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espérances? le feu a-t-il endommagé votre maison ? II faut que vous puissiez faire modérer vos charges en proportion de vos pertes. Une communauté même at-elle essuyé ces dommages? des commissaires du district viendront sur les lieux vérifier les faits.

Si c'est un district qui ait, sur la majeure partie de son territoire, souffert ces accidens, le département fera vérifier.

Un fonds a été destiné aux réductions, modérations et secours. La legislature en allouera une portion à chaque département; mais c'est le conseil entier du département qui le répartira entre les différens districts. Le directoire ne fera que dresser l'état des pertes de chacun. Le conseil est plus nombreux ; il doit mieux connoître la rêalité des besoins. N'exerçant qu'une autorité consultative et momentanée, il est moins suspect de préventions et de partialité.

Il existe encore un fonds de non valeurs destiné à des secours extraordinaires. C'est l'assemblée nationale qui en disposera, et qui en distribuera les sommes, suivant les besoins de chaque département.

Lorsqu'une partie seulement des contribuables d'une communauté aura essuyé des dommages, le directoire du district fera la répartition, sur l'avis de la municipalité.

C'est dans tous ces détails qu'il est consolant de comparer le nouveau régime à l'ancien. Il y avoit aussi un fonds destiné à soulager le contribuable. Mais d'abord ce fonds qui, pour la France entière, est aujourd'hui de onze millions, n'étoit alors que de quatre. Et comment étoit-il distribué? par qui? et à qui? Chaque intendant partageoit cette somme entre ses favoris ; les parlemens en tiroient leur part. Si l'importunité arrachoit un foible secours, c'étoit tout au plus celle de la pauvre noblesse, pour laquelle toutes les mains réservoient alors leurs bienfaits, et tous les cœurs leur commisération. Au premier moment où les assemblées provinciales s'établirent, on demanda compte aux in. tendans de l'emploi de ces sommes, accordées en remises aux contribuables. La plupart n'en purent donner aucun. Des iniquités horribles se découvrirent; le

monde en causa; quelques-uns eurent peur : mais le moment du scandale passé, les déprédateurs reparurent, en il en est plus d'un qui jouit encore de sa proie.

Sur les clauses contraires à la liberté et aux bonnes mœurs dans les testamens.

Décret rendu le 5 septembre.

Nous n'avons pu instruire nos lecteurs de cette loi, au moment où elle a été rendue. Il vaut mieux retourner en arrière, que de leur laisser ignorer une réforme sage et salutaire.

Les lois sur les successions sont une des branches principales du code civil. La propriété sur laquelle repose le bonheur social, n'existeroit point, si les biens que le propriétaire laisse en mourant ne pouvoient se transmettre à ceux que la nature ou sa volonté appelle à les recueillir. L'égalité plus ou moins grande des fortunes dépend en grande partie de l'égalité du partage des biens dans les familles. Les législateurs qui avoient créé des citoyens égaux, devoient sans doute abolir l'inégalité révoltante de la primogéniture, ou du droit d'aînesse; ce reste impur des lois féoda» les, qui, dans les enfans d'un même père, créoient, " quelquefois en dépit de lui-même, un riche et des " pauvres; un protecteur hautain et d'obscurs su"bordonnés; lois corruptrices qui semoient les haînes " là où la nature avoit produit la sainte fraternité ».

Mais l'inégalité des partages peut naître d'une autre source que celle des mauvaises lois. Trop souvent les passions, les préférences, et les ressentimens injustes des pères ruinent arbitrairement les uns, pour enrichir les autres. Le droit de tester, s'il est sans limites, est aussi contraire aux droits du plus grand nombre des citoyens, qu'à l'intérêt de la nation entière. La prépondérance des noms, le faste des titres, les prétentions arrogantes d'une noblesse chimérique renaîtroient bientôt, ou plutôt ne périroient point, si la loi per, mettoit ces abus testamentaires qui les favorisent, en

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conservant à perpétuité tous les biens d'une race dans les mains des premiers nés. Il n'y a plus d'aînés, plus " de privilégiés dans la grande famille nationale. II " n'en faut plus dans les petites familles qui la com"posent". Ainsi s'exprimoit Mirabeau dans un discours lu, deux heures après sa mort, à la tribune de l'assemblée nationale. Elle ne voulut point alors décider cette question. La législature actuelle ache vera son ouvrage, et conciliera l'ordre des successions avec les principes constitutionnels.

Mais parmi les vices du despotisme illimité des testateurs, il en est de si odieux, de si contagieux, que l'espérance même d'une réforme prochaine ne suffit point à les rendre tolérables. On peut, en attendant la maison nouvelle qu'on veut bâtir, habiter une masure, au risque de quelques intempéries; mais au moins fautil la purger d'un amas de fange d'où s'exhalent des vapeurs meurtrières. Laissons donc quelque temps. encore les pères disposer de leurs biens, et dépouiller capricieusement un fils altier et fougueux, au profit d'un frère adulateur et hypocrite. Mais comment supporter qu'un acte protégé par la loi impose aux citoyens des conditions anti-patriotiques ou immorales?

Voyez ce père poursuivi jusqu'au lit de mort par des passions intolérantes. Est-il fanatique? il défend à son fils d'épouser une protestante. Est-il aristocrate? il lui défend de se marier avec une bourgeoise. Etoit-il noble ? il lui défend de faire le commerce. Il fait pis: il le déshérite, il autorise un étranger à le dépouiller, s'il montre une ame citoyenne, s'il remplit des fonctions publiques. Du fond de son tombeau, ce père dénaturé enchaîne sa liberté, son patriotisme, ses penchans et sa conscience. Meurs de faim, lui dit-il, ou renonce au bonheur, et même à l'honneur..... Horrible abus de la puissance paternelle! Plusieurs coutumes, et les lois romaines sur-tout, l'avoient légitimé. L'assemblée nationale a décrété, que des clauses si funestes, soit impératives, soit prohibitives, seroient à l'avenir réputées non écrites, et nulles devant la société. Il est temps que la loi cesse de s'insulter elle

même en consacrant des dispositions contradictoires, en protégeant indifféremment la liberté ou la tyrannie.

ÉVÉNEMEN S.

BUCHAREST. La Valachie, dont cette ville est la capitale, avoit été conquise par les Russes dans cette dernière guerre. Par l'événement de la paix, elle rentre sous la domination des Turcs ; les Boyards et le peuple, tous les habitans sont consternés. Le carnage, les incendies, le pillage, tous les désordres qui suivent une armée victorieuse, leur sembloient préférables à la honte d'être gouvernés par une nation stupide et féroce.

La Servie, autre province turque, éprouve le même sort, elle déteste également cette paix fatale. Un grand nombre de familles se prépare à fuir dans les bras d'un ennemi éclairé, le joug d'un maître barbare. L'empereur s'apprête à recueillir dans ses Etats ces nombreux émigrans.

Cet exemple est une preuve nouvelle qu'il n'y a plus de domination assurée que celle de la justice et de la raison; que le lien de la force est le plus foible des liens; qu'avec les peuples comme avec les femmes, on ne doit espérer la fidélité qu'en inspirant

l'amour.

LA HAVANE. Cette Colonie espagnole, située dans l'île de Cuba, en Amérique, vient d'être dévastée par un fléau qui rappelle les antiques déluges.

Du 21 juin, à la pointe du jour, jusqu'au 22 dix heures du matin, la pluie tombant à grand flots, a inondé les champs, fait déborder les rivières, brisé les ponts, changé les ruisseaux en torrens; la terre a tremblé, des abîmes se sont ouverts, des habitations entières ont été englouties, et les plantations les plus

riches déracinées, coupées et entraînées par les courans orageux. Les bestiaux, les nègres et les hommes (car dans ces pays ce sont deux espèces) ont péri en foule dans ce désastre. On évalue les pertes à plus de douze mille animaux, et environ trois mille personnes.

De mémoire d'homme, aucune inondation n'a été suivie de si étonnans phénomènes. L'eau en quelques endroits s'est élevée à soixante-cinq pieds. En d'autres lieux, la terre, dépouillée de son écorce féconde, ne laisse plus voir que la pierre vive. On a vu sortir d'une crevasse profonde des tourbillons de fumée épaisse et volcanique. Une rivière souterraine a été découverte au fond d'une de ces excavations, roulant sur un lit de belles pierres noires enfin une minę de très-bon cuivre a été trouvée dans cette rivière, ainsi qu'un sable et des pierres d'une couleur rare et précieuse.

OUCHY-LE-CHATEAU. (Département de l'Aisne.) Dans les villes, tous les sentimens se montrent avec faste; ils portent dans les hameaux un caractère plus intéressant et plus vrai. Le patriotisme des villageois se peint par une foule de circonstances naïves que nous nous plaisons à recueillir.

Tel est l'usage qui vient de s'établir dans le petit bourg d'Ouchy-le-Château. Pour afficher les décrets, on n'a pas trouvé de place plus commode que deux immenses volets, pendans à une croisée, celle du procureur de la commune. Le dimanche après dîner, ce magistrat dresse devant sa pórte, ou dans sa maison, une grande table, autour de laquelle se rangent en foule les habitans du lieu. Chacun ayant apporté sa plume, son encre et son papier, alors on va décrocher soigneusement l'un des volets, que l'on pose sur la table; et tous les assistans, sous la dictée d'un d'entre eux, écrivent la teneur des décrets. Le premier volet

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