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Je fais bien aife que ma dernière lettre ait pu vous faire quelque plaifir. Vous n'êtes pas initié! applaudifiez-vous-en. Rappelez-vous le mot, et fcientia erim perder cos. Si je ne fuis pas Tans danger, moi que la grace divine a retiré du piége, jugez, du rique de ceux qui y retent.

Il y a long-temps qu'on fait l'éloge de la sûreté du plancher des vaches; la connoillance des chofes occultes et une mer oragenfe d'où l'on n'apperçoit pas le rivage.

"Je vous remercie du quatrième mois que je vais lire, & vous embraile, de tout mon cœur »

Cę 4 mai 1792.

Mon très-cher, nous avons l'oreille bien baffe; nous fommes encore plus gelés que nous ne l'étions, que nous ne le fumes jamais. La malédiction ne finira que quand les veaux engraités des mifères públiques auront été facrifiés fur l'autel de la justice divine.

Les patriotes qui font fortis de chez eux pour tout prendre, & qui n'ont pris que la fuite, ajoutent à l'humeur du peuple.

Les Jacoquins d'Epernay font dans la confternation; trois fcis vingt-quatre heures avant les nouvelles, ils faifoient répandre des bruits que Mons, Tournay étoient à nous avec tous les magafins, Liége avec le chapitre & l'évêque. Tout ce pays-là révolté en notre faveur nous fournitoit une armée capable de conquérir l'Allemagne; le revers de cette médaille attrifte tellement les ef prits, qu'il ne faudroit qu'un fouffle pour terraffer la rebellion, Mon Dieu! mon Dieu! Paris perfiftera-t-il encore long-temps dans fa folie, fa bêtife, fa ftupidité ? nous avons bien affez de 'maux, qu'on fe dépêche de prévenir ceux qui nous menacent, en rendant l'autorité au roi, pour qu'il viene préierver fes fujets de l'entrée de 400 mille hommes en France, qui acheveront d'y apporter la famine après avoir tué 100 mille de nos cultivateurs. Je n'entends plus parler de votre feuille à deux liards; faites donc qu'on y appuie für la nécefité de venir à jubé vis-à-vis de notre maître, si on ne veut pas être expofé au traitement le plus rigoureux; car les provinces fe réuniront pour demander juftice a roi de ceux qui l'ont emprifonné, & ont autorifé les traitemens indignes qu'on lui a faits,

» J'ai bien du chagria; un mot de vous ".

Du 8 mai.

Le moment critique s'avance de favoir que notre bon roi eft bien gardé. J'ai vent d'une coamon ami, & je me réjouis lition fourde qui raflemble autour de lui, dans Paris, 10,000 gentilshommes. C'est la garde conftitutionnelle de la fidélité, de faquelle on ne doute plus, qui leur a fait prendre ce parti un de mes amis, prefque de mon âge, mais de la première & de la plus froide valeur, doit étre du nombre. Ces braves gens ne fe hoient point affez à la garde nationale, lardée d'anciens foldats aux gardes, & démagogues au fond; regardant le roi comme le

boulevard

boulevard de fes propriétés, & même comme fa propriété, dont elle ne voudroit pas fe deflair, pour la rendre a la France entière, qui en a plus de befoin qu'elle. Le roi doit, il eft vrai fa confervation à cette bougeoifie; mais il ne lui eft pas redevable pour les motifs, & il ne fauroit attendre d'eux fa libération, fans quoi cela feroit fait. Ses véritables libérateurs font donc ac tuellement ou à fa folde, ou inconnus & errans autour de lui; & tout cela agira au moment qu'il faudra bien faifir.

" Quoi! ce vilain petit Duchâtelet, manchor, sferait minifte de la guerre! Je l'ai connu chez la vieille marquife Durfén, sde fun temps la doyenne des Médées françaifes. Elle fut une des pre mières qui fit courir après moi, quand j'eus fait prendre l'air au fcientifique ouvrage du Diable amoureux. Elle avoit été toute la vie en commerce avec les efprits; moi, je les peignais de main de maître, & nous nous trouvâmes auffi favansat que l'autre ; c'eft-a-dire fort tépéb eux. 124 Va stiubacɔ m2 24

:

» Elle faifoit élever ce manchot, qu'ons deftinoit alal carpière des affaires étrangères; attendu fon défaut corporalfɔla maison de madame la marquife Durfé regorgeoit d'empiriques xde gens qui galoppoient après les fciences occultes on ne pouvoit s'y fournir que de fort mauvaife politique, & le jeune homme y étoit exposé aux plus dangereuses communications. de mel fuis pas furpris qu'au fortir de cette étrange éducation il ait été difporé à donner dans les travers du temps, c'eftoun imtie popr: ainfi dire dès le berceau; il n'a pu faire qu'ici que des fottifes le voila en place pour de plus grandes il ne manque cependant pas d'efprit; & comment cela pourroit être puifqu'il ya chez lui garaifon? C'est un héritage de famille, il et de ceux que la charité ne nous confeil'e pas, ais nous force de plaindre. Les fucce de la propagande, comme fes crimes, font à leur dernier

terme.

*

bes, intelligences desfactieux dans les villes de Flandre les hattoient qu'à l'apparition de leurs armadilles les troupes allemandes fe trouveroient entre deux feux. C'étoit un piége pour les attirer. Les révolutionnaires de Flandre: font corrigés par les excès qu'enfante notre révolution ; elle porte une odeur de crimes qui révolte la terre comme le ciel,

Sila France n'étoit pas une petite partie du globe, on pourroit croire à la fin du monde, car ce royaume et décidément gouverné par la bete, c'eft-à-dire déchiré, dévoré, ravagé, foulé aux pieds, par ce qu'on peut imaginer de plus ftupide & de plus atroce; mais la vilaine trouve enfu à qui parler, & on va la jeter dans le puits. Il manque néanmoins au monftre, fous lequel nous gémions, un caractère eflentiel pour le rendre en tout femblable celui de l'Apocalypfe, c'eft l'hypocrifie; nous fommes heureux qu'elle ait dédaigné de fe couvrir de ce mafque, & n'ait rempli fa coupe que d'abunthe..

Oh mon Dieu! j'entends parler de perfécutions du district contre ce qui nous étoit sefté de religieufes cloîtrées; ils n'ont pas quarante jours à vivre, & veulent fe fouiller par de nouvelles inhu manités! & le toi pardonneroit! Oh! non, non; il nous faudra juftice; nous foutrons trop. A chacun fon gueron; l'impu dent Barnave s'eft affis à côté de mon roi; il aura les deux feites No. 165. Tame 138 E

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coupées, ainfi des autres. Ah! quand refpirerons-nous ! je fuis grêlé, gelé, abîné; je n'en fens rien, tant j fouffre.

J'ai le premier, le fecond, e troifième & le cinquième mois; il me faut tout; je ne lis que ce journal; il est felon mon cœur ; j'effleure tous les autres ».

14 mai 1792.

J'ai, mon très-cher, reçu la quatrième livraifon que j'ai lue avec le même intérêt. Votre lettre m'annonce la défaite des Ja cobins dans la huitaine. Mais que feront les Feuillans de plus de treize à quatorze cents coquins qu'on a ratiemblés dans Paris, & qui y logent avec les chauve-fouris fous les toits?

» L'infame Lecointre veut s'emparer de la famille royale, que les coupables de toutes les fecies regardent comme leur palladium, & la conduire à Versailles. Il faut veiller fur cet infâme projet & que le roi ne prenne l'ait qu'au milieu de trois à quatre cents gardes à cheval. Il est en sûreté dans les Tuileries. La garde parihenne & 12,000 champions veillent là sur lui, indépendamment des fiens.

In juin l'armée des princes entrera sûrement en France, ayant à vaincre la pouffière, fi toutefois les frimats qui nous afliegen ont difparu. Je ne puis douter de ce fait; il m'eft aliuré pas mon cadet, qui est là à portée de savoir ce qui fe prémédite. La providence weillé fur lui comme fur fon alue, de qui vous pourrez apprendre les particularités. Comme tout vient de Dieu, je ne dois m'enorgueillir de rien, heureux de pouvoir rendre gloire à fon nom. Tout va bien, mon ami, vous le voyez de votre côte, & je vous le certifie autant qu'un aveugle dont les bras font employés à mettre en jeu les refforts d'une importante manufacture peut certifier; car telat mon rôle. Je vous ai prévenu que nous étions huit en tout dans la France, abfolument inconnus les uns des autres • qui élevions, mais fans celle, comme Moife, les yeux, la voix, les bras vers fo ciel pour la déc fion d'un combat dans lequel les élémens euxmêmes font mis en jeu. Il me paroît que la force de nos adver faires eft bien diminuée; leur chute s'approche autant que j'en puis juger. La catastrophe peut etre bien confidérable & bien avanta geufe, meme pour l'humanité. Nous croyons voir arriver un évé nement figuré dans l'apocalypfe, & failant une grande époque. Tranquilifez-vous; ce n'eft pas la fin du monde : cela la rejette à mille ans par-delà. Il 'eft pas encore temps de dire aux monta gnes: Timber fur nous; mais en attendant le mieux poffible, ce va être le cri des Jacobins, &c. &c. ; car il y a des coupables de plus d'unte robe.

via mailon eft une maifon d'oráifon : c'eft ainfi que tandis que les rois quarts des égli es font interdites de droit divin & le refte par la force humaine, Dieu fe ménage des temples dans quelques cœurs où il eft ferui avec foi & avec vérité.

Nous fommes sûrs d'être employés; mais ce que nous faifons nous pane. I' faut fe confoler en acinant. Les grands & les `petits prophètes étoient auffi quinze-vingt que nous ; & ce qu'il nous ont laillé eft plein de lumières qui percent fous l'enveJoppe.

Aimez moi bien, car je vous aime de tout mon cœur ».
La fuite à l'ordinaire prochain.

ASSEMBLÉE NATIONALE,

Suite de la fiance pe manente, du 10 août 1792.

Vendredi 31 août à 9 heures du matin. Après diverses pétitions, l'affemblée à décrété fur la propofition du.co. mité militaire, que les deux compagnies de gendarmerie qui font inftituées fpécialement pour la garde des tribunaux de Paris, feront formées inceffamment fur le pied de guerre.

Des députés ont rende compte d'une émeute arrivée à Carcaffonne, à l'occafion des grains, & dans laquelle M. Verdier, procureur-fyndic du département, a perdu la vie. L'affemblée a décrété que les auteurs & fauteurs de ce délit feront pourfuivis, et jugés par les ir bunaux de Montauban & de Perpignan.

Le Miniftre de la guere a notifié des dépêches de M. Dumourier, qui ayant appris que Verdun était fur le point dêtre attaqué; què la garniton de cette place étoit forte de quatre mille hommes, et qu'elle venoit d'être renforcée par une foule de citoyens qui s'etoient jetés dans la ville pour la défendre. D'un autre côté Luckner a envoyé quatre bataillons prendre un pofte avantageux en avant de cette ville. Il marche pour foutenir cette avant-garde. Les volontaires affluent de toutes parts; on les place dans les garnifons.

Les dons patriotiques et les adreffes d'adhésion aux mefures prifes par l'affemblée fe multiplient chaque jour. Il est décrété que les tribunaux de district ne pourront point prendre de vacances.

Sur la propofition de M. Goujon, l'affemblée a décrété que les biens des émigrés précédemment féquestrés, font, dès-à-préfent,. confilqués, & qu'ils feront vendus, foit à l'encan, foit par adjudication, fur trois publications de huitaine en huitaine, ou par bail à rente.

L'affemblée a admis à fa barre les reprefentans de la commune provifoire de Paris, qui viennent demander à l'affemblée le rapport du décret de caffation qui a étẻ rendu hier foir contre eux. Ils citent pour titre au maintien dans leurs fonctions les nombreux fervices qu'ils ont

rendus à la chofe publique, & les approbations réitérées que l'affemblée a données à leurs travaux, & l'ap probation conftante dont le peuple les a honorés & les honore maintenant! L'affemblée a chargé la common extraordinaire de lui faire promptement le rapport de la pétition de MM. les commiffaires, & elle les invite aux honneurs de la féance.

D'après le rapport de M. Lafource fur M. Montinorin, ex-ministre l'aflemblée la décrété d'accufation. : M. Guader a fait un rapport au nom de la commiffion extraordinaire, fur la reddition de Longwy. Nous avons donné le décret rendu à ce fujet dans le numéro dernier, page, 397...

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Samedi premier Jeptembre, à neuf heures du matin. Le département de la Haute-Saône annonce qu'il a fix bataillons devant l'ennemi, & que fes contributions ne font point arrivées. L'affemblée déclare que cette conrrée de la France a bien mérité de la patrie. Le dépar tement de la Côte-d'Or écrit à l'aflemblée que la municipalité de Dijon a arrêté les perfonnes fufpectes qui le trouvoient dans fon territoire. La crainte de voir attaquer notre frontière par les fuiffes, a déterminé le département à mettre Auxonne en état de guerre.

Un de MM. les fecrétaires lit une lettre des commisfaires envoyés par l'affemblée à l'armée du Bas-Rhin. A Strasbourg ils ont fufpendu le commandant de la place, & autorifé M. de Biron à prendre une partie du commandement de M. Lamorière. A Scheleftat, ils ont fufpendu un juge de paix & le commandant de la place. A Colmar, ils ont fufpendu plufieurs officiers. La garde nationale de cette ville leur a paru animée du meilleur efprit. Il s'y eft formé une compagnie de cavaliers volontaires, une d'enfans de la patrie, & une de francs

tireurs.

Le comité de correfpondance a communiqué des dépêches des commilaires du Rhin, qui annoncent que fes Suiffes, à l'exception du canton de Berne, ne font point dans des difpofitions auffi hoftiles qu'on le croit Les commiffaires ont pris fur eux de dire aux cantons que la France défiroit refter avec eux en bonne intelligence.

On a lu une lettre des adminiftrateurs du départe ment de la Meuse, qui annoncent que Verdun eft afi

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