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3. Nous avons déja rapporté les Auteurs ci-deffus, & nous avons montré que les Conciles de Tours & de Mâcon avoient échapé à l'exactitude de cet Auteur, qui fçavoit très-bien expliquer & rapporter ces principes à nos usages; Charles-Martel vivoit en l'an 720, mais auffi-tôt qu'il eut donné des Dixmes à ses Gens de guerre, les Ecclefiaftiques s'en plaignirent, comme nous l'apprenons par les Conciles tenus du tems de Pepin, Charlemagne, Louis le Debonnaire, & leurs fucceffeurs. Il n'étoit pas naturel que l'Eglife eût fait autant de Conciles pour recouvrer fes Dixmes, fi elles n'avoient fait partie de fon Domaine; ce qui n'eft arrivé qu'après avoir été dépouillée de plufieurs autres biens, comme nous le ferons voir par les Capitulaires qui parlent de nonis & decimis, ce que nous traiterons dans le Chapitre fuivant; les Princes crurent qu'il s'agiffoit non-feulement de conferver les biens de l'Eglife, mais auffi la Religion; il y eut même plufieurs Evêques qui autoriferent ces diftractions; on donna 'donc ces Dixmes comme des Bénéfices à la Nobleffe qui versoit fon fang fi généreusement pour la caufe commune, & c'eft l'origine de l'inféodation des

Dixmes: Il arriva même que cet usage fe gliffa jufques dans les Bénéfices & les offrandes, la remise en a été bien plutôt faite à l'Eglife que des Dixmes qui font demeurées inféodées.

4. Outre ces deux Conciles de Tours & de Macon, dont nous avons déja parlé, qui font du fixiéme fiécle, nous voyons même que Ina, Roi d'Angleterre ou des Saxons Occidentaux, recommande de donner les premiers fruits aux Eglifes, c'eft une partie de ceux que nous appellons Prémices; ce qui marque que c'eft la pieté & la charité des Fideles qui avoit été la cause de ces libéralitez, Ina étoit avant Charles-Martel; S. Ambroife, S. Jerôme & S. Auguftin avoient à la verité fait quelque mention des Dixmes, mais les premiers Conciles font ceux que nous avons rapportez qui ont montré ce droit, tous ces Conciles & autorités nous font voir que les Dixmes Ecclefiaftiques font avant les inféodées, & que celles-ci n'ont commencé que pendant les Guerres de Charles-Martel, cela eft certain; nous avons encore un témoignage plus ancien que les deux Conciles dans le même fiécle, c'eft par la Conftitution générale de Clotaire. Agraria, pafcuaria vel decimas,

porcorum Ecclefia pro fidei noftra devotione concedimus, an. 560, tom. 5 Conc. col. 827.

DEUXIE'ME PREUVE. * Que les Dixmes font Ecclefiafti ques ab origine, & que la réunion des Dixmes inféodées à une Cure n'en change point l'état. Jugé par un Arrêt que le retrait féodal n'avoit pas lieu contre l'Eglife.

N°. I.

I

L s'eft présenté une très-belle. queftion fur cette matiere, jugée le 4 Août 1695, au rapport de M'. Bouvar de Fourqueux, à présent Procureur Général de la Chambre des Comptes, lors Confeiller à la Troifiéme des Enquêtes, fur un appointement au Confeil après cinq Audiences, entre Frere Jacques Leroi, Chanoine Régulier de l'Ordre de S. Auguftin, Prieur Curé d'Aviré, dont j'étois Avocat, contre défunt M. le Président de Bailleul, Marquis de Château - Gontier pour un retrait féodal des Dixmes de la Paroiffe d'Aviré, Pays d'Anjou, qu'il vouloit exercer. L'appel avoit été inter

jetté par ce Prieur de la Sentence qui avoit jugé le retrait féodal en faveur de M'. le Prefident de Bailleul.

*Nota. L'Arrêt rapporté dans cet article, dont la décision est très - importante, ne peut fournir cette preuve, comme on le remarquera fur le nombre 17.]

2.Dans le fait, Frere Jean l'Enfantin, Prieur-Curé d'Aviré, avoit acquis une Dixme inféodée de plufieurs Particuliers, les 19 Juin & 15 Juillet 1676, avec faculté de remeré pour neuf années, & déclaration de l'Acquereur, que s'il demeuroit Propriétaire incommutable defdites Dixmes, il en faifoit don à fa Cure pour demeurer réunies à fon Domaine & en jouir par fes fucceffeurs à perpétuité, à la charge de quelques Services; & s'il décedoit avant que d'être Propriétaire incommutable, il en donnoit le prix à fa Cure pour être employé au profit de la Fabrique, à condition d'ac quitter les mêmes Services; ce Prieur étant demeuré Propriétaire incommuta→ ble de ces Dixmes par une Sentence rendue contre ses vendeurs, il fut condamné par une autre du 26 Juin 1690, payer les ventes & iffuës à Monfieur le President de Bailleul, cette Sentence

à

ne fut point exécutée du vivant de l'En fantin; mais pour éviter ces droits, il révoqua la donation qu'il avoit faite n'ayant été ni acceptée ni infinuée, il déceda en 1691.

3. La Cotte-morte fut vendue par les Religieux de la Roe, à fon neveu qui l'avoit prise par anticipation, & il fut paffé un acte en fa faveur par lefdits Religieux de la Roe, Ordre de S. Auguftin Congrégation de France, le 23 Juin 1671, par lequel il s'obligea à payer toutes les dettes du défunt. Frere Jacques Leroy ayant été pourvû de ce Prieuré, voulut fe faire fervir de cette Dixme ci-devant inféodée; mais il en fut empêché par M. René l'Enfantin Prêtre, qui prétendoit que le prix lui en appartenoit, ou la Dixme, comme faisant partie de fa Cotte-morte. Les Agens de Monfieur le Préfident de Bailleul firent fequeftrer les fruits, & demanderent que la Sentence du 26 Juin 1690 fût exécutée contre les Religieux qui la dénoncerent à l'Enfantin, leur Ĉeffionaire de la Cotte-morte, qui s'étoit obligé aux dettes.

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4. Mais les Agens de Monfieur le Prefident de Bailleul s'étant accommodez vrai-semblablement avec l'Enfantin,

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