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CZAR, f. m. C ZARIN E, f. f. Titre d'honneur que prend l'Empereur ou l'Impératrice de toutes les Ruffies.

LES naturels du pays prononcent Tzar ou Zaar ; & felon Becman ce

nom eft corrompu de Céfar ou Empereur; auffi le Czar porte un aigle dans fes armoiries comme un fymbole de fon Empire.

Le premier qui a pris le titre de Czar a été Bafile, fils de Jean Bafifide, qui fecoua le joug des Tartares vers l'an 1470, & jetta les premiers fondemens de la puiffance où cet Empire eft aujourd'hui parvenu.

Quand le Czar Pierre I, exigea de la cour de Vienne qu'on le qualifiât du titre d'Empereur, cela forma beaucoup de difficulté à la Cour Impériale; mais le Czar Pierre fit préfenter par fon Ambaffadeur une lettre originale que Maximilien I avoit écrite au Czar Jean Bafilowitz. Le Comte Sinzendorff, grand Chancelier de la Cour de Vienne, fit chercher dans les archives de la maifon d'Autriche l'original de cette lettre. On ne la trouva point; mais l'écriture du Secrétaire & la fignature de Maximilien ayant été reconnues & bien vérifiées, on ne fit pas difficulté d'accorder à Pierre I, & à fes fucceffeurs, le titre d'Empereur & d'Impératrice, dont ils jouiffent encore à présent.

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DACA, grande Ville des Indes Orientales, au Royaume de Bengale, fur le Gange.

LA

A fertilité du territoire de Daca, & les avantages de fa navigation, en ont fait depuis fort long-temps le centre d'un grand commerce; elle n'en eft pas moins reftée une des villes de l'univers les plus défagréables. Une multitude prodigieufe de chaumieres, conftruites au hafard dans un tas de boue, au milieu defquelles quelques maifons de brique bâties à la morefque, s'élevent d'efpace en efpace à peu près comme les baliveaux dans nos bois taillifs; c'eft la peinture naturelle de cette ville fi industrieuse.

Les cours de Delhy & de Moxoudabat en tirent chaque année les toiles néceffaires à leur confommation. Chacune des deux cours y entretient pour cela un agent chargé de les faire fabriquer. Il a une autorité indépendante du gouvernement du lieu, fur les courtiers, tifferands, brodeurs, fur tous les ouvriers dont l'industrie a quelque rapport à l'objet de fa commiffion. On défend à ces miférables, fous des peines pécuniaires & corporelles, de vendre à qui que ce puiffe être, aucune piece dont la valeur excede trente roupies. Ce n'eft qu'à force d'argent qu'ils peuvent fe rédimer de cette vexation.

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Dans ce marché comme dans tous les autres les compagnies Européennes traitent avec des courtiers Maures établis dans le lieu même, & autorilés par le Gouvernement. Elles prêtent auffi leur nom aux particuliers de leur nation, ainfi qu'aux Indiens & aux Arméniens, fixés dans leurs établissemens qui, fans cette précaution, feroient fûrement pillés. Les Mogols eux-mêmes, couvrent fouvent fous un pareil voile leur industrie, pour ne payer que deux, au lieu de cinq pour cent.

On diftingue dans les contrats, les toiles qu'on fait fabriquer, & celles que le tifferand ofe, dans quelques endroits, entreprendre pour fon compte. La longueur, le nombre des fils, & le prix des premiers font fixés. On ne ftipule que la commiffion pour les autres, parce qu'il eft impoffible de faire autrement. Les nations qui fe font un point capital d'avoir de belles marchandises, s'arrangent pour être en état de faire des avances aux entrepreneurs dès le commencement de l'année. Les tifferands, peu occupés en général dans ce temps-là, travaillent avec moins de précipita-. tion que dans les mois d'Octobre, de Novembre & de Décembre, temps où les demandes font forcées.

On reçoit une partie des toiles en écru, & une partie à demi-blanc. II

feroit à défirer qu'on pût changer cet ufage. Rien n'eft plus ordinaire que de voir des toiles d'une très-belle apparence dégénérer au blanchiffage. Peut-être les fabriquans & les courtiers prévoient-ils ce qui arrivera, mais les Européens n'ont pas le tact affez fin, ni le coup-d'œil affez exercé pour s'y connoître. Une chofe particuliere à l'Inde, c'eft que les toiles, de quelque nature qu'elles foient, ne peuvent jamais être bien blanchies & bien apprêtées, que dans le lieu même de leur fabrique. Si malheureufement elles font avariées avant d'être embarquées pour l'Europe, faut les renvoyer aux endroits d'où on les a tirées.

il

Entre les toiles qu'on achete à Daca, les plus importantes fans comparaifon, font les mouffelines unies, rayées & brodées. De toutes les contrées de l'Inde, on n'en fait que dans le Bengale, où fe trouve le feul coton qui y foit propre. Il eft planté à la fin d'Octobre, & recueilli dans le mois de Février. On le prépare tout de fuite pour le mettre en œuvre dans le mois de Mai, Juin & Juillet, c'eft la faifon des pluies. Comme le coton prête plus & caffe moins, elle eft la plus favorable pour fabriquer des mouffelines. Ceux qui en font le refte de l'année, entretiennent cette humidité néceffaire au coton, en mettant de l'eau immédiatement audeffous de leur chaîne. Voilà dans quel fens il faut entendre qu'on travaille les mouffelines dans l'eau.

A quelque degré de fineffe qu'aient été portées ces toiles, on peut affurer qu'elles font dans un état d'imperfection très-fenfible. L'ufage où eft le Gouvernement de forcer les meilleurs manufacturiers à travailler pour lui, de les mal payer, & de les tenir dans une efpece de captivité, fait qu'on craint de paroître trop habile. Par-tout la contrainte & la rigueur étouffent l'induftrie, fille & compagne de l'aifance & de la liberté.

Les cours de Dely, de Moxoudabat, font moins difficiles fur les broderies qu'on ajoute aux mouffelines. A leur imitation, les gens du pays, les Mogols, les Patanes, les Arméniens qui en font faire confidérablement, les prennent telles qu'elles font. Cette indifférence retient l'art de broder dans un affez grand état d'imperfection. Les Européens traitent pour les broderies, comme pour les mouffelines & les autres marchandises, avec des courtiers autorifés par le Gouvernement, auquel ils paient une contribution annuelle pour avoir ce privilege exclufif. Ces entrepreneurs diftribuent aux femmes les pieces deftinées pour les broderies plates, & aux hommes celles de chaînette. On fe contente fouvent des deffeins de l'In

de; d'autres fois nous leur envoyons des defseins pour les rayures, les bro

chures & les broderies.

DAIRI, OU DAIR O, Souverain Pontife des Japonois.

KEMP

EMPFER l'appelle le Monarque héréditaire Ecclefiaftique du Japon. En effet, l'Empire du Japon a préfentement deux chefs; favoir, l'eccléfiaftique qu'on nomme Dairo, & le féculier qui porte le nom de Kubo. Ce dernier eft l'Empereur du Japon, & le premier l'Oracle de la religion du pays.

Les grands prêtres, fous le nom de Dairi, ont été long-temps les monarques de tout le Japon, tant pour le fpirituel que pour le temporel. Ils en ufurperent le trône par les intrigues d'un ordre de bonzes venus de la Corée, dont ils étoient les chefs. Ces bonzes faciliterent à leur Dairi le moyen de foumettre toutes les puiffances de ce grand Empire. Avant cette révolution, il n'y avoit que les Princes du fang ou les enfans des Rois, qui puffent fuccéder à la monarchie; mais après la mort d'un des Empereurs, les bonzes ambitieux éleverent à cette grande dignité un de leurs grands prêtres, qui étoit dans tout le pays en odeur de fainteté. Les peuples qui le croyoient defcendu du Soleil, le prirent pour leur fouverain. La religion de ces peuples eft tout ce qu'on peut imaginer de plus fou & de plus déplorable. Ils rendirent à cet homme des hommages idolâtres : ils fe perfuaderent que c'étoit réfifter à Dieu même, que de s'opposer à ses commandemens. Lorsqu'un Roi particulier du pays avoit quelque démêlé avec un autre, ce Dairi connoiffoit leurs différens avec la même autorité que fi Dieu l'eût envoyé du ciel pour les décider.

Quand le Dairi régnoit au Japon, & qu'il marchoit, dit l'auteur de l'ambaffade des Hollandois, il ne devoit point toucher la terre; il falloit empêcher que les rayons du foleil ou de quelqu'autre lumiere ne le touchaffent auffi; c'eût été un crime de lui couper la barbe & les ongles. Toutes les fois qu'il mangeoit, on lui préparoit fes repas dans un nouveau fervice de cuifine qui n'étoit employé qu'une fois. Il prenoit douze femmes, qu'il époufoit avec une grande folemnité, & fes femmes le fuivoient d'ordinaire dans leurs équipages. Il y avoit dans fon château deux rangs de maisons, fix de chaque côté pour y loger fes femmes. Il avoit de plus un férail pour fes concubines. On apprêtoit tous les jours un magnifique fouper dans chacune de ces douze maifons: il fortoit dans un palanquin magnifique, dont les colonnes d'or maffif étoient entourées d'une espece de jaloufie, afin qu'il pût voir tout le monde fans être vu de perfonne. Il étoit porté dans ce palanquin par quatorze gentilshommes des plus qualifiés de fa cour. Il marchoit ainfi précédé de fes foldats, & fuivi d'un grand cortege, en particulier d'une voiture tirée par deux chevaux, dont les houffes étoient toutes femées de perles & de diamans: deux gentils

hommes tenoient les rênes des chevaux, pendant que deux autres marchoient à côté; l'un d'eux agitoit fans ceffe un éventail pour rafraîchir le pontife, & l'autre lui portoit un parafol. Cette voiture étoit destinée pour la premiere de fes femmes ou de fes concubines, &c.

Nous fupprimons d'autres particularités femblables qui peuvent être fufpectes dans les relations des voyageurs; il nous fuffit de remarquer que le culte fuperftitieux que le peuple rendoit au Dairo, n'étoit guere différent de celui qu'ils portoient à leurs dieux. Les bonzes, dont le nombre eft immense, montroient l'exemple, & gouvernoient defpotiquement fous leur chef. C'étoit autant de tyrans répandus dans les villes & dans les campagnes enfin leurs vices & leurs cruautés aliénerent les efprits des peuples & des grands; un Prince, qui reftoit encore du fang royal, forma un fi puiffant parti, qu'il fouleva tout l'Empire contr'eux. Une feconde révolution acheva d'enlever aux Dairos la fouveraineté qu'ils avoient ufurpée, & les fit rentrer avec les bonzes dans leur état naturel. Le Prince royal remonta fur le trône de fes ancêtres, & prit, vers l'an 1600, le titre de Kubo qui lui eft encore affecté. Ses defcendans ont laiffé au Dairo fes immenfes revenus, quelques hommages capables de flatter fa vanité, avec une ombre d'autorité pontificale & religieufe pour le confoler de la véritable qu'il a perdue; c'eft à quoi fe bornent les reftes de fon ancienne fplendeur Méaco eft fa demeure; il y occupe une espece de ville à part avec fes femmes, fes concubines, & une très-nombreufe cour. L'Empereur ou le Kubo réfide à Yedo, capitale du Japon, & jouit d'un pouvoir abfolu fur tous les sujets. Voyez KUBO. L'article du Dairo, qu'on lit dans le Dictionnaire de Trévoux, a befoin d'être rectifié. Confultez Kampfer & les Recueils des voyages de la compagnie des Indes orientales au Japon, tome V.

DALAI-LAMA, OU LAMA-SEM, & communément LE GRAND LAMA, Chef de la Religion de tous les Tartares idolâtres, ou plutôt leur Dieu fenfible & vivant.

LE nom de Dalai-Lama fignifie prêtre universel. On prétend que ce pontife eft le même, auquel on donna autrefois le nom de prétre-Gehan, ou prétre-Jean; car le mot de Gehan, dans la langue des Indiens feptentrionaux, fignifie univerfel. Ainfi, prêtre-Gehan & Dalai-Lama ont la même fignification. Ce dieu prétendu fait fa réfidence ordinaire près de la ville de Potala, vers les frontieres de la Chine. Il habite un célébre couvent fitué fur le fommet d'une montagne très-élevée. Les environs font peuplés d'une prodigieufe multitude de prêtres de cette divinité, qu'on nomme Lamas, & dont le nombre fe monte à vingt mille. Ils demeurent plus ou

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