que consent le créancier. La généralité de ses termes montre suffisamment que sa décision est applicable à tous les cas de subrogation. La caution est donc dans notre droit, comme autrefois dans la jurisprudence du parlement de Paris, forcée de subir la subrogation accordée par le débiteur, quoiqu'elle y soit restée étrangère, s'y fût-elle même opposée. Mais cela n'est rigoureument vrai que pour le cas où le terme de la dette nouvelle ne dépasse pas ce qui reste à courir du terme de la dette acquittée. Dans le cas contraire, le tiers qui prête ses fonds sous la condition d'être subrogé à l'ancien créancier, agira prudemment, en exigeant l'accession de la caution; autrement celle-ci pourrait, à l'échéance du terme de l'ancienne dette, ou même immédiatement, si la dette a été payée à échéance, se soustraire aux conséquences de la subrogation, en exigeant du débiteur qu'il lui procurât la décharge au moyen d'un payement immédiat que le nouveau créancier serait obligé de recevoir, s'il ne préférait vo lontairement renoncer à son action contre elle (Arg. de l'article 2039). Si la subrogation consentie par le débiteur a effet contre sa caution, à plus forte raison celle que consent la caution doit-elle avoir effet contre lui; il n'est pas douteux même qu'elle ne puisse être opposée aux autres cautions, mais on peut se demander pour combien elle pourra l'être? Sera-ce pour le tout, ou seulement pour leur part et portion virile? Si la caution qui a subrogé ́eût payé de ses propres deniers, elle eût été légalement subrogée contre ses cofidejusseurs, mais fractionnairement et sa part déduite (articles 2029 et 2030). Or, dira-t-on, elle n'a pas pu transporter à un tiers plus de droits qu'elle n'en aurait eu ellemême si elle eût payé avec son propre argent. Le nouveau créancier ne peut donc agir contre chacune des cautions qui n'ont pas donné leur consentement à la subrogation que jusqu'à concurrence de sa part et portion. Cet argument, quoique décisif en apparence, n'est pas concluant, car la caution, en consentant la subrogation à celui qui lui prête ses fonds pour acquitter la dette, ne lui cède pas les droits qu'elle aurait si le payement se faisait avec son propre argent; elle le met au lieu et place de l'ancien créancier. Si le débiteur eût payé lui-même de ses propres deniers, il n'eût eu aucun recours contre ses fidéjusseurs, et cependant s'il subroge l'étranger qui lui prête les fonds nécessaires à sa libération, le subrogé n'acquiert-il pas le droit qu'avait l'ancien créancier d'agir pour le tout contre chacun d'eux? Pourquoi donc en serait-il autrement, quand c'est la caution qui subroge? les deux cas sont absolument semblables. Mais il est bien entendu que les juges devront annuler cette subrogation et rétablir les choses dans l'état où elles devraient l'être, s'ils reconnaissent en fait que l'emprunt est simulé et que le tiers subrogé n'est qu'un prête-nom dont se sert la caution. pour acquérir une action insolidum que la loi lui refuse. La subrogation conserve donc l'ancienne créance avec ses qualités et ses accessoires contre le débiteur, ses créanciers et ses cautions, mais la conserve-t-elle également contre les tiers acquéreurs d'immeubles hypothéqués à la dette? Faut-il en ce qui touche l'hypothèque ou le privilége, restreindre l'effet de la subrogation aux immeubles qui sont dans les mains du débiteur ou de ses cautions au moment du payement, ou l'étendre même à ceux qui sont possédés par des tiers non obligés personnellement? Nous étudierons cette question dans trois espèces différentes; nous supposerons : 1° la subrogation consentie par le créancier, 2o la subrogation consentie par le débiteur, 3° la subrogation légale. Premier cas. Subrogation volontairement consentie par le créancier au profit d'un tiers qui, quoique étranger à la dette, offre de la payer (V. art. 1250, 1°). On peut dire avec raison que les accessoires d'une créance font partie d'elle-même, car plus elle présente de garanties, plus sa valeur commerciale est grande. Ce serait par conséquent enlever au créancier une portion très-notable de son droit que de lui refuser la faculté d'en disposer d'une manière complète, absolue. Aussi a-t-on toujous tenu pour certain que le cessionnaire d'une créance hypothécaire reçoit l'hypothèque dans toute son étendue, c'est-à-dire, tant le droit de suite que le droit de préférence. Or, en droit romain et dans notre ancienne jurisprudence, le payement effctué par un tiers étranger à la dette, mais avec clause de subrogation, ne se distingue pas de la vente que le créancier fait de son droit au profit d'un tiers qui lui en paye le prix. C'est, dit Renusson, un véritable négoce entre le tiers qui a payé, et le créancier qui a reçu son dû. On ne peut lui attribuer d'autre effet que celui du transport-cession (V. Renusson, chap. X n° 20, 21 et 22; chap. XIII, no 30 et 31). Dans ce système, l'hypothèque, avec tous les avantages qu'elle comporte, passe nécessairement au subrogé qui peut par conséquent l'opposer, soit aux autres créanciers du débiteur, soit aux tiers détenteurs. Pothier n'admet pas, comme Renusson, que le payement avec clause de subrogation au profit du tiers qui l'effectue volontairement soit un véritable négoce, un traasport ordinaire de la créance. Selon lui, la clause subrogatoire n'empêche pas que le payement ne soit réellement extinctif de la dette; ce n'est que pour assurer le recours du subrogé, et dans la limite de ce recours qu'il fait, au moyen d'une cession supposée, subsister l'ancienne créance avec tous les droits qui en dépendent. Mais cette cession fictive comme la cession réelle, constitue le subrogé procurator in rem suam de l'ancien créancier, ce qui lui permet de faire valoir l'hypothèque contre tous ceux auxquels le subrogeant aurait pu lui-même l'opposer (V. Oblig., no 522). Ainsi en droit romain, dans notre ancienne jurisprudence et même au temps de Pothier, le subrogé, lorsque la subrogation émane du créancier, acquiert l'hypothèque dans toute son étendue, l'hypothèque opposable aux tiers détenteurs comme aux autres créanciers du debiteur; c'est un point qui n'a jamais été contesté. En est-il différemment sous l'empire du Code? Faut-il dire avec quelques jurisconsultes que l'hypothèque dont sont grevés les immeubles possédés par des tiers étrangers à la dette est éteinte par le payement, nonobstant la clause de subrogation? nous ne le pensons pas. Un législateur n'abroge pas sans de puissants motifs une pratique depuis longtemps suivie, consacrée par les lois de tous les temps et soutenue par les jurisconsultes les plus éminents. Or, nous allons montrer que le système qui main tient au profit du subrogé l'hypothèque contre les tiers détenteurs, est sous tous les rapports préférable au système opposé. Il est, 10 plus utile : en effet, d'une part, en maintenant le droit de suite au profit du subrogé, on procure au créancier une chance de plus de trouver des tiers qui consentent à le payer; c'est d'autre part venir au secours du débiteur et du tiers détenteur lui-même; car dans bien des cas, ce sera en considération de la garantie attachée au droit de suite, qu'une personne, peutêtre très-favorable au débiteur, se détermineraà écarter, en le désintéressant, un créancier impatient d'être payé, et par conséquent, disposé à exercer son droit dans toute sa rigueur. Dans tous les cas, on ne nuit à personne, puisque chacun conserve la position qu'il avait au moment du payement. Ainsi, en déclarant éteinte l'hypothèque dont sont grevés les immeubles possédés par des tiers au moment où la dette est acquittée, on nuit au créancier dont on diminue les garanties, au débiteur et au tiers détenteur auxquels on enlève l'espoir de voir un tiers bien disposé pour eux venir à leur secours. 2o Il est plus conforme à l'esprit général du Code sur les subrogations: car si la loi a trouvé utile de conserver au profit du subrogé le droit qu'avait l'ancien créancier de se faire payer par la caution (art. 1252), l'hypothèque contre les créanciers chirographaires du débiteur, et même contre les créanciers hypothécaires inscrits dans un rang inférieur au subrogeant, la même raison d'utilité exige nécessairement que l'hypothèque soit également conservée contre les tiers détenteurs. Il est, en effet, impossible de trouver quelque motif particulier de favoriser les uns plus que les autres, et même si, à toute force, quelqu'un mérite la faveur de la loi, n'est-ce pas plutôt la caution que le tiers détenteur? Par son intervention, la caution facilite souvent d'utiles opérations qui sans elle seraient peut-être impossibles; en aidant à ses risques et périls le crédit particulier, elle favorise également le crédit public; toute bonne loi lui doit protection. Aussi trouvons-nous dans notre Code plusieurs dispositions de faveur établies à son profit par exception au droit commun (V. art. 1153 et 2028 combinés; l'art. 2038). On concevrait done, à la rigueur, qu'on l'eut aussi par exception affranchie des conséquences ordinaires de la subrogation, d'autant plus qu'elle peut dire avec quelque raison en consentant à joindre mon obligation à celle du débiteur, je n'ai pas seulement considéré sa personne, j'ai aussi considéré celle du créancier avec lequel j'allais me mettre en rapport. Or, si la subrogation a effet contre moi, vous me mettez en relation avec un tiers que je ne connais pas, avec lequel je n'aurais jamais consenti à contracter. Ajoutons encore qu'en obtenant la libération, elle ne réalise aucun bénéfice, elle évite seulement de perdre. Le tiers détenteur, au contraire, ne peut invoquer aucun de ces motifs pour se prétendre libéré; il ne rend service à personne; peut-être même, car il est possible qu'il soit acquéreur à titre gratuit, combat-il pour faire un gain, bénéfice injuste, puisqu'il serait acquis aux dépens du subrogé, créancier à titre onéreux. Enfin ce n'est jamais en considération de la personne du créancier originaire qu'il s'est déterminé à se porter acquéreur de l'immeuble hypothéqué, ce qui lui enlève tout intérêt à se trouver en relation avec telle personne plutôt qu'avec telle autre. Dès lors, on comprend quelle énorme inconséquence il y aurait à déclarer le tiers détenteur affranchi des conséquences de la subrogation, tandis qu'on lui fait produire tout son effet contre la caution! 3° Il est plus conforme à l'intention présumée des parties: car stipuler qu'on sera subrogé au lieu et place de l'ancien créancier qu'on désintéresse, c'est évidemment vouloir acquérir pour la sûreté de son recours, le plus de garanties possible, toutes celles qu'avait l'ancien créancier, et par conséquent tant l'hypothèque sur les biens possédés par des tiers, que celle dont sont grevés les biens restés en la possession du débiteur. Cette intention n'est surtout pas douteuse, lorsque la sûreté de l'ancien créancier consistait uniquement, au moment du payement, en une hypothèque sur un immeuble possédé par un tiers acquéreur. Mais ce n'est pas assez d'avoir montré l'inconséquence et l'injustice de la doctrine restrictive que nous combattons; nous devons encore établir qu'il n'existe, dans les travaux préparatoires du Code, aucun passage, dans la loi, aucun texte sérieux qui la puisse justifier. J'ai dit déjà qu'on ne trouve dans les procès-verbeaux des discussions du conseil d'État, rien qui se rapporte à la |