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Bénéfices fut réitérée plufieurs fois fous le titre de don gratuit & de charitatif équipollent à Décime.

Les lettres patentes de François I du 24 Septembre 1523, font mention que le Roi avoit demandé depuis peu un fubfide de 1200 mille livres tournois à tous Archevêques, Evêques, Prélats, & autres gens eccléfiaftiques, pour la folde des troupes levées pour la défense du Royaume : on trouve même dans ces lettres qu'il y avoit eu une impofition dès 1518, & il ne paroît point qu'il y eût aucun confentement du Pape.

En 1527, lorfqu'il fut queftion des affaires d'Efpagne pour le traité de Madrid, en l'affemblée du Parlement où étoient le Chancelier & les Députés de fix Parlemens; la Cour, du confentement, vouloir & opinion des Préfidens & Confeillers des autres Parlemens, & d'un commun accord, ordonna que la réponse feroit faite au Roi, qu'il pouvoit faintement & juftement lever fur fes fujets, favoir l'Eglife, la nobleffe, peuple, exempts & non exempts, deux millions d'or pour la délivrance de fes enfans (qui étoient reftés prifonniers), & pour le fait de la guerre contre l'Empire.

Au lit de Juftice tenu le 20 Décembre de la même année, où étoient plufieurs Evêques, le Cardinal de Bourbon dit que l'Eglife pourroit donner & faire préfent au Roi de 130,000 livres.

Le premier Préfident répliqua qu'il n'étoit homme qui n'eut dit que le Roi devoit lever ces deux millions d'or fur l'Eglife, la nobleffe, &c. 11 voulut traiter fi les gens d'Eglife pouvoient être contraints de contribuer; mais le Cardinal de Bourbon craignit l'examen d'une prétention que le Clergé avoit toujours cherché à éviter par des offres: le Cardinal, dit le regiftre, lui a clos la bouche, vû l'offre qu'il a fait, & de traiter & entretenir l'Eglife en fa liberté, & fes prérogatives, prééminences & franchises, difant que le Roi le devoit faire, mais qu'ils peuvent & doivent raifonnablement contribuer pour le cas qui s'offre, fans fe confeiller ni attendre le confentement du Pape.

Il y eut là-deffus deux avis, l'un de demander en particulier aux Evêques & Prélats ce qu'ils voudroient donner de leur chef, & de les exhorter d'affembler enfuite leur Clergé pour impofer fur eux ce qu'ils pouvoient raifonnablement porter; l'avis le plus nombreux fut que l'Eglife & la Nobleffe devoient contribuer & n'en devoient point être exempts; combien, eft-il dit, qu'ils foient francs, que la portion du Clergé devoit fe lever par Décimes pour accélérer; qu'il convenoit que le Roi choisit cinq ou fix Archevêques & Evêques, autant des Princes & Nobles, & autant des Cours Souveraines, pour faire la diftribution, affiete & départ de l'impofition, & enfuite dépêcher des mandemens aux Archevêques, Evêques, & autres Prélats, pour faire lever fur eux & fur leur Clergé les fommes qui leur feroient impofées, pourquoi le Roi leur donnera main forte.

La guerre qui fe préparoit contre la France en 1534, obligea encore François I de s'aider du revenu temporel de l'Eglife: il témoigne à la

vérité par fes lettres patentes du 12 Février, que c'eft à fon très-grand regret; mais il marque en même temps le danger qui menaçoit le Royaume, & le fervice auquel feroient tenus les propriétaires des fiefs s'ils étoient hors les mains des Eccléfiaftiques; & par ce motif il enjoint à tous Officiers Royaux de faire faifir pour cette fois feulement, & fans tirer à conféquence, le tiers du temporel des chapitres, colleges & communautés, & la moitié de celui des Archevêques, Evêques, Abbés, Prieurs & de leurs couvens.

Les Eccléfiaftiques n'eurent main levée de cette faifie qu'en offrant, fuivant leur ufage, trois Décimes payables moitié à la Touffaints, & moitié à Noël; & le Roi par une déclaration du 28 Juillet 1535 en exempta les Confeillers-clercs du parlement.

Il est vrai que cette déclaration & une autre du 19 Août fuivant en faveur du commis au greffe civil du parlement, qualifient ces trois Décimes de don gratuit & charitatif équipollent à trois Décimes accordées par le Clergé mais François I fe mettoit peu en peine de ces qualifications, pourvu qu'il eût ce qu'il demandoit; & l'adreffe de ces deux déclarations qui eft faite à la chambre des Comptes ou aux Commiffaires commis & députés par le Roi pour ouir les comptes du don gratuit, fait affez fentir que l'impofition fe levoit par autorité du Roi.

On continua de lever des Décimes jufqu'au décès de François I, comme il paroît par trois déclarations des 7 Décembre 1542, Février 1543, & 19 Mai 1547; dont la premiere ordonne que les Décimes des gens d'Eglife & autres deniers extraordinaires feront portés ou envoyés aux recettes générales des finances par les receveurs de ces deniers, aux dépens des gens d'Eglife; la feconde attribue la connoiffance des comptes des Décimes à la chambre des comptes, ce qui prouve de plus en plus que ces impofitions étoient faites de l'autorité du Roi; & la troifieme donnée par Henri II, fait mention des Décimes levées en l'année précédente qui étoit 1546.

Les Décimes fubfifterent pareillement fous Henri II, puifque par la déclaration dont on vient de parler du 19 Mai 1547, il en exempte les Confeillers-clercs du parlement de Paris, & que par une déclaration du 15 Février de la même année, il en exempte de même les Confeillersclercs du parlement de Rouen.

La déclaration du 19 Septembre 1547, contient un réglement pour les Décimes du Diocefe de Bourges; & celle du 21 Avril 1550 contient un femblable réglement pour le Diocese de S. Brieux.

Lors du lit de juftice tenu par Henri II, le 22 Février 1551, ce Prince ayant exposé la nouvelle guerre qu'il étoit prêt d'avoir, le Cardinal de Bourbon dit en s'adreffant au Roi, qu'oyant les grandes offres que lui faifoit la nobleffe de fa vie & de fes biens.... que le Clergé avoit deux chofes, l'une l'oraifon & priere, que la feconde étoient les biens tempc

rels dont le Roi & fes prédéceffeurs les avoient fi libéralement départis ; que la veille ils s'étoient affemblés jufqu'à fix Cardinaux & environ trente Archevêques & Evêques, qui tous d'un commun accord avoient arrêté de donner au Roi fi grande part en leurs biens, qu'il auroit matiere de contentement, affurant S. M. que fi les corps n'étoient voués à Dieu & à la Religion, ils ne lui en feroient moindres offres que la noblesse.

Les déclarations du 6 & 20 Janvier 1552, contiennent des réglemens pour la perception des Décimes dans les Diocefes de Chartres & d'Evreux, ce qui fuppofe que dans le même temps on en levoit auffi dans les autres Diocefes.

Le Clergé accorda encore à Henri II, en 1557 fix cents mille écus; le Roi de fon côté, par un édit du mois de Juin, créa un office de receveur pour le Roi de toutes les impofitions extraordinaires, y compris les dons gratuits des Eccléfiaftiques; & par fes déclarations du 8 Décembre, 3 & 4 Janvier 1558, il exempta les Confeillers au Parlement, & quelques autres perfonnes, des Décimes, dons, octrois charitatifs équipollens à icelles à lui accordés, & qu'il avoit ordonné être levés fur le Clergé de fon Royaume pour cette année (1558).

C'est ainsi que les Décimes furent levées jufqu'en 1561, fans qu'il y eût aucune affemblée fixe du Clergé, ni aucun contrat paffé à ce fujet avec le Roi; & l'on voit par l'analyse qui a été faite des différens réglemens intervenus fur cette matiere, que l'on confondoit alors avec les Décimes, les dons gratuits ou dons charitatifs que l'on qualifioit d'équipollens à

Décimes

Ce ne fut que depuis ce contrat de Poiffy en 1561, que ces deux objets commencerent à être diftingués.

Les Prélats qui étoient alors affemblés à Poiffy, pour le fameux Colloque qui fe tint avec les Miniftres de la religion prétendue réformée, firent au nom de tout le Clergé de France un contrat avec le Roi, qu'on appelle le contrat de Poiffy, par lequel il s'engagerent à payer au Roi 600,000 livres par an pendant fix années, & de racheter dans dix ans 630 mille livres de rente, au principal de fept millions cinq cent foixante mille livres, dont l'hôtel-de-ville de Paris étoit chargé envers divers particuliers qui avoient prêté de l'argent au Roi c'eft là l'origine des rentes fur le Clergé, qui ont depuis été augmentées au moyen des divers contrats paffés entre le Roi & le Clergé. Nous n'entrerons point ici dans le détail de ces rentes, qui fera mieux placé au mot RENte.

Le Clergé ayant été obligé de s'affembler plufieurs fois, tant pour l'exécution du contrat de Poiffy, que par rapport aux nouvelles fubventions qui furent demandées au Clergé dans l'intervalle de l'exécution du contrat de Poiffy; les affemblées du Clergé devinrent depuis ce temps plus fréquentes, fans néanmoins qu'il y eut encore rien de fixé pour le temps de

leur tenue.

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Ce ne fut qu'au commencement du fiecle dernier qu'il fut réglé que les affemblées générales qui fe tiennent pour renouveller le contrat de Poiffy, fe feroient tous les dix ans, d'où on les appelle décennales: les affemblées qui fe font pour régler les comptes fe renoient d'abord tous les deux ans, enfuite on les a fixé de cinq ans en cinq ans.

Dans l'affemblée du Clergé tenue à Melun en 1579, où fut établie la forme d'adminiftration qui fubfifte encore préfentement; le Clergé prétendit avoir rempli tous les engagemens qu'il avoit pris par le contrat de Poiffy, & que les députés n'avoient pu l'engager au-delà par des actes postérieurs.

Cependant au mois de Février 1580, il fut paffé un nouveau contrat avec le Roi, par lequel le Clergé s'obligea de payer pendant fix ans 1,300,000 livres pour fatisfaire au paiement de 1,206,322 livres de rentes dues fur les hôtels-de-villes de Paris & de Touloufe, & le furplus être employé au rachat de partie de ces rentes.

Le terme pris par le contrat de Poiffy & par celui de 1580, qui étoit en tout de feize années, étant expiré, il fut renouvellé à Paris par le Clergé le 3 Juin 1586, pour dix années, & depuis ce temps il a toujours été renouvellé de dix ans en dix ans.

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Ces contrats ne different les uns des autres, qu'en ce que les rentes dont le Clergé eft chargé ont augmenté ou diminué, felon les divers engagemens pris par le Clergé avec le Roi elles ne montoient fuivant le contrat de Poiffy, qu'à 630,000 livres, elles furent depuis augmentées jufqu'à 1,300,000 livres par différens contrats paffés par les Députés du Clergé, lequel protefta contre cette augmentation de charges, prétendant que les Députés avoient excédé leur pouvoir. Néanmoins par le contrat de 1586, Clergé s'eft obligé à la continuation de ces rentes; & ce contrat a depuis été renouvellé tous les dix ans, excepté que par le contrat de 1636 & autres contrats poftérieurs, les rentes furent réduites à 1,296,961 livres, à caufe de deux parties remboursées par les Diocefes de Bourges & de Lifous 13 Elles ne montent préfentement qu'à 1,292,906 livres moges. Elles ne

le

9 deniers. Ces rentes dont le Clergé eft chargé forment ce que l'on appelle les anciennes Décimes ou les Décimes du contrat, c'est-à-dire, qui dérivent du contrat de Poissy.

Les Décimes extraordinaires, felon l'ufage préfent, font de deux fortes; les unes qui font auffi des impofitions annuelles, de même que les Décimes ordinaires, mais qui ont une origine différente; les autres font les dons gratuits que le Clergé paie au Roi tous les cinq ans, & autres fubventions extraordinaires qu'il paie de temps en temps, felon les befoins

de l'Etat.

Le contrat que le Clergé paffe avec le Roi pour les anciennes Décimes ou rentes qu'il s'eft obligé de payer, fe renouvelle, comme nous l'avons obfervé

obfervé tous les dix ans, & les autres fubventions ou Décimes extraordinaires font accordées & réglées par un contrat féparé qui fe paffe tous les cinq ans, & quelquefois plus fouvent. Nous expliquerons plus particuliérement ce qui concerne ces Décimes extraordinaires aux mots Don gratuit & Subvention.

Ce que le Clergé en corps paie au Roi pour les anciennes Décimes ou Décimes ordinaires, eft impofé fur tous les membres du Clergé, tant du premier que du fecond ordre, chacun felon le revenu de leurs bénéfices.

Les Décimes extraordinaires fe paient quelquefois de même au Roi par voie d'impofition : quelquefois pour en accélérer le paiement, le Clergé fait un emprunt à conftitution de rente, & en ce cas les fommes néceffaires, tant pour payer les arrérages de ces rentes que pour faire le remboursement & fournir aux frais d'adminiftration, font levées fous le nom de Décimes & autres fubventions, par contribution fur tous les membres du Clergé en la forme qu'on l'a déjà dit.

L'impofition des Décimes & autres fubventions, tant ordinaires qu'extraordinaires, ne peut être faite fur les membres du Clergé, qu'en vertu des lettres patentes duement enregistrées.

Le rôle des aides, dixiemes, Décimes, & autres impofitions fur le Clergé, fe faifoit autrefois par des élus, de même que l'affiette des tailles. L'ordonnance de Charles VI, du 7 Janvier 1400, dit qu'il n'y aura à Paris fur le fait des aides que trois élus, & un fur le fait du Clergé, lefquels auront les gages accoutumés fans aucun don; que dans chaque ville du Royaume & autres lieux où il y a fiege d'élus, il n'y aura dorénavant que deux élus au plus avec celui du Clergé, ès lieux où il y a coutume d'y en avoir un, avec un receveur; que ces élus & receveurs feront pris entre les bons bourgeois, par l'ordonnance des Généraux des Aides & par le Confeil de la Chambre des Comptes.

La répartition des Décimes & autres impofitions fe fait fur chaque Diocefe dans l'affemblée générale du Clergé; & la répartition fur chaque bénéficier du Diocefe fe fait par le Bureau Diocéfain ou Chambre des Décimes, qui eft compofée de l'Evêque, du Syndic, & des Députés des Chapitres, de ceux des Curés & des Monafteres. Ces Bureaux Diocéfains ont été établis par lettres patentes, fuivant les conventions du contrat de 1615.

Chaque Diocefe en général & chaque Bénéficier en particulier, eft impofé fuivant la proportion du département de 1516, excepté pour ceux qui, depuis trente ans, ont été cottifés fur un autre pied, ou lorfqu'il y a eu des jugemens ou transactions qui en ont difpofé autrement.

Les bénéfices qui avoient été omis dans le département de 1516, ou qui ont été établis depuis, font taxés en vertu d'un édit de 1606, & les nouveaux monafteres en vertu d'un édit de 1635. Ce qui eft impofé en vertu de ces réglemens, doit être à la décharge des curés les plus charTome XV.

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