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damné dans sa fortune, dans son honneur et sa liberté, et ne lui est pas notifiée par huissier commis (art. 187 et 188, Code d'instruction criminelle). En affaire civile, quand la partie a constitué avoué, la condamnation est également définitive si l'opposition n'est pas formée dans la huitaine (art. 157, Code procédure civile).

Mais, dans la matière même qui nous occupe, le législateur a déployé contre la négligence une sévérité qui serait une injustice si l'on ne l'étendait pas aux créanciers non produisants.

En effet, l'état de collocation provisoire ayant rejeté, réduitou placé défavorablement la créance d'un créancier diligent qui a obéi à la loi, s'il ne contredit pas dans le mois, il est forclos, et cette forclusion est définitive, absolue; son droit est à jamais perdu, alors même que par des productions faites ultérieurement par des créanciers retardataires, le rang auquel il avait été colloqué viendrait à n'être plus, utile. La jurisprudence a appliqué cette forclusion avec une telle rigueur qu'il faut reconnaître que toute la défaveur est pour ceux qui ont été d'abord diligents, et tout l'avantage pour ceux qui ne se présenteront qu'à la dernière extrémité.

On explique cette différence en disant que ceux qui ont produit ont prouvé qu'ils avaient reçu l'avis en temps utile, qu'ils sont déjà dans la cause, et qu'ils deviennent inexcusables s'ils ne contredisent pas dans le délai, tandis que le retard des non-produisants vient peut-être de ce que la sommation ne leur a pas été communiquée avec exactitude par le mandataire qu'ils ont au domicile élu. Mais, alors, qu'ils s'en prennent à leur mandataire, et lui fassent supporter la peine de la faute qu'il a commise; car, dans l'état actuel de nos moyens de communication, les facilités merveilleuses de correspondance et de locomotion, que les nouvelles découvertes ont mises à la disposition des justiciables, doivent exercer une juste influence sur l'accomplissement des devoirs imposés par la loi. Lorsqu'en 1807 le législateur a fixé des délais, il a considéré les distances, les moyens qu'on avait alors pour les parcourir, la difficulté des communications, et l'on peut affirmer avec certitude que les délais, tout en restant dans les mêmes limites, sont aujourd'hui relativement plus considérables qu'il y a cinquante

ang.

L'indulgence pour les retardataires va jusqu'à prétendre que le délai d'un mois est trop court pour le créancier, qu'une sommation vient surprendre à l'improviste; il n'a pas le temps de chercher, de préparer son titre et de l'envoyer.

C'est ici que la justice de la déchéance proposée par le projet éclate dans tout son jour, et démontre l'erreur de cette dernière excuse.

Il n'est pas vrai que le créancier puisse être surpris inopinément par la sommation de produire, et qu'il n'ait qu'un mois pour chercher et envoyer les pièces nécessaires. L'ordre est ouvert sur une aliénation volontaire ou sur une vente par expropriation. Nous ne pouvons prévoir que ces deux cas.

Si la vente est volontaire, l'acquéreur, soit de son propre mouvement, soit sur la sommation à lui faite par un créancier, est obligé de notifier son contrat à tous les créanciers inscrits conformément aux art. 2183 et 2185 du Code Napoléon. La notification est faite par huissier commis; il est en outre obligé de purger les hypothèques légales, art. 2194. L'ordre ne peut s'ouvrir que trente jours après les délais prescrits par ces articles, ainsi le veut le Code de procédure civile (art. 775).

Le délai pour la surenchère fixé par l'art. 2185 étant de quarante jours et le délai pour la purge des hypothèques légales étant de soixante, il est évident que près de trois mois avant la sommation de produire, tout créancier inscrit connaît par une notification spéciale la vente de l'immeuble, le prix de cette vente, la volonté de l'acquéreur de se libérer et la nécessité de l'ordre qui va s'ouvrir; ajoutez à ces délais le mois qui suit la sommation, et vous serez convaincus que s'il ne produit pas il est coupable de négligence ou de mauvaise volonté.

Si la vente a eu lieu sur saisie immobilière, sa faute est encore plus impardonnable: en effet, il a connu l'insolvabilité de son débiteur, la poursuite, l'adjudication et même l'époque où l'ordre sera ouvert, longtemps avant la nécessité de produire. Par l'art. 692 du Code de procédure, actuel, il est lié à l'instance en expropriation; il est sommé de prendre communication du cahier des charges et d'assister à la vente dont le jour lui est indiqué: qu'on suppute tous les délais prévus par les Année 1858.

art. 694, 695 et 696 du Code de procédure; qu'on y réunisse les autres délais fixés après l'adjudication par les art. 750 et suivants de notre projet, l'on sera forcé de convenir que le créancier inscrit n'est pas surpris à l'improviste; qu'il est partie en cause et qu'il est depuis plus de trois mois préparé à la sommation et à la production qui doit la suivre.

Nous ne comprenons donc pas l'intérêt qu'il excite et l'indulgence dont on veut couvrir sa désobéissance à la loi. Nous sommes plus vivement touchés de la position des créanciers vigilants, du besoin qu'ils ont de retirer leurs capitaux et du devoir de rendre prompte justice à ceux à qui elle est due.

Dans la procédure de l'ordre telle qu'elle est aujour d'hui réglée par le Code, s'il ne s'élève aucune contestation entre les créanciers qui ont produit dans le mois, le juge-commissaire peut et doit même, s'il veut accomplir exactement sa mission, prononcer la déchéance des créanciers non-produisants. Cette déchéance est donc encourue, art. 759. Pourquoi les contestations qui s'élèvent entre les créanciers vigilants tourneraient-elles contre eux-mêmes et viendraient-elles relever les négligents de la peine méritée ? C'est un fait qui est étranger à ceux-ci. Pourquoi l'inaction du commissaire leur rendrait-elle un droit périmé? La conservation ou la perte d'un droit ne peut dépendre de la complaisance ou de la négligence du magistrat la loi doit être la seule règle en pareille matière; et c'est afin de faire cesser cet arbitraire que le nouvel art. 755 pose une limite commune, infranchissable, dont l'apparente sévérité ne doit plus être qu'une justice aux yeux des hommes impartiaux.

Aucun délai fixé pour dresser l'état de collocation ne stimulait le zèle du juge et ne réglait l'accomplissement de ses devoirs. C'était d'ailleurs une lacune remarquée pour chacune des opérations qui lui sont confiées. L'omission est réparée, l'état devra être dressé dans le délai de trente jours.

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XVI. (Art. 757 du projet; devenu l'art. 758 de la loi) (*). Le Code de procédure avait prévu les contestations; mais il ne traçait aucune marche pour arriver promptement à leur solution. Il ne disait pas comment le tribunal en était saisi. Selon l'usage adopté, le jugecommissaire faisait un rapport à telle audience qu'il jugeait convenable, sans indication préalable aux intéressés; tous les créanciers et tous leurs avoués avaient le droit de se croire intéressés. Le poursuivant devait figurer comme partie principale. Cette absence de règlement devait amener des lenteurs et des frais plus considérables.

Désormais, la contestation sera limitée par le dire : elle sera resserrée entre les contestants; le poursuivant, s'il n'est pas l'un d'eux, n'y sera plus partie, et la fixation de l'audience obligera le juge aussi bien que les contestants. L'avertissement sera commun.

Il faut encore signaler dans l'art. 757 une amélioration favorable aux créanciers postérieurs. S'il est évident que le résultat des contestations doit laisser encore une somme disponible pour les créances venant après celles contestées, il sera permis de donner satisfaction aux ayant-droit en réservant somme suffisante pour l'éventualité des contestations.

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XX. (Art. 761; 762 de la loi.) Le Code de procédure commandait impérieusement l'appel dans les dix jours de la signification du jugement à avoué. Mais il laissait la faculté de s'arrêter entre le jugement et la signification, dont il ne fixait pas l'époque; et ce repos, permis aux contestants, était nuisible aux autres créanciers; il fallait aussi mettre fin aux doutes qui se sont élevés sur la détermination des sommes qui doivent limiter le premier et le dernier ressort. Le projet préviendra pour l'avenir toute difficulté sur ce point.

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XXII. (Art. 763; 764 de la loi.) Mais quand la Cour a statué, la procédure peut encore sommeiller. On laisse rendre arrêt par défaut pour faire perdre du temps, lasser la patience d'un adversaire et forcer les autres créanciers à acheter la créance compromise. Il n'y a point d'excuse pour celui qui fait défaut en pareille matière. On doit toujours être prêt; et, d'ailleurs, trop de ménagements pour les ruses employées par les plaideurs est un oubli du respect dù à la position malheureuse de la masse des créanciers et à celle du débiteur, dont les ressources se dissipent par les intérêts et les dépens. Il faut surtout, après avoir abrégé les délais, diminuer la charge des frais. L'arrêt sera donc signifié dans la quinzaine ; il ne sera signifié qu'à avoué; on ne pourra y former opposition, et la signification à avoué fera courir le délai du pourvoi en cassation.

XXIII. (Art. 764; 765 de la loi.)- Le Code de procédure avait, pour la première fois, imparti un délai au juge-commissaire pour continuer les opérations de l'ordre après le jugement ou l'arrêt rendus sur les contestations. L'art. 764 a le même but. Mais nous avons cru devoir diminuer, sans dommage pour aucun des ayant-droit, la longueur de ce délai nous l'avons réduit à huit jours.

XXIV. (Art. 765; 766 de la loi). · Il est une règle absolue en procédure toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens. L'art. 130 du Code de procédure en avait fait un principe qui ne souffrait d'exceptions que celles admises par l'art. 131. Mais on avait compris, en lisant l'art. 766 du Code de procédure, que, pour les ordres, cette règle ne reprenait son empire que contre la partie qui succombait en appel. On croit qu'en première instance on peut se permettre les contestations les plus téméraires; on se les fait pardonner par le prétexte des intentions les plus louables. On n'a jamais plaidé dans un intérêt égoïste; on veut n'avoir jamais fait de contestations que dans l'intérêt de la masse; et si l'on vient à perdre le procès, on obtient toujours l'emploi de ses dépens en frais de poursuite d'ordre. Telle est la conclusion que l'on a tirée de la disposition bien restreinte de l'art. 766; en sorte qu'il est permis de se tromper aux dépens des autres, mais on ne peut persévérer qu'à ses dépens. Nous avons pensé qu'il fallait rétablir la règle générale, même pour la première instance, parce que, sous la couleur d'une contestation de bonne foi et dans l'intérêt de tous, on se livrait à des contestations plus que téméraires, qui à l'inconvénient d'entraver la marche de l'ordre ajoutaient la diminution de la somme à distribuer.

On devait cependant rejeter sur la masse les frais faits par un créancier dont la collocation rejetée d'office aura été rétablie par le tribunal; mais si un adversaire s'est constitué, s'il s'est approprié la décision du juge-commissaire, il sera passible des dépens.

Nous avons consacré de nouveau dans le projet les principes posés par les art. 778 et 769 aujourd'hui appliqués; mais nous avons aussi voulu punir la négligence

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dans la production des pièces, même de la part de celui qui gagne son procès, si la production faite en temps Utile avait pu avoir pour effet d'éviter la contestation.

Enfin, la dernière disposition de l'art. 765 proposé assure le recouvrement des frais dus par un créancier pour contestation mal fondée; la condamnation aux dépens ne sera pas illusoire, et la charge n'en retombera pas sur la masse.

XXV. (Art. 766 du projet; 767 de la loi.)-- Le silence du législateur de 1807 sur le caractère de l'ordonnance de clôture, sur le droit de se pourvoir contre elle, et sur la voie de recours à prendre, a donné lieu aux questions les plus controversées et aux décisions les plus nombreuses et les plus contradictoires. Les uns ont soutenu que l'ordonnance de clôture n'était qu'une simple décision rendue par un seul juge et qui pouvait être attaquée par opposition devant le tribunal; les autres ont dit qu'une décision qui était exécutoire et revêtue du mandement souverain, qu'une décision qui prononçait la déchéance de créanciers, ordonnait la radiation d'inscriptions, était un jugement en premier ressort qui ne pouvait être attaqué que par la voie de l'appel; d'autres enfin, ne rencontrant dans cette ordonnance aucune nature bien définie, ne lui ont reconnu que le caractère d'un acte dont il fallait demander la réforme par action principale.

Nous n'entrerons pas dans l'examen de ces trois systèmes, dont les deux premiers ont été défendus avec une opiniâtreté qui n'est pas encore apaisée. Qu'il nous suffise de dire que plus de cinquante arrêts de cours impériales ont été rendus; que la Cour de cassation, après avoir jugé, par un premier arrêt du 9 avril 1839, que l'ordonnance de clôture devait être attaquée par l'appel, a décidé, le 14 janvier 1850, qu'on ne pouvait l'attaquer que par la voie de l'opposition (*). La question est sans importance quant au fond; mais elle a signalé une lacune qui a donné et donne encore lieu à bien des procès nous proposons de trancher la question dans le sens du dernier arrêt de la Cour suprême, et nous adoptons le système qui ouvre la voie de recours la plus prompte et la moins dispendieuse. Nous proposons d'admettre l'opposition. Il nous restait à en régler les délais et les formes, et nous pensons l'avoir fait utilement par l'art. 766 du projet.

XXVI. (Art. 767; 768 de la loi.) L'art. 767, que nous avons l'honneur de vous proposer, reproduit les termes du Code de procédure, article 770; c'est une disposition qui doit trouver sa place dans toute loi relative au règlement des ordres.

XXVIII. (Art. 768; 769 de la loi.) Ce même Code avait bien dit, par son art. 759, que le jugecommissaire ordonnerait la radiation des inscriptions des créanciers non colloqués; mais il ne s'était pas occupé de faire opérer cette radiation. Cependant l'acquéreur y a droit, et cette mesure est pour lui d'un grand intérêt; elle doit même être opérée avant tout. Les art. 772, 773 du Code de procédure n'ont trait qu'à la radiation des inscriptions des créanciers colloqués, et l'art. 774 ne parle que de l'inscription d'office. L'article 768, que nous vous soumettons, s'explique d'une manière plus spéciale.

XXVIII. (Art. 769, 770; 770, 771 de la loi.) Nous avons pu, alors, pour compléter tout ce système de radiation, reprendre dans le Code les articles que nous venons de citer et les transcrire dans le projet, en ajoutant, dans notre art. 769, une prescription favorable à l'acquéreur et qui lui garantit que la radiation des inscriptions des créanciers non colloqués sera exactement exécutée par les soins de l'avoué poursuivant.

XXIX. (Art. 771; 772 de la loi.) Tout ce que nous avons prévu et réglé jusqu'ici n'est relatif qu'aux ordres ouverts après saisie immobilière. Ces ventes ne sont pas les plus fréquentes; mais elles sont régulièrement suivies d'un ordre inévitable. Si l'on en excepte les mesures préparatoires, les ordres à suivre sur aliénation volontaire doivent emprunter les formalités des

(*) [V. ces nombreux monuments de jurisprudence réunis dans la Table générale de notre Recueil, Ordre, no 382 et suiv.]

ordres sur expropriation forcée. En effet, quelle que soit la nature de l'aliénation, dès qu'elle donne lieu à un ordre, elle met en jeu les mêmes droits, les mêmes intérêts; le vendeur, l'acquéreur et les créanciers ont entre eux les mêmes situations. Il n'y a qu'une différence, c'est que dans les ordres, après expropiation, il y a toujours insuffisance de deniers et des pertes presque certaines, ce qui rend l'intervention de la justice toujours nécessaire, quel que soit le nombre des créanciers; tandis que dans les ordres sur ventes volontaires, la possibilité de donner satisfaction à tous rend les contestations plus rares, et permet, si les créanciers sont moins nombreux, d'arriver à un règlement par des formes plus simples.

On a vu plus haut que le projet propose de conférer à la partie saisie le droit de provoquer l'ouverture de l'ordre; nous avons démontré qu'elle pouvait y avoir un grand intérêt. Mais lorsqu'un propriétaire d'immeubles grevés d'hypothèques a, lui-même et de son propre mouvement, vendu ses biens pour se libérer, n'a-t-il pas un intérêt aussi puissant, et ne doit-on pas lui donner la même faculté? L'art. 775 du Code de procédure semble ne l'attribuer qu'au créancier le plus diligent, ou à l'acquéreur. Mais, si les créanciers ne s'accordent pas entre eux pour recevoir le prix, ou si l'acquéreur, à l'échéance du terme, ne se libère pas entre leurs mains, le vendeur doit pouvoir requérir l'ouverture de l'ordre, et demander à sortir d'affaire le plus tôt qu'il sera possible.

Toutefois, si l'art. 2184 peut permettre aux créanciers de provoquer la distribution du prix sans distinction de dettes exigibles ou non exigibles, si même l'acquéreur doit toujours tenir le prix à leur disposition, on ne peut permettre au vendeur d'obliger l'acquéreur à devancer le terme que lui-même a stipulé; il ne pourra provoquer l'ordre que lorsque le prix sera exigible aux termes du contrat.

XXX. (Art. 772 du projet; 773 de la loi.) — Une autre lacune existe aussi dans l'art. 775 du Code. Après avoir dit que l'ordre ne pourra être provoqué s'il n'y a plus de trois créanciers, le législateur a gardé le silence sur le mode à suivre pour parvenir au règlement. Si les parties ne peuvent pas s'entendre, l'ordre devra-t-il être introduit et suivi par action principale avec la procédure des matières ordinaires? Nous avons cru devoir réparer cet oubli. La distribution sera réglée par le tribunal jugeant en matière sommaire, sur assignation à personne ou domicile réel, sans autre procédure que des conclusions motivées. Le jugement sera signiflé à avoué seulement, s'il y a avoué constitué.

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XXXIII. (Art. 773; 776 de la loi). Mais nous avons cru devoir nous montrer plus sévères pour la subrogation dans la poursuite de l'ordre que ne l'avait été le législateur de 1807. On comprend que, dans les termes où avait été organisée cette poursuite, on ait dû subordonner la subrogation à la nécessité d'une demande formée et d'une décision à rendre par la chambre du conseil; la négligence et le manquement à des devoirs étaient difficiles à constater; aucun délai pour l'accomplissement des formalités n'avait été posé absolument par le Code; il n'en sera plus ainsi. Tous les actes de cette procédure sont jalonnés et placés à des intervalles bien déterminés; le mécanisme de cette poursuite est, pour ainsi dire, monté avec un engrenage qui doit fonctionner régulièrement. Le ralentissement ne peut provenir que d'une faute, d'une négligence, que le calcul des dates mettra le juge-commissaire à même de constater et d'apprécier seul. Ce pouvoir que lui donnera la loi n'aura pas seulement pour effet d'épargner les frais d'une contestation portée devant le tribunal; la faculté de pourvoir d'office au remplacement de l'avoué retar

dataire évitera l'embarras d'une demande en subrogation devant laquelle reculait toujours le sentiment d'une bonne confraternité, sentiment honorable sans doute, mais quelquefois en opposition avec l'intérêt des parties. Au surplus, l'exercice de ce pouvoir est limité à des cas peu nombreux, à l'inobservation de délais vraiment nécessaires à la marche de l'ordre. L'officier ministériel en faute ne devra être payé des frais avancés par lui qu'après le règlement définitif.

XXXIV. (Art. 776) (*). Au nombre des mesures depuis longtemps demandées pour la prompte expédition des ordres et le recouvrement plus facile des capitaux par les créanciers, on a réclamé avec instance le dépôt du prix par l'acquéreur dans un délai plus ou moins rapproché de l'ouverture de l'ordre, et tout au moins avant sa clôture. Les avantages de cette précaution sont aperçus au premier examen. L'acquéreur ne pourra jamais être qu'un acheteur sérieux et solvable; on ne courra plus le risque de n'avoir pour débiteur du prix qu'un spéculateur qui a espéré réaliser un bénéfice sur son acquisition pendant le long intervalle de temps que lui promet le règlement d'un ordre à suivre. L'adjudicataire ou acquéreur qui n'a pas son argent disponible n'interviendra plus dans la procédure avec la seule intention d'entraver son cours, sans s'inquiéter des pertes qu'il occasionne aux créanciers. La loi dit que les bordereaux seront exécutoires contre l'acquéreur; la vente n'a été faite que pour payer les créanciers, et souvent ces créanciers ne sont pas plus avancés après qu'auparavant; ils ont attendu longtemps; les intérêts se sont ajoutés au prix et en ont rendu le paiement plus difficile par l'acquéreur. On a même remarqué que chez les habitants de la campagne la manie de posséder des terres les pousse à acheter sans avoir l'argent nécessaire pour payer; que le rendement de la terre n'étant jamais au niveau de l'intérêt du prix, amenait presque toujours la nécessité de nouvelles poursuites, d'une seconde vente et de nouveaux frais. Enfin la vente sur folle enchère a souvent lieu pour obtenir l'exécution des bordereaux.

Si ces faits sont vrais, il faut dire que le but de l'aliénation soit sur expropriation forcée, soit volontairement faite pour payer les créanciers, peut être souvent manqué, et que la mesure du dépôt est une précaution efficace.

Cependant, comme le moyen proposé a rencontré de vives contradictions, il faut en examiner la valeur.

On a dit: L'obligation de déposer le prix éloignera nécessairement les amateurs dans les ventes par adjudication; les enchérisseurs seront effrayés, et on nuira souvent aux créanciers, surtout dans les adjudications forcées. Nous répondons: Ce n'est pas un malheur si l'on éloigne des adjudicataires qui ne peuvent payer dans un court délai, car l'expropriation n'a lieu que par la raison qu'il y a déjà retard dans le paiement, et parce que les créanciers impatients veulent être payés le plus tôt possible.

On insiste sur la gravité de l'inconvénient en matière de ventes volontaires; souvent, dit-on, on anéantira des conventions faites de bonne foi, et l'on contraindra au dépôt un acquéreur qui avait dû compter sur les délais stipulés.

Cette objection vient d'un oubli de la loi. Celui qui achète un immeuble a dù s'assurer avant tout de la situation hypothécaire de cet immeuble. Il en a connu les charges; il a connu l'obligation pour lui de notifier son contrat aux créanciers inscrits. Il a su que les créanciers ne seraient pas plus tenus de respecter les délais qu'il a stipulés, qu'ils ne seraient tenus d'en accorder à leur débiteur qui a vendu; et l'article 2184 du Code Napoléon lui ordonne de « déclarer aux créanciers qu'il est « prêt à acquitter, sur-le-champ, les dettes et charges hypothécaires, jusqu'à concurrence seulement du prix, sins distinction des dettes exigibles ou non exigibles ». Le dépôt du prix est pour ainsi dire la conséquence de cette exigence de la loi; il est la garantie de l'exécution. S'il n'y avait qu'un créancier, l'acquéreur ne serait-il

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(*) [Cet art. 776 du projet, qu, dans tous les cas d'aliénation forcée ou volontaire, assujettissait l'acquéreur a la consignation de son prix, a été supprimé à la demande de la Commission, et, par suite, aux termes de l'article suivant (777), la consignation est et demeure facultative. V. le Rapport, nos XXXIII et XXXIV.]

pas obligé de payer immédiatement? Si, en quelque nombre qu'ils soiert, les créanciers s'entendaient sur la distribution du prix le lendemain même des notifications, il serait obligé de payer sur-le-champ. Le nombre et les contestations entre les créanciers sont des faits qui doivent lui rester étrangers; et lui accorder soixante jours après l'ouverture de l'ordre, c'est lui donner un temps plus que suffisant car il faut se rappeler que ce moment sera précédé du délai pour faire les notifications, et des quarante jours pour la surenchère, et qu'en fait l'acquéreur aura plus de quatre mois.

Mais enfin, dit-on, le dépôt sera préjudiciable aux créanciers eux-mêmes; la caisse des dépôts et consignations ne donnera pas le même taux d'intérêt que le débiteur du prix.

Cette considération ne regarde que les créanciers personnellement, et l'article du projet leur permet de renoncer à l'obligation du dépôt.

Si l'acquéreur est en même temps créancier devant venir en ordre utile, il sera dispensé de consigner la somme qui doit lui revenir sur le prix, et chaque créancier pourra consentir individuellement que la part pour laquelle il sera colloqué reste dans les mains de cet ac quéreur.

Si l'ordre étant réglé sans contestation, et par le bon accord des créanciers, le nouveau propriétaire ne payait pas, on aurait sous la loi actuelle le droit de faire revendre sur folle enchère. Il doit en être de même, lorsque le dépôt du prix sera exigible par l'expiration des soixante jours; et, si le cas échéait, il donnerait raison à la sage prévoyance de la disposition qui vous est proposée.

XXXV. (Art. 777; id. de la loi.) — Dans la procédure suivie aujourd'hui pour le règlement des ordres, il a été fait souvent usage du moyen mis par la loi à la disposition de l'acquéreur, pour obtenir la libération complète de l'immeuble acheté, avant la clôture de l'ordre : le désir naturel de disposer de sa propriété par revente, donation ou autrement, de l'améliorer, de la partager, d'y construire, ne pouvant être réalisé qu'en obtenant la radiation des charges hypothécaires, l'acquéreur a eu recours aux offres réelles et aux dispendieuses formalités que cette voie entraîne.

Les offres réelles faites au milieu et pendant le cours d'un ordre sont illusoires pour tous les créanciers; aucun d'eux ne peut les accepter, dans les termes où la loi veut qu'on les accepte; une instance en validité est nécessaire, et, si l'acquéreur obtient enfin la liberté de son immeuble, ce n'est qu'au prix de frais énormes qui sont supportés par la somme à distribuer.

Si le projet de loi est adopté, l'accélération de la procédure et le terme plus promptement amené éviteront au nouveau propriétaire le recours au moyen des offres réelles. S'il arrivait cependant que des retards imprévus eussent suggéré au débiteur du prix la pensée de prendre cette voie, nous avons voulu qu'elle fût plus courte et qu'elle menât au but d'une manière moins onéreuse pour les créanciers.

Tel est le résultat qu'on espère atteindre par le nouvel art. 777.

La vente a-t-elle eu lieu sur saisie immobilière? Si l'ordre n'est pas ouvert, l'acquéreur en requiert l'ouverture, consigne le prix, et, par une procédure simple et expéditive, fait prononcer la validité de sa consignation et la radiation des inscriptions; sa déclaration, faite sur le procès-verbal d'ordre, interpelle tous les créanciers et la partie saisie sans notifications individuelles.

Si l'ordre est ouvert, il fait immédiatement la déclaration de sa consignation en y joignant le récépissé de la Caisse des dépôts, et forme en même temps sa demande sur le procès-verbal.

Si l'aliénation n'a pas eu lieu par suite d'expropriation forcée, l'acquéreur, après avoir rempli les formalités de la purge et sommé le vendeur de lui rapporter la mainlevée des inscriptions existantes, consigne son prix; requicrt, trois jours après, l'ouverture de l'ordre; dépose son récépissé, et forme, toujours sur le procèsverbal, sa demande en validité et en radiation.

XXXVI. (Art. 778.) —L'art. 778 règle la procédure en cas de contestation, ainsi que le sort des dépens.

XXXVII. (Art. 779.) —Le législateur de 1807 avait ⚫ublié de s'expliquer sur l'effet que pouvait produire la

revente sur folle enchère intervenant dans le cours de l'ordre et même après le règlement définitif et la délivrance des bordereaux. La différence dans le prix, en plus ou en moins, devrait-elle donner lieu à une nouvelle procédure? Non, sans doute; il suffit que le jugecommissaire modifie l'état de collocation et rende les bordereaux exécutoires contre le nouvel adjudicataire.

Nous vous avons exposé les motifs graves et sérieux qui ont engagé le Gouvernement à vous soumettre les réformes qu'il croit indispensables dans cette partie de notre législation civile. La protection dont la loi veut couvrir les faibles doit y trouver plus d'énergie, le crédit public et particulier plus de confiance, les débiteurs une libération plus prompte, les créanciers une garantie plus sûre de leurs intérêts, et des risques moins grands de perdre ce qu'ils ont attendu longtemps.

Le Gouvernement, en vous présentant ce projet, croit avoir répondu à un vœu depuis longtemps émis par les organes des intérêts généraux et par tous ceux qui, à des titres divers, ont acquis l'expérience des choses judiciaires.

Signé à la minute: E. DE PARIEU, vice-pré-
sident du Conseil d'Etat; SUIN, conseiller
d'Etat, rapporteur;
BARON DE SIBERT

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Les art. 692, 696 et 717 du Code de procédure civile sont modifiés ainsi qu'il suit :

Art. 692. Pareille sommation sera faite dans le même délai de huitaine, outre un jour par cinq myriamètres :

1° Aux créanciers inscrits sur les biens saisis aux domiciles élus dans les inscriptions. Si, parmi les créanciers inscrits, se trouve le vendeur de l'immeuble saisi, la sommation à ce créancier portera qu'à défaut de former sa demande en résolution et de la notifier au greffe avant l'adjudication, il sera définitivement déchu, à l'égard de l'adjudicataire, du droit de la faire prononcer;

20 A la femme du saisi, aux femmes des précédents propriétaires, au subrogé tuteur des mineurs ou interdits, ou aux mineurs devenus majeurs, si, dans l'un et l'autre cas, les mariage et tutelle sont connus du poursuivant d'après son titre. Cette sommation contiendra, en outre, l'avertissement que, pour conserver les hypothèques légales sur l'immeuble exproprié, il sera nécessaire de les faire inscrire avant la transcription du jugement d'adjudication. La sommation devra être remise à la personne de la femme.

Copie en sera notifiée au procureur impérial de l'arrondissement où les biens sont situés, lequel sera tenu de requérir l'inscription des hypothèques appartenant aux femmes, mineurs, interdits, leurs héritiers ou ayant

cause.

Art. 696. Quarante jours au plus tôt et vingt jours au plus tard avant l'adjudication, l'avoué du poursuivant fera insérer, dans un journal publié dans le département où sont situés les biens, un extrait signé de lui et contenant :

1o La date de sa saisie et de sa transcription; 2o Les noms, professions, demeures du saisi, du saisissant et de l'avoué de ce dernier;

3o La désignation des immeubles, telle qu'elle a été insérée dans le procès-verbal;

40 La mise à prix ;

50 L'indication du tribunal où la saisie se poursuit, et des jour, lieu et heure de l'adjudication.

Il sera, en outre, déclaré dans l'extrait que tous ceux du chef desquels il pourrait être pris inscription pour raison d'hypothèques légales, devront requérir cette inscription avant la transcription du jugement d'adjudica

tion.

Toutes les annonces judiciaires relatives à la même saisie seront insérées dans le même journal.

Art. 717. L'adjudication ne transmet à l'adjudicataire d'autres droits à la propriété que ceux appartenant au saisi.

Néanmoins, l'adjudicataire ne pourra être troublé dans sa propriété par aucune demande en résolution fondée sur le défaut de payement du prix des anciennes aliénations, à moins qu'avant l'adjudication la demande n'ait été notifiée au greffe du tribunal où se poursuit la vente.

Si la demande a été notifiée en temps utile, il sera surs's à l'adjudication, et le tribunal, sur la réclamation du poursuivant ou de tout créancier inscrit, fixera le délai dans lequel le vendeur sera tenu de mettre à fin l'instance en résolution.

Le poursuivant pourra intervenir dans cette instance. Ce délai expiré sans que la demande en résolution ait été définitivement jugée, il sera passé outre à l'adjudication, à moins que, pour des causes graves et dûment justifiées, le tribunal n'ait accordé un nouveau délai pour le jugement de l'action en résolution.

Si, faute par le vendeur de se conformer aux prescriptions du tribunal, l'adjudication avait eu lieu avant le jugement de la demande en résolution, l'adjudicataire ne pourrait pas être poursuivi à raison des droits des anciens vendeurs, sauf à ceux-ci à faire valoir, s'il y avait lieu, leurs titres de créances dans l'ordre et distribution du prix de l'adjudication.

Le jugement d'adjudication dûment transcrit purge toutes les hypothèques, et les créanciers n'ont plus d'action que sur le prix. Les créanciers à hypothèques légales, qui n'ont pas fait inscrire leur hypothèque avant la transcription du jugement d'adjudication, peuvent faire valoir leurs droits dans l'ordre, mais seulement tant que l'état de collocation provisoire n'a pas été dressé par le juge. ART. 2.

Les art. 749 à 779 du Code de procédure civile sont remplacés par les dispositions suivantes :

Art. 749. Dans les tribunaux où les besoins du service l'exigent, il est désigné, par décret impérial, un ou plusieurs juges spécialement chargés du règlement des ordres. Ils peuvent être choisis parmi les juges suppléants, et sont désignés pour une année au moins et trois années au plus.

En cas d'absence ou d'empêchement, le président, par ordonnance inscrite sur un registre spécial tenu au greffe, désigne d'autres juges pour les remplacer.

Les juges désignés par décret impérial ou nommés par le président doivent, toutes les fois qu'ils en sont requise rendre compte à leurs tribunaux respectifs ou au procureur général, de l'état des ordres qu'ils sont chargés de régler.

Art. 750. L'adjudicataire, et à son défaut le poursuivant, sont tenus de faire transcrire le jugement d'adjudication dans les quarante-cinq jours de sa date, et, en cas d'appel, dans les quarante-cinq jours de l'arrêt confirmatif.

Dans les quinze jours qui suivent l'expiration de ce délai, les créanciers et la partie saisie sont tenus de se régler entre eux sur la distribution du prix.

Art. 751 (*). Les quinze jours expirés, faute par les créanciers et la partie saisie de s'être réglés entre eux, le saisissant dans la huitaine, et, à son défaut après ce délai, le créancier le plus diligent, la partie saisie ou l'adjudicataire requiert l'ouverture du procès-verbal d'ordre, et, s'il y a lieu, la nomination d'un juge-commissaire.

Cette nomination est faite par le président, à la suite de la réquisition inscrite par le poursuivant sur le registre des adjudications tenu à cet effet au greffe du tribunal.

Art. 752. Le juge-commissaire, dans les trois jours de sa nomination, ou le juge spécial des ordres dans les trois jours de la réquisition, déclare l'ordre ouvert et commet un ou plusieurs huissiers à l'effet de sommer les créanciers de produire. Cette partie du procès-verbal ne peut être expédiée ni signifiée.

Art. 753. Dans les huit jours de l'ouverture du procès-verbal, sommation de produire est faite aux créanciers par acte signifié aux domiciles élus dans leurs inscriptions ou à celui de leurs avoués, s'il y en a de constitués. L'ouverture de l'ordre est en même temps dénoncée à l'adjudicataire.

L'adjudicataire, alors même qu'il ne serait pas le poursuivant, est tenu, dans les huit jours de la dénonciation de l'ouverture de l'ordre, de faire pareille sommation à la femme du saisi, aux femmes des précédents propriétaires, au subrogé tuteur des mineurs et interdits et aux mincurs devenus majeurs. Copie en est notifiée au procureur impérial du tribunal devant lequel l'ordre est poursuivi.

(*) [Remplacé par un article nouveau de la Commission.]

> Dans les huit jours de la sommation pár lui faite aux créanciers inscrits, le poursuivant remet l'état des inscriptions et l'original de la sommation au juge, qui en fait mention sur le procès-verbal.

Art. 754. Dans les trente jours de cette sommation, tout créancier est tenu de produire ses titres avec acte de produit signé de son avoué et contenant demande en collocation. Le juge fait mention de la remise sur le procèsverbal.

Art. 755. L'expiration du délai de trente jours cidessus fixé emporte de plein droit déchéance contre les créanciers non produisants. Le juge la constate immédiatement et d'office sur le procès-verbal et dresse l'état de collocation sur les pièces produites. Cet état est dressé au plus tard dans les trente jours qui suivent l'expiration du délai ci-dessus.

Dans les dix jours de la confection de l'état de collocation, le poursuivant la dénonce, par acte d'avoué à avoué, aux créanciers produisants et à la partie saisie, avec sommation d'en prendre communication et de contredire, s'il y échet, sur le procès-verbal dans le délai de trente jours.

Art. 756. Faute par les créanciers produisants et la partie saisie de prendre communication de l'état de collocation et de contredire dans ledit délai, ils demeurent forclos, sans nouvelle sommation ni jugement; il n'est fait aucun dire s'il n'y a contestation.

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Art. 757 (devenu l'art. 758 de la loi.) (*) —Tout contestant doit motiver son dire et produire toutes pièces à l'appui ; le juge renvoie les contestants à l'audience qu'il désigne et commet en même temps l'avoué chargé de suivre l'audience.

Néanmoins, il arrête l'ordre et ordonne la délivrance des bordereaux de collocation pour les créances antérieures à celles contestées; il peut même arrêter l'ordre pour les créances postérieures, en réservant somme suffisante pour désintéresser les créanciers contestés.

Art. 758 (759 de la loi.)—S'il ne s'élève aucune contestation, le juge est tenu, dans les quinze jours qui suivent l'expiration du délai pour prendre communication et contredire, de faire la clôture de l'ordre: il liquide les frais de radiation et de poursuite d'ordre qui sont colloqués par préférence à toutes autres créances; il liquide en outre les frais de chaque créancier colloqué en rang utile, et ordonne la délivrance des bordereaux de collocation aux créanciers utilement colloqués et la radiation des inscriptions de ceux non utilement colloqués; il est fait distraction, en faveur de l'adjudicataire, sur le montant de chaque bordereau, des frais de radiation de l'inscrip

tion.

Art. 759 (760 de la loi.)- Les créanciers postérieurs en ordre d'hypothèque aux collocations contestées sont tenus, dans la huitaine après les trente jours accordés pour contredire, de s'entendre entre eux sur le choix d'un avoué; sinon, ils sont représentés par l'avoué du dernier créancier colloqué. L'avoué poursuivant ne peut, en cette qualité, être appelé dans la contestation.

Art. 760 (761 de la loi). — L'audience est poursuivie, à la diligence de l'avoué commis, sur un simple acte d'avoué à avoué, sans autre procédure que des conclusions motivées. L'acte contient avenir pour l'audience fixée conformément à l'art. 757. S'il est produit de nouvelles pièces, toute partie contestante ou contestée est tenue de les remettre au greffe trois jours au moins avant cette audience; il en est fait mention sur le procès-verbal. Le tribunal statue sur les pièces produites; néanmoins il peut, mais seulement pour causes graves et dúment justifiées, accorder un délai pour en produire d'autres; le jugement qui prononce la remise fixe le jour de l'audience; il n'est ni levé ni signifié. La disposition du jugement qui accorde ou refuse un délai n'est susceptible d'aucun recours.

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jours de sa date à avoué seulement, et n'est pas susceptible d'opposition. La signification à avoué fait courir le délai d'appel contre toutes les parties à l'égard les unes des autres.

L'appel est interjeté dans les dix jours de la signification du jugement à avoué, outre un jour par cinq myriamètres de distance entre le siége du tribunal et le domicile réel de l'appelant; l'acte d'appel est signifié au domicile de l'avoué, et au domicile réel du saisi s'il n'y a pas d'avoué. Il contient assignation et l'énonciation des griefs, à peine de nullité.

L'appel n'est recevable que si la somme contestée excède celle de quinze cents francs, quel que soit d'ailleurs le montant des créances des contestants et des sommes à distribuer.

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Art. 764 (765 de la loi). Dans les huit jours qui suivent l'expiration du délai d'appel, et en cas d'appel dans les huit jours de la signification de l'arrêt, le juge arrête définitivement l'ordre des créances contestées et des créances postérieures, conformément à l'art. 758.

Les intérêts et arrérages des créanciers utilement colloqués cessent.

Art. 765 (766 de la loi). Les dépens des contestations ne peuvent être pris sur les deniers provenant de l'adjudication.

Toutefois, le créancier dont la collocation rejetée d'office, malgré une production suffisante, a été admise par le tribunal sans être contestée par aucun créancier, peut employer ses dépens sur le prix au rang de sa créance.

Les frais de l'avoué qui a représenté les créanciers postérieurs en ordre d'hypothèque aux collocations contestées, peuvent être prélevés sur ce qui reste de deniers à distribuer, déduction faite de ceux qui ont été employés à payer les créanciers antérieurs. Le jugement qui autorise l'emploi des frais prononce la subrogation au profit du créancier sur lequel les fonds manquent, ou de la partie saisie. L'exécutoire énoncera cette disposition et indiquera la partie qui doit en profiter.

Le contestant ou le contesté, qui a mis de la négligence dans la production des pièces, peut être condamné aux dépens, même en obtenant gain de cause.

Lorsqu'un créancier condamné aux dépens des contestations a été colloqué en rang utile, les frais mis à sa charge sont, par une disposition spéciale du règlement d'ordre, prélevés sur le montant de sa collocation au profit de la partie qui a obtenu sa condamnation.

Art. 766 (767 de la loi). En cas d'opposition par un créancier, par l'adjudicataire ou la partie saisie, à l'ordonnance de clôture, cette opposition est formée, à peine de nullité, dans la huitaine de cette ordonnance, et portée dans la huitaine suivante à l'audience du tribunal, même en vacation, par un simple acte d'avoué contenant moyens et conclusions; et, à l'égard de la partie saisie, n'ayant pas d'avoué en cause, par exploit d'ajournement à huit jours. La cause est instruite et jugée conformément aux art. 760, 762 et 763, même en ce qui concerne l'appel du jugement.

Art. 767 (768 de la loi). Le créancier sur lequel les fonds manquent et la partie saisie ont leur recours contre ceux qui ont succombé, pour les intérêts et arrérages qui ont couru pendant les contestations.

Art. 768 (769 de la loi). Dans les dix jours, à partir de celui où l'ordonnance de clôture ne peut plus être attaquée, le greffier délivre un extrait de l'ordonnance du juge pour être déposé par l'avoué poursuivant au bureau des hypothèques. Le conservateur, sur la présentation de cet éxtrait, fait la radiation des inscriptions des créanciers non colloqués.

Art. 769 (770 de la loi). — Dans le même délai, le greffier délivre à chaque créancier colloqué un bordereau de collocation exécutoire contre l'adjudicataire.

Le bordereau des frais de l'avoué poursuivant ne

peut être délivré que sur la remise des certificats de radiation des inscriptions des créanciers non colloqués. Ces certificats demeurent annexés au procès-verbal. Art. 770 (771 de la loi). Le créancier colloqué, en donnant quittance du montant de sa collocation, consent la radiation de son inscription. Au fur et à mesure du payement des collocations, le conservateur des hypothèques, sur la représentation du bordereau et de la quittance du créancier, décharge d'office l'inscription jusqu'à concurrence de la somme acquittée.

L'inscription d'office est rayée définitivement sur la justification faite par l'adjudicataire du payement de la totalité de son prix, soit aux créanciers colloqués, soit à la partie saisie.

Art. 771 (772 de la loi). - Lorsque l'aliénation n'a pas lieu sur expropriation forcée, l'ordre est provoqué par le créancier le plus diligent ou par l'acquéreur.

Il peut être aussi provoqué par le vendeur, mais seulement lorsque le prix est exigible aux termes du contrat. Dans tous les cas, l'ordre n'est ouvert qu'après l'accomplissement des formalités prescrites pour la purge des hypothèques.

Il est introduit et réglé dans les formes établies par le présent titre.

Art. 772 (773 de la loi). En cas d'aliénation autre que celle sur expropriation forcée, l'ordre ne peut être provoqué, s'il y a moins de quatre créanciers inscrits. Dans ce cas, la distribution du prix est réglée par le tribunal, jugeant comme en matière sommaire, sur assignation signifiée à personne ou domicile, à la requête de la partie la plus diligente, sans autre procédure que des conclusions motivées. Le jugement est signifié à avoué seulement, s'il y a avoué constitué.

En cas d'appel, il est procédé comme aux art. 762 et 763.

Art. 773 (774 de la loi). L'acquéreur est employé par préférence pour le coût de l'extrait des inscriptions et des dénonciations aux créanciers inscrits.

Art. 774 (775 de la loi). - Tout créancier peut prendre inscription pour conserver les droits de son débiteur; mais le montant de la collocation du débiteur est distribué, comme chose mobilière, entre tous les créanciers inscrits ou opposants avant la clôture de l'ordre. Art. 775 (776 de la loi). En cas d'inobservation des formalités et délais prescrits par les art. 753, 755, § 2, et 768, l'avoué poursuivant est déchu de la poursuite, sans sommation ni jugement. Le juge pourvoit à son remplacement d'office ou sur la réquisition d'une partie, par ordonnance inscrite sur le procès-verbal ; cette ordonnance n'est susceptible d'aucun recours.

Il en est de même à l'égard de l'avoué commis qui n'a pas rempli les obligations à lui imposées par les

art. 757 et 760.

L'avoué déchu de la poursuite est tenu de remettre immédiatement les pièces sur le récépissé de l'avoué qui le remplace, et n'est payé de ses frais qu'après la clôture de l'ordre.

Art. 776 (Supprimé). Quel que soit le mode d'aliénation, l'acquéreur ou adjudicataire est tenu de déposer son prix en principal et intérêts à la caisse des consignations, dans les soixante jours de l'ouverture de l'ordre, sauf les conventions qui interviennent entre les intéressés après la vente ou adjudication.

Il peut être dispensé de consigner: 1o la somme qui lui revient comme créancier en ordre utile; 2o celle que tout autre créancier, également en ordre utile, consent à laisser entre ses mains; dans ces cas, le juge détermine la somme que l'acquéreur ou adjudicataire est autorisé à retenir provisoirement; s'il y a contestation, il est statué par le tribunal, sans retard des opérations de l'ordre.

Lorsqu'il est établi par le règlement de l'ordre que l'acquéreur ou l'adjudicataire a été autorisé à retenir une somme trop forte, l'état définitif est déclaré exécutoire contre lui jusqu'à concurrence du capital et des intérêts à rapporter.

Si, à l'expiration du délai de soixante jours ci-dessus fixé, l'acquéreur ou adjudicataire n'a pas consigné le prix ou la partie du prix à laquelle est réduite la consignation, la revente sur folle enchère peut être poursuivie par tout créancier, le vendeur ou le saisi, sur le vu d'un certificat constatant le défaut de consignation.

Art. 777 (du projet et de la loi). — L'adjudicataire sur expropriation forcée, qui veut faire prononcer la radiation des inscriptions avant la clôture de l'ordre, doit

consigner son prix et les intérêts échus, sans offres réelles préalables.

Si l'ordre n'est pas ouvert, il doit en requérir l'ouverture après l'expiration du délai fixé par l'art. 751. Il dépose à l'appui de sa réquisition le récépissé de la caisse des consignations, et déclare qu'il entend faire prononcer la validité de la consignation et la radiation des inscriptions.

Dans les huit jours qui suivent l'expiration du délai pour produire fixé par l'art. 754, il fait sommation par acte d'avoué à avoué, et par exploit à la partie saisie, si elle n'a pas avoué constitué, de prendre communication de sa déclaration, et de la contester dans les quinze jours, s'il y a lieu. A défaut de contestation dans ce délai, le juge, par ordonnance, sur le procès-verbal, déclare la consignation valable et prononce la radiation de toutes les inscriptions existantes, avec maintien de leur effet sur le prix. En cas de contestation, il est statué par le tribunal sans retard des opérations de l'ordre.

Si l'ordre est ouvert, l'adjudicataire, après la consignation, fait sa déclaration sur le procès-verbal par un dire signé de son avoué, en y joignant le récépissé de la caisse des consignations. Il est procédé comme il est dit ci-dessus, après l'échéance du délai des productions. En cas d'aliénation autre que celle sur expropriation forcée, l'acquéreur qui, après avoir rempli les formalités de la purge, veut obtenir la libération définitive de tous priviléges et hypothèques par la voie de la consignation, opère cette consignation sans offres réelles préalables. A cet effet, il somme le vendeur de lui rapporter dans la quinzaine mainlevée des inscriptions existantes, et lui fait connaître le montant des sommes en capital et intérêts qu'il se propose de consigner. Ce délai expiré, la consignation est réalisée, et, dans les trois jours suivants, l'acquéreur ou adjudicataire requiert l'ouverture de l'ordre, en déposant le récépissé de la caisse des consignations. Il est procédé sur sa réquisition conformément aux dispositions ci-dessus.

Art. 778. Toute contestation relative à la consignation du prix est formée sur le procès-verbal par un dire motivé, à peine de nullité; le juge renvoie les contestants devant le tribunal.

L'audience est poursuivie sur un simple acte d'avoué à avoué, sans autre procédure que des conclusions motivées; il est procédé ainsi qu'il est dit aux art. 60, 762 et 163.

Le prélèvement des frais sur le prix peut être prononcé en faveur de l'adjudicataire ou acquéreur.

Art. 779. L'adjudication sur folle-enchère intervenant dans le cours de l'ordre, et même après le règlement définitif et la délivrance des bordereaux, ne donne pas lieu à une nouvelle procédure. Le juge modifie l'état de collocation suivant les résultats de l'adjudication, et rend les bordereaux exécutoires contre le nouvel adjudicataire.

Ce projet de loi a été délibéré et adopté par le Conseil d'Etat, dans ses séances des 25 février, 18, 19 et 26 mars, 26 novembre, 9 et 16 décembre 1857. Le président du Conseil d'Etat, Signé : J. BAROCHE, etc. RAPPORT

Fait au nom de la Commission chargée (*) d'examiner le projet de loi portant modification des articles 692,696, 717, 749 à 779 du Code de procédure civile, par M. Ricué, député au Corps législatif.

MESSIEURS,

1. (Considérations générales.) Le projet de loi qui vous est soumis a été accueilli, dans vos bureaux et par votre Commission, avec un sentiment de satisfaction et de gratitude, non-seulement comme progrès, mais comme promesse on y a vu le signal de réformes plus étendues dans la procédure civile.

Attentif au mouvement des esprits et à l'état actuel de

(*) Cette commission est composée de MM. GuyardDelalain, président; Tesnière, secrétaire; Du Miral, Josseau, Riché, Nogent Saint-Laurens, Corta.

Les conseillers d'Etat, commissaires du Gouvernement, chargés de soutenir la discussion du projet de loi, sont: MM. de Parieu, vice-président du Conseil d'Etat Suin, le baron Sibert de Cornillon et Duvergier..

la société, heureux de doter successivement le pays de toutes les améliorations qu'un pouvoir stable peut soul donner, mais qu'il doit donner dans l'intérêt de sa force morale, le Gouvernement ne pouvait rester indifférent au désaccord que chaque jour révèle de plus en plus entre nos mœurs nouvelles et de nombreuses dispositions de notre Code de procédure.

Nous ne voulons contester ni le mérite relatif de co Code ni ce qu'ont de savant et d'ingénieux au point de vue théorique la plupart de ses formes, dont l'intention est de protéger des droits. Ce Code est un notable bienfait, si on le compare au chaos de l'ancien régime ou à la simplicité chimérique des improvisations judiciaires de la Convention. Mais, préparé surtout par un commentateur optimiste des anciens usages du Châtelet de Paris, très rapidement examiné au Conseil d'Etat et au Tribunat, voté sans discussion par le Corps législatif, passif auditeur de harangues d'apparat, élaboré loin des yeux du grand homme, dont le bon sens, illustré par le génie, avait jeté de si vives lueurs dans les débats préliminaires du Code Napoléon, le Code de procédure civile ne fut pas, dès son apparition, populaire parmi les justiciables; et, depuis, les modifications qu'a subies la société et la division indéfinie de la propriété ont encore augmenté la distance entre le Code de 1806 et les besoins de notre époque.

Beaucoup de ces anciennes lois et traditions sont faites, s'écrie le public moderne, pour une société aristocratique, formaliste, patiente, ignorante ou dédaigneuse des intérêts de la petite propriété. Un procès, avant 1789, était souvent pour un homme le compagnon d'une partie de sa vie on passait des années dans la ville parle mentaire, sollicitant ses juges, son rapporteur et leurs secrétaires; un procès était une espèce d'habitude: il n'est plus qu'un accident importun. L'ère des chemins de fer veut plus de rapidité en toutes choses que l'époque du coche; la justice criminelle et la justice commerciale sont simples et promptes; les lenteurs et les formalités en matière civile impatientent la génération actuelle (*)!

En tenant compte de ces aspirations des masses, le législateur ne doit pas cependant suivre les hommes étrangers aux affaires jusqu'aux vœux excessifs de leur inexpérience. Les nécessités absolues d'une bonne justice ne peuvent être sacrifiées au désir d'abréger; au milieu des rapports compliqués dont la société se compose, une simplicité primitive n'est qu'un rêve: nous ne devons pas, novateurs rétrogrades, supprimer celles des formes qui représentent des garanties indispensables, et les plaideurs du XIXe siècle ne peuvent être ramenés au chêne de Vincennes.

D'ailleurs, l'existence même des formes inévitables, la passion ou l'inexpérience des parties, la nécessité de tenir la balance égale entre le plaideur riche et instruit et son adversaire ignorant et pauvre, exigent le concours dans la procédure civile d'officiers ministériels représentant les intéressés. Quand même ces officiers n'auraient pas acheté leurs titres sous l'égide de la loi, et acquis ainsi une situation qui, quelle que soit sa définition légale, ne pourrait être gravement altérée sans indemnité, il faudrait encore que leur intervention fût convenablement rémunérée, car, après tout, leur moralité et leur intelligence sont encore, pour les justiciables, la meilleure des économies. Une réforme judicieuse et équitable peut, sans changer sensiblement les conditions de leur existence actuelle, proportionner la rétribution de ces officiers à l'importance de la cause, plutôt que de l'attacher au mécanisme de la procédure; accorder une prime au succès, qui suppose à la fois le discernement dans le choix et l'intelligence dans la direction de l'affaire. Une réforme ainsi faite rehausserait encore la dignité de ces intermédiaires, et laisserait à leur travail, à leur habileté, à leur responsabilité, la juste rémunération sans laquelle le public se trouverait à la merci de capacités au rabais.

D'ailleurs, c'est moins dans les perceptions des officiers ministériels que dans la mauvaise assiette de certaines taxes fiscales, que gît l'abus qui rend si souvent la justice trop dispendieuse.

(*) Parmi les plus éloquentes expressions des vœux de la magistrature à cet égard, citons le discours du procureur général de Lyon à la rentrée de 1856. L'Académie des sciences morales et politiques a couronné des mémoires en faveur de réformes très radicales.

Quoique les institutions judiciaires ne profitent pas seulement au plaideur, puisque leur seule existence prévient souvent la violence ou la fraude, nous admettons qu'un impôt particulier soit, pour ceux qui comparaissent devant les tribunaux, le prix de la protection qu'ils invoquent; mais il faut que l'impôt soit ménagé de manière à ne pas rendre cette protection inaccessible ou dévorante pour les intérêts des petits propriétaires, des pupilles, de ceux qui ont le plus de titres à la sollicitude publique! Il faut aussi que l'impôt ne contrarie pas la bonne administration de la justice, en rendant trop dispendieux les moyens qu'elle a de s'éclairer. Ainsi, les droits d'enregistrement et de timbre étant admis, il semble désirable que l'état des finances permette bientôt d'exonérer les ventes sur expropriations forcées, triste liquidation du gage des créanciers, et les ventes de biens de mineurs, des droits fiscaux proportionnels de greffe, superposés en 1808 aux droits proportionnels d'enregistrement; d'affranchir les bordereaux de collocation dans les ordres d'un autre droit fiscal proportionnel de greffe; de décharger les expéditions d'expertises et d'enquêtes des droits bursaux de greffe, qui, rendant ces mesures d'instruction plus chères, contribuent souvent à faire repousser par le juge le moyen de vérifier les faits

D'impôts raisonnables dans leurs principes, certaines applications paralysent souvent, au détriment de la petite propriété, les dispositions les plus sages de nos codes. Ainsi, le Code Napoléon est favorable à l'acquéreur qui veut, par la purge, affranchir l'immeuble des hypothèques qui le grèvent, en payant le prix d'achat aux créanciers ou en les appelant à faire revendre l'immeuble si le prix leur paralt insuffisant. Eh bien, les héritages ruraux sont souvent vendus en détail; chaque acquéreur veut purger, et il y a plusieurs hypothèques inscrites sur chaque partie : l'enregistrement perçoit sur les notifications même collectives de purge autant de droits qu'il y a d'acquéreurs et de créanciers: dix acquéreurs de petits lots notifiant à dix créanciers, il est perçu cont droits de 2 francs, plus le décime.

Sans doute, la loi sur l'assistance judiciaire est un grand bienfait; mais elle n'embrasse que les indigents, et ainsi ne s'applique guère qu'aux demandos d'aliments et aux séparations entre époux. Mais, pour ceux qui ne sont ni indigents ni riches, c'est-à-dire pour la grande majorité des Français, l'accès de la justice devrait être aplani dans des cas bien fréquents.

Que, par exemple, un procès s'élève sur la propriété d'un champ valant seulement 60 francs de revenu : la procédure sera sommaire et le jugement en dernier ressort. Mais, cas plus habituel, qu'il ne s'agisse que d'une servitude sur ce même fonds, ou d'une haie intermédiaire, le procès sera susceptible d'appel, et ordinaire, c'est-à dire surchargé, en première instance et même à la Cour, d'écritures, première plaidoirie obscure et stérile, dont les avoués signifient des copies en très fins caractères, en gardant pour eux l'original grossoyé.

Heureux le perdant, quand le tribunal n'a pas été obligé d'ordonner une expertise, conflée à trois experts si l'un des plaideurs n'a pas consenti à se contenter d'un seul expert, qu'il n'est pas permis d'entendre à l'audience dans la cause la plus simple, et qui déposent au greffe un rapport que l'on grossoie et que l'on signifie après avoir déjà grossoyé et signifié le simple jugement d'instruction qui ordonnait l'expertise.

Mais c'est surtout en ce qui concerne les ventes judiciaires, ventes de biens de mineurs, licitations, partages, que la petite propriété est hors la loi, ou victime de la loi. Et la petite propriété, qu'est-ce en France? Sur douze millions de cotes foncières, plus de cinq millions sont au-dessous de cinq francs, plus de huit millions audessous de vingt francs. « Le coût moyen de chaque vente judiciaire, dit M. le garde des sceaux dans son compte rendu de la justice civile de 1850, est d'environ 6 pour 100 du produit de la vente. Mais quand on dis tingue les ventes selon l'importance des immeubles, on constate une inégalité choquante dans le coût de ces procédures. Les frais de la procédure commune, qui doit précéder toutes les ventes, ne peuvent être évalués à moins de 300 francs; et beaucoup d'immeubles, vendus par autorité de justice, ne valent pas davantage. Or, comme les frais sont payés par les adjudicataires en sus du prix, il en résulte que ces immeubles sont adjugés à une somme trop faible, au grand préjudice des intéressés. Pour les ventes d'immeubles de 2,000 francs à 5,000, les frais sont de 15 à 16 pour 100, de 10 à 14 pour

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