Page images
PDF
EPUB

cesse-t-il d'ètre un homme, d'être votre frère ; c'est un citoyen qui a une grande dette à payer à la société ; et la société doit à ce débiteur tous les adoucissemens qu'il n'est pas strictement et évidemment nécessaire de lui refuser.

Que des Français eussent été, avant la révo lution, spectateurs muets de cette atrocité gratuite, il n'auroit pas fallu s'en étonner; ils ne savoient être ni hommes ni citoyens; mais que, depuis la révolution, trois cent mille Français libres n'aient élevé une voix protectrice pour faire enlever le corps du supplicié avant qu'il fut apperçu par celui qui alloit l'être; il n'y a que trop de quoi faire craindre que les aines françaises ne s'éleveront jamais.

Un citoyen, ce fait est certain, un citoyen s'est avancé, l'arrêt à la. main, pour faire cette juste et touchante réquisition; une bayonnette nationale l'a repoussé.

Leur corps à été rendu à leurs parens, qui ont fait célébrer un convoi dans l'église SaintAndré-des-Arcs. Le grand concours de citoyens qui y ont assisté, suffit pour prouver que les frères Agasse ont emporté avec eux les restes du préjugé dont nous sommes déjà étonnés d'avoir été dupes pendant tant de siècles.

Bureaucratic de l'assemblée nationale.

Un seul fait bien observé nous donne quel: quefois plus d'expérience que des observations éparses sur vingt faits différens. L'affaire de la commune de Saint-Jean d'Angély, que nous avons suivie, nous a fait connoître les progrès de la bureaucratie dans l'assemblée nationale. Or, citoyens, savez-vous à quoi vous conduiroit un tel abus? A être indignement vexés toutes les fois que vous auriez intérêt à une affaire à laquelle un député se trouveroit aussi intéressé dans un

posé.

sens op

J'ai déjà dit que la commune de Saint-Jean d'An

gély étoit divisée en deux partis; l'un composé de citoyens et de la municipalité, et c'est la véritable commune; l'autre de quelques nobles et de quel ques juges qui avoient formé une municipalité élective sans le concours de la commune.

Ces deux municipalités avoient remis leurs pièces au comité des rapports, pour faire juger leurs prétentions; mais elles n'avoient pas le même degré d'influence dans ce bureau. Le sieur Bonnegens, chef du corps de justice de cette ville, et le sieur Regnaud, soisans députés du bailliage de Saint-Jean d'Angély, et réputés tels à défaut d'examen de leur honteuse élection (1), protégeoient la faction aristocratique de Saint-Jean d'Angély. Trois fois le rapporteur de cette affaire a été changé, parce que trois fois un député extraordinaire de cette ville avoit instruit celui qui étoit chargé du rapport (2).

Les nouvelles élections ont eu lieu avant que l'affaire ait été rapportée. L'ancien maire non électif a été élu à la pluralité de 277 voix sur 295. L'autre parti a réclamé contre cette élection.

Le député extraordinaire de cette commune s'est présenté sur le champ au comité des rapports, pour obvier à une surprise semblable à celles qu'il avoit éprouvées; mais comme il s'agissoit d'une élection, le comité des rapports l'a renvoyé au comité de constitution, où il a demandé à être entendu, avant qu'on s'occupat de l'élection du maire de S.-Jean d'Angély.

M. Desmeuniers, sans l'entendre, s'est chargé de ce rapport, et la présenté dans la séance du mercredi 11. M. Dubreuil, chargé des pièces de l'affaire des deux municipalités, lui a offert, à haute voix, de les lui remettre, afin qu'il pût s'ins

truire.

Il n'est point étonnant que M. Desmeuniers n'ait

[1] Vide No. 18, p. 19. [2]ide N°. 26, p. 27.

pas voulu prendre le temps de connoître une af faire qu'il devoit rapporter. Deux députés y prenoient un intérêt personnel; il est naturel d'aimer ses collègues, et de les servir chaudement. Peutêtre que, s'il eût lu les pièces que lui offroit M. Dubreuil, et celles que le député extraordinaire lui eût mis sous les yeux, il n'eût pu user de bienveillance pour les deux députés de Saintonge, protecteurs de la petite coalition de juges et de nobles, qui ont assez démérité de leurs concitoyens, pour craindre de retomber dans la classe de simples citoyens.

[ocr errors]

Il ne nous est pas possible de prononcer sur la plupart des faits énoncés dans le rapport de M. Desmeuniers; mais nous voyons M. Desmeuniers dire que le maire de S.-Jean d'Angély a été à la porte, s'emparer du décret sur les municipalités, quoiqu'il ne fût plus en fonctions; et nous lisons dans la séance du mardi 2 février, que M. Desmeuniers, pour faire sentir la nécessité d'un article qu'il proposoit, a cite S.-Jean d'Angély, où l'ancienne municipalité non élective et un comité élu librement remplissent les fonctions municipales (1).

Qui faut-il croire, M. Desmeuniers du 2 février, ou M. Desmeuniers du 11 février? Pourquoi donc un galant homme se donne-t-il ainsi des soufflets de sa propre main? Un point qu'il est bien essentiel de remarquer, c'est que le décret adopté de faire faire sur les lieux un procès-verbal des faits, par le maire de la Rochelle, a été proposé particulièrement par M. Regnaud, rayé du tableau des avocats de cette ville, lesquels composent la municipalité qui vient d'être élue, et adepte de la petite coalition judiciaire qui a été exclue des places

[1] Vide Assemblée nationale permanente, chez Devaux, P. 161.

municipales. Or, si le maire de la Rochelle, choisi par M. Regnaud, bien plus que par l'assemblée, compose son enquête de ceux qui ont fait parvenir des instructions à M. Desmeuniers, c'est-à-dire des membres de la coalition, il est clair qu'une é ection par laquelle un citoyen a obtenu toutes les voix, hors dix-huit, dans deux assemblées primaires, pourra devenir problématique. Mais, ce qui ne le sera pas, c'est le danger d'avoir pour ennemi des députés à l'assemblée nationale.

Faits et Observations.

M. le maire a prié le roi et la reine de visiter les établissemens de bienfaisance dans cette ville. Leurs majestés se sont rendues, avec M. le dauphin, à Notre Dame, où elles ont entendu la messe; de-là elles ont été à l'hôpital des EnfansTrouvés, où la présence de tant de malheureux enfaus a donné à M. le dauphin une grande leçon. La propreté et l'ordre de cet hospice ont paru satisfaire le roi et la reine. Le peuple s'est porté par-tout sur leurs pas, et a témoigné son ivresse par des cris et des applaudissemens.

Le 10, on s'occupoit dans l'assemblée des représentans municipaux, de la caisse d'escompte. L'orateur fut interrompu par un citoyen qui cria, au voleur; il lui avoit été pris un porte-feuille, contenant pour 15,000 livres de billets. On a fermé les portes; chacun a défilé, et a fait voir qu'il n'avoit pas le porte-feuille qui s'est trouvé derrière un tableau.

Un particulier connu nous écrit qu'il a voulu retirer un effet, engagé au Mont-de-Piété ponr une somme de 17 livres ; qu'il a offert un billet de 200 livres à Mad. Damien, commissionnaire au Mont-de-Piété, rue de la Ferronnerie, laquelle a refusé de le recevoir pour comptant, parce que le Mont-de-Piété ne les reçoit pas lui-même. Il seroit temps enfin qu'on fixat quel est celui qui

[ocr errors]
« PreviousContinue »