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Affaire de la caisse d'escompte.

Dans les séances qui ont été consacrées à examiner les causes de la rareté du numéraire et les opérations de la caisse d'escompte, les mandataires ont du moins eu pour prétexte le public et l'état actuel des choses. Leur comité des rapports n'a pu dire quelles étoient les causes de la rareté du numéraire; mais il a sagement proposé des moyens de le rendre plus rare; savoir, 1o. d'étendre la circulation des billets de caisse aux provinces et principalement dans les villes de commerce, en y établissant des bureaux pour distribuer et échan-. ger ces billets. 2o. De classer par profession les porteurs de billets pour la somme d'argent qui se distribue journellement à la caisse, et admettant les uns et excluant les autres de la distribution.

Comment pourroit-on douter de la loyauté de ce rapport, quand on pense que, dans son plus grand éclat, la caisse d'escompte n'a pu obtenir assez de confiance dans les provinces pour qu'elles se chargeassent de la circulation d'un seul de ses billets?On ne voit pas ce qu'il y auroit à gagner dans ce mioment en leur offrant la funeste facilité des billets de caisse. On attireroit bien par-là une partie de leur numéraire à Paris; mais ce ne seroit pas pour augmenter la circulation et pour faciliter le commerce. Cette opération ne seroit utile qu'à l'infàme coalition de financiers qui accapare l'argent, et qui croit que le peuple sera assez stupide pour imputer ce malheur à l'assemblée nationale et à la révolution.

Quant à la proposition de la classification des pore teurs de billets, elle feroit croire qu'il n'y a plus rien à tirer de l'opération des numéros que M. Brousse des Faucherets distribuoit au palais-cardinal. Il n'y a pas un banquier qui ne donnât au moins 12 liv. par billet de mille livres, pour être inscrit comme Cordonnier ou tailleur, puisqu'avec l'argent qu'il

recevroit

recevroit, il pourroit gagner encore douze livres sur le premier citoyen qui auroit besoin d'argent, et qui ne se trouveroit pas de la profession admise à en recevoir à la caisse.

Un homme de sens ne se seroit guère arrêté à ces secrets d'empirique; il auroit dit, Messieurs, nous sommes députés des districts pour faire un plan municipal, et non pour examiner les opérations de la caisse d'escompte. Nous n'y comprenons rien; seulement nous savons qu'il se fabrique des écus neufs dans tout le royaume, au coin du roi des Français, et qu'il n'en paroît pas un seul dans la circulation. Nous savons que le trésor royal paye en billets de caisse, et qu'il exige les appoints en comptant, que les payeurs de rente donnent des billets en payement, et n'en reçoivent point; qu'ils forcent plusieurs rentiers à se réunir, afin de se partager un billet. Le mont-de-piété ne prend point de billets, et il en donne à tous les forts emprunteurs. La loterie royale paye les lots en billets autant qu'elle le peut, et les receveurs ne prennent point de billets, même quand les mises excèdent ces billets. Les receveurs des deniers royaux ne veulent point recevoir de billets. On voit l'argent comptant entre les mains d'une trentaine de Savoyards et de quelques marchands de vin. Il suffit de consentir à un escompte plus ou moins fort, pour qu'ils vous échangent sur le champ votre billet contre du numéraire. Cet affreux brigandage a commencé aussi-tôt que le ministre adoré de la France a fait adopter à l'assemblée nationale son plan sur la caisse d'escompte. L'assemblée nationale, pleine de confiance en ses lumières et en ses vertus, a fait ce qu'il a voulu, a tourné son décret comme il l'a voulu, a modifié son décret comme il l'a voulu. L'événement ne répond pas à ce qu'il avoit annoncé ; il est même absolument contraire : le numéraire est plus rare qu'auparavant. Nous n'y comprenons rien, Messieurs; le ministre adoré a, sans doute, No. 32.

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quelques grands projets. Imitons l'assemblée na tionale; ne le contrarions pas. Cet état des choses ne peut pas durer long-temps; ainsi, en attendant que nous y comprenions quelque chose, travaillons au plan municipal; car il est bien essentiel qu'il y ait une autorité fixe et constitutionnelle établie dans cette ville immense, avant que le projet des accapareurs d'argent vienne à éclater.

Réponse de la Société de la révolution d'Angleterre à M. l'archevêque d'Aix, président de l'assem

blée nationale.

« Les membres de la société de la révolution d'Angleterre prient l'archevêque d'Aix de recevoir leurs plus sensibles remercimens de la lettre qu'il a adressée au lord Stanhope, leur président, et par laquelle il leur a fait part de l'arrêté de l'assemblée nationale de France.

» Ils n'ont jamais éprouvé de plus vive satisfaction que celle que leur ont donné sa lettre et la mention pleine de bonté, dont l'assemblée nationale a pris plaisir à honorer leur adresse de félicitation.

» Ils ont ressenti particulièrement la justice que cette auguste assemblée leur a rendue, quand elle a reconnu dans leur adresse l'influence de ces principes de bienveillance universelle, qui doivent dans tous les pays du monde, réunir les amis du bonheur public et de la liberté.

» Leurs cœurs sont pénétrés de ces principes et ils ne désirent rien avec plus d'ardeur que d voir arriver le moment où ces principes domi nans dans le cœur de tous les hommes, doiven éteindre l'envie et les haines nationales, extermi ner de la surface de la terre l'oppression et la se vitude, et faire disparoître les guerres, ces ter ribles erreurs des gouvernemens.

» Ils envisagent avec transport la perspective d ces temps fortunés qui s'ouvrent à leurs regards

et dont les décrets de l'assemblée nationale sem blent donner un gage au genre humain.

>> La société de la révolution eroit devoir ajouter dans cette circonstance que, parmi les plus importans bienfaits de la révolution de France, elle compte la leçon salutaire que la tendance de ces grands mouvemens doit donner à tous les rois.

» Les Français sont heureux d'avoir un rọi si justement appellé le premier des citoyens, qui sait céder à leurs désirs, qui les encourage à reprendre leurs droits, et que leurs suffrages ont couronné par le titre de restaurateur de la liberté française.

» Ce titre l'élève au plus haut degré de gloire. » Puissent les despotes du monde reconnoître leur erreur insensée ! puisse son exemple leur apprendre qu'ils ne pourront jamais être plus grands, plus heureux, et plus puissans que lorsqu'abjurant le pouvoir despotique, ils se placeront eux-mêmes, ainsi que les rois de France et d'Angleterre, à la tête de la constitution d'un gouvernement libre et d'un peuple éclairé ».

Oui, oui, elles s'éteindront ces haines nationales si cruelles et si absurdes. Il suffit que les hommes éclairés des deux pays s'entendent pour éclairer leurs concitoyens ; il faut qu'il se fasse entre les gens de lettres, qui sont les ministres des peuples, la même ligue qui s'étoit formée entre les ministres des rois contre les peuples. Peut-on penser sans frémir que des ministres de diverses puissances étoient d'intelligence pour faire faire une guerre, parce qu'ils savoient combien elle devoit leur produire à chacun, de quelque côté que tournât la victoire? Il a existé de pareils monstres; et, selon notre louable usage, sur l'apparence, nous les avons adoré.s

Faits et observations.

Nous avions annoncé, d'après la voix publique et sur la foi d'un très-grand nombre de papiers

nouvelles, que la ville de Sens s'étoit distinguée par dessus toutes celles de la France, en appelant à la première place municipale un simple et vertueux jardinier. Le sieur Martin de Crécy a pris la peine de nous écrire, pour nous apprendre que c'étoit une erreur grossière. Il nous assure « que le maire de Sens est M. le marquis de Chambonas, ci-devant commandant de cette ville, et que l'histoire du jardinier est un conte qu'inventa sûrement quelque fabuliste aristocrate».

Nous demandons pardon à nos frères de Sens, et en particulier à M. Martin de Crécy, d'avoir cru qu'il y avoit parmi eux assez de vraie grandeur, de patriotisme et de lumières, pour préférer un jardinier à un marquis. Nous avions eu la simplicité de croire que toute une ville avoit voulu venger la classe utile et respectable des cultivateurs de l'indigne oubli où elle est plongée depuis plusieurs siècles. Nous nous rétractons; la ville de Sens a pour maire un marquis.

:

Les personnes detenues à Bicêtre ont voulu forcer l'enceinte qui les sépare de nous elles se sont d'abord rassemblées dans les cours et dans les corridors; mais la garde ordinaire les a forcées de rentrer dans leurs cases. On a demandé main-forte à Paris. Quelques officiers municipaux s'y sont transportés avec 150 hommes. On s'est apperçu qu'il y avoit eu un trou pratiqué à un mur extérieur. On y a placé une garde. Un prisonnier ayant tenté de s'évader, la sentinelle lui a lâché un coup de fusil qui l'a blessé au bras; un second coup de fusil l'a étendu roide moit. Cet exemple a effrayé ceux qui vouloient tenter de le suivre, et l'ordre a été rétabli.

Il paroît, par une foule de lettres que nous recevons des provinces, qu'une partie des troubles qui y règnent viennent de la dureté des seigneurs, et plus encore de leurs fermiers, à exiger les droits féodaux, même ceux qui sont supprimés sans indemnités. Les châteaux de MM. d'Aiguillon et de

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