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Les gens de la campagne n'ayant ni temps, ni argent à perdre, il est donc à propos de les prémunir contre les séductions de ces vendeurs de recettes. Cela est d'autant plus essentiel, comme vous l'observez trèsbien, qu'ayant une fois été trompés, ils suspecteroient tout ce qu'on pourroit leur présenter de mieux sur l'agriculture.

L'un de vos Abonnés.

ÉVÉNEMEN S.

ALLEMAGNE. La folie des émigrans français est de troire que le monde entier va prendre les armes pour leur rendre leur bastille, leur livre rouge, et leurs écussons gothiques. A peine ont-ils vu l'empereur et le roi de Prusse se réunir à Pilnitz chez l'électeur de Saxe, qu'ils se sont crus les conquérans vainqueurs de la France. Cependant, malgré la présence de M. d'Artois, sollicitant la ruine de sa patrie et la perte de son frère, qu'est-il résulté pour cux de cette conférence fameuse? Pas un écu, pas un soldat; mais une déclaration vague, une expectative diplomatique, qui ne promet rien, et donne peu d'espérance. Il est clair maintenant que ces grands potentats ne voient dans les troubles de la France qu'une occasion favorable pour dominer l'Allemagne ; leur réunion ne menace que les petits princes de l'Empire, qui les servent si imbecillement, en favorisant les contre-révolutionnaires français. Ils feroient bien mieux d'imiter l'électeur de Trèves et le prince de Neuwied. Ce dernier, sur les représentations des habitans, a refusé à Monsieur l'asile qu'il lui demandoit pour les déserteurs du régiment de Berwick. Bientôt nous verrons les conjurés français bannis et honnis par toute l'Europe.

TOURNAY en Flandres. Les aristocrates français qui peuplent cette ville, ont une autre manie que ceux d'Allemagne. Ils passent leur vie a pleurer la captivité du roi. Leur spectacle chéri est la pièce de Richard

exur de lion. Il y a quelques jours que, voyant représenter cette pièce, au moment où ce prince paroît enchaîné sur la tour, nos émigrans, semblables à Dom Quichotte tombant l'épée à la main sur une armée de marionnettes, crurent voir Louis XVI leur deman, dant la liberté. Dans leur transport monarchique, ils sautent en foule sur le théâtre, escaladent les murailles de taile peinte, prennent d'assaut la forteresse théâtrale, et délivrent glorieusement le roi chanteur.

Il est bon de remarquer qu'au moment où cette scène grotesque se passoit à la comédie de Tournai, Louis XVI alloit a l'opéra de Paris au milieu des acclamations du plus confiant et du plus sensible des peuples.

SAINT-ANDER en Espagne. Il y a peu de temps qu'un navire français étoit dans ce port. Les matelots se divertissoient paisiblement à terre. Le capitaine, M. For sin de Nantes, prévenu qu'ils alloient être arrêtés par ordre de l'inquisition, fait embarquer ses gens, en arborant le pavillon français. Les alguazils furieux s'emparent du capitaine lui-même, et le plongent dans un horrible cachot. Le consul français, deux autres capitaines de navires, aidés d'un alcade espagnol, homme juste, et ennemi de la tyrannie, n'obtinrent l'élargissement de M. Forsin qu'avec des efforts in croyables, et à une condition bien douloureuse; c'é toit de livrer deux de ses matelots. Hélas! il a fallu y consentir, et sacrifier ces deux victimes au monstre inquisitorial. On a su depuis la cause de ce traitement abominable. Quelques-uns de nos prêtres réfractaires avoient dénoncé à l'évêque ces matelots, comme ayant brùlé sur le quai l'effigie de son eminence, celle du pape, et celle du roi d'Espagne.

Ce fait nous est attesté par M. Servier de Rouen, qui le tient de M. Forsin lui-même.

CONDOM (département du Gers.) On a trouvé dans les archives de la cathédrale une transaction très-ancienne et très-singulière, passée entre le clergé et le peuple du diocèse. On y voit que le peuple ne vouloit payer la dime qu'à la dixième gerbe, et que le clergé la vouloit à la huitième. Par ce traité, les pauvres

habitans consentent à cette horrible exaction; et le clergé, pour les indemniser, promet et s'oblige de faire sortir chaque année du purgatoire deux cent cinquante ames de leurs parens et amis, et de les conduire directement en Paradis.

VLLEFRANCHE (Département de l'Aveyron.) La visite de l'évêque constitutionnel, et les fêtes qui l'ont cẻlébrée, ont produit plusieurs traits intéressans. Une commune villageoise s'est présentée pour complimenter le nouveau prélat: voici la harangue énergique du maire... Monsieur, on nous a dit que vous étiez un évêque de paille, et qu'on vouloit y mettre le feu. Nous vous apportons tout notre sang pour l'éteindre......

Le soir, on distribua, en présence de l'évêque, les prix du collège. L'un deux est une médaille d'argent, revêtue du nom et des armoiries de l'ancien juge. mage, dont la famille a fondé ce prix, On appelle le jeune rhetoricien qui l'avoit mérité; il paroît triomphant. On lui offre la médaille. Il voit ce nom privilégié, cet écusson féodal... Quoi, dit-il, c'est l'emblême de la servitude et de l'aristocratie qu'on me donne pour récompense! je rougirois d'un semblable trohée..... En même temps il jette la médaille et la ule aux pieds. Quel beau caractère annonce une si belle action! Qui ne sait quel trouble jette dans un jeune cœur les premières victoires du talent! Au milieu de sa gloire enfantine, ne songer qu'à l'honneur national, c'est un miracle de grandeur d'ame. Nous décernops à ce jeune écolier le premier prix du pa-. triotisme. Puisse la leçon qu'il donne, profiter aussi bien que celles qu'il a reçues!

PARIS. Le 30 de ce mois l'assemblée nationale cessera ses fonctions.

Parmi les illuminations superbes de la capitale, on a remarqué celle d'un pauvre artisan. Il avoit décoré son échoppe d'un très-beau transparent, sur lequel on lisoit ce vœu du bon sens et de la liberté : Vive le roi, s'il est de bonne foi!

UESTION IMPORTAN

Adressée aux Rédacteurs.

E

De Quimper, le 2 août 1701.

L'article 10 du décret sur les Domaines congéables donne lieu à de grandes difficultés dans le départemen: du Finistère, où presque tous les biens sont de cette nature. Il porte que les domaniers supporteront la totalité des impositions foncières, et ils retiendront au foncier, sur la redevance convenancière, une partie de cet impôt, pro-' portionnellement à ladite redevance.

Ce mot proportionnellement, mal entendu par tout le monde, occasionnera une infinité de procès.

RÉPONSE

Donnée par l'un des députés de l'assemblée nationale qui ont redigé le décret.

C'est la proportion du cinquième dont il s'agit, et elle se réfère à la redevance. Ainsi, celui qui doit annuellement vingt livres, ou des denrées en valeu de vingt livres, retiendra quatre livres.

On s'abonne à Paris, chez DESENNE, Libraire, au Palais Royal; et en province, chez les principaux Libraires, et chez les Directeurs de la Poste, pour 9 liv. par an. L'abonnement ne peut être moins d'une année. On prévient les Souscripteurs qu'il faut affranchir les lettres et le port de l'argent; et on les prie de vouloir Lien circonstancier l'adresse de chaque village, pour éviter la ressemblance des noms.

De l'Imprimerie de DESENNE, rue Royale, Butte
Saint-Roch, No. 25.

ET SECONDE SEMAINE

DE LA SECONDE ANNÉE

DE LA

FEUILLE VILLAGEOISE.

Jeudi 6 Octobre 1791.

Aux Rédacteurs de la Feuille Villageoise.

A Septmonsel, dans le Jura, le 17 Septembre 1791.

MESSIEURS,

Depuis qu'on répète vos leçons à nos braves paroissiens, ils sont devenus des modèles de civisme. Si vous les aviez vus, il y a șix mois, et si vous les revoyiez aujourd'hui, vons seriez tout glorieux de votre ouvrage. Jugez-en par la fête qu'ils viennent de

célébrer.

La garde nationale, composée de huit à neuf cents hommes, n'avoit point encore de drapeaux; les femmes, aussi patriotes que leurs enfans et leurs maris, se sont cotisées pour en préparer un. Elles ont peint au milieu du drapeau sept montagnes qui représentent le site de la paroisse. La liberté, enveloppée de nuages, descend du ciel, portant d'une main une couronne civique, de l'autre la constitution, et se repose sur le mont le plus élevé. A ses pieds se trouve un homme vigoureux, les bras chargés de chaînes. C'est le serf du Jura (1); il fléchit le genou, et tend des mains suppliantes a la liberté, qui brise ses fers.

(1) Les peuples du Mont-Jura étoient serfs du chapitre de Saint-Claude. Ce chapitre, composé de moines, s'étoit fait séculariser, anoblir, et décorer d'une médaille d'or; mais il lui manquoit de se faire humaniser, et de joindre un peu de bonté à tant d'honneurs et de distinctions. Ni les supplications du peuple, ni les remontrances de Voltaire, ni l'édit libérateur de M. Necker, ni l'exemple donné par Louis XVI dans tous ses domaines main-mortables, n'avoient pu émouvoir le chapitre de Saint-Claude, qui cou. tinua d'écraser ses esclaves jusqu'au moment où la constitution française est venue les affranchir. Le coeur d'un chanoine, d'un Troisième Partie.

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