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reil menaçant & d'une pompe' éblouiffante qui frappent l'eeil de la multitude. Des légiflateurs raffemblés pour ré diger le premier code digne d'être offert aux hommes devenus enfin libres, ne fauroient mettre trop de poids dans leurs difcuffions, & fe tenir avec trop de constance & d'immobilité au-deffus des petites paffions. Semblables au voyageur qui gravit les Alpes, ils doivent, fans s'émouvoir, entendre gronder les orages fous leurs pieds.

Il faut rendre cette juftice à nos députés conventionnaires; ils ont ouvert leur feffion avec une forte de fublimité. C'eft au moment que tous les potentats de l'Europe, coalifés contre la France, font entrer leurs armées fur notre territoire, que l'affemblée nationale déclare folennellement la profcription des rois & l'abolition de la royauté. Déjà nos frontières font envahies, & plufieurs de nos villes paffent lâchement fous les fourches candines. Châlons & Reims font à la vue de l'ennemi : tranquille à fon pofte, la convention décrète la république & la déclare une & indivifible; mais il faut rester à ce degré d'élévation, & ne pas retomber dans de petites manoeuvres de clubs. La Pruffe, l'Autriche & les émigrés redouteront plus encore la convention, fi elle fait fon devoir, que nos deux millions de foldats.

Réclamation.

La fection du Panthéon Français me charge de donner un défaveu formel à un article de la Chronique de Paris, jeudi 27 feptembre, où il eft dit qu'en épurant les membres choifis pour la convention nationale, elle a rejeté Marat. Citoyen, la fection du Panthéon Français a cru, ainfi que beaucoup d'autres, plus prudent de fufpendre, pour cette fois feulement, l'exercice du droit qu'elle a d'examiner ceux qu'on lui défigne pour repréfentans, & elle s'en eft rappor tee entiérement au choix des électeurs. Je vous prie de l'apprendre au public, en inférant cette lettre dans votre Journal. PARIS, homme de lettres, préfident de la fection du Panthéon Français.

Paris, 29 feptembre, l'an premier de la république. NOUVELLES DES ARMÉE S. Armée du Centre. La pofition eft toujours la même, ainfi que celle de l'armée pruffienne; mais la détreffe de celle-ci augmente de jour en jour; le foldat commence à murmurer: on lui fait manger du pain d'avoine, qui n'eft pétri qu'à moitié, encore eft-il réduit à une livre par jour. Non-feulement ils font dans la difette de vivres, mais ils manquent encore d'eau, tellement que le roi de Pruffe fit demander dernièrement au général Dumourier la permiffion de laiffer boire fes che yaux dans une marre voifine de notre camp; à quoi

Dumourier

Damourier répondit : « Ce n'eft pas à moi; c'est à mes canonniers qu'il faut demander cette permiflion ». La difette de fourrages a obligé les Pruffiens à faire manger du bled à leurs chevaux; & ce bled fermentant dans leur corps en fait mourir un grand nombre, qu'ils mangent enfuite. On peut juger de leur état de détreffe par la lettre fuivante.

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Extrait d'une letrre trouvée dans la poche du Prince de Ligne, général Pruffien, tué à l'affaire de la Croix-auxBois, le 14 Septembre 1792, datée du camp de Boux.

Nous commençons à être affez las de cette guerre, où meffieurs les émigrés nous prome:toient plus de beurre que, de pain; mais nous avons à combattre les troupes de ligne dont aucun ne déferte, les troupes nationales qui reftent: tous les payfans qui font armés, ou tirent contre nous ou nous aflaffinent quand ils trouvent un homme feul ou endormi dans une maison.

Le

temps qui, depuis que nous fommes en France eft fi déteftable que tous les jours il pleut à verfe, & que les chemins font fi impratiquables, que dans ce moment nous ne pouvons retirer nos cañons: de plus la famine; nous avons tout le mal imaginable pour que le foldat ait du pain, & la viande manque fouvent: bien des officiers font cinq, fix jours fans trouver à manger chaud, nos fouliers & capottes font pourris, & nos gens commencent à être malades. Les villages font délerts & ne fourniffent ni légumes, ni eau-de-vie, ni farines, je ne fais comment nous ferons & ce que nous deviendrons. Quelquefois on fe donne le petit plaifir, comme moi.... L'écrivain en refte là, & il n'a fans doute pas eu le temps de terminer fa lettre.

Pour copie conforme à l'original, figné, DUMOURIER. La méfintelligence commence à fe manifefter entre' les émigrés & les chefs des armées combinées. Ceuxci commencent à voir qu'en leur promettant de les ame ner à Paris avant la fin de septembre, on les a trompés, & la réfiftance qu'ils éprouvent de toutes parts le No. 168. Tome 14..

leur prouve affez. Thionville, qu'ils croyoient réduire en vingt-quatre heures, a déjà été bombardé trois fois en vain. La garnifon fait de vigoureufes forties, enlève des convois à l'ennemi, & par là-deffus fe moque de lui. L'armée de Dumourier fe renforce tous les jours; dix mille hommes du camp de Châlons viennent de lui arriver, fous les ordres du général Dubouquet; trois mille gendarmes bien exercés font partis de Paris & prêts à le joindre; des bataillons de volontaires de tous les départemens font en marche pour fe réunir à lui. L'armée a confiance en fon général, & Dumourier compte fur le courage des volontaires & des foldats. Que faut-il de plus pour efpérer d'être vainqueurs ?

On attend un mouvement dans les armées de Dumourier & Kellermann, qui doit rendre notre pofition encore plus avantageufe en vain le roi de Pruffe demandet-il à parlementer avec Dumourier; ce général ne veut Jui répondre qu'à coups de canon.

Le 20, à trois heures du matin, l'avant-garde de l'armée de Kellermann, forte de dix mille hommes, a été attaquée par l'ennemi on s'eft canonné vivement pendant huit heures, à quatre cents pas de diftance. Sans l'accident de trois caiffons incendiés par un obus, nous aurions perdu beaucoup moins de monde. Il y a eu à peu près trois cents hommes, tant tués que bléités, de notre côté. La perte de l'ennemi a été beaucoup plus confidérable. Le courage & le fang-froid des volontaires pendant l'action a été étonnant; des bataillons qui n'avoient jamais vu le feu, font reftés dans une intrépide immobilité; des lignes entières renverfées étoient remplacées fur-le-champ; on ne demandoit qu'à s'approcher de l'ennemi, qui n'a pas ofé engager le combat, & s'en eft tenu à la canonnade, puis s'eft retiré & a Occupé un pofte appelé le pofte de la lune, à la droite d'Oberval. Le lendemain, l'ennemi a tenté de faire une fortie par le même bois qui avoit protégé fa retraite ; mais une batterie placée à propos l'a bientôt fait changer de deffein, & l'a forcé de fe replier fur le corps de farmée.

On annonce qu'un régiment de dragons autrichiens a été fait prifonnier. Une lettre que nous recevons, en date du 24, paroît confumer cette nouvelle, en nous appre nant qu'un gros de cavalerie ayant été attaqué par Kel

lermann, les foldats ont mis bas les armes font def cendus de cheval, en priant qu'on ne tirât pas fur eux; ce qu'ordonna le général.

Armée du Nord. Il eft arrivé à Lille, le 23, un bataillon de volontaires foldés: on attendoit le lendemain un plus grand nombre d'hommes encore. Nos détachemens qui fe font portés fur les bords de la Lys, ont repouffé l'ennemi jufqu'à Warneton; ils fe font rendus maîtres du Pont-Rouge & du Bac. Les maifons qui fervoient de retraite aux Autrichiens ont été incendiées fans miféricorde ; plufieurs de ces victimes du defpotifme ont trouvé la mort dans les flammes. Nos gens pouffoient leur conquête plus avant. A cinq heures du foir, ils attaquoient Warneton avec une valeur qui ne laiffe pas douter que ce lieu ne foit en ce moment en leur poffeffion. L'ennemi, qui occupe depuis quelque temps les poftes de Lannoy, Roubaix, Tourcoig, &c., se dispose à les évacuer. Il commande des chariots de corvée pour emporter le pillage & les équipages fur leur territoire.

On femble révoquer en doute que l'armée de M. Carles foit entrée dans la Weft-Flandre, & que les villes de Me nin, Ypres & Courtray foient prifes rien d'officiel n'est encore arrivé fur la prife de ces trois villes.

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Lille eft affiégé en règle par 20,000 hommes; mais le cou rage des habitans & de la garnifon, compofée de 6000 homines d'infanterie & 600 hommes de cavalerie, ne laifle rien craindre fur le fort de cette place, d'ailleurs très-fortifiée.

Des militaires éclairés qui reviennent de l'armée de Dumourier, nous affurent que des bataillons de piquiers bien organifés feroient de la plus grande utilité dans fon armée. Tout le monde connoît l'avantage que nous avons à l'arme blanche fur toutes les troupes d'Europe. C'est d'après cela, fans doute, qu'ils calculent l'avantage des piques, foutenues par les baïonnettes & précédées de fartillerie.

Plufieurs citoyens nous ont demandé fi M. d'Arville, commandant à Reims, n'a pas été aide-de-camp de Lafayette.

On affure qu'un détachement Pruffien a conduit à Coblentz Lafayette, Latour Maubourg, Bureaux de Puzy, Alexandre Lameth & Jarry; que ces derniers doivent être conduits à la citadelle de Wefel, & Lafayette à Spandaw.

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Extrait du rigifire des délibérations du confeil exécutif pro

vifoire.

Du 21 septembre 1792, l'an 4°. de la liberté, & 1". de l'égalité. «Le confeil exécutif provifoire, confidérant que les motifs qui ont déterminé l'envoi des commiflaires dans les départemens ne fubfiftent plus, après en avoir délibéré, arrête que tous les commiffaires qui ont été envoyés, au noin du pouvoir exécutif, dans les divers départemens, font dès-à-préfent rappelés, pour rendre compte au confeil de leur miffion qu'en conféquence les pouvoirs qui leur ont été délégués par le confeil font révoqués, & que le miniftre de l'intérieur donnera aux départemens l'avis de la préfente révocation. Pour ampliation. GROUVELLE, fecrétaire ».

En conféquence de cet arrêté, 'le miniftre de l'inté rieur a adreflé aux corps adminiftratifs la lettre ci-jointe.

« J'ai l'honneur, meffieurs, de vous adreffer une délibération du confeil du pouvoir exécutif provifoire, portant révocation des pouvoirs qu'il a donnés à diverfes commiffaires qu'il a envoyés dans les départemens.

Si quelques-uns de ces commiffaires ont rempli l'intention du confeil, qui étoit de ramener les hommes & les chofes à l'unité de principes & d'action, de juftice & d'ordre, quelques autres s'en font étrangement écartés, en provoquant, au contraire, des rumeurs, occafionnant du trouble, expofant même la sûreté des perfonnes & des biens, voulue par les loix, la juftice & la raifon.

Le calme doit fuccéder à l'orage. Il n'eft point de liberté pour les hommes en fociété, fans l'exercice rigoureux des loix: il n'eft point de bonheur fur la terre, Tans la paix & l'union. Je ne puis que vous manifefter ces principes que je crois de toute vérité comme de toute juftice.

» Si donc, meffieurs, il fe préfente, dans votre département, des hommes qui fe difent encore investis de pouvoirs du confeil exécutif, hâtez-vous de leur appren dre que ces pouvoirs font révoqués. Quant à ceux qui. ne feroient pourvus que de commiffion émanée d'un feul miniftre, ils refteront chargés d'en pourfuivre l'exécution, fous la refponfabilité du miniftre dont ils l'auront reçue. Le miniftre de l'interieur. Signé, ROLAND",

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