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peuple en rendit des actions de grâces solennelles à Dieu et à saint Martial, leur apôtre et protecteur singulier (1). »

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S'il est vrai, comme le prétendent les Bollandistes, que le troisième livre des Miracles de saint Martial, publié dans les Acta sanctorum ait été écrit au commencement du xre siècle, cet évêque d'Agen serait probablement un Jean Gérald oublié dans le catalogue des évêques de cette église, lequel aurait été guéri subitement d'une fièvre opiniâtre après avoir fait un vœu à l'apôtre de l'Aquitaine (2). On trouve à la vérité, au xıro siècle, un évêque d'Agen du nom de Gérald si c'est de lui qu'a voulu parler l'auteur du troisième livre des Miracles de saint Martial, il faudrait retarder d'un siècle la date de cet opuscule.

POÈME IV. Pierre le Scolastique rapporte que Gualon ou Gaulon gentilhomme distingué de la province de Bourges, pria saint Martial de guérir son fils, qui se mourait; que saint Martial, voulant } l'obliger davantage à la reconnaissance, le laissa mourir afin de le ressusciter. Le père s'endormit de tristesse, et, dans un songe, vit saint Martial qui semblait donner la communion à son fils. S'étant éveillé, et repassant dans son esprit ce qu'il avait vu, il conçut de bonnes espérances sur la résurrection de son fils. Il pria le saint de ressusciter celui qu'il n'avait pas voulu guérir lorsqu'il était malade.

Nec spes vana fuit : surrexit protinus ille,

Atque, cibum poscens. corpus puerile refecit.

Son espérance ne fut pas vaine : son fils ressuscita aussitôt, et demanda à manger pour fortifier son corps affaibli. Le père vint rendre ses hommages à saint Martial, lui fit ses présents, lui offrit ce fils qu'il lui avait rendu, et se montra toujours dévoué à son culte (3).

(1) BONAVENT., T. II,

p. 305. Cf. p. 623.

(2) Dominus etiam Johannes Geraldus, episcopus Agennensis, retulit: quod cum de febre quartana infirmaretur, et in plena hyeme multum affligeretur, et nullum posset cum mediis curationis remedium invenire, sancto Martiali promisit cum summa devotione quod si quartana eum dimitteret, quolibet anno, cum oblationibus, ejus ecclesiam visitaret. Quo voto emisso, finita febri quartana, continuo liberatus est, et ex tunc B. Martiali familiaris exstitit et devotus. (Acta SS., T. v, p. 560.)

(3) BONAVENT., T. II, p. 626.

POÈME V. Dans le poème suivant, Pierre le Scolastique décrit la résurrection d'un homme qu'on voulait ensevelir dans l'église de saint Martial, au-delà de Barcelone, sur le sommet du mont Signus « de sorte que, dit Bonaventure, celui que la mort avoit déjà dévoré fut revomi par elle par les mérites et l'intercession de l'apôtre saint Martial, lequel eut pitié du père désolé qui lui présentoit sa requête pour son enfant décédé (1) ». Voici les premiers vers de ce poème :

Ultra Barcinonam mons nomine Signus habetur,
Vertice qui proprio fert ecclesiam patris almi:

Hic etiam quemdam vivum de morte levavit,

Impositum feretro, quem jam sepelire parabant (2).

Ces deux résurrections furent opérées du vivant de Pierre le Scolastique, comme le montrent ces vers du livre quatrième que nous avons déjà cités :

Nostis exanimes quos ad vitam revocavit :
Temporibus vivunt duo, quorum Bituricensem

Alter habet patriam, colit alter Barcinonensen (3).

Dans le résumé qu'il a donné de ce livre, Nadaud après avoir dit ces paroles : « Au-delà de Barcelone, il y a une église dédiée à saint Martial », ajoute les mots suivants : « Les troubles de la patrie l'obligent (Pierre le Scolastique) à voyager. Il ne parle point des miracles qu'il a vu opérer au saint il ne s'arrête qu'aux anciens (4) » : nous ne savons à quel poème du livre VIII il faut rapporter ces paroles.

POÈME VI. Saint Martial a instruit les Gaulois, les Belges, les Celtes, les Aquitains. Les Belges ont été édifiés par les brillants exemples du pieux Eloi, qui reconstruisit la vieille église de SaintMartial (5). La ville de Trèves voit son évêque Nicet éclairé par le flambeau de l'Aquitaine, et admire cet homme rempli d'une lumière

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(5) A Paris. C'est ce que rapporte saint Ouen dans la Vie de saint Eloi : « Aedificavit etiam imoque renovavit basilicam in honore sancti Martialis, etc. » (L. I, c. XVIII.)

divine. Vous trouverez d'autres saints originaires du Limousin devenus ailleurs les patrons des peuples que s'ils honorent comme leurs pères les enfants de saint Martial, qu'ils vénèrent en saint. Martial leur père commun :

Hic docuit Gallos, Belgas, Celtas, Aquitanos :
Ergo decet Celtas, decet, inquam, nosse patronum:
Frater, ab hoc actu noli sejungere Belgas,

Quos pius Eligius, renovans templum vetus ejus,
Exemplis vitæ lucentibus ædificavit.

Nicetium (1) Trevir nostra videt'ire lucerna
Miraturque virum divino lumine plenum.
Quod si quæsieris, plures poteris invenire
Hinc ortos, aliis populis extare patronos.
Quod si rite colunt Marciæ semine natos

Et perhibent patres, patrem patrum venerentur. (2).

POÈME VIII. Pierre le Scolastique parlait, dans ce poème, du miracle des Ardents, dont il se dit témoin oculaire. Nous regrettons que ni Bonaventure ni Nadaud ne nous aient transcrit ce passage, qui est si important pour déterminer l'époque où vivait le poète. Citons d'abord Bonaventure : « Petrus Scolasticus, selon ce qu'il allègue au livre VIII, chapitre VIII, se déclare avoir vêcu vers le temps de la guérison des Ardents et de l'assemblée générale d'Aquitaine, qui se fit à Limoges l'an 994 (3) ». Voici maintenant le résumé de Nadaud : « Il se fit une assemblée du peuple à Limoges : les habitants s'y rendirent pour tenir un concile, où l'on demanda de porter le corps de saint Martial. Lorsque les moines voulurent l› lever la nuit, il parut dans tout le pays une lumière brillante (4). Ce miracle n'avoit point été écrit. [Saint Martial] guérit plusieurs malades dévorés d'un feu [secret: ce] ne peut être que le miracle des Ardents, arrivé en 994 (5). »

(1) Il y a Nicetio dans Bonaventure.

(2) BONAVENT., T. II, p. 321, T. I, p. 86.

(3) Id., T. I, p. 207.

(4) Adémar, dans un sermon sur la translation des reliques de saint Martial à l'époque du miracle des Ardents, rapporte ce fait : « Qu'une lumière céleste brillant la nuit sur le tombeau de saint Martial, éclaira toute la ville pendant une heure, comme le soleil en plein midi » Tunc ecce ipsa media nocte apparuit signum super basilicam sancti Petri, in qua beati Martialis sepulcrum esse videtur. Nam cernentibus innumeris sed divo jacentibus in excubiis lumen de cælo coruscans super locum sepulcri descendit, in suo jubare totam civitatem quasi lux diei meridiana per unam fere horam illuminavit. (Patrolog., T. CXLI, col. 116 et 147). (5) NADAUD, Mém. mss, T. IV.

Dans ce même poème VIII, Pierre le Scolastique raconte qu'un soldat, né à Périgueux, ayant recouvré la yie, racontait les visions qu'il avait eues, et les révélations qu'il avait recueillies de la bouche d'un ange. Il attestait que saint Martial était un saint vénérable entre les autres saints; que le Christ l'avait enseigné comme un de ses disciples, et que saint Pierre, se l'étant associé pour compagnon, était arrivé avec lui à Rome, et l'avait envoyé convertir la nation des Gaulois :

Mortuus est miles quidam, petragoricensis
Qui patriæ fuerat civis : vitamque recepit,
Vivus ut ad tempus visorum nuntius esset,
Angelica testans se condere verba loquela.
Tecta revelabat; quos numquam viderat ante
Noscebat penitus, castigabatque nocentes.
Hic inter reliquos Marciam nomine sanctos
Attestabatur venerandum, quem docuisset
Discipulum Christus, Petrusque sibi sociasset;
Cum quo Romanam socius devenit in urbem,
Et missus Gallis meruit convertere gentem.
Talibus arguitur qui spernit credere nobis (1).

Le résumé de Nadaud (vIIIe livre) nous fournit en outre les pensées suivantes : << Saint Martial alla instruire les Cappadociens après saint Paul »>.

[Dans son enthousiasme religieux et poétique, Pierre l'Ecolâtre ] « parle de saint Martial d'une manière » [ que l'exacte théologie pourrait condamner ]. Saint Martial est devenu Dieu par la faveur divine :

:

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Vana salus hominis sed Marcias Deus extat.
Nostra fert numen quod ei natura negavit.
Quem Deus assumpsit, sic atria possidet ejus :
Res nostras sub eo dispensans ordine justo............
Marcias igitur potis est salvare fideles,

Munere divino cum factus sit Deus ipse.

[Pierre le Scolastique] « finit le vIIIe livre en versifiant les miracles rapportés par l'écrivain anonyme » [ de la Vie de saint Martial] (2).

(1) BONAVENT., T. II, p. 132, 627.

(2) NADAUD, Mém. mss, T. IV.

12

LIVRE NEUVIÈME.

Le livre neuvième ne renferme que cent soixante dix-neuf vers. Pierre le Scolastique s'arrête après avoir commencé à dire quelques mots d'Ebroin, maire du palais ce qui montre que ce livre n'est pas complet (1).

Nous n'avons trouvé qu'un court fragment du Ixe livre c'est le récit du miracle qui fut opéré, vers l'an 632, à Paris, lorsque saint Eloi, ayant reconstruit l'église de saint Martial, y transporta avec une pompe solennelle des reliques du saint évêque. Saint Eloi fit passer la procession auprès d'une prison, et pria saint Martial de délivrer les captifs :

<< Saint Martial prête une oreille favorable à ses vœux : il descend du ciel, et, à son arrivée, ceux qui étaient enchaînés dans les noirs cachots entendent un bruit semblable à celui du tonnerre. Tout-àcoup ils voient apparaître un personnage éclatant de splendeur: devant lui, la prison est ébranlée, les fers se brisent, les portes s'ouvrent, et les captifs s'en vont en liberté : »

Vota precesque pia Marcias percipit aure,
Cœlitus adveniens: adventu moxque sub ipso
Auditur tonitru positis in carcere tetro.
Protinus apparens intus vir splendidus ore.

Carcere concusso disrumpit vincula cuncta.

Effringensque seras, vinctos dat abire solutos (2).

Nous pensons que ce dernier livre du poème de Pierre le Scolastique était la traduction en vers du second livre des Miracles de saint Martial, composé au Ixe siècle, et publié par les Bollandistes au 30 juin le récit où il est question d'Ebroin est l'histoire de la punition de Loup ou Lopès, duc des Gascons, qui fut frappé mortellement dans l'église de saint Martial lorsqu'il venait de ravir une ceinture d'or qui était appendue au saint tombeau (3).

Voilà tous les fragments que nous avons pu recueillir du poème de

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