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En sommes-nous donc réduits à faire de tels reproches à nos législateurs ? Cela fait gémir.

Buzot continue son apostrophe verbeuse: Ne crains-tu pas que l'on découvre auffi cette corruption profonde, &c.... On vous entend, M. Buzot; Paris est une nouvelle Babylone indigne de posséder plus long-temps la convention dans ton sein. Que cette ville ne s'avise donc pas de réclamer contre la maison militaire décrétée. Pour Ja punir, nos chastes législateurs en secoueroient la boue de leurs pieds, & porteroient leurs pénates dans une autre ville où il y auroit encore des mœurs. Que cette défaite est misérable ! Légissateurs mal-adroits, que ne dites-vous tout bonnement que votre intention est de quitter Paris pour aller vous établir dans un lieu où vous soyez moins vus & plus à votre aife. Ce n'est pas la contagion des femmes publiques, des jeux & du luxe que vous cherchez à éviter; vous savez bien que les femmes publiques, le luxe & le jeu vous suivront partout où vous irez, tant que vous toucherez 21 liv. d'indemnités par jour; avouez plutôt que vous ne cherchez qu'un prétexte de vous éloigner du foyer des lumières, pour consommer tout à loisir vos œuvres de ténèbres. Plusieurs d'entre vous ne s'en cachent même point. Cette garde militaire n'est mise en avant que pour piquer d'honneur les habitans de Paris, & les porter à de nouveaux mouvemens qui vous autoriferont à les fuir. Il est encore une autre considération... vous aurez beau cumuler délai sur délai, tôt ou tard il faut bien que le grand jour du jugement dernier de Louis XVI arrive, & déjà les fans-culottes difent aff z haut pour que vous l'entendiez que cela devroit être fait. Que savons-nous? peut-être ne feriez-vous pas fachés de voir le peuple perdre patience, & prendre un parti extrême! ah! c'est alors que vous diriez adieu à Paris pour jamais.

Buzot ne se déconcerte pas & paye d'effronterie. Il ne craint pas d'avancer que l'oppofition de Paris à une maison militaire en démontrerit la necessité, puisqu'il feroit poffib'e de l'abufer au point de le faire reclamer contre une mesure juste, grande & fage....

Malheur aux loix qui n'ont d'autres panégyristes que ceux qui les tont!...

A qui peut être redoutable cette force composée de tous les points de l'empire ?... aux factieux ?...

En effet, s'il te pouvoit que cette maison militaire, si elle se forme, arrivée à Paris & ne rencontrant dans cette ville que des frères, vint à se dire: mais qu'avions-nous besoin

besoin ici? n'y serions-nous appelés que par une faction de l'assemblée conventionale?

Je ne m'arrêterai point, dit toujours Buzot, aux craintes fantastiques d'une garde prétorienne.

Pas tant fantastique; car enfin, les représentans du peuple se font d'abord contentés d'une garde citoyenne; ils ont ensuite voulu avoir la gendarmerie, plus richement habillée; puis on lui a donné le bonnet de grenadier auquel les volontaires avoient généreusement renoncé; & voilà maintenant la convention qui décrète une maison militaire sur le même pied à peu près que celle de la cidevant maison du roi !

Nous aimons à croire que ce décret, avant d'être mis à exécution sera porté à la sanction des assemblées primaires; car enfin il seroit difficile de faire passer pour loi réglementaire ou de police, qui ne regarde que l'intérieur de la salle de la convention un décret qui or donne la levée d'un corps de troupes à pied & à cheval, fourni par les quatre-vingt-trois départemens.

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Mais on dit que déjà, intimidés par l'opinion publique, qui se manifeste de toutes parts contre l'établissement d'une maison militaire conventionale, les vrais factieux, c'est-à-dire, la faction de l'assemblée qui propose cette mefure, commencent à en rougir, & n'infifteront plus davantage. Citoyens, le fublime Buzot & le parti dont il eft

est l'interprète, , ne lâchent peut-être prise en ce moment que pour en attendre un plus favorable. Nous vous invitons à ne pas les perdre de vue: des représentans du peuple capables d'avoir conçu l'idée d'une maison militaire à leur usage, à coup sûr sont suspects & doivent demeurer tels aux yeux des patriotes.

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Mais voici de la mauvaise foi, de l'impudence & de l'abfurdité tout ensemble. C'est toujours le sublime Buzot qui parle.

Une garde fous l'immédiate autorité d'un corps législatif ne fauroit défirer & fervir que le bien & la liberté de tous.

Il est aisé de prévoir quel fera le produit de ce mélange adultère & monstrueux d'une afssemblée législative foutenue par une armée à ses ordres. Hafardons une conjecture qui assurément n'est pas gratuite. Louis, du fond des tours du Temple, a encore de nombreux amis à Paris & dans toute la France, & ce ne font pas les fans-culottes. Or, la convention laisse aux conseils-généraux des départemens (voyez art. VII du projet de décret) le choix des citoyens qui doivent composer sa garde: on exige, il est vrai, des certificats de civisme; mais on N°. 171. Tome 14.

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fait comme ils s'obtiennent. Une autre condition requife art. VIII, est d'avoir cinq pieds trois pouces au moins. A coup sûr, la maison militaire conventionale, d'après ces préliminaires, ne sera guère mieux composée que celle du ci-devant roi.

On va juger 'celui-ci; on le doit du moins, & tous les patriotes le demandent. Au peu d'empressement & d'énergie de la convention, il paroît qu'elle est dominée par un parti qui favorite le criminel découronné; mais le peuple, mais les fans-culottes, mais les sections, mais la terrafie de Feuillans! ce ne sera qu'un cri d'indignation. Que fera la convention ? Pénétrée nétrée, comme le dit l'éloquent & fublime Buzot, pénétrée de fon auguste destination, forte de fes droits, fière de la puissance nationale, elle dira avec Buzot: qu'importe le murmure ou la prévention d'un petit nombre alufe? De son côté, la maison militaire, dont le général ( remarquez bien cela) fera nommé par le corps conventional, art. VI, fière de sa taille & de fon bonnet, traitera avec mépris les fansculottes de toute grandeur, groupés aux portes & fous les fenêtres de la salle de l'assemblée. Il ne nous eft pas donné de prévoir ce qui peut en résulter, à la preihière étincelle tombée au milieu de la multitude en fermentation.

Quand on n'auroit pas à craindre d'événemens semblables, représentans de la nation, rappelez-vous ce que vous êtes, & les trois bases que vous avez déjà posées à savoir; la république, l'égalité & la fouveraineté du peuple dans les assemblées primaires, & foyez conféquens avec vous-mêmes.

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Vous voulez des gardes!... Sclon, qui vous valoit bien, n'en avoit pas un; & Athènes cessa d'être libre du. moment qu'elle permit à Pifistrate d'en avoir quatre cents.

Vous voulez des gardes!... Lycurgue, qui vous valoit bien, n'en avoit pas. Un jeune citoyen le blesse au visage; le législateur des Spartiates ne crut pas devoir profiter de de cet événement pour se faire donner une maifon militaire. Vous voulez des gardes!... Numa, qui vous valoit bien, n'en avoit pas.

Vous voulez des gardes!... Voici ce que J. J. Rousseau, qui vous valoit bien, écrivoit à un peuple redevenu efclave parce qu'il ne fut pas mettre à profit les leçons de l'auteur du Contrat focial.... "Je voudrois qu'on fentit la barbarie » & l'horrible indécence de voir l'appareil des armes profa>> ner le fanctuaire des loix. Polonois! êtes-vous plus guer>> riers que n'étoient les Romains ? et jamais, dans les plus

>> grands troubles de leur république, l'aspect d'un glaive >>> ne fouilla les comices ni le lénat. >>> (Gouvernement de Pologne, chap. VIII.)

Vous voulez des gardes!... Mais ces francs Gaulois, mais ces braves Germains, qui nous valoient bien tous, dans leurs afsemblées nationales du Champ de Mars, n'en fouffroient aucun autour de leurs chefs ou de leurs magiftrats; tout le peuple assistoit, en armes, aux délibérations, & il applaudifioit ou improuvoit en toute liberté les opinions, en frappant d'une certaine manière ses boucliers avec fes piques.

Le 14 de juillet, après la prise de la Bastille, quand une députation du corps conftituant vint à Paris & traversa la Grève pour monter à la maison commune, elle n'avoit point de gardes; tout le peuple lui servoit d'escorte, & crioit devant elle: place! place & chapeau bas! ce sont des députés!

Vous voulez des gardes!... Vous ne devez pas vous en donner vous-mêmes: c'est à nous, citoyens de la ville où yous vous trouvez, de vous en servir si nous le jugeons convenable. Il n'appartient qu'à un despote ou à un sénat d'aristocrates de se composer une maison militaire; & le peuple qui le lui permet ou qui le souffre, n'est déjà plus

libre.

Vous voulez des gardes!... Des janissaires, apparemment, pour réduire au filence de la stupidité les tribunes du peuple. Bientôt vous aurez des muets pour aller étrangler, de par le président des Français, le citoyen qui hafardera de manifester son improbation; par exemple, contre un M. Buzot, lifant son projet de décret d'une maison mili taire. Il vous faut des gardes de cinq pieds trois pouces au moins, & avec de grands bonnets de poil! Seroit-ce pour faire peur auxians-culottes? Mais ce sont des fans-culottes de toute taille qui ont pris la bastille en deux heures, qui ont châtié les gardes du corps dans le château de Versailles & les gardes-fuisses dans le palais des Tuileries. Ils ont défendu Lille contre les cinq pieds trois pouces de l'armée autrichienne, & repris Verdun sur ceux du roi de Prusse. Braves enfans de Paris, qui le jour que l'on proclama la patrie en danger, partites par milliers pour le camp de Soiffons, qu'euffiez-vous répondu aux municipaux chargés de recevoir vos enrôlemens, s'ils vous euffent dit: << Mes enfans, vous vous présentez pour être fol>> dats de la république; le feu de la jeunesse, du pa>> triotisme & du courage brille dans vos yeux; mais >> il vous manque trois pouces : c'est une condition de

» rigueur pour être admis à la garde des propriétés na>> tlonales & à la défense du territoire français, envahi >> par l'Autriche & la Prusse : vous reviendrez, quand >>> vous aurez atteint la mesure requife ». Heureusement. que nos généraux font moins difficiles que nos représentans !

Et toi, Buzot, qui déjà te vantois de voir arriver quatre cents hommes d'Angers pour appuyer ton projet de décret, tu as fans doute écrit à cette ville de te les choisir tous de cinq pieds trois pouces au moins?

Représentans du peuple, à vous des gardes ! Qu'en voulez-vous faire ? contre qui dirigerez-vous leurs baïonnettes? sera-ce contre les fans-culottes qui vous ont nommés, & qui suent, qui travaillent pour vous indemnifer? Mais, peut-être, craignez vous Marat, que tout un détachement de l'armée parifienne, commandé par Carle, sous les ordres de Lafayette, ne put jadis réduire au filence. Certes! Marat finira par se croire redoutable.

Des gardes! Si vous n'aviez que de bonnes intentions, vous n'en fentiriez pas le besoin: si vous trahillez vos devoirs, quelle garde assez forte vous fauvera des malédictions du peuple ?.... Des gardes!.... Est-ce pour vous mettre hors de fa tutelle? Vos prédécesseurs s'en font pourtant bien trouvés.

Cinq à fix mille gardes !.... Mais vous en avez vingtcinq miliions! Nous le sommes tous les uns des autres. Ne sommes-nous pas tous sous la fauve-garde des loix

Des gardes pour vous !.... Il semble que le château des Tuileries où nous vous préparons une falle d'assemblée, vous ait influencés déjà à l'exemple du despote que nous en avons chassé, & vous aussi, vous voulez vous entourer de gardes! Vous ne devriez pas même avoir d'huiffiers. Devriez-vous seulement vous être apperçus fi l'on montoit la garde aux portes de l'assemblee ? Une garde à pied & à cheval à votre service! Votre intention feroit-elle de transformer l'assemblée conventionale en lit de juslice ou en séance royale? Celle du 23 juin 1789 avoit moins de gardes que vous n'en demandez.

Représentans du peuple! ce n'est pas avec de telles metures que vous gagnerez sa confiance, quoi qu'en dife votre coliègue Buzot. (Cewe garde prévient tous les sujets de défiance.) Quelle confiance pouvons-nous avoir en vous? Depuis la téance du 21 septembre vous n'avez rien fait qui marque. Vous décrétez que tout émigré pris les armes à la main fera livré au bourreau dans les vingts

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