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font point de Droit divin, & que l'ufage & la coutume en font la regle pour la quotité. Felinus, cap. caufam de prafcr. Voici un troifiéme argument; Coquille fur la Coutume de Nivernois, titre des Dixmes, & plufieurs Docteurs François, tiennent qu'il ne faut confiderer que nos Ordonnances & nos Coutumes, pour prouver que la Dixme n'eft pas payée de toutes chofes, qu'elle eft ordinaire en certains lieux, & infolite en d'autres, & que cette difference de coutumes & d'ufages eft un argument invincible que la Dixme n'eft point de Droit divin, ce qui nous conduit à un quatriéme argument qui eft auffi folide que les autres, c'eft que fi elle étoit de Droit divin, elle fe payeroit à la dixiéme dans toute l'Eglife; cependant les uns la payent à la 10, à la 11, 12, 13 & 15, même à la vingtiéme & à d'autres quotitez, ce qui eft connu de tout le monde ; il y a des Paroiffes dans lefquelles on paye les groffes à une quotité, & les menuës à une autre. Or ces ufages & ces coutumes fi differens & fi contraires ne fortent pas de la Loi divine, elle eft immuable, elle ne change point, on n'en peut difpenfer, elle ne peut donc avoir d'autres caufes que la pieté & la

charité des Fideles: Quelques-uns ont plus honoré leurs Pafteurs, d'autres ont été plus en état de le faire, foit par leur abondance ou par la fituation des lieux, mais tous ont eu égard à la fubfiftance de leurs Miniftres, ce qui eft de Droit divin.

13. Si les Dixmes avoient été de Droit divin, non - seulement elles auroient dû être payées de toutes chofes à la dixiéme & d'une maniere uniforme; mais on n'auroit pas pû en changer l'état & la nature, & en faire des biens prophanes, d'autant que cela répugneroit à la qualité & à l'origine de la Dixme; nous voyons qu'il y a des Dixmes inféodées, par conféquent la Dixme n'eft point de Droit divin, d'autant que celles qui ont cette impreffion font regardées comme les autres biens prophanes, étant fujettes à vente, échange, donation, & autres difpofitions, ce qui ne conviendroit pas à la Dixme; fi elle étoit de Droit divin, on ne pourroit pas en changer l'état & la qualité.

14. Enfin fi elle étoit de Droit divin, ell feroit imprefcriptible pour la quotité; mais nos Ordonnances, nos Coutumes, & les Arrêts nous apprennent qu'elle doit être payée fuivant la quo

tité: Ces raisons font fi preffantes qu'il faut être de mauvais goût pour y résister. Quelques Canoniftes ont fait une objection qui a quelque couleur; mais il eft facile d'y répondre, & elle s'efface au grand jour ; ils ont prétendu que le nouveau Teftament n'avoit point dérogé à l'ancien au fujet des Dixmes, mais il y a plufieurs réponses; la premiere, les Dixmes ayant été données feulement à la race des Levites pour la portion qu'ils devoient avoir dans les heritages promis aux Juifs, elle n'a point paffé aux Miniftres de la Loi de grace qui ne font point de cette Tribu, que la naiffance n'appelle pas au faint Miniftere, & qui font confirmez dans le Sacerdoce par la vertu & la grace du Saint-Esprit qui fe donne par l'impofition des mains, on ne fuit point les traces du fang, & ce n'eft plus la race d'Aaron qui eft feule capable du Sacerdoce.

15. Une feconde raison ; les obfervations légales ont ceffé par la nouvelle Loi; que fi quelques-unes de nos Ordonnances faites vrai-femblablement fur les Mémoires du Clergé, les ont qualifiées de Droit divin par énonciation une énonciation de cette qualité ne forme aucune preuve, & ne peut pas préju

dicier à celles qui font plus anciennes ; il y a des Capitulaires de nos Rois qui les ont reglées fuivant l'ufage & la coutume, qui ont déclaré que les Dixmes infolites ne fe payeroient pas. Plufieurs Réglemens femblables ont caracterisé la Dixme, comme étant de droit pofitif Ecclefiaftique; l'on voit donc que le premier tems a été celui des Patriarches qui ont offert des Dixmes de reconnoiffance pour les biens qu'ils avoient reçus du Seigneur ; que le fecond a été du tems de Moïfe, l'obligation en étoit indifpenfable par la Loi de ce Légiflateur qui l'avoit reçuë de Dieu; cette Loi n'a été publiée que chez les Juifs & non aux Gentils; mais depuis la Loi de grace on en a ufé autrement, c'eft la charité & la pieté des Fideles qui en a été le principe.

Il faut donc conclure cette premiere queftion, que les Dixmes ne font point de Droit divin. Paffons à une feconde, c'eft de fçavoir fi dans leur origine elles ont été fpirituelles ou prophanes. Nous ferons voir dans la fuite qu'on y eft fujet d'une maniere générale & fans exception; mais ce fera la matiere des dif fertations fuivantes,

CHAPITRE II.

Si les Dixmes font fpirituelles
ou temporelles.

N°. I.

N

Ous avons vu dans le premier chapitre que les Divmes n'étoient pas de Droit divin, mais ce n'eft pas affez de voir la négative, il faut examiner l'affirmative, & nous faire un fiftême qui nous conduira à la décifion de plufieurs queftions. Toutes les difpofitions Canoniques femblent établir ce point indéfiniment qu'elles font spirituelles, elles font miles au rang des benéfices & offrandes, & l'aliénation en eft également défenduë. Panorme & tous les Docteurs en conviennent, ils citent plufieurs chapitres fur ce fujet ; mais ce Docteur, pour raifon de cette fpiritualité, prétend qu'elles font de Droit divin, c'est sur le chapitre, Litteras num. 2, de juramento calumnie, cap. cum olim de prafc. cap. finali de rerum permut. & qu'on ne peut pas échanger un fpirituel contre un temporel ; il y a plufieurs autres Décretales par lefquelles ils prétendent que les

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