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datées de Fontainebleau, du 6 octobre 1769, signées PHLIPEAUX, de la main de Duval fils; et, ce qui est plus étonnant, ces fausses lettres-de-cachet, au nom du roi, annonçoient liberté, ordonnoient au gouverneur le comte de Jumilhac de nous mettre dehors, tandis que les captureurs cachés dans le cabinet, à côté de la chambre du conseil, se montrent aussi-tôt qu'ils creyent qu'on a signé la décharge requise par le gouverneur. Et moi, diso Marais, accompagné de ses satellites armés, JE M'OPPOSE A L'ORDRE DE VOTRE LIBERTÉ. J'EN AI UN CONTRAIRE DE VOUS MENER QUEUQUE PART TOUT-A-L'HEURE GAROTTÉ ET LIÉ. Quel scélérat que ton chef, de se jouer du roi et des ministres, de contrefaire des lettresde-cachet, de se moquer des citoyens innocens, de leur Jiberté, de leur vie, de l'autorité, de la justice et des Joix, d'abuser de la confiance et du pouvoir qui ne lui ont jamais été donnés que pour s'en servir contre les malfaiteurs! Sartine, qui ne se doutoit pas que je connusse l'écriture de Phelippeaux, et celle de son sccrétaire, enrageoit d'ailleurs de n'avoir point de prise sur nous. Son dessein étoit 1°. de nous obliger de sortir de notre chambre pour s'emparer de nos papiers; 2. pour donner au gouverneur de geôle la décharge de nos personnes, sans laquelle on ne pouvoit nous transférer ailleurs, ai nous mettre dehors; et c'est pour cela qu'il nous montroit effrontément de faux ordres de liberté qui lui avoient réussi pour d'autres victimes avant nous: 3o. pour exciter nos plaintes et la révolte de nos sens, en prendre occasion de nous insulter, de nous faire lier et garotter despotiquement comme des criminels révoltés, et de nous faire transférer ailleurs l'un après l'autre, sans pouvoir néanmoins nous inculper, ni pouvoir nous rien reprocher qui autorisât de tels attentats et de tels dénis de justice. On ne pourroit bien définir la scélératesse de Sartine, son orgueil, son ambition, son audace, ses hautes trahisons, ses prévarications, son despotisme, ses cruautés, ses crimes de lèse-maajesté, de lèse-nation, de lèse-humanité, pendant dix-huit ans, où, sans nul talent ni le plus petit mérite, ses vices infâmes l'avoient élevé à la police. Jamais on ne heurta plus cffrontément que lui le sens commun, et ne fut plus loué des sots périodistes qui lui étoient vendus, jusqu'à préconiser sans pudeur ni restriction des actions qui méritoient la plus sévère punition.

Ce

Le comte de Jumilhac, qui se prêtoit forcément ? foutes les méchancetés de Sartine, et répugnoit à me receler; parce que je lui avois rendu d'assez grands services, exigea, avant mon départ, que je lui donnasse la dé charge de ma personne le 13 octobre 1769; mais connoissant aussi bien la signature du vieux comte de Saint-Florentin et jeune duc de la Vrillière que l'écriture de Duval et de Sartine, je fis sur le registre verd des sorties de la Bastille ma protestation, tant contre la fausse lettre de liberté qu'on me communiqua, que contre la translation tortionnaire qui fut aussi-tôt exécutée à huit heures du soir pour le donjon de Vincennes, où, les jours suivans, furent conduits de la même manière six de mes compagnons, avec le sieur Rinville. Nous ne sortimes donc d'un enfer que pour rentrer dans un autre beaucoup plus terrible et plus secret, entre les mains de Rougemont, que je nommois le démon Rougemontagne. geolier, comme ceux dont j'aurai à parler, n'étant, dans sa vile place, que dépositaire, receleur, gardien, nourricier, vakt despote, créature gagée et tyran, passoit impunément sur les ordres de son chef, ajoutoit les persécutions majeures aux moindres alternativement, se tourmentoit comme les démons de Milton, pour aviser de nouveaux moyens de me tourmenter, supprimoir mes plaintes et mes déclarations, faisoit de faux rapports, me disputoit ma pension; et, sous prétexte de nouveaux ordres qu'il ne montroit jamais, exerçoit les nouvelles tyrannies qu'il inventoit, et me resserroit de plus en plus; en sorte que, n'étant jamais visité de personne, il m'étoit impossible d'obtenir ni liberté, ni raison, ni justice, ni espoir d'être entendu sur aucun point. Quelque attention même que j'eusse à ne lui pas donner de prise sur moi, et quelque patience même dont je fisse usage pour souffrir en paix, leurs faux rapports et leurs mensonges me faisoient toujours éprouver de nouvelles et de plus cruelles tribulations, sans les pouvoir éviter. J'ai essuyé douze de es longues tribulations toujours dissemblables. Le parlement, par un abus incompréhensible, ne visitoit ni la Bastille, ni Vincennes, ni Bicêtre, ni la Salpêtrière, ni les prisons de Saint-Martin, de Saint-Germain-des-Prés, de Montmartre et de l'hôtel de la Force, ni les cinquantesept maisons de force, que tiennent secrètement sous T'autorisation et la direction de la scélérate police de préendus maîtres de pension, ni enfin des hospices, qui

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Ron de Pari

M. Le Marquis de Favras élant à lhotel de Ville y Fart sont testament de Mort avec toutte tranquilité dun Homme qui ne serait pas Comme lui Condamné à être pendu

Bureau des Revolutions de Paris Rue des Marois F. S.G.No 20.

la

recèlent et tyrannisent, sous l'inquisition de fa pofice, l'insu du roi et du ministère, une multitude d'innocens, de citoyens jeunes et vieux, une multitude de libertins, de coupables de tous états, d'infirmes, d'imbécilles, de vieillards, d'impotens, de femmes enceintes, de filles folles ou libertines, d'enfans en bas âge logés pêle-mêle, abandonnés à la discrétion de ces geoliers, sans être vis sités jamais de la police ni du ministère, quoique la juss tice, la charité, leur soient dus avant tous autres.

La suite à l'ordinaire prochain.

CHATELET.

Le comité des recherches de la commune, poursu vant sans relâche ses glorieux travaux, vient de décou vrir un nouveau Faveras. C'est d'après ses diligentes per quisitions qu'il a fait arrêter, avant - hier, le sieur da Saint-Félix, demeurant rue et barrière Notre-Dame-desChamps, et conduire dans les prisons du Châtelet. I est accusé d'avoir parcouru plusieurs provinces, d'y avoir répandu des propos incendiaires, et particulièrement d'avoir fait ses efforts pour persuader aux habitans des villes et des campagnes qu'il ne falloit pas payer les impôts de quelque nature qu'ils soient. Son procès va être instruit, au plus tard, la semaine prochaine. Nous rendrons un compte exact de ses dépositions dans le numéro prochain.,

Testament du sieur Thomas de Mahy de Faveras, Exécuté en place de Grève, après avoir fait amende honorable devant la principale porte de l'église de Notre Dame.

L'an mil sept cent quatre-vingt-dix, le vendredi dixneuf Février, après-midi: nous Jean-Nicolas Quatremere, conseiller du roi en son Châtelet de Paris, assisté de Me. Jean Drié, greffier-commis, sommes transportés à l'hôtel-de-ville, pour faire mettre à exécution le jugement en dernier ressort rendu au Châtelet de Paris, la Compagnie assemblée le jour d'hier, lequel con lamina Thomas de Mahy de Faveras, à faire amende honora

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