Page images
PDF
EPUB

dant que les Papes fiégeoient à Avignon. Ces levées se faifoient par la permiffion du Roi; mais il n'y en a point eu depuis le Concile de Conftance. Voyez ci-devant DECIME.

Décime pafchaline; eft le nom que l'on donne vulgairement aux Décimes annuelles & ordinaires.

Décime faladine; eft une levée du dixieme, qui fut faite en France en 1188, tant fur le Clergé que fur les laïcs: elle fut nommée faladine, parce que Philippe-Augufte mit cette impofition pour la guerre qu'il entreprit contre Saladin, Soudan d'Egypte, qui venoit de prendre Jérufalem.

C'EST

DÉCLARATION DE GUERRE.

'EST un acte public fait par les Officiers d'une nation, de vive voix, ou par écrit, par lequel l'on fait favoir à une autre nation que l'on va commencer les actes d'hoftilité contr'elle, pour obtenir la réparation de l'injure ou du dommage reçu. Cette Déclaration de guerre confidérée en elle-même & indépendamment des formalités particulieres de chaque peuple, n'eft pas fimplement du droit des gens, mais du droit même naturel. En effet, la prudence & l'équité naturelle demandent également qu'avant que de prendre les armes contre quelqu'un, on ait tenté toutes fortes de voies de douceur avant que d'en venir à cette extrémité. Il faut donc fommer celui de qui on a reçu quelque tort, de nous en faire quelque fatisfaction au plutôt, pour voir s'il ne voudroit pas penser à lui-même, & nous éviter la néceffité de pourfuivre notre droit par la voie des armes.

Tout cela étoit compris dans la maniere de procéder des Romains, réglée dans leur droit fécial. Ils envoyoient premiérement le chef des féciaux, ou hérauts d'armies, appellé pater-patratus, demander fatisfaction au peuple qui les avoit offenfés; & fi, dans l'efpace de trente-trois jours, ce peuple ne faifoit pas une réponse fatisfaifante, le héraut prenoit les dieux à témoin de l'injuftice, & s'en retournoit, en difant, que les Romains verroient ce qu'ils auroient à faire. Le Roi, & dans la fuite le Conful, demandoit l'avis du Sénat; & la guerre réfolue, on renvoyoit le Héraut la déclarer fur la frontiere. On eft étonné de trouver chez les Romains, une conduite fi jufte, fi modérée & fi fage, dans un temps, où il femble qu'on ne devoit attendre d'eux que de la valeur & de la férocité. Un peuple qui traitoit la guerre fi religieufement, jettoit des fondemens bien folides de fa future grandeur.

Il s'enfuit de ce que nous venons de dire, que la Déclaration de guerre n'a lieu que dans les guerres offenfives; car lorfque l'on eft actuellement attaqué, cela feul nous donne lieu de croire, que l'ennemi a bien résolu de ne point entendre parler d'accommodement.

Il s'enfuit encore, que l'on ne doit pas commencer les actes d'hoftilité, immédiatement après avoir déclaré la guerre, mais qu'il faut attendre du moins autant que l'on peut, fans fe caufer à foi-même du préjudice, que celui qui nous a fait du tort ait refufé hautement de nous fatisfaire, & fe foit mis en devoir de nous attendre de pied ferme, & cela encore même qu'il n'y ait pas beaucoup d'efpérance qu'il fe difpofe à nous donner fatisfaction. Autrement la Déclaration de guerre ne feroit plus qu'une vaine cérémonie, & on ne doit rien négliger pour faire voir à tout le monde & à l'ennemi même, que ce n'eft qu'à la derniere extrémité que l'on prend les armes, pour obtenir ou maintenir fes juftes droits, après avoir tenté toute autre forte de voies & lui avoir donné tout le temps de revenir à lui-même.

On diftingue la Déclaration de guerre en Déclaration conditionnelle & en Déclaration pure & fimple. La Déclaration conditionnelle est celle qui eft jointe avec la demande folemnelle de la chofe qui nous eft due, & fous cette condition, que fi on ne nous fatisfait pas, nous nous ferons raifon par les armes. La Déclaration pure & fimple, eft celle qui ne renferme aucune condition, mais par laquelle on renonce purement à l'amitié & à la fociété de celui à qui on déclare la guerre; mais la Déclaration de guerre, de quelque maniere qu'elle fe faffe, eft par fa nature conditionnelle. On doit toujours être difpofé à recevoir une fatisfaction raisonnable, du moment que l'ennemi l'offre, & c'eft ce qui fait que quelques perfonnes rejettent cette diftinction de la Déclaration de guerre. Mais elle peut pourtant fe foutenir, en fuppofant que celui à qui on déclare la guerre purement & fimplement, a déjà affez témoigné, qu'il n'avoit aucun deffein de nous épargner la néceffité d'en venir aux mains avec lui. Jufqueslà donc, la Déclaration peut bien, du moins quant à la forme, être pure & fimple, fans préjudice des difpofitions où l'on doit toujours être, fuppofé que l'ennemi revînt à lui-même, ce qui regarde la fin de la guerre, plutôt que les commencemens, auxquels fe rapporte la distinction des Déclarations, en pures & en conditionnelles.

Au refte, du moment que la guerre a été déclarée à un Souverain, nonfeulement elle eft cenfée déclarée en même-temps à tous les fujets, qui avec lui ne font qu'une feule perfonne morale, mais encore à tous ceux qui dans la fuite peuvent fe joindre à lui, & qui ne doivent être regardés par rapport à l'ennemi principal, que comme des fecours ou des acceffoires.

Remarquons ici, que le Souverain qui déclare la guerre, ne peut retenir les fujets de l'ennemi, qui fe trouvent dans fes Etats au moment de la Déclaration, non plus que leurs effets. Ils font venus chez lui fur la foi publique en leur permettant d'entrer dans fes terres & d'y féjourner, il leur a promis tacitement toute liberté & toute fureté pour le retour. Il doit donc leur marquer un temps convenable, pour fe retirer avec leurs

effets;

effets; & s'ils reftent au-delà du terme prefcrit, il eft en droit de les traiter en ennemis; mais en ennemis défarmés. S'ils font retenus par un empêchement infurmontable, par une maladie, il faut néceffairement, & par les mêmes raisons, leur accorder un jufte délai. Loin de manquer à ce devoir aujourd'hui, on donne plus encore à l'humanité; & très-fouvent on accorde aux étrangers, fujets de l'Etat auquel on déclare la guerre, tout le temps de mettre ordre à leurs affaires. Cela fe pratique fur-tout envers les négocians ; & l'on a foin d'y pourvoir dans les traités de commerce. Le Roi d'Angleterre, dans fa Déclaration de guerre contre la France en 1755, ordonna, que tous les François qui fe trouvoient dans fes Etats, pouvoient y demeurer, avec une entiere fureté pour leurs perfonnes & leurs effets, pourvu qu'ils s'y comportaffent comme ils le devoient.

Pour ce qui eft des formalités que les différentes nations obfervent dans les Déclarations de guerre, elles font toutes arbitraires par elles-mêmes. Il eft donc indifférent qu'on le faffe par des envoyés, par des hérauts ou par des lettres; que ce foit à la perfonne même du Souverain ou aux fujets, pourvu néanmoins que le Prince ne puiffe pas l'ignorer.

On peut même omettre la Déclaration de guerre dans certains cas, quand même la guerre eft offenfive; lors, par exemple, qu'une nation à qui on a réfolu de faire la guerre, ne veut admettre ni miniftre ni héraut pour la lui déclarer; on peut, quelle que foit d'ailleurs la coutume, fe contenter de la publier dans fes propres Etats, ou fur la frontiere; & fi la Déclaration ne parvient pas à fa connoiffance avant le commencement des hoftilités, cette nation ne peut en accufer qu'elle-même. Les Turcs mettent en prifon & maltraitent les Ambaffadeurs même des Puiffances avec lesquelles ils ont réfolu de rompre; il feroit périlleux à un héraut d'aller chez eux leur déclarer la guerre. On eft difpenfé de le leur envoyer, par leur propre férocité.

Mais comme perfonne n'eft difpenfé de fon devoir, par cela feul qu'un autre n'a pas rempli le fien; nous ne pouvons nous difpenfer de déclarer la guerre à une nation avant que de commencer les hoftilités, par la raison que, dans une autre occafion, elle nous a attaqués fans Déclaration de guerre. Cette nation a péché alors contre la loi naturelle; & fa faute ne nous autorise pas à en commettre une pareille.

Quant au temps de la Déclaration, le droit des gens n'impofe point l'obligation de déclarer la guerre, pour laiffer à l'ennemi le temps de fe préparer à une injufte défensive. Il eft donc permis de faire fa Déclaration feulement lorfque l'on eft entré dans les terres de l'ennemi, & que l'on y a occupé un pofte avantageux; toutefois avant que d'y commettre aucune hoftilité. Car de cette maniere, on pourvoit à fa propre fureté, & on atreint également le but de la Déclaration de guerre, qui eft de donner encore à un injufte adverfaire le moyen de rentrer férieufement en luiTome XV.

Gg

même, & prévenir les horreurs de la guerre, en faisant juftice. Henri IV en ufa de cette maniere envers Charles-Emmanuel, Duc de Savoye, qui avoit laffé fa patience, par des négociations vaines & frauduleufes.

A l'égard des raifons pour lefquelles les peuples ont trouvé à propos que la guerre, pour être légitime & folemnelle, fût précédée d'une Déclaration, & du but qu'ils fe font propofé en cela, Grotius prétend que c'est afin qu'on pût être d'autant mieux affuré que la guerre étoit entreprise, non par une autorité privée, mais par l'ordre de l'un ou de l'autre peuple, ou de leurs fouverains.

Mais cette raison de Grotius paroît peu fuffifante, car eft-on plus affuré que la guerre fe fait par autorité publique, lorfqu'un héraut, par exemple, vient de la déclarer avec certaines cérémonies, qu'on ne le feroit lorsqu'on verroit fur les frontieres une armée commandée par quelqu'un des principaux de l'Etat, & prête à entrer dans notre pays? Ne pourroit-il pas au contraire arriver plus aifément, qu'une perfonne ou quelque peu de perfonnes s'érigeaffent de leur chef en hérauts, que non pas qu'un homme levât de fon autorité une armée, & la menât fur la frontiere à l'infçu du fouverain? La vérité eft, que le but principal des Déclarations de guerre, ou du moins ce qui en a fait établir l'ufage, c'eft afin de faire connoître à tout le monde que l'on a un jufte fujet de prendre les armes, & de témoigner à l'ennemi même, qu'il n'a tenu & qu'il ne tient encore qu'à lui de l'évirer. Les Déclarations de guerre, les manifeftes que les Princes publient, font à cet égard un jufte refpe&t qu'ils ont les uns pour les autres, & pour la fociété en général, à laquelle ils rendent ainfi en quelque façon compte de leur conduite, pour obtenir leur approbation : c'eft ce qui paroît en particulier par la maniere dont les Romains faifoient cette Déclaration; celui que l'on envoyoit pour cela prenoit à témoins les Dieux, que le peuple à qui ils déclaroient la guerre étoit injufte, en ne voulant point faire ce que le droit & la juftice demandoient.

Enfin, il faut encore remarquer ici, que l'on ne doit pas confondre la Déclaration de la guerre avec la publication de la guerre: l'unique but de la Déclaration de la guerre, c'eft de déclarer à la nation injufte ou à fon conducteur que l'on va enfin recourir au dernier remede, & employer la force ouverte pour obtenir juftice. Au lieu que par la publication de la guerre, on fe propofe non-feulement d'avertir les fujets du Prince qui dé clare la guerre, que telle ou telle nation doit être regardée comme ennemie, & qu'ils doivent prendre leurs mefures là-deffus; mais encore d'aviser de la Déclaration de guerre les puiffances neutres pour les informer des raisons juftificatives qui l'autorifent, du fujet qui l'oblige à prendre les armes, & de leur notifier que tel ou tel peuple eft fon ennemi, afin qu'elles puiffent fe diriger en conféquence. Ainfi la Déclaration regarde feulement l'ennemi, & la publication fe fait en faveur des fujets de la puiffance qui déclaré la guerre, & des puiffances neutres,

Les manifeftes que les Princes publient, contiennent ordinairement la publication de la guerre Ces pieces ne manquent point de contenir les raifons juftificatives, bonnes ou mauvaises, fur lefquelles on fe fonde, pour prendre les armes. Le moins fcrupuleux voudroit paffer pour jufte, équitable, amateur de la paix; il fent qu'une réputation contraire pourroit lui être nuifible. Eft-il néceffaire, dans un fiecle fi poli, d'observer que l'on doit s'abstenir dans ces écrits, qui fe publient au fujet de la guerre, de toute expreffion injurieuse, qui manifefte des fentimens de haine, d'animofité, de fureur, ce qui n'eft propre qu'à exciter de femblables fentimens dans le cœur de l'ennemi? Un Prince doit garder la plus noble décence, dans fes difcours & dans fes écrits; il doit fe refpecter foi-même dans la perfonne de fes pareils; & s'il a le malheur d'être en différend avec une nation, ira-t-il aigrir la querelle par des difcours offenfans, & s'ôter jusqu'à l'efpérance d'une réconciliation fincere?

C'EST

DÉCOUVERTE, f. f.

'EST une chofe fort commune d'entendre dire aujourd'hui, parmi les gens qui paffent même pour avoir de l'efprit, que les Découvertes font inutiles; que l'Amérique n'eft pas fi avantageufe à l'Espagne qu'on le croit; qu'elle s'eft appauvrie d'habitans pour la peupler & pour s'y foutenir; & qu'enfin, quand même on découvriroit des terres qui donneroient de l'or & de l'argent, on n'en feroit pas pour cela plus avantagé; parce que l'or & l'argent doivent diminuer de valeur en Europe, à proportion du produit des nouvelles mines qu'on découvre. On ajoute qu'un Etat n'en devient pas pour cela plus puiffant, puifque François I repréfentoit en Europe tout autant de puiffance avec quatorze millions de revenu, que Louis XIV avec deux cens. On conclut de-là qu'il eft inutile & même préjudiciable de faire des Découvertes.

On ajoute que les frais néceffaires pour de pareilles entreprises, font très-considérables; que ceux qu'il faut faire enfuite pour s'établir dans les pays qu'on a découverts font immenfes; & qu'on ne peut pas empêcher les autres nations de s'y établir également; ce qui prive de l'exclufif du commerce, & par conféquent de tout le profit qu'on pourroit s'en pro

mettre.

Pour fe convaincre de la foibleffe de ces raisonnemens, il n'y a qu'à jetter les yeux fur la Hollande, fur la Hollande, examiner les principes de cette répu blique, réfléchir fur la foibleffe de fes commencemens; confidérer par quels moyens elle a pu foutenir une guerre de cinquante ans, contre la puiffance la plus formidable de l'Europe; comment un petit coin de

« PreviousContinue »