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Ces choses arrivèrent en Béthanie, au-delà du Jourdain, là où Jean baptisait 1. Le lendemain, Jean vit Jésus venir à lui, et dit : Voici l'agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde; c'est celuici dont je disais : Après moi vient un homme qui est avant moi; car il est plus ancien que moi. Et je ne le connaissais point; mais, afin qu'il soit manifesté en Israël, je suis venu baptiser dans l'eau. Et Jean rendit témoignage, en disant : J'ai vu l'Esprit descendant du ciel comme une colombe, et il s'est reposé sur lui. Et je ne le connaissais point; mais celui qui m'a envoyé baptiser dans l'eau m'a dit: Celui sur qui tu verras l'esprit descendre et se reposer, est celui qui baptise dans le Saint-Esprit. Et je l'ai vu, et j'ai rendu témoignage que c'est le Fils de Dieu. » (S. Jean, 1, 15-34.)

Jean-Baptiste avait mené une vie austère dans le désert; c'est ce que d'autres ont fait aussi. Mais personne au monde, comme le remarque si judicieusement saint François de Sales, n'a pratiqué

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I » En Béthanie, au-delà du Jourdain. Paroles qu'on trouve dans la plupart des manuscrits grecs et dans la Vulgate. Dans quelques-uns de ceux-là, et dans le plus grand nombre des traductions nouvelles, on lit « Bethabara. » Origène préféra cette version à toutes les autres, et son autorité en entraînait bien d'autres. Toutefois il parait que ce grand écrivain avait oublié qu'il y avait deux bourgs de ce nom. Il paraît qu'il ne connaissait que la Béthanie dont l'Évangile parle souvent, el où Lazare demeurait avec ses sœurs. Celle-ci était située très-près de Jérusalem, au pied de la montagne des Oliviers, et par conséquent il n'en peut être question ici. Mais il y avait une autre Béthanie dans le territoire de la tribu de Ruben, au-delà du Jourdain. C'était là que Jean baptisait.

Le style grec ne les distingue pas l'une de l'autre ; mais le style hébraïque y met une différence. Au pied de la montagne des Oliviers était située Beth-hanie (Maison de dattes), ainsi appelée à cause du grand nombre de dattiers qui y croissent. Sur les bords du Jourdain, au-delà du fleuve, était Beth-hanie Maison de navigation), qu'on nommait ainsi à cause du passage du fleuve. Celle-ci fut appelée, plus tard, Bethabara, ce qui veut dire, dans l'interprétation, passage; probablement pour la distinguer de l'autre Béthanie, près de la montagne des Oliviers.

une abnégation de soi-même qui puisse être comparée à celle de saint Jean-Baptiste, puisqu'il demeura dans le désert, se privant de la vue de Jésus-Christ, dans l'intérêt de la gloire de Dieu et du salut des hommes. Le renoncement de soi-même est l'essence de la vertu. Le fils de Dieu a dit de celui qui exerçait cette abnégation « Nul ne s'est élevé d'entre les enfants des femmes plus grand que Jean-Baptiste. (S. Math. xi, 11.) »

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Le lendemain Jean s'arrêta avec deux de ses disciples. Et, regardant Jésus qui s'avançait, il dit : « Voici l'agneau de Dieu. Et les deux disciples l'ouïrent parler, et suivirent Jésus. Et Jésus se retourna, et voyant qu'ils le suivaient, il leur dit que cherchez-vous? Ils lui dirent: Rabbi (c'est-à-dire maitre), où demeurez-vous? Il leur dit venez et voyez. Ils allèrent, et virent où il demeurait, et restèrent avec lui ce jour-là, car il était environ dix heures, (c'est-à-dire, quatre heures de l'après-midi.) » « Or André, frère de Simon-Pierre, était l'un des deux disciples qui avaient ouï parler Jean, et qui avaient suivi Jésus. Et le premier qu'il rencontra fut Simon son frère, et il lui dit : nous avons trouvé le Messie (ce qui veut dire le Christ.) Et il le conduisit vers Jésus; et Jésus l'ayant vu, lui dit : Tu es Simon, le fils de Jona; tu seras appelé Céphas (ce qui veut dire Pierre.) (S. Jean 1, 35-42.)

L'évangéliste Jean ne nomme pas le disciple de Jean-Baptiste, qui allait avec André vers Jésus. On a cru que c'était Barthélemi ou Jacques fils de Zébédée. Saint Epiphane nomme ce dernier. Mais comme Jean l'évangéliste ne se nomme jamais dans son évangile, même lorsqu'il parle de lui, il est très-probable qu'il était lui-même le disciple dont il s'agit. A cela on peut ajouter que Jean nous a conservé un bien plus grand nombre de prédications de Jean-Baptiste que les autres évangélistes.

Les deux disciples furent envoyés par Jean-Baptiste, au fils de Dieu. Celui-ci les renvoya probablement vers leur premier maître, car nous verrons, qu'après qu'llérode eut fait jeter Jean Baptiste dans les fers, ils furent rappelés par Jésus dont ils ne se séparèrent plus.

« Le lendemain Jésus voulut aller en Galilée, et rencontra Philippe, et il lui dit : « Suis moi. Or Philippe était de Bethsaïde, la

ville d'André et de Pierre. Philippe trouva Nathanaël et lui dit : Nous avons trouvé Jésus de Nazareth, fils de Joseph, duquel Moïse a écrit dans la loi et les prophètes. Et Nathanaël lui dit : Peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth? Philippe lui dit : Viens et vois. Jésus aperçut Nathanaël venant à lui, et dit : Voici vraiment un israélite en qui il n'y a pas de déguisement. Nathanaël lui dit : d'où me connaissez-vous? Jésus répondit, et lui dit: Avant que Philippe t'ait appelé, quand tu étais sous le figuier, je te voyais. Nathanaël répondit, et lui dit : Maître, vous êtes le fils de Dieu, le roi d'Israël. Jésus répondit, et lui dit Parce que je t'ai dit que je te voyais sous le figuier, tu crois : tu verras de plus grandes choses. Et il lui dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu montant et descendant sur le fils de l'homme.» (S. Jean, 1, 43–51.)

Ce Nathanaël, que l'évangéliste dans un récit aussi court que beaú, nous représente comme si vénérable, à qui Jésus lui-même rend un si grand témoignage, ne se rencontre plus sous ce nom, jusqu'après la résurrection de Jésus-Christ. (Voyez saint Jean, XXI, 2.) Il se livrait à la pêche avec Pierre, Jean, Jacques, frère de celui-ci, Thomas et deux autres de ses disciples, sur le lac de Tibériade où le fils de Dieu, ressuscité, leur apparut. Il était de Cana en Galilée. L'opinion de ceux qui le prennent pour Barthélemi, est, à mon avis, très-vraisemblable. Dans le passage cité plus haut, Jean semble compter Nathanaël au nombre des apôtres. Nulle part il ne nomme Barthélemi, les autres évangélistes ne nomment pas non plus Nathanaël, et là, où ils citent Barthélemi, ils ne le séparent jamais de Philippe, que nous voyons, dans saint Jean, être l'ami de Nathanaël. Le nom de Barthélemi n'est pas un nom proprement dit, il signifie fils de Tolmaï, et suppose un autre nom. Ainsi Pierre se nommait Simon Bar-Jonas, c'est-à-dire, fils de Jonas. Il est probable que cet autre apôtre s'appelait Nathanaël Barthélemi. On comprendrait difficilement pourquoi il ne fut pas question pendant trois ans de ce Nathanaël, ainsi surnommé, et pourquoi il eût (la chose étant ainsi expliquée) tardé à suivre Jésus-Christ aussitôt. Quelques-uns le prennent pour l'époux de Cana aux noces duquel Jésus avait assisté.

CHAPITRE III.

« Or trois jours après, on célébrait des noces en Cana de Galilée, et la mère de Jésus était là. Et Jésus fut invité avec ses disciples. Et le vin ayant manqué, la mère de Jésus lui dit : Ils n'ont pas de vin. Mais Jésus dit: Femme, qu'y a-t-il entre vous et moi? Mon heure n'est point encore venue. Sa mère dit aux serviteurs : Faites tout ce qu'il vous dira. Or il y avait six vases de pierre placés selon l'usage de la purification des Juifs, contenant chacun de deux à trois mesures. Et Jésus leur dit : Emplissez ces vases d'eau. Et ils les emplirent. Et Jésus leur dit : Versez maintenant, et portez-en à l'intendant. Et ils lui en portèrent. Quand l'intendant eut goûté de l'eau qui avait été changée en vin (et il ignorait d'où cela venait; mais les serviteurs qui avaient puisé l'eau le savaient), il appela l'époux, et il lui dit : Tout homme sert le bon vin d'abord, et le moindre après qu'on a bu largement : toi tu as gardé le bon vin jusqu'à présent. Jésus fit le premier de ses miracles en Cana de Galilée et manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui. »

Après cela il descendit en Capharnaum, lui et sa mère, et ses frères et ses disciples, et ils demeurèrent là peu de jours. (Saint Jean, 11, 1-12.)

Cana était situé, suivant les uns, à trois quarts de mille de Nazareth; suivant les autres, à un peu plus d'un mille (un peu plus de deux lieues.) Il paraitrait que la sainte Vierge avait été invitée à la noce non-seulement comme convive, mais encore comme parente. Elle s'aperçut que le vin allait manquer, c'était peut être après les premiers jours de la fête de noce qui durait sept jours chez les Israélites. Prenant une part vive à l'embarras où se trouveraient ses amis, si, au milieu de la fête, le vin venait à manquer, elle s'adressa pleine de foi et de confiance à son Fils, son Seigneur et son Dieu. Il lui avait été soumis à Nazareth; maintenant il semble

Ces paroles, << trois jours après, » doivent se rapporter, soit au départ de Jésus de Béthanie, soit à son arrivée en Galilée,

lui parler avec une espèce de dureté, qui était probablement adoucie par le son de sa voix et ses manières gracieuses. Lui seul savait quand arriverait le moment où son secours serait nécessaire, secours qu'il voulait donner comme Dieu afin de se glorifier comme fils de Dieu. C'était là le véritable but du miracle, but qui appartenait à sa mission divine. De même qu'à l'âge de douze ans, il avait dit avec dignité à ses parents : « Pourquoi est-ce que vous me cherchiez? Ne savez-vous pas qu'il faut que je sois occupé de ce qui regarde mon Père? (S. Luc, 11, 49.) » De même il dit maintenant, non comme fils de la vierge mortelle, dans le sein de laquelle il avait pris une nature sujette à la mort, mais comme chargé de l'œuvre de Dieu, comme fils de Dieu, comme Dieu : « Femme, qu'y a-t-il entre vous et moi? Mon heure n'est point encore venue. »

Sa mère paraît ici aussi très-grande et très-digne d'amour. Elle comprend le sens de ces paroles: « Mon heure n'est point encore venue. » Et elle attend pleine de foi et d'espérance. Prenons pour nous tous ce qu'elle avait dit aux serviteurs: « Faites tout ce qu'il vous dira. »

Le Dieu fait homme exauça ses prières. Le premier miracle qu'il fait durant son saint ministère, il l'opère sur les puissantes instances de Marie. Ce grand miracle de Jésus-Christ, ainsi que les deux multiplications de pains qui eurent lieu plus tard, font allusion à ce miracle plus étonnant encore, qu'il opère chaque jour sur nos autels par le ministère de ses prêtres.

J'ai déjà fait observer dans l'histoire de Jésus, que l'expression : Quand les convives se sont enivrés,» ne devait pas être prise dans le sens que nous avons coutume d'y attacher. Dans l'origine le mot grec methuein signifie aussi boire « après le sacrifice,» meta to thuein. (Hug. Grot.)]

On sait que l'expression grecque adelphos qui signifie proprement frère, est aussi employé très-souvent pour signifier cousin. De même que le mot adelphé, sœur. Je parlerai dans une autre occasion, où il en est question, des prétendus frères et sœurs de Jésus-Christ, et je prouverai clairement que les premiers n'ont pas été ses frères, mais ses cousins germains; il n'y a par conséquent aucune raison d'admettre, avec quelques critiques, que saint

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