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« Attendu que de ces décisions de l'autorité administrative, seule compétente pour apprécier et statuer sur les prétendus actes de malversation et d'abus d'autorité imputés au bourgmestre Couty, ainsi que des documents produits au procès, il résulte que la conduite dudit sieur Couty a été celle d'un homme probe, d'un magistrat intègre, consciencieux et pénétré de l'amour de ses devoirs ;

<< Attendu qu'il est établi que la dénonciation du 16 sept. 1845 a été faite spontanément par le prévenu, et que c'est malicieusement et artificieusement que ce dernier, en tête de sa dénonciation, se prévaut d'une prétendue demande du commissaire de l'arrondissement de Namur de lui dénoncer les faits incriminés ;

< Attendu que si les faits articulés dans ladite dénonciation à charge du sieur Couty avaient existé, ils l'auraient exposé, nonseulement au mépris ou à la haine des citoyens, mais aussi à une répression administrative;

«Attendu que, par tous les actes et faits du procès, il est établi que le prévenu Nicolas Delaire n'a été guidé dans sa conduite envers ledit sieur Couty que par un esprit malveillant, et que les faits qu'il a précisés dans sa dénonciation, il les a dénoncés méchamment et à dessein de nuire audit Couty qui, à cette époque, était bourgmestre de Ham-sur-Sambre; d'où il suit que la dénonciation par écrit que Nicolas Delaire a adressée, sous la date du 16 sept. 1845, au commissaire de l'arrondissement de Namur contre le sieur Charles Couty est calomnieuse ;

Attendu que cette dénonciation ayant été faite à un officier de police administrative, il en résulte que le prévenu a commis le délit prévu par l'art. 373 du C. pén.;

«Attendu que le premier degré de juridiction a été épuisé par le jugement dont est appel, et que l'action, tant du ministère public que de la partie civile, a été intentée avant qu'elle ait été éteinte par la prescription établie par l'art. 638 du C. d'inst. crim.; « Attendu que la peine infligée par le premier juge n'est pas proportionnée au délit ; < Attendu que la somme de 400 fr. allouée pour dommages-intérêts par le jugement dont est appel n'est pas en rapport avec le préjudice souffert par la partie civile; qu'il y a lieu de la majorer et de la fixer à 3,000 fr.; Par ces motifs, la Cour, sans s'arrêter aux moyens et exceptions proposés par le prévenu, et dont il est débouté, met l'appel

de Nicolas Delaire au néant; statuant sur l'appel du ministère public et de la partie civile, met le jugement dont est appel au néant, en tant qu'il n'a condamné le prévenu qu'à deux mois d'emprisonnement, à 200 fr. d'amende, à 400 fr. de dommages-intérêts envers la partie civile, et à l'affixion du jugement au nombre de 100 exemplaires; émendant,quant à ce, et vu les art. 373, 374, 52 du C. pén. et 164 du C. d'inst. crim., condamne Nicolas Delaire à quatre mois d'emprisonnement, à 1,000 fr. d'amende; déclare qu'à l'expiration de sa peine il sera interdit pendant cinq ans des droits mentionnés à l'art. 42 du C. pén.; condamne par corps le prénommé Delaire à payer à la partie civile la somme de 3,000 fr. pour dommages-intérêts qu'elle a éprouvés; autorise celle-ci à faire afficher le présent arrêt au nombre de 200 exemplaires, et ce aux frais de Nicolas Delaire; condamne ledit Delaire aux dépens. ›

Delaire a déféré cette décision à la Cour de cassation, et s'est en même temps pourvu de nouveau contre l'arrêt préparatoire du 6 déc. 1849. Il fondait son recours sur six moyens qui, tous combattus par le ministère public, ont été successivement écartés, et que l'arrêt que nous recueillons fait suffisamment connaître.

ARRÊT.

LA COUR;-Sur la 1 partie du 1o moyen tiré de la fausse application et de la violation de l'art. 575 du C. pén., en ce que la Cour d'appel, au lieu de prononcer, comme elle l'a fait par son arrêt du 6 déc. 1849, un sursis à statuer jusqu'après décision de l'autorité compétente sur la vérité ou la fausseté des faits dénoncés le 16 sept. 1845, et au lieu de statuer ensuite au fond par son arrêt du 2 août 1850, aurait dû simplement déclarer l'action du ministère public et celle de la partie civile prématurées et non recevables :

Attendu que, suivant l'art. 1o du C. d'inst. crim., tout délit donne naissance à une action publique et peut donner lieu à une action civile ;

Attendu que l'exercice de ces actions ne peut être arrêté ou suspendu que dans les cas formellement établis par la loi; que, dans aucun cas, la faculté d'intenter ces actions n'est subordonnée à l'existence préalable de la preuve d'un ou de tous les éléments constitutifs d'un délit;

Attendu que le délit de dénonciation calomnieuse existe à l'instant même où une dénonciation faite par écrit a été spontané

ment adressée à un des officiers mentionnés dans l'article 375 du C. pén., si les faits que cette dénonciation renferme sont susceptibles d'une répression, sont faux et ont été dénoncés de mauvaise foi ou dans l'intention de nuire au dénoncé ;

Attendu qu'il n'est pas exact de soutenir, comme le fait le demandeur, que l'élément du délit de dénonciation calomnieuse, consistant dans la fausseté des faits dénoncés, et le délit lui-même ne prennent naissance qu'à l'instant où cette fausseté a été constatée par une décision de l'autorité compétente, puisque cet élément subsiste antérieurement à cette décision, qui ne fait qu'en reconnaître et déclarer l'existence; qu'il suit de ce qui précède que la Cour d'appel, en ne déclarant point l'action non recevable, ni par son arrêt du 6 déc. 1849, qui a prononcé le sursis à l'action jusqu'après la décision de l'autorité compétente sur la vérité ou la fausseté des faits dénoncés, ni par son arrêt du 2 août 1850, qui a statué sur le foud, n'a point de ce chef contrevenu à l'art.373 du C. pén., ni à aucun autre texte de loi.

Sur la 2° partie du 1er moyen, consistant dans la violation de l'art. 638 du C. d'inst.cr., en ce que la Cour, en ordonnant le sursis, et en statuant ensuite au fond par les deux arrêts prérappelés, a méconnu qu'il y avait prescription sur le fait de dénonciation calomnieuse dont l'existence remontait à plus de trois ans :

Attendu que le demandeur ne méconnaît pas et ne pouvait méconnaître que l'action née à l'occasion de la dénonciation calomnieuse formée le 16 sept. 1845 a été intentée le 7 juillet 1847, et que depuis lors, et jusqu'à l'arrêt définitif du 2 août 1850, il a été posé une foule d'actes d'instruction et de poursuites, et qu'il est intervenu un jugement et cinq arrêts interruptifs de la prescription, mais il prétend que l'élément du délit, consistant dans la fausseté des faits dénoncés, n'existait pas au moment de l'intentement de l'action; qu'il ne pouvait exister que par la décision de l'autorité compétente sur la fausseté des faits dénoncés; qu'ainsi il n'avait pu prendre naissance que plus de trois ans après la dénonciation; qu'il n'y avait donc lieu de la part de la Cour d'appel d'ordonner un sursis par son arrêt du 6 déc. 1849, parce que l'action intentée ne pouvait devenir utile qu'en la considérant comme une action intentée de nouveau au 6 déc. 1849, et qu'une action intentée à cette époque se serait trouvée atteinte par la prescription;

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Attendu que la prétention du demandeur repose uniquement sur une erreur démontrée dans les motifs relatifs à la 1r partie du 1 moyen; que cette erreur git dans le soutènement que le délit de dénonciation calomnieuse, et l'action qui en découle, n'ont pu naître qu'avec la décision de l'autorité compétente sur la fausseté des faits dénoncés; que ce système, s'il pouvait être accueilli, offrirait la bizarrerie de faire admettre la prescription d'un délit et d'une action qui ne seraient pas encore nés; qu'il suit de ce qui précède que la Cour d'appel, en repoussant le moyen de prescription, n'a pas contrevenu à l'art. 658 du C. d'inst. crim.

Sur la 3e partie du 1o moyen, tirée de ce que les deux arrêts attaqués auraient violé la règle des deux degrés de juridiction, et les art. 179 et 199 du C. d'inst. crim.:

Attendu que le tribunal correctionnel de Namur avait, par son jugement du 8 juillet 1848, épuisé sa juridiction; que si ce tribunal n'a point sursis à prononcer jusqu'après la décision de l'autorité administrative sur la fausseté des faits dénoncés, la Cour d'appel, faisant ce que le 1er juge aurait dû faire, a prononcé ce sursis par son arrêt du 6 déc. 1849, et n'a statué sur le fond qu'après la décision rendue par l'autorité administrative;

Attendu que la Cour d'appel n'aurait pu renvoyer la cause devant un premier juge, soit avant, soit après la prononciation du sursis, sans lui faire subir l'épreuve d'un 3o degré de juridiction, et sans contrevenir à la règle que le demandeur invoque; d'où il suit que la Cour d'appel, en procédant comme elle l'a fait, n'a pu contrevenir à cette règle ni aux articles invoqués à l'appui de la 3m partie du 1er moyen.

Sur la 1 partie du 2 moyen, puisée dans la violation des art. 7 de la loi du 20 avril 1810 et 97 de la Constitution, en ce que l'arrêt du 2 août 1850 ne contient aucun motif relatif au rejet d'une fin de non-recevoir que le demandeur aurait proposée du chef qu'il n'existait pas de décision sur la fausseté des faits dénoncés lorsque l'action a été intentée :

Attendu que le juge n'est pas tenu de donner des motifs particuliers pour justifier le rejet d'une fin de non-recevoir, lorsque les motifs qu'il a donnés pour rejetter une autre exception s'appliquent également à la fin de non-recevoir;

Attendu qu'il résulte des motifs énoncés pour écarter le moyen de prescription que la Cour d'appel a virtuellement reconnu que le

délit de dénonciation calomnieuse et l'action qui en dérivait existaient avant toute décision sur la fausseté des faits dénoncés ; d'où il suit que les motifs sur lesquels la Cour d'appel a basé le rejet du moyen de prescription justifient en même temps le rejet de la fin de non-recevoir proposée par le demandeur, et que la Cour d'appel n'a pas contrevenu aux articles invoqués à l'appui de la 1TM partie du 2o moyen.

Sur la 2 partie du 2me moyen prise de la violation de l'art. 193 du C. d'inst. cr., en ce que l'arrêt du 2 août 1850 ne contient pas l'énonciation des faits dont le demandeur a été déclaré coupable:

Attendu que l'arrêt du 2 août 1850 porte, non-seulement que la dénonciation que Nicolas Delaire a adressée, sous la date du 16 sept. 1845, au commissaire de l'arrondissement de Namur, contre le sieur Couty, est calomnieuse, mais qu'il se réfère encore, en le visant, à l'arrêt du 6 déc. 1849, qui renferme l'indication détaillée des faits articulés dans la dénonciation; que de plus l'arrêt du 2 août 1850 confirme le jugement du tribunal en tout ce qui ne concerne pas le quantum des peines, dommages-intérêts et le nombre d'af fiches, et que ce jugement contient également tous les faits détaillés dans la dénonciation; qu'il suit de là que l'arrêt attaqué a suffisamment satisfait au prescrit de l'art. 195 du C. d'inst. crim.

Sur le 3m moyen, tiré de la violation des art. 179 du C. d'inst. cr. et 73 du C. pén., en ce que l'arrêt du 2 août 1850 a confirmé pour partie le jugement du tribunal correctionnel de Namur, tandis qu'il aurait dû l'infirmer pour le tout :

Attendu que ce moyen repose encore sur le fondement erroné que, lorsque le tribunal correctionnel a rendu son jugement, il n'existait pas de délit de dénonciation calomnieuse à défaut de décision de l'autorité compétente sur la fausseté des faits dénoncés; que, par suite, le tribunal correctionnel était incompétent ratione materiæ, et, par une conséquence ultérieure, que ce jugement aurait dû être infirmé pour le tout comme contraire à des lois d'ordre public;

Attendu que l'inexactitude et le non-fondement de ce moyen a déjà été suffisamment établi dans les motifs précédents, et qu'ainsi l'arrêt attaqué, en confirmant pour partie le jugement dont il avait été appelé, n'a commis ni l'excès de pouvoir qui lui est reproché, ni violé les deux articles invoqués.

Sur le 4 moyen de cassation, consistant

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dans la fausse application et la violation de l'art. 375 du C. pén., en ce que la Cour d'appel aurait mal à propos déclaré que la dénonciation du 16 sept. 1845 a été faite spontanément :

Attendu que l'appréciation des circonstances, d'où la Cour d'appel a déduit le caractère de spontanéïté dans la dénonciation adressée par le demandeur le 16 sept. 1845 au commissaire de l'arrondissement de Namur, rentrait entièrement dans le domaine de la Cour d'appel comme juge du fond; qu'une pareille décision, gissant en fait, est souveraine toutes les fois que, comme dans l'espèce, elle n'est pas démentie par un acte authentique; qu'il suit de là que, dans la supposition toute gratuite que l'arrêt du 2 août 1850 eût fait une appréciation erronée de ces circonstances, cette appréciation, toute de fait, ne peut donner ouverture à cassation.

Sur le 5° moyen, déduit de la fausse appliIcation et de la violation du même art. 573 du C. pén., en ce qu'il n'existe pas de véritable décision administrative établissant la fausseté des faits dénoncés, et que dès lors le demandeur ne pouvait être condamné par application de l'article précité :

Attendu qu'aucune disposition légale n'ayant prescrit ni la formule ni les formalités suivant lesquelles la décision de l'autorité administrative sur la vérité ou la fausseté des faits doit être rendue, la Cour d'appel a pu, sans contrevenir à aucune loi, trouver cette décision dans les pièces mentionnées dans son arrêt, et notamment dans la dépêche du ministre de l'intérieur en date du 15 juin 1850.

Sur le 6 et dernier moyen de cassation, tiré de la violation de l'art. 373 du C. pén., des art. 29, 45, 127, 128, 129, 179 du Code d'inst. crim., en ce qu'en supposant gratuitement l'existence d'une décision administrative, sur la fausseté des faits dénoncés, les 2o, 3o, 6o et 7° faits rentraient dans les attributions du pouvoir judiciaire comme constituant des délits, et que dès lors la vérité ou la fausseté de ces faits ne pouvait être reconnue et constatée que par l'autorité judiciaire compétente :

Attendu que les 2o, 3o, 6o et 7° faits dénoncés le 16 sept. 1845 par le demandeur, à charge du sieur Couty, faits qui pouvaient constituer des délits, ont fait l'objet de poursuites judiciaires dirigées contre ledit Couty; que ces poursuites ont été mises à fin par deux ordonnances de la chambre du conseil du tribunal de Namur, sous les dates des 29

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oct. 1845 et 5 juin 1847, qui ont déclaré n'y avoir lieu à suivre ;

Attendu que la Cour d'appel a reconnu la fausseté de tous les faits dénoncés le 16 sept. 1845 par le demandeur; que cette fausseté résultait des deux ordonnances prérappelées, en ce qui concernait les 2o, 3o, 6o et 7° faits, ainsi que l'avait reconnu également le tribunal de Namur;

Attendu que la première des ordonnances précitées, relative à l'imputation de coups et blessures, en admettant qu'elle ne porte que sur la dénonciation de Hubert, a force de chose jugée à l'égard de tous, aucune charge nouvelle n'ayant été produite ou alléguée contre Couty, et que la seconde de ces ordonnances a été rendue, comme il résulte de son contexte, sur toutes les dénonciations qui avaient été dirigées contre le défendeur, et nommément sur celles qui avaient été faites par Nicolas Hubert et Nicolas-Joseph Delaire ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi; condamne le demandeur en l'amende de 150 fr. et aux dépens de l'instance en cassation.

En ce qui concerne la 2me amende consignée par le demandeur :

Attendu que l'arrêt du 2 août 1850, n'étant que le complément de l'arrêt du 6 déc. 1849, et ces deux arrêts devant être considérés comme ne formant qu'un ensemble, une seule amende a suffi pour rendre recevable le pourvoi formé contre ces deux arrêts, par suite déclare qu'il y a lieu de restituer au demandeur la 2me amende consignée.

Du 7 oct. 1850. 2 Ch. Prés. M. le cons. Marcq, fais. fonct. de pr. Rapp. M. Peteau. Conclusions conformes M. Dewandre, 1er av. gén. - Pl. MM. De Behr, c. Bosquet.

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sion des travaux de construction du chemin de fer du haut et du bas Flénu, avec droit de percevoir les péages des transports à opérer par cette voie au taux fixé par un tarif.

Douze années s'étaient écoulées depuis cette concession sans que l'administration eût prétendu que cette société fût soumise au droit de patente: il en fut autrement en 1849. L'administration ayant su que la compagnie avait distribué à ses actionnaires la somme de 591,683 fr., elle lui demanda une déclaration de patente. La société s'y refusa, prétendant qu'elle n'y était pas soumise : cependant elle finit par en présenter une, mais comme contrainte, et sous réserve de tous ses droits. L'administration la taxa en conséquence pour les dividendes obtenus d'après le résultat de ses bilans à partir de 1845, à raison de 1 1/3 pour , ce qui porta le droit exigé à 8,678 fr. 65 c.

La société paya cette somme, et ensuite elle s'adressa au gouverneur de la province pour en obtenir la restitution. Elle fonda sa réclamation sur ce que la loi ne frappait pas du droit de patente toutes les sociétés anonymes en général, mais seulement celles qui se livrent aux spéculations énumérées au tableau no 9 annexé à cette loi, parmi lesquelles ne sont pas nominativement comprises les sociétés ayant pour objet l'entreprise des chemins de fer, sociétés qui n'existaient pas alors, et qui ne peuvent trouver d'assimilation avec aucune des industries imposées par le législateur, soit d'après les termes, soit d'après l'esprit de la loi.

Sur ce que si l'art. 5 de la loi veut que le droit de patente pour les professions, commerce, industrie ou métier, qui ne s'y trouvent pas expressément énoncés,soit réglé sur le pied de celui imposé aux professions qui y sont les plus analogues par leur nature et par les bénéfices qu'elles procurent, et si les n° 18 et 131 du tableau 14 soumettent au droit de patente les entrepreneurs de roulage, commissionnaires et facteurs, ces dispositions ne pouvaient être invoquées contre la société réclamante, puisqu'elle ne pouvait être assimilée à ceux qui exercent leur industrie en toute liberté, qui peuvent la cesser et la reprendre à volonté, et ne sont limités par aucun acte relativement à l'indemnité qui leur est due exclusivement pour le prix du transport, tandis que la société réclamante est obligée, en vertu de son contrat, de faire le service qui lui est imposé sur le chemin qu'elle a construit à ses frais, et qu'elle doit entretenir; elle doit se conformer au cahier des charges de sa concession et au règlement

de police, elle ne peut ni cesser, ni même suspendre le transport, elle ne peut ni demander ni recevoir autre chose que le péage qui lui a été concédé, péage qui lui est octroyé principalement pour l'amortissement du capital employé à la confection de la route et des intérêts du capital engagé, et pour le fait du transport sur le chemin concédé.

La plus forte partie de chaque répartition faite aux actionnaires, soit à titre d'intérêt, soit à titre de dividende, disait-elle, est un véritable remboursement du capital; la frapper d'un impôt de ce chefserait une véritable confiscation, ce serait faire peser un double impôt sur le sol du chemin de fer à raison duquel la société paie l'impôt foncier, ce serait priver la société de la jouissance entière du péage concédé contrairement à la convention qui interdit au gouvernement d'établir, pendant la durée de la concession, aucun nouveau péage au profit, soit du gouvernement, soit de la province, de la commune ou des particuliers.

Quand une concession est accordée pour l'exécution d'un travail réclamé par l'intérêt général, le concessionnaire qui exproprie exerce le droit de l'État, et quand l'État exploite lui-même un chemin de fer il n'exerce ni commerce ni industrie, comme l'ont jugé différentes fois les tribunaux; que le même fait posé en son nom, et sous son autorité, par un tiers, ne saurait revêtir un autre caractère.

Ensuite l'art. 9 de la loi du 6 avril 1823 n'a pas dérogé à la loi de 1819, quant à la question de patentabilité des sociétés anonymes; elle n'a fait autre chose que de réduire le taux du droit, lorsque celui-ci était dû d'après la loi antérieure. Si cet article porte qu'on doit considérer comme dividendes les remboursements et accroissements de capitaux, il a soin d'ajouter que quand les sociétés feront conster de la première mise de fonds et des remboursements qui ont eu lieu depuis, de manière à ce que les remboursements du capital placé ou fourni peuvent être suffisamment distingués des dividendes, le droit ne sera pas perçu sur les sommes remboursées. »

Or le capital primitif de la société, d'après ses statuts, a été de 3,500,000 fr., les dépenses faites par elle jusqu'à la fin de 1848, en dehors du cahier des charges, et qui sont un véritable accroissement du capital s'élevant à 1,754,216 fr. 55 c., total 5,254,216 fr. 55 c., donc jusqu'à ce que cette somme soit remboursée, il n'y aura pas de dividende

proprement dit pouvant donner lieu au droit de patente, ce qui est d'autant plus vrai que le capital social s'amoindrit tous les jours par le laps de temps de la concession à l'expiration de laquelle il n'y aura plus rien.

Enfin la société argumentait de ce que, pendant douze années, son système avait été suivi par le gouvernement, qui n'avait rien exigé à sa charge.

Cette réclamation fut successivement soumise à l'avis des répartiteurs, du contrôleur et du directeur des contributions.

Les premiers répondirent qu'ils n'étaient pas à même de résoudre la question de droit qu'on leur soumettait, le second et le troisième estimèrent que l'exploitation d'un chemin de fer constituait une branche de commerce ou d'industrie qui devait être soumise au droit de patente d'après l'esprit de la loi; ils invoquèrent une circulaire de l'administration du 6 novembre 1845 à l'appui de leur opinion.

Sur ce, intervint la décision attaquée qui adopta le système de la défenderesse en cassation dans les termes suivants :

La députation permanente du conseil provincial du Hainaut;

Vu la réclamation présentée par la société anonyme du chemin de fer du haut et du bas Flénu, dont le siége est à Jemmapes, tendante à obtenir le remboursement de la somme de 8,678 fr. 2 c. qu'elle a payée pour droit de patente du chef de l'exploitation desdits chemins de fers pour l'exercice 1848;

Vu, sur le mérite de cette réclamation, les avis des répartiteurs, du contrôleur et du directeur des contributions;

< Vu les lois du 21 mai 1819 et du 6 avril 1823:

«Attendu que le tableau n° 9, annexé à la loi du 21 mai 1819, ne soumet à la patente que les sociétés anonymes qui se livrent à des spéculations ayant pour objet la navigation, le commerce, l'entreprise de fabriques ou manufactures, l'entreprise ou l'exploitation d'usines ou moulins, les assurances, les armements et équipements de vaisseaux, la pêche ou telles autres branches de commerce ou d'industrie qui, par leur nature, sont, aux termes ou dans l'esprit de la loi, assujéties au droit de patente;

« Attendu que les sociétés pour l'exploitation d'un chemin de fer par concession de péages ne sont pas nominativement désignées dans la nomenclature des sociétés anonymes patentables reprises audit tableau;

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