évaluer à 13 ou 14 millions; & cette perte oceafionnera un vide dans la circulation, qui néceffitera de porter la nouvelle fabrication à une fomme plus confidérable.

C'est entre ces deux inconvéniens qu'il faut choifir; & le terme moyen, quoiqu'il ne puiffe être effentiellement bon, fera cependant la feule reffource: c'eft d'attendre que le public fente lui-même les embarras de cette concurrence, & fe dégoûte des anciennes efpèces.

Dans cette expectative, on pourroit porter à 25 millions la fabrication des efpèces en argent bas, & diftinguer ces nouvelles monnoies par une empreinte très-caractérisée, qui ne permît pas de les confondre avec les anciennes,

Si l'Affemblée nationale fe déterminoit à exelure, dès ce moment, de la circulation les pièces de 24, 12 & 6 fous, il feroit néceffaire alors de porter la nouvelle fabrication à 40 millions.

Quant à la monnoie de cuivre pur, votre comité des monnoies a tout lieu de croire que c'eft moins le befoin de la circulation que l'intérêt particulier des fabricateurs qui en a provoqué l'augmentation; que celle qui a été livrée au public, l'a été pour une valeur trop fupérieure à fa valeur intrinfèque ce qui a pu exciter l'étranger à en introduire dans le royaume, d'autant que c'eft prefque toujours à lui que les directeurs des monnoies fe font adreffés. pour Pachat des flaons de ces efpèces, afin d'économifer les frais de fabrication. Votre comité penfe donc qu'il ne faut autorifer les fabrications de ces efpèces qu'en raifon des befoins des départemens bien conftatés, & fur les demandes des adminiftrateurs; car il eft beaucoup de ces départemens où cette monnoie eft furabondante & incommode.

Sur la feconde queftion qui a pour objet de savoir fi l'on fabriquera une monnoie de billon, ou fi l'on s'en tiendra à une monnoie de cuivre rouge, & à une monnoie d'argent bas, votre comité croit devoir vous obferver que la monnoie de billon présente peu d'avantages, depuis que, par l'effet de l'augmentation du prix du marc d'argent, on eft forcé de réduire à fept grains & demi le poids de matière fine qui entre dans une pièce de deux fols. Cette monnoie difpen→ dieufe dure peu, & s'efface promptement à raifon du cuivre qui y domine: dès que l'empreinte s'efface, la contre-faction & le billonage s'introduifent, & les étrangers nous apportent une quantité de mauvais billon avec lequel ils payent nos denrées, ou nous enlèvent de bonnes espèces d'or ou d'argent.

Ce font, fans doute, ces confidérations qui ont fait profcrire ces espèces de la circulation par les anglois, les portugais, les efpagnols, hollandois & autres peuples: il paroît donc convenable de s'en tenir à ne fabriquer que des efpèces d'argent bas & de cuivre pur. Mais il paroîtroit néceffaire, eu égard aux circonftances, de ne pas fupprimer le billon noir qui existe, jufqu'à ce que le voeu du public à cet égard fût mieux connu; car il n'eft pas fans inconvénient de retirer des mains du peuple une monnoie qui lui eft effentiellement utile dans le moment même où il témoigne le defir que la maffe de cette monnoie foit augmentée.

Vous avez demandé en troifième lieu à votre comité, de vous faire connoître fon opinion fur la queftion de favoir fi l'on adoptera pour la nouvelle fabrication la divifion décimale.

C'est d'après cette divifion que votre comité a ré-> digé fon projet de divifion de l'écu en argent bas. II paroît que le public, d'accord avec l'académie, de

Rap. fur les Mon. par Gabriel de Cussy. A3

fire cette détermination préparatoire à la divifion décimale, qu'il regarde comme la plus commode & la plus fimple.

Mais ne réfulteroit - il pas beaucoup d'embarras & d'inconvéniens de ce changement dans les tranfactions journalières du peuple & du commerce? S'il étoit même queftion d'établir en principe général, que la proportion décimale feroit obfervée pour la fabrication & l'évaluation de toutes les efpèces, votre comité ne pourroit fe difpenfer de vous repréfenter qu'une pareille difpofition emporteroit la néceffité de procéder à une refonte générale de toutes les espèces, propofition défaftreufe, alarmante dans tous les temps, & qui produiroit vraisemblablement des effets contraires à vos vues, en rendant les espèces encore plus

: rares.

Et peut-être penferez-vous qu'il feroit digne de votre fageffe, dans ces temps de crife, de calmer l'inquiétude que peuvent infpirer tous ces projets de refonte dont on entretient journellement le public, en décrétant « que le titre & le poids des efpèces » d'argent & leur valeur numéraire, font & demeu>> reront invariablement fixés tels qu'ils le font au>>>jourd'hui ».

Vous avez enjoint à votre comité de vous rapporter la férie de queftions qu'il avoit eu l'honneur de mettre fous vos yeux, & d'y ajouter fes réponses. Il vient d'en réfoudre plufieurs, en vous propofant de porter à vingt-cinq millions la fabrication des nouvelles divifions d'écu en argent bas; d'ordonner que la proportion décimale fera obfervée pour fes divifions, & de décréter que la monnoie de billon noir continuera provifoirement d'être admise dans la circulation; mais qu'il ne poura en être fabriqué de nouvelle qu'en vertu de vos décrets,

Votre comité va vous rappeler fucceffivement les autres queftions, & vous rendre compte des obfervations dont elles lui ont paru fufceptibles!

La première chofe à régler dans un plan de fabrication de monnoie, c'eft fans doute le poids dont on fe fervira. L'adoption d'une mefure univerfelle eft une belle idée, mais cette mefure n'eft point encore arrêtée ni même convenue; & comme elle ne feroit applicable à la fabrication des monnoies qu'en changeant, toutes les expreffions numériques & intrinsèques, & en pracédant à une refonte générale, ainfi que votre comité vous l'a ci-devant obfervé; il vous propofera de décréter:

«Que le poids de marc, dépofé à la cour des mon»> noies, continuera de fervir à déterminer le poids » de toutes les divifions des monnoies >>.

Votre comité vous a propofé enfuite de prononcer fur les queftions de favoir fi les nouvelles efpèces porteront, ou ne porteront pas l'impôt dit seigneuriage avec les frais de fabrication, ou fi elles ne porteront que les frais de fabrication.

Votre comité vous a déja exprimé fon voeu fur ces queftions, en vous expofant, tant dans fes rapports que dans leur réfumé général, les inconvéniens du feigneuriage, & de toute addition de valeur étrangère à la valeur intrinsèque des efpèces. Il vous a fait connoître en même temps le danger & l'inconféquence de l'emploi des remèdes de poids & de loi en dedans, qui fait une des principales bafes du produit de ce feigneuriage. Il vous a obfervé enfin que cet emploi des remèdes étoit une mefure incohérente avec le principe de l'invariabilité du titre, dont il vous a démontré la néceffité & les avantages. Quant à la remife des frais de fabrication, il penfe que ce feroit un acte de juftice & de bienfaifance envers le peuple, & un grand moyen

que

de confiance plus néceffaire dans des temps de crife dans aucune circonftance. Il eft bon d'obferver que les frais de fabrication fur une monnoie en argent bas feront plus chers d'environ un tiers que fur une fabrication d'écus. Ce feroit donc priver le peuple d'une portion de fa propriété; ce feroit le punir de la médiocrité de fes moyens, en lui faifant payer plus cher les facilités qu'on lui doit. Vous éloignerez encore plus furement de vous, Meffieurs, ces fyftêmes de mauvaise foi & de dureté, d'après lefquels on effaieroit de vous perfuader qu'on peut profiter légitimement de l'ignorance de ce peuple pour le tromper, en lui livrant pour une valeur quelconque, des efpèces dont le poids & le titre ne repréfenteroient que lės deux tiers ou les trois quarts de cette valeur. Vous repoufferez également ces diftinctions abfurdes que l'on vous propoferoit d'établir entre les espèces deftinées à la circulation intérieure & celles qui peuvent être employées à la folde de nos échanges avec l'étranger. Le peuple a droit à une repréfentation exacte de la richeffe qui lui eft promife par la loi; & votre comité croit fe conformer à vos principes, en établiffant pour maxime, que la pièce de vingt fols doit contenir précisément & rigoureufement le tiers de l'argent contenu dans l'écu de trois livres. La politique bien entendue fe joint à ces motifs; car il est notoire que plus la fabrication d'une monnoie offre de bénéfices, plus on eft tenté de la contrefaire, & il n'y a que les faux-monnoyeurs qui contrefont la bonne monnoie; mais l'étranger qui aperçoit un gain affez confidérable dans la fabrication d'une monnoie aux mêmes titre & poids fixés par la loi, n'hésite pas de s'y livrer, parce qu'il ne croit pas fa probité compromise en vous faifant payer une portion de métal au. même prix pour lequel elle vous eft livrée par le fouverain.

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