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garde de la loi tous ceux qui font fufpectés de ne pas aimer I liberté, qu'on les tienne enfermés jufqu'à la fin de la gterre, & qu'on les garde avec des piques, c'eft ainsi. que fe fera déformais le fervice de l'intérieur. Les 'municipalités affigneront une folde réglée; par exemple, 30 fous par jour à chaque citoyen qui montera fa garde, & cela n'eft que ftrictement jufte. Si la république de Rome falarióit fes enfans pour affifter aux assemblées & aux fpectacles, pourquoi la république de France ne les paieroit-elle pas pour garder les foyers communs & maintenir les méchans. On a fouvent reproché au peuple, à celui de Paris fur-tout, d'être inconftant & léger, d'abandonner aufli-tôt fes entreprifes, & de dépofer fon pouvoir fouverain dès le lendemain d'une grande action: hommes injuftes, comment pouvez-vous faire ce reproche? Ne faut-il pas vivre, ne faut-il pas nourrir fa famille Et comment voulez-vous qu'un honnête citoyen nourriffe fa famille, comment voulez-vous qu'il vive s'il fert l'état fans retirer de falaire?

Quant l'état aura fixé ce falaire, & la commune de Paris doit en donner inceffamment l'exemple, quand un citoyen touchera le même traitement pour paffer fa journée en faction que pour la paffer dans un atelier, quand il fera sûr, outre cela, que s'il meurt à fon poste fa femme & fes enfans feront adoptés par la patrie, nous ne verrons plus ni légèreté, ni inconftance, & coux qu'on a calomniés jufqu'aujourd'hui prouveront à leurs concitoyens que l'état ne fauroit avoir de meilleurs défenfeurs que ces hommes de la nature qui n'ont jamais connu les délices & la molleffe.

Il eft une autre mefure que la prudence commande impérieufement d'employer, d'employer fur le champ, c'est la défenie extérieure de Paris. Déjà la commune a accordé cette partie effentielle de fa confiance à l'eftimable Belair, capitaine d'artillerie, né Français, & très-avantageufement connu de toute l'Europe. Le pouvoir exécutif s'eft joint à la commune pour procurer à ce citoyen tous les moyens pécuniaires & autres d'exécuter fonvafte projet. Les forêts qui avoifinent Paris, l'immensité de bras que contient la capitale, l'ardeur de tous les patriotes, le befoin d'une défenfe qui mette à l'abri de tout revers, de toute inquiétude, tout nous eft un garant certain qu'avant dix jours M. Belair aura prefque achevé fes

vaux.

Mais, dira-t-on, fi vous êtes fi affurés de l'impoffibilité d'avancer fur Paris, pourquoi faire tant de dépenfes pour protéger Paris? Pourquoi faire tant de dépenfes....... Comment le trouve-t-il encore des ames aflez étroites pour calculer des dépenfes pécuniaires, lorfqu'il s'agit de défendre la liberté ! Hommes cupides! citoyens avares! comment n'avez-vous pas fait ce raifonnement? Ou nous vaincrons nos ennemis, & nous ferons libres, ou nos ennemis nous vaincront & nous ferons efclaves. Au premier cas ne ferons-nous pas affez riches, riches de la liberté, riches de notre fol, riches de la félicité publique? Au fecond cas, qu'avons-nous befoin de richeffes, puifque nous avons tous juré de ne point furvivre à la perte de la liberté? Voudrions-nous amailer des tréfors pour qu'ils devinffent la proie des féroces foldats autrichiens? d'ailleurs des travaux publics n'appauvriffent jamais une nation; les exportations feules la ruinent; mais ici loin d'exporter, l'on ne propofe que de faire circuler, & la circulation quelle qu'elle foit, fera toujours l'ame des grands corps politiques.

Du refte on a raifon de dire que probablement ces immenfes travaux feront fuperflus; non il n'y en a aucune probabilité pour l'ennemi; non, l'on ne conçoit pas comment il pourroit pénétrer dans le centre de la France; non il n'est pas même de fon intérêt de le tenter, tant par la crainte de la délertion, que par la crainte d'être taillé en pièces; mais enfin dans de telles circonftances on doit tout prévoir, même ce qui paroît abfurde; & pour quelques millions de livres tournois, voudrions-nous avoir à nous reprocher, nous ne dirons pas d'avoir laiffé prendre Paris, mais d'avoir laiffé à l'ennemi la moindre poffibilité d'y pénétrer jamais? Paris renferme dans fon fein & le pouvoir exécutif, & le corps législatif, il renfermera bientôt la convention nationale; or, il faut que les hommes appelés à décréter le bonheur du monde dorment tranquilles; il faut que ceux des citoyens qui refteront à Paris foient physiquement affurés que toutes les trahisons du monde ne fauroient amener l'ennemi juqu'à eux.

Et nous auffi nous repoufferions avec indignation le projet de la défente de Paris, fi nous pouvions être sûrs que tous les traîtres font connus, déplacés, élagués; nous -ne ferons pas à nos armées l'injure de croire que des Allemands, des Prufhens puiffent les vaincre, lorsqu'on

ne les menera pas à la boucherie: mais comme la lifte des complices de Lafayette étoit innombrable, comme le pouvoir exécutif, quelque recherche qu'il faffe, aura peine à les découvrir tous, comme il pourroit résulter d'une trahifon combinée, qu'ea douze ou quinze jours de marche forcée, l'ennemi ne rencontrant rien fur fon paffage fe préfentât enfin fous les murs de Paris, comme cela eft poffible, malgré tous les caractères d'invraisemblance, il faut que Paris offre une défense refpectable, une défense affez forte pour que dans ce cas l'armée, les bataillons du département, tous les citoyens français aient le temps de voler à notre fecours, de venir avec les Parifiens cerner les affiégeans, & leur creufer leur tombeau dans nos plaines.

Ainfi, point de découragement: infamie à celui qui peut douter du fuccès, & mort à celui qui voudra femer. la terreur!

Examen des principaux candidats qui afpirent ou qu'on defigne à la convention.

Un des premiers noms qui fe préfentent fur prefque toutes les liftes eft celui de Robespierre. S'il n'eût point quitté le pofte d'accufateur public, nous dirions: qu'il y refte! Que de gens en place ne font pas à leur place! Robefpierre étoit à la fienne, fouillée depuis par Dutertre, & occupée en ce moment par un poëte patriote fort agréable, (M. Pons de Verdun) mais mai préparé peut-être pour un fardeau fi lourd,

Que Maximilien Robespierre foit donc de la convention, & qu'il nous permette de lui recommander le chapitre VII du livre II du contrat focial, intitulé: du législateur. C'eft dans ce beau chapitre que J. J. Rouleau énonce cette vérité défefpérante : Il faudroit des dieux pour donner des loix aux hommes.

La Sentinelle met fur les rangs l'abbé Syeyès. Mais ce prêtre, après avoir fait qu'est-ce que le tiers etat ? & une ébauche d'une méthaphy fique ténébreufe de la déclaration des droits de l'homme, prit férieufement la défenfe, de la dine, eccléfiaftique. Il y a quinze ou dix-huit mois, il quê,a parmi fes amis & protégés, des fignatures au bas de chaque page d'un petit écrit de fa façon en faveur des deux chambres: Il eft évident qu'Enimanuel Syeyès n'eft pas l'un

des

des hommes qu'il nous faut pour la convention. Son ami Tayllerand encore moins; évêque & noble, fa conduite au département & en Angleterre n'a pas fuffifamment défavoué ces deux taches indélébiles. Il n'a point marché droit ni d'un pas aflez fûr dans le chemin âpre du patriotifme pour le compter parmi les reftaurateurs de la liberté fra çaise.

Nous avons vu des nomenclatures où le trouve M. Rąderer. Même avant le maffacre de la Saint-Laurent, l'exprocureur-général-fyndic n'avoit point le fuffrage des patriotes jaloux d'être repréfentés par des citoyens purs. M. Roederer ne l'eft pas. Il n'a point dans le cœur cette auftérité de principes peintes fur fa phyfionomie. C'est un homme adroit que les circonftances ne mènent point mais qui fait les mettre habilement en œuvre. La tendre follicitude qu'il manifefta pour les jours précieux de LouisNéron, dans la matinée du 10 n'annonce pas cette averfion pour la cour qui doit caractériser l'homme du peuple,

J. Pétion a pour lui quantité de votans. Mais il est si bien à la mairie ! il femble né pour ce pofte. On lui doit peat-être la convention. Sous un autre maire, fous l'académicien Bailly, Paris auroit-il fait tant de chemin en fi peu de temps? On pourra trouver injufte d'exclure de la convention celui à qui nous en fommes principalement redevables. Mais nous le répétons, s'il faut des têtes faines à cette. convention, il nous en faut auffi à la maifon commune. Car la convention, dont le fiége ne peut être ailleurs qu'à Paris, a befoin d'avoir près d'elle un magiftrat fage, dont l'afcendant mérité affure aux légiflateurs tout le calme néceffaire pour l'achèvement de leur grand œuvre. Quand on nous aura indiqué le citoyen capable de fi-. gurer dans la chaife curule auffi avantageulement que J. Pétion, nous, confentirons à ce que celui-ci pafle fur les bancs de l'aréopage.

Nous en difons autant de P. Manuel. Il faut le laiffer procureur de la commune. Ce pofte femble fait pour lui. Son affiduité au travail le plus opiniâtre, fes yeux de lynx pour découvrir tous les anciens abus à réformer, tous ces petits ufages à remplacer par d'autres plus convenables à la première cité d'un empire libre; tout dans la conduite de P. Manuel annonce un magiftrat précieux au peuple de Paris. Un jour viendra que nous pourrons le No. 164. Tome 13

C

faire affeoir à fon tour parmi les pères confcripts de la nation. L'heure n'en eft pas venue, malgré fa haine pour les rois. Qu'il continue encore quelque temps à remplir les fonctions d'édile, & s'il le faut de tribun.

- Danton auffi eft dans le même cas. Sa voie forte & qui a le véritable accent de la liberté ne fe feroit fans doute jamais fait entendre en faveur du royalifme pendant la convention. Mais peut-être que Danton eft plus propre encore à veiller à l'exécution des loix qu'à les délibérer. Ha toute l'âpreté, toute la fermeté requise dans un miniftre de la juftice. C'eft le gardien, le cerbère des tribunaux. Les magiftrats & les coupables tremblent à fa vue; & c'eft ce qu'il nous faut en ce moment:

Pour Clavière, qui confentit à ne plus être repréfentant du peuple pour devenir miniftre du roi, on en a bien agi fans doute de le remettre à ce dernier poste; mais il ne peut, il ne doit plus prétendre à l'autre.

Le fecrétaire du miniftère actuel a dû fourire en lifant fon nom fur quelques liftes de candidats. Sans parler de ce qu'il fut avant la révolution, (mais alors il étoit bien jeune ce qu'il eft depuis ne fuffit pas tout à-fait pour lui conférer un titre qui fuppofe une maturité de raifon & un à-plomb de principes dont M. Grouvelle n'a point fait preuve dans la rédaction de la feuille villageoife. L'élève, l'aini & le panégyrifte de Cérutti n'eft pas des hommes que nous cherchons pour pefer d'une main ferme dans les balances de la fageffe les deftinées d'une grande' nation réfolue à périr plutôt que c'e ceffer d'être indépendante & foumife à fes feules loix.

Quant à N. Bonneville & à Camille Desmoulins, ils ont dû être bien furpris de s'entendre appeler à la convention. Et ils se rendent trop de juftice fans doute pour prendre ce compliment au mot. Bonneville & Desmoulins, légiflateurs!.... La patrie leur donne de l'emploi parmi les enfans perdus de la révolution, & les ajourne à la première convention du dix-neuvième fiècle.

L'auteur du roman de Faublas, rédacteur de la Sentie nelle, a de l'efprit & il écrit bien. Ce dernier ouvrage lui a mérité la reconnoiffance de fes concitoyens. Maisfi M. Louvet n'avoit que ce titre à faire valoir pour fiéger au fénat-légiflateur, il faut le dire, ce ne feroit pas fuffifant. Les choix d'ailleurs qu'il a propotés dans fa feuille n'annoncent pas affez la connoiffance des hommes,

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