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gnagers ne retiraffent point de l'Autel le préfent que leur parent y avoit fait, & préfent auquel ils n'avoient aucun droit. Mais le Seigneur féodal ayant un droit réel fur la chose tenue de lui, & démembrée de fon Fief, a toujours pû la retirer pour la réunir, & principalement dans cette efpece, puifque l'Eglife n'entendoit pas fe fubftituer à la place de l'ancien Vaffal & rendre les fervices; mais au contraire tenir librement & fans dépendance. Ainfi celui de qui l'Eglise acqueroit des Dixmes ne donnoit que le fien, au lieu que fi le retrait féodal avoit été exclu, le Seigneur auroit été dépouillé de fon bien par le fait d'autrui.

Voilà pourquoi, lorfque l'Eglife acqueroit de quelque Vaffal des Dixmes elle avoit foin de faire confirmer la donation par le Seigneur, & de faire amortir les droits & fervices dont la Dixme étoit chargée, ce qu'elle n'obtenoit pas toujours. J'ai vu dans des Procès particuliers un très-grand nombre de Chartes des 12 & 13. fiécles, de ces fortes de confirmations , portant tantôt un entier affranchiffement appellé amortissement, & tantôt faites à la charge de quelques redevances qui tenoient lieu des fervices de l'ancien Vaffal.

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Mais afin d'en donner une preuve plus publique, il n'y a qu'à jetter les yeux fur l'Edit de S. Louis de l'an 1269, que M. du Perray trompé par Bouchel & par quelques autres plus anciens, a cru fauffement permettre la réunion des Dixmes aux Paroiffes, & défendre le retrait aux Seigneurs féodaux. Ce Prince permet à tous les Vaffaux mouvans fans moyen ou médiatement des Fiefs de la Couronne,d'aliéner les Dixmes en faveur des Eglifes, fans lui prefenter Requête péciale; l'Edit général devant fervir de confentement de fa part à tous ceux qui voudroient le faire. Par cet Edit qui fe trouve tout entier dans Bouchel, Bibl. Can. tom. 1, p. 475, il eft constant que les Seigneurs pouvoient empêcher ces aliénations, & reprendre la Dixme aliénée quand ils n'avoient pas confenti à l'aliénation. ]

17. On peut donc induire de cet Arrêt qui a d'ailleurs des circonftances particulieres qui peuvent avoir déterminé les Juges, que les Dixmes inféodées ne peuvent être retirées par retrait féodal ni lignager avant l'Eglife, comme il a été jugé par Arrêt de 1267, & la Loi de S. Louis étant de 1269, qui a donné la faculté de réunir les Dixmes aux PaTome I.

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roiffes, fans que les Seigneurs puiffent exercer aucun retrait féodal'; cette Loi étant en vigueur, il faut conclure que les Dixmes Ecclefiaftiques font plus anciennes ab origine que les inféodées, puifque c'eft par un retour au Droit naturel qu'elles font réunies à l'Eglife, mais qu'elles retiennent leur qualité & leur état comme auparavant, & qu'elles font poffedées par les Paroiffes comme inféodées fans fuppreffion de Fief, & que la réunion s'en fait fans altération ni diminution des droits feigneuriaux & féodaux, n'y ayant point d'amortiffement.

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18. Il faut voir Covarruvias, lib. 1, cap. 17 de Decimis, n. 5; l'Hiftoire de Bretagne, liv. 4, chap. 42, n. 25; Balnage fur l'article 24 de la Coutume de Normandie, & fur la Rubrique des Fiefs, page 145; Pontanus fur l'art 191 de la Coutume de Blois; Dumoulin fur le chap. 2 de Feudis, & fur l'art. 105 de la Coutume de Poitou; & M'. de Marca dans l'Hiftoire de Bearn, qui prétend qu'on ne pouvoit vendre les Dixmes inféodées, fans les avoir préfentées au Curé, & ce n'étoit qu'à fon refus que les contrats faits avec des Etrangers avoient lieu, & que fi les Curez les achetoient, il s'en faifoit une réunion à

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la Cure de plein droit, ce qui feroit contraire à notre fiftême; mais il dit qu'il y avoit une reconnoiffance en faveur de I'Eglife, auffi-bien qu'en faveur des Seigneurs de Fiefs; nous reconnoiffons bien les reconnoiffances faites aux Seigneurs de Fiefs, mais non celles faites à l'Eglife, à moins qu'elle n'ait des Fiefs.

TROISIEME PREUVE que les Dixmes Ecclefiaftiques. Jont plus anciennes que les in féodées,

N°. I.

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UAND des Dixmes inféo

dées ont été données à des Corps & Communautez, & qu'il n'y a point eu de fuppreffion de Fief, le Šeigneur a fait faifir faute d'avoir donné homme vivant & mourant ; cette queftion a été jugée par Arrêt du 27 Juillet 1684, au fujet des Dixmes inféodées appartenantes aux Curé & Marguilliers de S. Michel du Mefny S. Denis; on déclara la faifie qui en avoit été faite bonne & valable, faute d'ayoir donné à la Dame Tuffeau, à cause du Fief de Menou, homme vivant, mourant, &

confiscant, fait la foi & hommage, donné aveu & dénombrement, & payé les droits fuivant la Coutume, & ils font condamnez à la reftitution des fruits jufques à ce qu'ils ayent fatisfait à la Coutume: ce qui montre que quand il n'y a point de fuppreffion de Fief, encore que les Dixmes foient réunies à l'Eglife Paroiffiale, le Fief fubfifte toujours,nonobftant l'opinion des Auteurs qui ont tenu le contraire. Il faut obferver qu'on ne peut jamais confifquer le Fief d'une Eglife par la faute du Miniftre.

2. Nous avons plufieurs Arrêts dans nos Livres, par lefquels il paroît qu'on ne condamnoit pas les Décimateurs Laïcs au fupplément de la Portion congruë; mais par la Déclaration de 1686 on a ordonné que ceux qui avoient les Dixmes inféodées y feroient tenus fubfidiairement, au cas que les Ecclefiaftiques fuffent infuffifantes; on a jugé la même chose par un Arrêt du 26 Avril 1689, entre Maître Jacques Godefroy, Prêtre, Curé de la Paroiffe du Pas, & le fieur Abbé de S. Cofme de Blois, par lequel l'Abbé a été condamné, tant fur fes Dixmes inféodées, que fur les champarts à lui appartenans en ladite Paroiffe, de payer les deux tiers de la Portion

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