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des armes; mais elle voudra rivaliser avec nous sur des objets bien plus importans.

Le peuple anglais paye 15 millions et demi de livres sterlings de taxe; il les supporte patiemment; il mérite donc les plus grands égards; et, selon le langage de Montesquieu, il ne peut trouver une indemnité de ces taxes énormes que dans sa liberté.

M. Wyndham et M. Powis s'opposèrent à la motion; et M. Pitt, affectant de parler avec rẻpugnance sur cette matière, avança que, quoique la motion portât sur des principes justes, il la croyoit faite dans un moment défavorable, puisqu'elle avoit été rejetée dans un temps où il l'avoit faite lui-même, et qui paroissoit favorable; que dans ce moment la chambre avoit à s'occuper d'un objet qui exigeoit toutes ses forces, celui de supprimer les priviléges accordés à ceux qui payent plus de cinquante livres de taxe par année. Il demanda l'ajournement indéfini de la question.

M. Fox soutint que la motion de M. Flood étoit admissible, que le moment étoit propre pour réformer l'inégalité de la représentation; que les affaires du continent ne devoient pas influer sur celles de la Grande-Bretagne, et qu'enfin lorsqu'on prévoit un violent orage, c'est le cas d'etayer sa maison.

Plusieurs autres membres se déclarèrent pour la motion de M. Flood, en donnant les plus grands éloges à son patriotisme. La question ayant été mise aux voix, on fit sortir les spectateurs de la salle, et la question fut ajournée.

Ce 30 mars 1790, PRUDHOMME.

De l'Imprimerie des Révolutions de Paris, rue des Marais, F. S. G. No. 20.

RÉVOLUTIONS

DE PARIS,

DÉDIÉES A LA NATION
Et au District des Petits-Augustins.

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DÉTAILS

Du 30 MARS AU 6 AVRIL 1790.

Projets de contre-révolution.

Ce qui se passe maintenant en France n'est

point une révolution, ce n'est qu'une secousse », disent les aristocrates paisibles,, qui se consolent de ce qu'ils ont perdu, par l'espoir de conserver une partie de leurs iniques prérogatives; « le peuple, No. 38.

A

ajoutent-t-ils, se lassera de la liberté dont il n'est pas digne, et tout reviendra peu à peu sur l'ancien pied.

» Non, s'écrie l'aristocrate furieux, cette canaille n'a ni pain ni numéraire, et elle n'en est que plus fière. Alléchons-la, en lui montrant un peu d'argent; et, lorsqu'elle aura donné dans le piége, lavons tous les affronts qu'elle nous fait essuyer depuis neuf mois dans des flots de sang. Attendre que cette populace se repente, c'est en avoir pitié. De nouveaux vertiges pourroient encore trouber les têtes après le repentir; il faut que notre vengeance soit si effrayante, que cette populace et sa postérité ne pensent jamais qu'en frémissant aux avantages qu'elle vient de remporter sur nous ».

Ce sont ces discours, et tant d'aut es, tout aussi sanguinaires, tout aussi coupables, que l'on entend daus les sociétés et dans les lieux publics, qui ont fait craindre, depuis quelques jours, aux patriotes que les factieux n'eussent trouvé des ressources extraordinaires et inattendues; et cependant ils ne prouvoient autre chose que la tolérance civile et le véritable esprit de liberté qui règnent parini

nous.

La crainte d'attenter à la liberté des opinions, fait que l'on souffre que des énergumènes soudoyés prêchent la très-prochaine contre-révolution, la dissolution de l'assemblée nationale, et l'aristocratie éternelle.

Cependant les apparences de mouvemens qui ont eu lieu, ou les tentatives qui ont été faites pour en exciter, les alarmes beaucoup trop vives qui en ont été la suite, prouvent que notre indulgence pour les missionnaires de l'aristocratie n'est pas sans quelque danger.

Comme il n'a fallu qu'un moment et une occasion pour armer et soulever contre la tyrannie ministérielle ceux que nos ennemis appellent la populace, c'est à-dire nos frères les ouvriers, les gague-deniers, et autres, qui nous sont d'autant

plus chers qu'ils sont plus, malheureux, les aristocrates préparent une occasion, et épient depuis long-temps un moment favorable à leurs projets.

Le hasard leur en a offert dont ils ont tire un parti 'qui doit nous faire tenir sur la défen

sive.

Une cinquantaine de jeunes gens traversèrent le palais royal, dimanche 28 mars, ils étoient rangés quatre à quatre, ils se tenoient sous le bras; il y avoit, dans le nombre, quelques chasseurs, ou du moins des jeunes gens qui en portoient les marques distinctives.

Ce spectacle, qui n'étoit pas nouveau, puisque la gai de nationale l'avoit donné plusieurs fois, attira quelques personnes qui formèrent des groupes; aussi-tôt il arriva des patrouilles qui étoient trop nombreuses, s'il ne s'agissoit que de maintenir l'ordre, et qui l'étoient assez s'il s'agissoit d'alarmer les esprits, en les frappant d'un grand appareil de précautions.

Quelques-uns de ces jeunes gens furent arrêtés; l'un d'eux se déclara clerc de procureur, et le lendemain on répandit que la basoche, irritée de la destruction de l'ancien ordre judiciaire, s'étoit laissé gagner par les aristocrates, et qu'elle alloit donner l'exemple de la révolte.

Ces rumeurs, aussi calomnieuses que stupides, excitèrent de la fermentation dans la classe du peuple qui n'apprécie rien par conjecture, et qui s'attache plus facilement à des faits qu'on lui donne pour vrai, qu'à des vérités qui exigent l'exercice de la réflexion. De-là vient que quelques groupes se formèrent encore pendant les jours suivans.

L'aristocratie envoya aussi-tôt des affidés semer l'esprit de sédition dans ces conciliabules formés par la curiosité. Là furent essayés tous les moyens qui peuvent égarer des hommes qui souf. frent, et qui ne voyent pas que leurs maux auront un terme assez prochain.

Là il fut proposé d'aller piller la caisse d'es

compte; mais le bon sens seul fit sentir que cette caisse, cause principale de nos maux actuels, devoit être supportée jusqu'à ce qu'il fût possible de la mettre en état de retirer ses billets; que piller la caisse d'escompte, ce seroit piller une maison démeublée, que ce seroit peut-être favoriser les vues des agens de cette caisse, qui trouveroient, dans un fort petit dégât, des excuses pour pallier une insigne mauvaise foi, et pour obtenir d'énor mes dédommagemens.

Là, des laquais interpelloient des ouvriers sur la misère actuelle, et les forçoient à s'apitoyer sur le sort des princes, de ces bons princes, qui faisoient travailler le pauvre peuple. Un de ces laquais a été arrêté.

Là, un brigand, aussi lâche imposteur que prédicant mal-adroit, a osé dire : « Nous avions quatre à cinq voleurs autrefois, nous en avons donze cents à présent ». A peine ce ». A peine ce blasphée a été prononcé, que les ouvriers, que le désœuvrement seul avoit rassemblés, se saisirent du coupable et le livrèrent à la garde.

Le jugement qui sera prononcé contre ce malheureux par le châtelet, sera digne d'être fremar. qué. Le sieur Curé a été condamné aux galères à perpétuité pour des propos contre la reine; en suivant une proportion, quelle peine ce tribunal prononceroit-il contre celui qui s'en est pern:is de calomaieux sur la plus respectable convention qui ait existé depuis que les nations ont cessé de s'assembler en personne?

En cherchant quelles peuvent être les causes de l'espèce de fermentation que nous avons remar quée, on en trouve de plusieurs sortes. Il est de toute justice de dire que messieurs de la basoche n'y ont eu aucune part, ils ont fait afficher pour faire cesser les bruits qu'on répandoit contre eux, le procès verbal du district des petits-pères, où avoit été conduit le jeune homme arrêté qui s'étoit dit clerc de procureur; une déclaration

au

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