Page images
PDF
EPUB

en sûreté le roi et sa famille, qu'elles ne répandissent l'alarme et l'esprit de désertion parmi les patriotes, et qu'elles ne ralliassent aux armées combinées, à leur entrée en France, tous les roya listes de l'intérieur, les partisans de la noblesse,' du clergé, des parlemens, de l'ancien régime et tous les mécontens; mais ces menaces, trop ridiculement exagérées pour qu'on pût croire à leur sincérité, n'épouvantèrent ni ne rallièrent per

sonne.

[ocr errors]

Les révolutionnaires montrèrent bien plus d'habileté dans le choix des moyens qu'ils adoptèrent pour exciter la désertion dans l'armée des puissances. Ils établirent, en principe, « que la déser» tion n'étoit que l'exercice honorable d'un droit légitime, pour quiconque abandonneroit une » terre asservie, pour se réfugier sur celle de la » liberté; que les hommes libres avoient seuls une » patrie, et qu'il ne pouvoit exister aucune obli»gation, de la part de l'homine privé de ses droits » naturels, envers celui qui les lui avoit ravis »; et l'assemblée décréta, en conséquence, le 2 d'août, au rapport de Guadet :

«1°. Que les officiers ou soldats des armées ennemies qui abandonneroient leurs drapeaux, pour venir vivre sur la terre de la liberté et de l'égalité, seroient admis au nombre des citoyens français, en prenant la cocarde aux trois couleurs, et en prêtant le serment civique, et recevroient, à titre

d'indemnité des sacrifices qu'ils auroient pu faire, une gratification de 50 francs, et un brevet de rente viagère de 100 livres, payable par quartier, et d'avance, et réversible sur la tête de la veuvė de celui qui se seroit marié en France, le tout sans être forcés de contracter un engagement militaire ; et que ceux qui voudroient contracter un tel engagement seroient admis, à volonté, dans le corps qu'ils voudroient choisir, et recevroient, en sus de la gratification et de la pension viagère, le prix d'engagement fixé par les lois antérieures pour les différentes armes ;

» 2°. Qu'il seroit formé un tableau général de tous les sous-officiers et soldats ainsi admis au nombre des citoyens français, et une masse générale du montant de leurs pensions, lesquelles, à mesure de leur extinction, seroient réversibles sur les survivans, jusqu'au moment où ils jouiroient tous de 500 livres de pension viagère; qu'en conséquence, la trésorerie nationale mettroit pour cet objet une somme de deux millions à la disposition du ministre de la guerre, et que le produit des biens des émigrés, dont la vente étoit décrétée, et subsidiairement les revenus de l'état, seroient affectés et hypothéqués au paiement desdites rentes;

» 3°. Que pendant la durée de la guerre, lesdits sous-officiers et soldats qui ne voudroient point contracter d'engagement militaire, se retireroient

dans l'intérieur du royaume, et au moins à vingt lieues des frontières, et qu'il leur seroit indiqué des villes où ils trouveroient des interprètes, et où il leur seroit libre de fixer leur résidence. >>

Quelle amorce pouvoit être plus séduisante pour tous les soldats lâches, dégoûtés du service, mécontens de leurs officiers, ou de la modicité de leur solde, que la certitude d'être mieux payés, et d'avance, sans avoir rien à faire, et sans être exposés à aucun danger? Aussi ce décret multiplia-t-il beaucoup les désertions dans les armées autrichiennes et prussiennes, au lieu que le manifeste publié par le duc de Brunswick, ne fit aucune impression sur les soldats français.

[ocr errors]

СНАРІTRE XXІХ.

[ocr errors]

Attentats commis

Lettre touchante du roi à l'assemblée. - Pétion vient présenter une pétition tendante à faire décréter la déchéance du roi et la convocation d'une convention nationale. — Arrangemens définitifs pour le départ du roi ; pressentimens sinistres de M. de Montmorin. M. Lefort revient de Normandie. Sa majesté me fait dire de suspendre les préparatifs de son départ. - Indiscrétion et perfidie qui empêchent l'exécution du nouveau plan. Alarmes de madame Elisabeth. Rapport du comité sur la conduite de M. de Lafayette; le décret d'accusation proposé contre lui est rejeté. par la populace contre les députés qui ont voté en faveur du général; ils en portent vainement leurs plaintes à l'assemblée. Nouvelles pétitions pour la déchéance du roi. Le jour de l'insurrection générale est fixé. — Négociation entamée avec Brissot. Marché fait avec Santerre ; trait de générosité de la reine à son égard.— Le procureur-syndic du département et le inaire rendent le compte le plus inquiétant des dispositions de la capitale. Mesures prises pour la défense du château. Le tocsin sonne, la générale bat; la municipalité est chassée violeminent de l'hôtel-de-ville. La commune révolutionnaire formée par des conciliabules de sédi̟tieux, est installée et donne le signal de l'insurrection.

QUOIQUE le manifeste du duc de Brunswick ne fût point connu officiellement, sa grande publi

[ocr errors]

cité et son insertion dans toutes les gazettes, constatóient assez son existence, pour mettre le roi dans la nécessité de faire, à cette occasion, une démarche quelconque auprès du corps législatif. Les ministres se rendirent en conséquence à l'assemblée le 3 d'août, et y présentèrent un message de sa majesté, conçu en ces termes:

« Il circule, monsieur le président, depuis » quelques jours, un écrit intitulé: Déclaration » de S. A. S. le duc régnant de Brunswick-Lu» nebourg, commandant les armées combinées » de LL. MM. l'empereur et le roi de Prusse, » adressée aux habitans de la France. Cet écrit » ne présente aucun des caractères qui pour»roient en garantir l'authenticité; il n'a été » envoyé par aucun de mes ministres dans les > diverses cours d'Allemagne qui avoisinent le » plus nos frontières. Cependant sa publicité me » paroît exiger une nouvelle déclaration de mes » sentimens et de mes principes.

» La France se voit menacée par une grande » réunion de forces. Reconnoissons tous le besoin » de nous réunir. La calomnie aura peine à croire » la tristesse de mon coeur, à la vue des dissen-» tions qui existent et des malheurs qui se pré» parent; mais ceux qui savent ce que valent » à mes yeux le sang et la fortune du peuple, » croiront à mes inquiétudes et à mes chagrins. » J'ai porté sur le trône des sentimens paci

« PreviousContinue »