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armes qui sont dans les arsenaux de la nation, et qui ne seroient pas strictement nécessaires à nos troupes de ligne, et même faire prêter aux municipalités les armes des soldats absens, à la charge de les rendre en bon état.

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2o. Connoître l'état de la répartition actuelle des troupes de ligne françaises et étrangères; en demander, en ordonner une répartition différente si celle qui existe peut paroltre dangereuse à la liberté ; arrêter et en pécher aucun rassemblement de corps armés, sans que le corps législatif en ait connu et approuvé les motifs.

Tout état qui se constitue est, par cela seul, dans un si grand danger, qu'il n'y a pas une seule précaut on a né liger; le salut du peuple peut même quelquefois faire fléchir les principes (1). Il n'est donc aucunes raisons qui puissent empêcher que l'on ne statue sur ces deux points; ils importent à la tranquillité générale, et au maintien de la constitution.

Rapprochons ce qui se passe à Marseille et dans d'autres garnisons, de la conduite de nos minis-, tres. Le décret constitutionnel sur l'organisation militaire a été présenté à l'acceptation. Les ministres n'ont accepté que la partie de ce décret, qui concerne l'augmentation de la paye. Eh! qui, sait si l'on ne présente pas cet article à nos frères des divers régimens comme une faveur royale? D'où vient ce retard pour l'acceptation de quel-. ques articles, qui étant constitutionnels ne peuvent être refusés, et qui, étant destinés à servir de base aux autres articles sur le pouvoir inilitaire, ne doivent pas être retardés. Pourquoi le garde-dessceaux répond-il aux commissaires, chargés de

(1) Cette maxime est d'un tel danger, qu'un homme libre ne doit l'avancer qu'en tremblant, Il n'y a jamais. que la nécessité absolue, jointe au succès, qui puisse faire pardonner celui qui ose la suivre.

veiller à l'envoi des décrets, que le roi a mis le décret dans sa poche? Qu'est-ce que ce veto de poche, que le genie ministériel substitue au veto absolu, refusé par la nation au chef du pouvoir exécutif? La responsabilité n'est donc qu'un vain nom? Il est vrai qu'il n'y a point encore de tribunal qui puisse la déclarer encourue. Un ministre renvoyé au châtelet, seroit renvoyé à lui-même.

Formation des districts et départemens.

Lorsque les assemblées administratives seront formées, les factieux sauront au juste quel est Tétat de leurs forces. S'ils ont obtenu la majorité des places dans la majorité des assemblées, la contre-révolution sera faite, sans qu'il leur en coûte autre chose que l'or qu'ils auront prodigué, ou les bassesses qu'ils auront faites pour obtenir des suffrages. Tenant les rênes des administrations partielles, et coalisés avec le ministère, toutes les forces se trouveront dans leurs mains; il faudroit une nouvelle insurrection pour rejeter ce joug, que nous aurions sottement remis sur nos têtes.

Si les aristocrates ne sont pas les plus forts dans les assemblées administratives, ce que leurs succès dans les municipalités pourroient faire craindre, ils, useront alors de tous leurs autres moyens; la séduction des troupes; la division des corps qu'ils ne pourront séduire; les querelles de ville à ville, de district à district; les secours étrangers, et, pardessus tout, les libelles et l'accaparement du numéraire.

On sent que, dans ce cas, il sera essentiel que les assemblées administratives soient composées, d'hommes fermes, courageux, actifs, prudens, capables d'effrayer les aristocrates (1), et de main

(1) On nous a assuré que les députés patriotes rioient

tenir la multitude. Il ne faut donc pas regarder que les élections qui vont avoir lieu, doivent moins influer sur la révolution que celles des officiers municipaux.

Il seroit bon que le peuple électeur sût trèsprécisément quelles seront les fonctions de ces deux sortes d'assemblées. Il est possible de les lui peindre sous des images repoussantes, et toutefois capables de les lui bien faire connoître. Les districts tiendront la place des subdélégués; les départemens remplaceront les intendans. Mais ce que les subdélégués et les intendans faisoient d'une manière odieuse et tyrannique, parce que, d'un côté, ils étoient forcés d'obéir aveuglément aux ministres, et, de l'autre, qu'ils cherchoient à s'enrichir, les districts et les départemens le feront avec modération, avec fraternité, s'ils sont composés d'hommes qui ne puissent point se coaliser pour faire le mal public, et qui soient dans le cas de se surveiller les uns les autres. Sans doute, le pouvoir qui corrompt si-tôt même de bons citoyens, emportera quelques-uns de nos futurs administrateurs, jusqu'à se faire despotes en souserdre; mais il faudra, dès le principe, user à outrance de la loi de la responsabilité. Un exemple sévère dès le commencement, et tout ira bien., Recommander au peuple de ne point élire les évêques, les abbés, les ecclésiastiques, qui ont intérêt à contre-carrer les opérations sur les biens ecclésiastiques; lui dire qu'il faut exclure les ducs, les comtes, les marquis, sur-tout ceux qui n'ont pris ces titres que depuis la révolution; lui répéter que les fiscaux, les parlementaires, les officiers

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du mot aristocrate qui se trouve dans toutes les adresses des communes et des sociétés; eh! les ingrats, ils ignorent ce qu'ils doivent à ce saint mot. Malheur à nous s'il devient plaisant, et s'il cesse de bien désigner les enne mis de la révolution dans toutes les classes 1

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de judicature, sont ennemis d'un régime qui leur arrache des pouvoirs, dont ils ont si indignement abusé; telle doit être, dans ce moment, la tàche de tous les citoyens dont l'opinion peut influer sur les esprits dans chaque arrondissement.

Un des plus grands vices des élections municipales, c'est qu'elles ont eu souvent pour objet des membres de l'assemblée nationale. Il est nécessaire d'éviter de retomber dans cette faute, lors des prochaines élections. Un homme ne peut pas remplir deux postes à-la-fois. Etre à Paris et à cent lieues de cette ville; faire des loix et régir une commune. L'inconvénient est plus grand encore pour les départemens et les districts; parce que de trop grands pouvoirs se trouveroient réunis dans une même main. Il est digne du désintéressement et de la fierté de MM. les députés de renoncer à des places subordonnées au pouvoir exécutif, et de ne pas se faire un titre auprès de leurs concitoyens d'une mission qu'ils n'ont pas encore achevé de remplir.

Volontaires de la Bastille.

Les citoyens qui concoururent le plus à la prise de la Bastille, et ceux qui se sont depuis mêlés parmi eux, se trouvent, dans ce moment, dans un tel état, qu'après s'être adressés à la municipalité de Paris, pour obtenir de l'occupation et des secours, ils ont été forcés de s'adresser à l'assemblée nationale elle-même.

Plusieurs de ces braves gens, c'est-à-dire, des véritables vainqueurs de la Bastille, avoient des emplois, des places; ils les ont abandonnés pour se livrer à la révolution.

Les cabales, les brigues, d'un côté ; de l'autre, les récompenses dues aux braves sergens et caporaux des gardes-françoises, et la noble fierté qui empêcha les vainqueurs de la Bastille d'aller se faire connoître dans les districts, les a éloignés des No. 36. * D

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places d'officier de la garde soldée. Mais, outre ces places, il y a un état-major immense, dispendieux, effrayant n'est-il pas bien étrange que, de toutes les épaulettes qui le composent, il n'y en ait pas eu une seule qui ait pu s'ajuster à une épaule de vainqueur de la Bastille ? Les soins multipliés à l'infini, dont M. le commandant-général étoit surchargé au commencement de la révolution, les complimens et la réception des brioches dont on l'accabloit, ne lui permirent pas de s'enquérir si, parmi ceux qui avoient versé leur sang ou hasardé leur vie, le 14 juillet, il n'y en avoit pas quelques uns qui méritassent d'entrer en concurrence, pour des places fortement appointées, avec Messieurs les Cincinnati, qui s'étoient distingués en Amérique, et qui avoient eu l'honneur de le connoître. Quelques gens de lettres, qui ont assisté ou aidé à la prise de la Bastille, et qui, par ce qu'il suffisoit de l'avoir préparée, n'ont pas cru devoir se prévaloir de leurs efforts militaires (1), ont vainement réclan.é l'attention de tous ceux qui avoient des récompenses à distribuer pour ces braves gens: ils languissent, faut-il le dire, dans une misère aussi affreuse, que si on vouloit les punir d'avoir porté le coup mortel au despotisme de la cour, et d'avoir sanvé la ville de Paris.

Ils s'adressent enfin à la nation. Ici nos sollicitations doivent cesser; la nation ne peut pas être

(1) On saura peut-être quelque jour en détail un fait singulier: Des deux journalistes qui ont soutenu le plus constamment les principes de la révolutton, l'un a failli étre pendu au Palais-Royal, pour avoir annoncé la prie de la Bastille; et l'autre a sauvé la vie à celui-ci, en verant, au bout de quelques minutes, porter la mêmẹ nouvelle, et en la prouvant par l'exhibition de deux feuillets du registre de la Bastille, qu'il avoit eu la précaution de cacher dans son sein.

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