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nomènes qui n'ont pas encore été bien expliqués jufqu'à préfent, & qui' au moyen des notions que nous avons acquifes du feu fixe, de la chaleur latente, & du feu développé, deviennent très-intelligibles.

L'eau devenue folide, c'est-à-dire, convertie en glace, peut redevenir fluide, non feulement par la chaleur qu'on lui communiquera, mais encore par le moyen de toutes fortes de liqueurs, qui, étant répandues deffus, en facilitent & en procurent la fufion.

Les Académiciens del Cimento, au paragraphe qui a pour titre, des progrès des congélations artificielles, ont été les premiers à obferver qu'en verfant de l'efprit de vin fur la glace, elle fe fond, & qu'en fe fondant elle engendre du froid.

Boyle, en fon Traité du froid & du chaud, a rapporté quelques expériences qui font voir que, non feulement l'efprit de vin fond la glace, mais qu'on obtient cet effet avec des fels neutres, des alkalis, &c. ; & il a remarqué que cette fufion de la glace étoit toujours accompagnée d'un notable degré de froid.

Farenheit tenta de femblables expériences avec les acides, & il reconnut que l'acide nitreux verfé fur la glace, la fondoit & engendroit en même temps un notable degré de froid.

M. de Mairan pouffa plus loin ces expériences, en remarquant que les fels qui facilitent le plus la fufion de la glace, font ceux qui produifent le plus de froid dans cette opération, & que pour cela le fel marin refroidit plus la glace que le fel ammoniac, & celui-ci plus que le fel de nitre, parce que le fel marin fond un morceau de glace en moins de 66 minutes, le fel ammoniac en 61, & le fel de nitre en 126.

On trouve dans la Chimie expérimentale de M. Baumé les résultats de différentes expériences qu'il a faites pour déterminer l'action de la glace fur diverfes fubftances, & la quantité de froid qui en eft le produit; & dans les Mémoires de l'Académie des Sciences (1) de Paris, on en trouve une de M. de Réaumur fur le même fujet, d'où l'on tire la table fuivante.

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(1) Mém. de 1734 fur les congél. artific.

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On peut étendre cette table à la combinaifon d'autres fels, d'autres acides, d'autres alkalis, ayant l'attention de mettre ensemble deux parties de glace pilée, & deux parties de fel, parce que ce font les dofes qu'a employées M. de Réaumur, qui a cru que cette proportion étoit la plus convenable pour obtenir le maximum du refroidiffement.

Maintenant, fi l'on veut répéter ces expériences, on obfervera que les fubftances qui fondent la glace le plus promptement, font celles qui engendrent auffi le plus de froid; & au contraire, que celles qui n'opèrent aucune fufion de la glace n'excitent aucun froid.

dans cet

Cela pofé, il n'est pas difficile de rendre raifon de la production du froid. En effet, toutes les obfervations que nous venons de rapporter écrit fe réuniffent pour prouver que toutes les fois qu'un corps folide devient fluide, il abforbe une partie de la chaleur des corps environnans & que cette chaleur s'y fixe & s'y combine de manière qu'elle ne donne plus de fignes de fa préfence. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner que la même chofe arrive dans la fufion de la glace, de quelque manière qu'on Popère.

Mais la quantité du froid qui s'engendre, doit être plus grande dans le cas d'une plus rapide fufion de la glace, comme fi l'on verfe deffus de l'efprit de fel fumant, ou de l'efprit de nitre concentré, parce que la glace devenant fluide en peu de momens, elle dérobe à l'acide nitreux ou muriatique cette dose de chaleur qui leur eft néceffaire pour maintenir leur fluidité, avant que ni l'un ni l'autre aient pu reprendre de l'air des corps environnans.

Pour preuve de cela, il convient de remarquer que non feulement ces fels qui fondent plus promptement la glace, mais auffi toutes les fubftances acides ou alkalines, qui, mifes en contact avec la glace, la liquéfient; plus elles procurent cet effet promptement, plus eft grand le froid qui en réfulte; & il n'y a pas d'autres raifons pourquoi quantité de fels, en fe diffolvant dans l'eau, engendrent du froid, finon parce que de folides ils deviennent fluides; & abforbent de la chaleur en acquérant la fluidité,

C'est en effet de cette manière qu'un métal qui fe diffout à froid dans le mercure, doit abforber & fixer de la chaleur, engendrer du froid & non du chaud, comme quelqu'un l'a écrit, parce que, dans ce cas-là, c'est toujours un folide qui devient fluide. Mais pour en faire l'expérience d'une manière convaincante, il faut prendre un thermomètre à mercure, en couvrir la boule d'une lame épaiffe d'alliage de M. Darcet, laiffer enfuite refroidir le thermomètre jufqu'à la température de l'air. On prendra d'autre part un petit vafe de bois de fapin; on y mettra un peu de mercure, auquel on laiffera prendre auffi la température de l'air ambiant ; & dans ce mercure on plongera la boule du thermomètre, en l'agitant un peu faciliter la diffolution du métal: alors on verra le mercure s'abaiffer fenfiblement, à mesure que le métal fe fondra & deviendra fluide.

pour

Pour faire cette expérience & avoir des résultats fenfibles, il ne faut employer qu'une petite quantité de mercure, & un petit vase de bois, qui foit un conducteur imparfait de la chaleur, parce que de cette manière le mercure, en se refroidisfant par la chaleur qu'il communique au métal qui fe diffout, ne peut pas abforber auffi aifément des corps voisins la chaleur qui lui eft enlevée, & fe conferve ainfi plus froid pendant long

temps.

On doit rapporter à ces principes les effets connus des acides, qui, étant verfés fur des fels alkalis volatils, ou fur du fel ammoniac, excitent toujours un degré fenfible de froid (1); ceux de certaines fubftances, comme le camphre, qui, en fe diffolvant dans l'acide nitreux ou l'esprit de vin, abforbe de la chaleur, & refroidit ces diffolvans, parce que, dans tous ces cas, c'eft un folide qui acquiert la fluidité.

Cette abforption, cette fixation de la chaleur n'eft pas feulement particulière aux corps folides qui deviennent fluides, mais aux fluides mêmes, quand ils paffent d'une fluidité médiocre à une plus grande, & qu'ils deviennent moins denfes, &, pour ainfi dire, plus fluides. L'eau, par exemple, en état de vapeurs, eft plus fluide qu'en état de liqueur; l'éther, l'efprit de vin, & toutes les liqueurs volatiles & vaporifables, quoique de leur nature très-rares & extrêmement fluides; cependant, lorsqu'elles font en vapeurs, elles font encore plus atténuées, plus fluides qu'en état de liqueurs.

M. Black, dont la fagacité eft fi connue, n'a pas manqué de nous avertir de ce phénomène, & il en a conclu que les vapeurs de l'eau bouillante doivent contenir une plus grande quantité de feu fixe & de chaleur latente que l'eau bouillante elle-même, parce que l'eau, en fe raréfiant encore & fe volatilifant, ce qui lui arrive lorfqu'elle devient vapeur, a dû abforber & fixer une dofe norable de chaleur, & de même que les corps Auides

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1) Voy. Boyle, Work, Geoffroy, Mém. de l'Acad. Roy. des Scienc.,

en devenant folides, mettent en liberté le feu fixe ou la chaleur latente qu'ils contenoient, & qui produifoit leur fluidité actuelle; de même les vapeurs, en ceffant d'être vapeurs, doivent développer & dépofer la chaleur latente qui les rendoit tels, & la communiquer aux corps voilins. Effectivement quelqu'un a fait l'épreuve qu'une livre d'eau réduite en vapeurs, paffant fous le réfrigérant de l'alambic, échauffe plus l'eau qui y eft contenue, qu'une livre d'eau bouillante, parce que l'eau bouillante ne communique à celle du réfrigérant que cette chaleur libre & développée qu'elle a acquife; au lieu que la vapeur, outre cette chaleur libre, y porte encore la chaleur latente qui fe détache d'elle-même, au moment qu'elle ceffe d'être vapeur.

Partant de ces principes, le célebre Magellan prétend que la chaleur accablante qui furvient à l'air, lorfque les vapeurs qui y font répandues viennent à defcendre, vient du feu fixe qu'elles contenoient, & qu'elles dépofent lorfqu'elles fe réfolvent en gouttes, & je fuis porté à croire que cette chaleur latente entre pour beaucoup dans d'autres phénomènes de l'atmosphère,

Le phénomène le plus fingulier, & dont l'explication toutefois dérive de ces principes, eft celui du refroidiffement qu'excite les liqueurs vaporifables dans leur évaporation.

Strabon dit, dans fa Géographie, que certains Peuples de l'Afie & de l'Afrique avoient coutume de rafraîchir les liqueurs, en humectant extérieurement les vafes qui les contenoient. Le P. Kircher rapporte une femblable pratique, qu'il dit être en usage chez les payfans de Rome, qui, , pour boire frais dans leurs voyages, ne manquent pas d'attacher fous leurs chariots des flacons pleins de vin, & enveloppés de chiffons qu'ils ont l'attention de tenir toujours mouillés.

De Mairan, Muffchenbroek, Richmann, ont été les premiers qui aient fait des expériences à ce fujet; car ayant humecté la boule d'un thermomètre, ils obfervèrent qu'il fe refroidiffoit à mesure que l'eau s'évaporoit; & M. Cullen, ce fameux Chimifte & Philofophe Ecoffois, a grandement perfectionné cette pratique, & y a répandu le plus grand jour, en démontrant que toutes les liqueurs vaporifables engendroient du froid dans l'évaporation, & que la quantité de froid étoit proportionnelle à la volatilité & à la rapidité de l'évaporation même. Ceux qui feront curieux de connoître fes belles expériences, pourront lire la Differtation de M. Roux, intitulée, Recherches hiftoriques & critiques fur les différens moyens de refroidir les liqueurs, & confulter le beau & favant Mémoire de l'illuftre Docteur Cigna de frigore ex evaporatione producto, inférée dans le Recueil de l'Académie de Turin; & enfin un dernier Mémoire de M. Achard de Berlin,

Or, la chaleur eft auffi abforbée & fixée par la liqueur dans la dernière expérience du thermomètre humecté, elle eft fixée, dis-je, par la

liqueur qui s'évapore, & qui produit le refroidiffement, puifque la liqueur vaporifable, pour parvenir à l'état de vapeur & de volatilité actuelle a befoin d'absorber & de fixer une certaine quantité de chaleur qui lui donne une plus grande fluidité. C'est ce qui fait qu'elle foutire cette chaleur des corps voifins, qui en étant par-là dépouillés, font fenfiblement refroidis.

Quand l'évaporation s'accélère, le refroidiffement augmente, parce qu'à mesure qu'il fe forme une plus grande quantité de vapeurs, le corps d'où part l'évaporation, perd une plus grande quantité de fa chaleur. Le contraire arrive quand l'évaporation fe fait lentement & infenfiblement, parce qu'à mefure que le corps d'où part l'évaporation perd de fa chaleur, que les vapeurs lui enlèvent, les corps ambians lui en rendent une certaine portion; ce qui fait que fon refroidiffement est alors peu fen

fible.

OBSERVATIONS

SUR LE

COCCUS-CHARACIA S.

PARMI les infectes, il n'en eft guère qui préfentent des faits auffi furprenans que le coccus-characias, dont M. d'Antic a déjà donné une defcription dans le Journal de Phyfique (1), & qu'il a bien voulu appeler de mon nom. N'ayant point apperçu d'ailes à cet infecte, après deux ans d'observation, il paroiffoit naturel d'en faire un nouveau genre parmi les aptères. J'ai été plus heureux depuis, & j'ai vu que, tel que les coccus, il eft de forme bien différente dans les deux fexes.

1o. le mâle a la tête féparée du corcelet, deux yeux très-diftincts, les antennes cétacées plus longues que le corps, deux ailes demi-tranfparentes gris de plomb, qu'il tient couchées lorfqu'il eft en repos, & fouvent élevées lorsqu'il eft en mouvement: je ne l'ai jamais vu s'en fervir pour voler. L'abdomen eft garni au-deffus de la partie poftérieure d'une infinité de filets de foie blanche, formant une houpe plus longue que les ailes: il a fix pattes, dont quatre font attachées au corcelet, & les deux poftérieures à l'abdomen. On ne lui voit point de trompe comme chez la femelle ; il ne prend aucune nourriture dans cet état de perfection. La longueur de fon corps, bien petit, comparé à fes ailes, eft d'une ligne & demie.

(1) Février 1784. Description du dorthefia-characias.

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