par plus d'une raifon, que les gens qui font tant de bruit aux Jacobins de Paris, ne foient les allies fidèlès. » Quel trifte réveil feroit le nôtre fi nous nous trouvions victimes d'un faux zèle qui nous auroit égarés, & fi, tombant fous le defpoti me, nous voyons triompher nos perfides ennemis ! Quait à moi, cela ne m'arrivera pas; & fi je dois cefler d'être un homme libre & un citoyen, c'est avec vous que j'irai périr, c'eft fous vos ruines que je ferai enféveli. Signé, le général de l'armée du Midi, Á. P. MONTESQUIOU ». Mon arme n'a pas fait de pétition, dit le général du Midi; nous fommes tous reftés dans le fi'ence que la loi impofe à la force armée; ainfi je n'ai aucune action perfonnel.e à juftifier. Or, l'armée de Lafayette a fait des pétitions, Lafayette n'eft pas refté dans le filence que la loi impose à la force armée : comment donc M. Montefquiou peutil dire que ce Lafayette eft un excellent citoyen? comment peut-il le dire, quand il avoue explicitement qu'il auroit des opi ions perfonnelles à juftifier, s'il avoit fait ce qu'a fait Lafayette? Je vous dirai, ajoute-t-il, que les Jacobins de Paris perdent le royaume, par e qu'ils font influencés par quelques hommes pervers qui les gouvernent. Ava t de répondre à cette inculpation grave, nous rappellerons les lecteurs à notre impartialité, à nos principes, nous leur rappellerons que nous-mêmes nous avons blâmé les Jacobins dans certaines circonstances, & que ce n'eft pas tant ici la caufe des Ja obins que la caufe de la liberté qu'il faut défendre. En lui-même, le mot Jacobin est un mot vide de fens; les Jacobins ne font que les amis de la liberté, & nous voudrions bien que M. Montefquiou nous expliquât comment ils perdent le royaume; nous voudrions qu'il nous dit le nom des homines pérvers qui les gouvernent. D'abord perfonne ne gouverne les Jacobins ; leurs féances font publiques, l'accès de leur tribune eft fibre à tout le monde, & fi Pétion, fi Robespierre, fi Danton; fi Manuel y font quelquefois plus applaudis que les autres orateurs, c'eft que leur éloquence fait leur concilier davantage l'attention de leurs collègues & des pectateurs. Sans doute ce font ces hommes-là que Montesquiou defigne fous le nom d'hommes pervers; mais nous vous le demandons, Français ! quelle idée voulez-vous qu'on fe forme de celui qui appelle pervers des hommes publics qui jouiffent de toute la bienveil lance nationale, qui n'ont été appelés aux places que par une longue réputation de vertu, & qui, juiqu'à ce jour, n'ont été calom és que par la cour, que par les fcélérats de Coblentz, que par la lie de la nation? Mais les Jacobins dénoncent toutes les autorités conftituées; ils dénoncent les membres de l'afemblée nation nale, le corps légiflatif n'eft pas libre dans fes fonc tions, les Jacobins de Paris y font la ma eure partie des décrets.... Oui, les amis de la conftitution ont dénoncé le directoire du département de Paris, celui de la Somme, celui de l'Aitne; oui, ils ont dénoncé l'ancienne municipalité. préfidée par le fieur Bally; oui, ils ont dénon é le côté du roi de l'affemblée nationale; mais M. Montefqu ou feroit-il changé au point de vouloir défendre les infames provocateurs du veto les bourreaux du champ de Mars, & les Jaucourt, les Ramond, les Girardin, & tous ces vils intrigans falariés par la lifte civile ? T Les amis de la conftitution ont encore dénoncé MarieAntoinette, Léopold, fon frère, François II, ion neveu; ils ont dénoncé Leffart & Montmorin, Briflac & Bouillé, le commandant Aclocque & Louis XVI; & M. Mon tefqu ou feroit-il auffi le dé enfeur officieux de Louis XVI, d'Aclocque de Bouilé, de Brilac, de Montmorin, de Leffart, de François II, de Léopold & d'Antoinette Médicis? Des intrigans, tous faux patriotes, vont impunément dans Les clubs faper, avec fecurité, les bafes de la conflitution que nous avons juree, & que, dans le fait, on n'a ssayée nulle part, car nulle part les autorités qu'elle a créees ne font refpecies ni libres dans leurs fonctions. Qoi ! l'on n'a pas effayé la conftitution? Quo! Louis XVI n'en a pas abufé tous les jours depuis le moment de fon accep tation? Quoi! il faudroit un nouvel effai à l'époque où nous fommes? Quoi! il faudroit fe taire alors que nous fommes évidemment trahis de toutes parts? Cette phrafe décèle toute la noirceur du complot dans lequel eft entré Montefquiou. Le vœu de la majorité de la nation, de la capitale entière, est prononcé pour la déchéance de Louis XVI & pour une nouvelle convention nat o nale e; cette vérité qu'on ne fa roit faire la guerre à des rois & des nobles, fous les ordres d'un roi & des nor bles, eft devenue une vérité triviale; la nation veut un changement dans fon gouvernement, ou du moins dans les gouvernans ; & le patriote Montefquiou, qui vient de fe rendre à Paris pour conférer avec Louis XVI, menacé d'une déchéance prochaine, nous prêche aujourd'hui un nouvel effai d'une conftitution dont l'abus nous conduit à la ruine, & dont la tolérance, fi elle étoit plus longue, nous précipiteroit, avant deux mois, dans le plus profond de l'abîme. Montefquiou, puifque vous trouvez aujourd'hui que Lafayette eft un excellent citoyen, nous vous condamnons avec le public, à la honte de voir fans ceffe le nom de Montefquiou accollé à celui de Lafayette, objet de la haine de tout ce qu'il y a d'hommes de bien en France. Police des tribunes de l'assemblée nationale. L'affemblée nationale a des tribunes publiques qui ne laiffent pas que de gêner certains membres. Ceux-ci ont fait ce qu'ils ont pu pour contenir les affiftans dans un filence prefque abfolu, comme s'il étoit poffible à des Français d'être les témoins impaffibles des délibérations d'où dépendent les deftinées de l'empire: c'est tout ce qu'on pourroit exiger d'eux, s'ils affiftoient aux débats du par lement d'Angleterre. Nous concevons que la préfence du peuple ne doit pas beaucoup plaire à ceux qui ont des traites fur la lifte civile. Nous convenons auffi que les bravos ou les huées de la multitude doivent troubler les travaux paifibles de nos légiflateurs; mais pourra-t-on nier que cette multitude qui fe preffe & se renouvelle aux tribunes, organe de l'opinion publique fervir de thermomètre & indiquer aux repréfentans de la nation le , ne puifle degré de confiance qu'ils doivent prendre dans les mesures qui leur font propofées pour fauver l'état, & conduire la révolution à fon terme? Il n'y a que les mal intentionnés d'entre nos pères conf cripts qui peuvent redouter la présence du peuple & la manifesta tion fpontanée de fes jugemens. C'en fera fait de la liberté, quand le citoyen dormira aux féances du corps législatif, comme c'en eft fait de la religion, depuis que le catholique dort aux fermons 'de fon curé. Le côté du roi de la falle du manége a mis tout en œuvre pour fe délivrer de cette incommode furveillance journalière. On a payé dés Stentor pour porter les tribunes à des excès vraiment répréhenfibles. Ce petit moyen n'a eu que de foibles fuccès; les fuffrages & les improbations ont toujours été en général conformes à la faine raifon. On a rappelé plufieurs fois à l'ordre; on a même eu recours à la force armée, & l'on s'est permis jusqu'à des arrestations. Tout cela n'a fait qu'irriter le public. Mais quelle a été fon indignation mardi matin, quand prenant fes places à l'ordinaire, il a vu qu'on s'étoit hâté, pendant la nuit, de pratiquer dans fes tribunes des féparations injurieufes, & d'y réferver une place pour des fentinelles permanentes, qui en effet vinrent s'emparer de leurs poftes. Ces innovations hoftiles déplurent au peuple avec d'autant plus de juftice, qu'elles n'étoient autorisées par aucun décret préalable. Les commiflaires de la falle les avoient prises fur eux, de même qu'ils s'étoient permis de déngner une place commode & apparente pour les miniftres. Il est évident qu'on cherchoit un éclat. Le public fe contenta de réclamer fortement contre ces difpofitions dans un tocal qui doit jouir de toute la franchife poffible. A bas les bonnets de grenadiers, s'écria-t-il; à bas les baion»nettes; nous ne voulons pour nous contenir d'autres armes que » ceties de la raifen; nous ferons la police nous-mêmes ». Et ie peuple avoit bien le droit de parler ainfi, d'après la conduite qu'il obferve depuis quinze jours fur la terrafie des Feuillans. Sans doute qu'il viendra un temps, & ce temps ne doit pas être fort éloigné, où la police fe fera fans armes d'aucune efpèce. Réfervons nos moufquets pour repouffer l'ennemi; il fied mal à un patriote en configne de préfenter une baionnette ou un fabre à fon compatriote, pour lui dire de ne pas aller plus avant. Enfin, fur la propofition de M. Beauvais, il fut décrété que les citoyers des tribunes feroient autorifés à nommer entre eux quatre inspecteurs pour faire obferver la police. Pourquoi l'affemblée nationale ne s'eft-elle avifée plus tôt de cet expédient fage & tout naturel? Pourquoi a-t-elle attendu qu'elle s'y trouvât pour ainfi dire forcée? Ne fera-t-elle donc jamais rien de bon, rien de louable pour ainfi dire que fous la dictée du peuple? Ce n'est pas qu'il faille que le peuple dorénavant n'ofe plus manifefter fon vœu ou fes craintes contre telles ou telles difpolitions légiflatives, tout feroit perdu s'il retomboit à ce degré de ftupid te; fi quand il affifte aux féances de fes repréfentans il dreitoit les oreilles & ouvroit des yeux hébétés, comme en 1788 fur le paffage du roi venant à la grand'chambre pour y tenir un lit de juftice. Il eft à propos au contraire que les mandataires fe [entent toujours en la présence de leurs commettans. Sans doute que nos législateurs ne font pas affemblés pour plaire aux tribunes, comme des acteurs au parterre; mais toujours eft-il vrai de dire que les bourafques des tribunes ont mené fou vent la chose publique au port. L'atmosphère s'épure par les ora-` ges; c'est dans le choc des difcuffions, c'eft au milieu des contradicions que la vérité aime à fe montrer. Kien ne forme mieux un tragédien que la févérité du public. Jadis il eût perdu fon talent s'il eût joué long-temps fur les théâtres de la cour, à Vertailles, ǎ Fontainebleaa & ailleurs, où il n'étoit pas permis aux fpectateurs d'applaudir ni de fiffler. Sans comparer l'ailemblée du corps légiflatif à une falle de spectacle, toujours eft-il vrai de dire que, les tribunes défertes aujourd'hui, ou condamnées à demeurer paffives & neutres, dès demain le corps législatif s'en reffent; il fe dégrade tout à fait, & perd le peu de nerf qui lui refte. Le peuple par fa préfence fert de régulateur à fes représentans; il en reçoit d'abord le mouvement pour enfuite réagir fur eux & les ramener à Fordre. Eftice que j'ai dit une fottise, demandoit un jour à fes amis un Lage applaudi par la multiude? Ce mot ancien, que plufieurs députés du côté du toi le font modeftement appliqué est une injure gratuite faite au public. Le public, quand on n'a pas jeté dans fa maffe un levain hétérogène, s'eft tenu plus conftamment à la hauteur des principes que la majorité de l'aflemblée nationale, & il fe démentira moins que jamais, à préfent qu'on lui a rendu le droit de police fur luimême qu'il avoit tant de raifon de réclamer. Le corps légiflatif ne l'exerce-t-il pas dans l'intérieur de la falle de fes affemblées? II auroit eu mauvaife grace de le refufer plus long-temps aux citoyens. dans leurs tribunes. Peuple, il ne fera plus fi facile qu'auparavant de gliffer au milieu de toi de ces agitateurs payés pour compromettre ta dignité & corrompre ton jugement; tu en feras juftice avec ce difcernement & cette modération dont tu as fait preuve tant de fois. Témoin aflidu des débats de tes mandataires, tu continueras de manifefter tes doutes & tes craintes, tas efpérances & ta fatisfaction, toutefois fans cefler de te tefpecter toi-même le premier dans la perfonne de ceux qui parlent en ton nom; feulement qu'ils fachent que tu es là. Jadis quand un cure étoit vacante, les paroiffiens s'affembloient tous pour nommer leur pafteur, ils ne s'en rapportoient point à des électeurs; & pourquoi les fections ne fe chargent-elles pas aujourd'hui de ce foin? Sans doute qu'elle ne craindroient pas de déplaire à M. l'évêque, qui n'aime pas voir les prêtres fe marier. M. Mayeux, choifi par l'aflemblée électorale pour remplir la cure de Sa nt-Sulpice, peut être un fort galant homme, ainfi que M. Tournaire, nommé pour fuccéder au prêtre philofophe qui di igeoit la paroille de Saint-Laurent. Mais a mérite égal, il étoit convenable, ce semble, de donner la préférence à des prêtres mariés, & Paris en ofre plus d'un en ce mom nt. MM. nos électeurs, à qui nous fommes redevables d'un fieur Ramond, d'un fieur Quatremaire, d'un fieur Paftor t, &c. dans le corps légiflatif, foutiennent dans toutes les occafions leur caractère, qui n'eft pas celui d'un civisme bien ardent. Quels choix peut-on attendre d'une compagnie qui à la fête du 14 juillet dernier, fe donne pour orateur un heur Cheron, & qui fans doute pour n'en avoir pas le démenti, prodigue fes applaudiffemens aux plates éloges que ce député feuillantin ofa bien débiter dans la chaire de vérité un roi parjure? ASSEMBLÉE NATIONALE. Séance du jeudi foir 2 août 1792. On a renvoyé au comité diplomatique le compte qu'a rendu le miniftre de la guerre des difpofitions de la Savoie. Il n'y avoit, le 21, en patriotes, que douze mille hommes, & les Autrichiens ne bougent pas encore dans le Milanais. |