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contraires aux principes & au plan du comité; il les conduit à des fuppofitions inexactes & à la confufion d'idées qu'il étoit le plus important de diftinguer.

il

En effet, fi tout homme qui avoit un loyer, pouvoit être taxé à raison de ce loyer, ce ne devroit être que par la préfomption que payant tant de loyer, avoit tant de richeffes; par exemple, on préfumoit que celui qui payoit 200 liv. de loyer, pouvoit faire une dépenfe annuelle de 1000 liv., qui étoit le produit, foit de propriétés foncières, foit de capitaux placés, foit de fon induftrie.

Le logement n'eft pas le premier befoin: il faut lanourriture, les vêtemens; & quand on a plufieurs befoins à fatifaire, on partage fes revenus entre fes befoins.

Ainfi c'étoit toujours en fuppofant qu'un homme qui avoit tant de loyer, reftoit encore avec une quotité de revenus fur lefquels il pouvoit faire quelque économie, qu'on le taxoit à raifon de fon loyer.

Il nous paroît impoffible de contefter ces vérités : or, comment les concilier avec l'allégation de MM. les députés de Paris, qu'il n'y a plus ni uniformité, ni régularité, lorfqu'on veut lever une impofition fur les facultés préfumées d'après le loyer?

Si la taxe des revenus mobiliaires n'eft pas demandée fous le nom de capitation, ce n'en eft pas moins une partie du revenu du citoyen qu'on lui demande pour le fifc; & comme c'eft toujours d'après le fait recounu ou prouvé qu'il paie tant de loyer, qu'on lui demande tant de contribution mobiliaire, on ne peut pas raifonnablement contefter que cette bafe, bonne jufqu'ici, & employée avec fuccès, le fera de même pour l'avenir.

Le confeil-général de la commune a répété, avec les députés, que la base préfumée eft inadmiffible

pour cette capitale, & qu'il en réfulteroit une foule d'inconvéniens.

Nous croyons, Meffieurs, qu'il naît des inconvéniens des lois les plus fages; & nous ne vous avons jamais diffimulé qu'en adoptant la préfomption réfultante des loyers, il pourroit en naître des erreurs & des inégalités; mais nous fommes loin d'admettre la conféquence qu'on en tire.

Dans l'impoffibilité reconnue d'atteindre à la perfection, il ne faut pas abandonner une chofe utile & néceffaire, il faut feulement l'employer avec les ménagemens convenables.

La contribution mobiliaire eft utile & néceffaire: les befoins du tréfor public la rendent indifpenfable; la juftice veut qu'elle ait lieu fur une même bafe, pour faire contribuer à la dépenfe commune tous les revenus & tous les citoyens.

Vous n'aviez, pour affeoir cette contribution, que le choix des préfomptions: vous avez choifi celle des loyers, comme la moins fautive; & lorfque vous l'avez choifie, on vous avoit préfenté tous les inconvéniens qu'on rappelle.

Deux grands motifs vous déterminèrent dans le choix que vous fites; l'un, qu'aucune autre base n'étoit auffi générale & moins fautive que celle des loyers, & que déja admife pour la capitation de Paris, on en avoit reconnu l'utilité; l'autre, que cette bafe avoit le grand avantage de pouvoir fervir de régulateur pour la contribution mobiliaire dans tout le

royaume.

Ce n'eft donc qu'en s'arrêtant aux inconvéniens fans en confidérer les avantages, qu'on peut réclamer contre votre plan.

Mais vous avez décrété, & fans doute vous maintiendrez cette difpofition conflitutionnelle, que toutes

les contributions feroient communes & égales. Vous ne voulez plus que le royaume préfente une foule de petits états ifolés & divifés d'intérêts; il faut une feule loi, & la capitale ne regrettera pas d'y être assujétie comme les provinces, lorsqu'elle confidérera que tous les françois font frères & ont les mêmes droits.

A combien de conféquences fâcheufes ne conduiroit pas l'adoption de la pétition du confeil-général de la Commune de Paris? Chaque ville, chaque diftrict, chaque département ne tarderoient pas à demander, à raifon de convenances locales ou autres, des exceptions à la loi générale; ils voudroient des abonnemens; ils voudroient s'impofer comme il leur plairoit, & bientôt les vues pleines de fageffe qui ont déterminé vos décrets feroient anéanties.

Déja plufieurs députés avoient propofé de laiffer aux municipalités le foin de s'impofer & de répartir comme elles le defiroient; vous n'avez pas cru devoir accueillir ces propositions: la municipalité de Paris pourroit-elle prétendre à un privilége particulier? Les députés de Paris prétendent qu'il eft phyfiquement impoffible d'établir un tarif équitable si on n'a aucune connoiffance de la fomme à laquelle on veut arriver; ils demandent en conféquence que vous fixiez quelle fomme Paris aura à payer, & que vous laiffiez à cette ville le foin de dreffer fes tarifs d'après les règles qu'elle vous aura propofées, & que vous aurez jugé devoir adopter : le confeil-général de la commune de Paris répète les mêmes demandes.

Nous ne pouvons croire à l'impoffibilité alléguée, ni accéder à la demande qu'on vous fait. Les tarifs ne font qu'une préparation à la perception; leur objet principal eft de fervir à évaluer les facultés des citoyens, & cela eft très-poffible & même très-facile,

ans qu'on ait fixé la fomme que chaque département aura à payer.

Par exemple, qu'au lieu de fuppofer, comme dans l'ancien régime de la capitation de Paris, que le loyer étoit le dixième du revenu du citoyen, on admette qu'il eft le cinquième ou le fixième, le tarif ne préfentera d'autre réfultat, fi ce n'eft que celui qui a 100 liv. de loyer eft préfumé dépenser un revenu de 5 à 600 liv.; celui qui a 300 liv. de loyer, un revenu de 15 à 1800 liv. ; celui qui a 1000 liv. de loyer, un revenu de 5 à 6000 liv., &c.

Ces tarifs peuvent être indépendans de la quotité de la contribution qui fera toujours une partie aliquote des revenus préfumés, & plus ou moins forte, fuivant que la contribution mobiliaire fera plus ou moins confidérable.

Il faut donc fuivre la même marche que pour la contribution foncière; il faut convenir d'un tarif ou d'un mode commun, propre à évaluer les revenus mobiliaires, comme on eft convenu d'un mode propre à évaluer les revenus fonciers ; & on pourra, après être convenu de ce mode, fixer la quotité générale de contribution mobiliaire, & celle affectée à chaque département, comme on s'est réfervé de fixer la quotité générale de la contribution foncière, & celle de chaque département.

Nous regrettons que le confeil-général de la commune de Paris fe foit borné à demander qu'on renvoie à fes adminiftrateurs la formation de fon tarif; il eût été plus fatisfaifant pour nous qu'elle eût fart connoître quelles font fes vues & quel est le tarif qu'elle defireroit: nous en euffions fait profiter tout le royaume, fi nous en avions reconnu l'avantage. Les mémoires publiés contiennent des fuppofitions entièrement contraires à notre plan.

On fuppofe que nous cherchons à établir une contribution énorme & défaftreufe par fes conféquences; Que nous ferions reverfer fur les non-propriétaires les cotes des propriétaires, & que la contribution tomberoit toute entière fur le commerce & l'industrie;

Que deux loyers égaux feroient toujours impofés à une taxe égale, malgré la différence certaine des revenus de chacun de ces locataires ;

Que par une inversion étrange nous appliquons les proportions les plus fortes aux petits logemens, en les diminuant progreffivement fur les plus forts. Ces fuppofitions nous autorisent à croire qu'on n'a ni approfondi ni examiné nos principes.

Nous avons toujours envifagé dans leur ensemble les contributions publiques, & en diftinguant des contributions foncière & mobiliaire, nous ne les avons pas pour cela regardées comme indépendantes l'une de l'autre.

Nous avons fans ceffe devant les yeux l'article de la déclaration des droits, qui veut que les contributions foient communes & réparties également entre tous les citoyens, à raifon de leurs facultés.

Voici, d'après ce principe, la base de notre opération. Suppofons tous les citoyens appelés à la contribution commune fur le même rôle, fuppofons les tous de bonne foi.

Jean est appelé; on lui demande combien il a de revenu il répond 100 liv. ; & fi la contribution commune eft du vingtième, on le taxes liv.

Pierre vient enfuite, & fe trouve taxé de même, à raifon du vingtième de fon revenu, rien ne feroit plus jufte.

Mais la bonne foi n'eft pas un garant fur lequel on doive compter. Beaucoup de contribuables ne

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