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ma première lettre seroit datée de Chamberry; vous voyez que je vous tiens parole. Tot a fui, depuis les bords da lac de Genève jusqu'à ceux de l'Isère, & des députations de toutes les vilies de Savoie m'arrivent successivement, pour rendre hommage à la nation française, & pour implorer sa protection. La fuite n'a été que trop rapide, puisqu'il m'est impoffible d'atteindre les ennemis; mais fi je 'ai pu leur faire que peu de prifonniers, j'en fuis dédommagé par des captures plus utiles, que je dois à la précipitation de leur fuite..

>> Je joins ici un état succint des provisions, des munitions, des armes & des effets militaires qu'ils ont abandonnés. Un procès-verbal exact vous représentera ces détails incessamment; il s'augmentera tous les jours des produits d'une déroute qui n'auroit pas été plus grande après la plus complète des victoires. Je n'ai pas eu befon des troupes qui me joignoient successivement. Je n'avois encore que douze bataillons, devant lesquels quinze mille & cent hommes effectifs ont disparu comme un fouffle. J'ai lieu de penser qu'une partie de ces troupes, qui s'est enfoncée dans les Bauges, y est encore & j'espère qu'il ne lui fera pas aisé d'en fortir. Je suis convenu hier au foir, avec M. Rofly que j'ai laissé à Montmélian qu'il se porteroit à Miolans & Freterève avec les huit mille hommes qu'il commande, & que delà il poufferoit jusqu'à l'Hôpital & Conflans, débouché des Bauges dans la Tarantaise. Je suis ici avec sept mille hommes, dont une partie occupe les villages de l'entrée des Bauges, & je poufse aujourd'hui mon avant-garde, commandée par M. Caza-Bianca, dans l'intérieur de ces montagnes.

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>> Je me conduirai en conféquence des découvertes que nous ferons. J'ai rassemblé entre les Marches & Montmélian, pour servir à renforcer ma droite ou ma gauche, suivant le besoin, les neuf ba aillons de grenadiers du Gard, de l'Isère, de la Drome & de l'Ardèche, qui m'arrivent successivement, & je vais envoyer des détachemens pour prendre possession d'Annecy, de Remilly, de Carrouge & de Thonon. J'espère que dans huit jours tout le pays sera sous la domination, de Genève jusqu'au Mont - Cénis. Si M. Anfelme est auffi heureux que moi, les états du roi de Sardaigne

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Sardaigne feront bientôt réduits au Piémont & à la Sardaigne. La marche de mon armée est un triomphe. Le peuple des campagnes, celui des villes, ,accourt au-devant de nous; la cocarde tricolore est arborée partout. Les applaudissemens, les cris de joie accompagnent tous nos pas. Une députation de Chambéry est venue me trouver avant - hier au château des Marches. Hier matin j'en fuis parti avec cent chevaux, huit compagnies de grenadiers & quatre pièces de canon, pour me rendre en cette ville. La municipalité, m'attendoit à la porte, en habit de cérémonie, pour m'en remettre les clefs. Le chef de la municipalité m'a exprimé les fentimens de respect & d'attachement du peuple en Savoie pour la nation française; & au nom de cette nation généreuse, j'ai promis protection, paix & liberté au peuple de Savoie. Je me suis rendu à la maison commune; j'y ai reçu les hommages que les citoyens s'empresso ent de rendre à la nation, & toute la troupe a été invitée à un grand festin qui lui étoit préparé.

>> Je ne peux donner trop d'éloges à la conduite des foldats & volontaires; elle n'auroit pas été plus régulière & plus cordiale dans leur propre pays. Vous fentez que les Piémontais, avant de se retiver, ont épuisé toutes les caisses: cependant il restera quelques fommes à notre disposition, & j'ai donné ordre aux percepteurs des deniers royaux, de continuer, pour le compte de la nation, les diverses perceptions, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné. J'ai cru devoir à la conduite franche & loyale des magistrats & des citoyens de Chambéry, de leur laisser à la maison commune un poste de leur garde bourgeoife. Hs ont été fort sensibles à cette marque de confiance. Aujourd'hui l'arbre de la liberté est planté en grande cérémonie fur la principale place de la ville. Il me paroît que les esprits font disposés à une révolution semblable à la nôtre. J'ai déjà entendu parler de proposer à la France un quatre-vingt-quatrième déparrement, ou au moins une république sous fa protection. In est à désirer que je connoisse le vœu du gouverne ment; car je crois que je ferai à portée d'influer für le parti que l'on prendra. Quoi qu'il arrive, voilà votre objet rempli. Cet événement est très-imposant pour Genève & pour la Suisse; nous la touchons à présent de No. 168. Tome 14.

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toutes parts. J'ai demandé la liberté de quelques prisonniers détenus pour quelques propos tenus en faveur de la tévolution française. J'en ai fait délivrer quelques autres qui n'étoient accusés que de contrebande. J'ai dû d'ailleurs croire que la nation laissereit un libre cours aux, loix du pays, jusqu'à ce que la nation savoifienne les ait librement changées.

» Je vous prie de me mander si je dois tenir un autre langage, jusques-là je n'interromperai point le cours des loix ordinaires; je désire que ma conduite ait l'approbation de l'assemblée conventionnelle & de la vôtre. Il faudra bientôt vous occuper du nombre des troupes que vous voudrez faire hiverner dans ce pays-ci: la campagne doit être terminée le 15 du mois prochain. Le général en chef de l'armée du Midi. Signé, MONTESQUIου ».

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<< Mille fusils environ; un affez grand nombre d'effets de campement, tentes & marmittes; 500 quintaux de foin, 3000 facs de bled de 180 livres 100,000 cartouches à balles, une grande quantité de poudres, qu'on n'a pu encore conftater, 7 à 800 gibernes, bretelles de fufils, bonnets de grenadiers & chapeaux fans nombre, du fel pour la consommation de tous les habitans du duché de Savoie, pendant neuf mois, 30,000 livres environ dans le tréfor public, 120 à 180,000 liv. qui résulteront au premier octobre de la rente des gabelles.

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Nota. » Il n'a pu être dressé encore aucun inventaire, & il arrive à chaque instant de tous les postes qui étoient occupés par l'ennemi, des avis qu'on y trouve des effets qu'on va fuccessivement reconnoître. Le commiffaire ordonnateur en chef de l'armée du Midi. Signe, VINCENT».

Pour copie conforme. Signé, SERVAN.

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Affiche du général Montesquiou, dans toute la Savoie. << Au nom de la nation française, guerre aux despotes, paix & liberté aux peuples. Le général de l'armée Française, Montesquiou. - Chambéry, le 24 septembre $792

Extrait du compte rendu à la convention nationale par le ministre des affaires étrangères.

Avant l'époque du 10 août, la nation française avoit, pour ainsi dire, perdu toute sa considération au dehors: c'étoit le fruit de perfides intrigues d'une cour qui faisoit entrer notre avilissement, comme élément essentiel dans les principes de contre-révolution qu'elle méditoit; c'étoit le fruit de la publicité que les conspirateurs n'avoient pas craint de donner à leurs complots, tant ils se croyoient affurés du succès !

Dans les contrées les plus éloignées, comme chez nos plus proches voisins, on avoit eu d'avance des notions certaines & très-étendues fur tous les fils de cette vaste conjuration, qui devoit nous être si fatale. Les mêmes causes qui donnoient aux armées autrichiennes & prufsiennes tant de sécurité & de confiance, aux rebelles émigrés tant de présomption & de jactance, aux aristocrates de l'intérieur tant, d'audace & d'insolence; ces causes agissoient anssi dans le reste de l'Europe, & nous perdoient dans l'opinion des peuples. Par-tout on voyoit déjà la contre-révolution consommée, la liberté anéantie; & le peuple français vaincu, ruiné, rentrant fous le joug du despotisme, n'étoit déjà plus qu'un objet de pitié & de dérision.

Mais la journée du 10 août, en déconcertant au-dedans tous les projets de nos ennemis, a dérangé aussi leurs fausses spéculations au-dehors. Les étrangers ont vu que nous allions enfin avoir un gouvernement, & ils n'ont pu le voir avec indifférence. Notre crédit public a commencé aussi-tôt à se relever le commerce n'a plus eu les mêmes alarmes; le change a éprouvé d'heureux changemens en notre faveur; les peuples ont conçu de nous velles espérances, & la terreur des rois s'est réveillée.

Presque tous les gouvernemens font les ennemis de la révolution française, parce que tous sont plus ou moins infectés du venin de l'aristocratie & du despotisme: mais aussi nous avions de chauds amis parmi les peuples; les hommes de tous les pays n'ont pas cessé de faire des vœux pour nos succès, malgré les exagérations, les menfonges, les calomnies dont on a essayé de nous fléttir; c'est qu'il y a par-tout des hommes véritablement feng Da

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sibles & humains qui comptent pour quelque chose l'af- tranchissement de vingt-cinq millions de leurs semblables, & qui mettent en compenfation de quelques désordres momentanés, de quelques malheurs individuels, les bienfaits éternels de la liberté & de l'égalité, que, tôt ou tard, tous les peuples de la terre partageront avec le peuple français.

Les rois ont prévu ce résultat, & ils feront tout pour le prévenir ou le retarder, La crise actuelle n'est pas la plus périlleuse que nous ayions à redouter; le moment du plus terrible danger arrivera au printemps prochain; alors la tyrannie coalisée fera son dernier effort, & nous aurons à repouffer à la fois les forces combinées de tous les rois qui auront pu ou qui auront ofé fournir leur contingent à cette croisade impie. Mais il est quelques motifs de nous raffurer, dans l'inquiète jaloufie de tous ces potentats; dans la dévorante ambizion qui les confume; dans des rivalités qu'un danger commun a pu affoupir, mais n'a pas éteintes; dans le choc de tant d'intérêts divers qui se contrarient fans cesse; dans les méfiances réciproques; dans les craintes respettives qui les agitent; dans la détresse pécuniaire où les plongent leurs insultantes prodigalités; dans la laffizude des peuples.... enfin, dans mille événemens politiques ou physiques, inattendus ou prévus, qui peuvent ou qui doivent infailliblement furvenir durant le cours de fix mois.

Des bruits contradictoires circulent sur les préparatifs & les armemens de la Ruffie. On a dit que quinze ou vingt ou même trente mille Russes étoient en route pour se joindre aux armées combinées, qui déjà nous combattent: mais jusqu'à présent nos troupes n'ont pas dépaffé nos frontières de la Pologne, & les quarante mille Rufles qui s'y trouvent fuffifent à peine pour y contenir un peuple que l'esclavage irrite, & les factions opposées des grands qui s'entredéchirent.

On a parlé d'une flotte venue d'Archangel dans les ports du Dannemarck, & déjà l'on suppose que cette flotte va se montrer fur nos côtes & les infulter: & les vaisseaux ruffes, effectivement venus d'Archangel, n'ont pas le quart de leur équipement; & pour le compléter, ils viennent de faire voile pour le port de Cronftald; ainsi il est maintenant impossible qu'ils fortent de la Baltique avant le mois de juin prochain.

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