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horreurs de la Saint-Laurent, n'ont pu s'empêcher de rendre un hommage public à la vérité des faits, dans un écrit qui circule en ce moment à Paris & par toute la France. Puiffe-t-il pénétrer au fein des montagnes helvétiques, plus ariftocratifées peut-être que Paris luimême la veille encore du 10 août !

à nos

Garder plus long-temps le filence, difent ces bons » patriotes fuiffes & allobroges réunis, feroit pour nous » un crime: nous devons à la nation française, » concitoyens, à l'Europe entière un éclairciffement ». Nous ne ferons qu'extraire les circonstances les moins connues qu'on trouve dans cette feuilie, intitulée: Les Crimes du 10 août dévoilés par les patriotes fuiffes, & les efforts qu'ils ont faits pour les prévenir, avec cette épigra phe heureuse:

Crimine ab uno

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Difce omnes!

VIRG

Ce qu'on pourroit traduire proverbialement ainsi :

Par cet échantillon, amis, jugez du refle.

Les patriotes Suiffes remontent d'abord jufqu'au 14 juillet 1789, & prouvent que le fyftême foutenu de la cour & des officiers fuiffes a été de mettre les foldats aux prifes avec le peuple.....

«Lacolombe, (difent-ils entre autres anecdotes) La» colombe, aide-de-camp de Lafayette, ne fut-il pas dans les cafernes des Suiffes, de la part de fon maître, » pour les menacer des forces de la capitale, s'ils n'o» béiffoient pas aveuglément à leurs chefs ».

C'étoit ici la place de rappeler les voyages incognito de Médicis-Antoinette à Courbevoie & à Ruelle pour animer par fa préfence, par fes promeffes & des pourboires, les foldats fuiffes à exécuter ponctuellement les ordres de leur état-major.

« Aucun moyen, continuent--ils, n'a été épargné. Le pape lui-même a fervi d'inftrument. Une bulle incendiaire a été lue dans les églises & commentée par » des prêtres fanat ques qui difoient hautement que

Tes

» Français n'avoient plus de religion, & ne reconnoiffoient

» aucune loi ».

Le paffage fuivant doit mériter la plus grande confiance à nos patriotes fuiffes:

«La journée du 10 août ne peut ni ne doit rompre » l'union des deux peuples; car les tyrans feuls font » coupables. D'un côté, le peu de Suiffes qui exiftoit » dans les gardes a été facrifié par l'ariftocratie; de l'au

tre, le peuple français ne peut pas accufer le peuple » fuiffe d'un crime commis par un petit nombre d'arifto» crates, & une horde de brigands etrangers à l'Helvétie. » Au contraire, les deux nations doivent être plus unies » que jamais: un même intérêt les raffemble, celui de » la liberté ».

On doit cet écrit, où l'on défireroit un peu plus de détails, un peu moins de réflexions, au citoyen J. de Somnaz, fous-lieutenant dans la légion des Allobroges préfident de la faciciété des patriotes fuiffes & allobroges réunis, & auteur de la Correfpondance des nations.

Les notes à la fuite du texte ne font pas ce qu'il y a de moins piquant & de moins curieux. On en ju gera par la onzième :

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«Le procureur-fyndic du département, Roederer parut » lui-même au château. S'il faut l'en croire, il ne donna » aucun ordre; mais il s'apperçut bien d'un mouvement » extraordinaire parmi les Suiffes. Que fit-il? Il fe con» tenta, à ce qu'il affure, d'entraîner le roi & fa famille » à l'affemblée nationale; & pour cela, il prétend avoir » bien mérité de la patrie. Voyez fa justification, p. 7 ».

Suite des lettres trouvées chez M. Delaporte, intendant de la lifle civile.

Paris, 17 mai 1792, rue de la Corderie.

"Monfieur, adjoint pendant quelque temps à la rédaction du Journal de la Nobleffe, aujourd'hui (& pour caufe) Journal univerfel des cours, &c., je me fuis fait un plaifir de vous le faire adreffer; je préfume qu'il vous eft agréable, puifque vous conti nuez de le recevoir.

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Oferai-je, Monfieur, profiter de cette occafion, pour avoir Phonneur de vous rappeler qu'il vous a été renvoyé par le roi à l'effet de me faire juftice, au nom facré de fa majesté, un pla

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cet que je lui avois préfenté en octobre 1791. Il s'agiffoit de la levée d'une configne qui avoit été donnée au château par je ne fais qui, au moyen d'une méprife fans doute plus feinte que réelle. Pai Phonneur de vous réitérer, Monfieur, que perfonne ne s'eft montré plus que moi attaché à la perfonne du roi,& que j'ai fait là-defus des preuves qui ne peuvent être renvoyées en doute enfin, vous repréfentez la perfonne du roi, qui a daigné recevoir mon placet avec bonté; & j'attends toujours de vous à ce fujet la juftice qui m'eft due.

Je vous fupplie inftamment Monfieur de m'honorer d'une réponse. Un fujet dont l'attachement & la fidélité pour le roi ne fe font jamais démentis, & qui, pour cette raifon, a été outragé de la manière la plus fenfible, a fans doute quelques titres pour fixer un infant votre attention.

Je fuis avec refpect, Monfieur, votre très-humble & trèsobéillant, ferviteur. Signé, D'ANLIBES.

Autre lettre. 199

Prifons de la haute-cour, 4 août 1797.

Poupart-Beaubourg a l'honneur de préfenter fon hommage à 24. Laporte, & de lui adreffer fa défense telle qu'il la articulée, tere & grande partie des notes: jeudi, 2 de ce mois, jour où a été rendu le premier jugement de la haute-cour nationale en faveur de MM. Noirot, Varnier & Tardi, qui ont été acquittés aux cris de joie & aux applaudillemens d'un peuple immenfe.

Quinze cents exemplaires du manifefte circulent dès le 25 du mois dernier, & dans la ville & dans tous les départemens. Majeure partie des camarades d'infortune de Poupart - Beaubourg croyoient qu'il n'en reviendroit jamais lui-même s'attendoit à périr fous les poignards des Jacobins du Loiret : il a joui, au contraire, d'une forte de triomphe; il a été couvert d'applaudifiemens deux fois, & cela étant aux ptifes avec le grand procurateur Garrand, qu'il a forcé an filence, ainfi que le législateur,, dénonciateur & faux témoin Bafire.... Les Jacobins d'Orléans font écrafés à jamais. Ici, le peuple éclairé & auffi jufte qu'a Paris il eft fésroce, eft tout dévoué au roi'; il aime la vérité & détefte celui qui le fatte du moins il fe, montre prévenu bien favorablement en faveur de tous les prifonniers de la haute-cour. Il est donc bien vrai que le danger n'eft jamais que pour les lâches.... ".

Autre lettre.

Graces au déplacement de M. d'Arboulin, mon très-cher; & pour ne pas expofer foi & fes amis à faire le voyage d'Orléans, on ne rifque plus rien par la pofte. Cette entrave eft le comble des chef-d'oeuvres opérés dans la troifième & dernière année de la liberté. Cette lettre vous arrivera par Scévole dans une boëte mife au voiturier.

» Nos maux extrêmes finiront dans trente-quatre jours justes. Mon ami, nous avons reçu claq lettres de Coblentz, de Trèves,

ז''

de Bruxelles; une; entre autres, d'un officier général, homme d'un vrai mérite, qui toutes s'accordent. C'eft pour nous la longueur d'un rigoureux carême : ce terme eft bien court pour les fcélérats auteurs de nos malheurs; encore trouveront-ils à le remplir de quelques nouvelles atrocités. Je ne puis vous dire combien j'ai été fenfible à l'aventure de M. Delaporte, depuis à celle. de M. de Briffac & de fa troupe, mon pauvre Scévole y com pris; & quand je penfe à la douleur de notre infortuné maître, je n'y tiens pas, mais je n'ai point de frayeur pour lui à mesure qu'on lui enlève fa garde vifible, l'invifible eft doublée; & h quelque malheureux s'armoit pour le frapper, faifi d'aveuglement, il tourneroit fon poignard contre lui-même. Croyez, mon ami que je ne vous parle pas fans fondement. Ignorans, comme nous le fommes, des détails qui doivent être le produit de ces événemens-ci, nous fommes affurés du fuccès général de la chofe, Dieu intervient, comme fa majefté, & fes loix lui permettent d'intervenir; & dès qu'il s'en mêle, rien ne fe fait à demi. Or, fi Louis XVI n'étoit pas fauvé, rien ne pourroit nous tirer de la confufion dans laquelle nous jetteroit une minorité de plus, Louis XVI eft appelé à régner fagement & glorieufement, à rétablir le culte divin dans toute fa fplendeur; mais il doit être en garde contre un de fes penchans; c'eft la clémence. Le royaume,, fouillé par tant de crimes, ne peut être purifié que par le fang des criminels cela regarde la juftice; c'est à elle à faire les facrifices. Qu'il fe garde bien d'arrêter le glaive; qu'il réfléchille aux châtimens qu'ont éprouvés les chefs & les princes des Ifraélites qui ont ménagé des victimes défignées par le feigneur. L'homme ne fait ce qu'il fait, quand il veut épargner ce fang; fa compaffion dégénère en cruauté, dont les gens qu'il a voulu fauver des viennent les objets. Le plus grand bonheur qui puiffe arriver à un criminel, eft d'être fupplicié fur la terre, parce qu'on ne pale pas deux fois, & qu'il eft terrible de tomber coupable & impuni dans les mains, ou fous la juftice du Dieu vivant,

Mais que de coupables à punir ! J'en vois bien d'autres, mon ami. A Paris tout eft criminel, depuis le falarié à 18 liv, dumam! nège, jufqu'au rentier qui touche froidement fes rentes, tandis que fon roi, torturé de mille manières, fert d'ôtage à la sûreté de la ville, & de gage de fidélité aux engagemens publics. Cependant les femmes fe parent, courent les fpe&acles de toutes les espèces, ne refpirent que diffipation, tandis que nous, conf ternés & profternés, nous appelons la vengeance & la miléricorde. Les femmes de Paris me fon: odieufes, & je demande pour elles l'entière exécution du deuxième ou troisième chapitre d'faic, dans lequel le prophète dit: " Que quand Dieu ata rendu au "peuple fes princes & fes juges, toutes les femmes feront ra. "fées". Je demande que la ducheffe de Bour..... foit à la tête, avec la demoiselle d'Auv...., la Larochef...., la Coig...., mon amie, & tant d'autres, en finiffant par les dames de la halle. Ca font les femmes amoureufes de l'indépendance & de la nouveauté, qui ont perdu les hommes; elles mériteroient le fouet, qu'on les rafe, & on obéit à Dieu.

La garde parifienne préferve les jours du roi; mais elle travaille pour elle-même: c'eft un roi conftitutionnel, & fon efclare qu'elle garde. Elle feroit défefpérée de voir le defcendant de St.

Louis fur le trône indépendant qu'a laiffé Saint-Louis à fes enfans.

"Paris ayant fon roi pour otage, attendra que les efforts de l'Allemagne viennent le lui arracher, & s'en fera un gage pour fe faire ménager. Quel horrible projet! De quoi menaceront-ils ? Le mettront-ils lui & fa femme fur la brèche ?

» Paris l'a laiffé dépouiller de fa garde, & mis, pour ainfi dire, Pétion fur le trône.

"Eft-ce aflez de ne pas égorger, de ne pas laiffer égorger fon maître? Doit-on fouffrir qu'on l'infulte, qu'on le maltraite & l'humilie à tout propos? Ah! canaille maudite, qui n'avez ni foi, ni loi, ni d'autres règles que votre intérêt mal entendu ! Dieu me donne foif & faim de la vengeance qui doit tomber fur vous; les éloges que l'on fait de votre fidélité à bien préferver le prifonnier dont vous avez forgé les fers, m'indignent. Je confentirois à être broyé dans un mortier, pour que vous fuffiez châtiés comme vous méritez de l'être.

» Je m'échauffe, mon ami; mais le fujet le veut. Paffons à des chofes plus gaies. Croyez-vous que mon bel efprit fait la coqueluche de Coblentz : cela fait palier des jours très-heureux à mon cadet qui y eft; mais la poéfie n'empêche de mourir de faim, ni ceux qu'elle infpire, ni feurs defcendans.

» Mille complimens à madame Mary.

"Si les deux liards vont, donnez le volume à mon fils, qui me le fera parvenir par une occafion.

"Aimez les miens qui vous aiment bien.

" Je vous embraffe de tout mon cœur.

"A propos,

j'ai dit du duc d'Orl.... qu'il avoit tellement fouillé le crime, qu'il en avoit dégoûté pour un fiècle.

Le jour de la Fête-Dieu 1792.

» Il faut tourner la phrafe au dire d'un gourmet, le duc d'Or léans, tellement fouillé, &c.... qu'il en aura, &c.... ».

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Autre lettre.

Ce 26 juin 1792.

« Monfieur, j'ai oui-dire hier dans une fociété compofée de gens dignes de foi, qu'un valet-de-chambre du roi, nommé Rameau ou Ramond, a rapporté que le roi, la reine & madame Élizabeth, avoient gaiement, depuis la journée du 20, fait fauter des cocardes nationales avec ironie, & en mêlant des propos injurieux pour la nation. Que l'intention du roi étoit de s'en aller lorfqu'il auroit l'habit de garde national, &c., & autres abfurdités femblables. Ce valet-de-chambre a tenu ces propos chez le fieur Perthe, tailleur, rue Boucher, & de-là, ils ont circulé jufqu'à la fociété où je me fuis trouvé. Nous avons pensé qu'il étoit bon que vous fuffiez inftruit de la moralité de l'homme en queftion, & je me fuis chargé de vous en prévenir. Il nous a femblé qu'un homme comme lui, indifcret ou calomniateur, ne

devoit

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