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2. pr. soumettent l'action en séparation à des formalités propres par leur publicité à avertir les créanciers de contredire une demande dont l'effet peut préjudicier à leurs droits, formalités qui, si elles sont observées, rendent les créanciers du mari non-recevables, après le délai d'un an, à se rendre tiers opposants (873); ne doit donc pas être loisible aux époux de porter la demande en séparation et de remplir les formalités de publicité préliminaires au jugement, dans un tribunal qui ne serait pas celui du domicile du mari, et qui pourrait être choisi à une telle distance que les créanciers seraient placés dans l'impuissance d'intervenir à temps dans l'instance. Il est évident que, dans une elle hypothèse, on ne saurait leur dénier le droit, nonobstant l'é

par des époux devant un tribunal autre que celui de leur domicile, était non recevable à proposer le déclinatoire d'incompétence pour obtenir le renvoi de la cause devant les juges du domicile des époux. Ils soutiennent que le créancier qui se rend partie dans une instance en séparation de biens ne forme pas une simple intervention, mais qu'au contraire il est partie principale agissant en vertu d'un droit personnel qu'il ne pourrait pas exercer autrement. Ils repoussent le moyen pris de ce que, s'agissant d'une incompétence ratione persone, il n'y avait que les époux eux-mêmes qui pussent en exciper, en disant qu'en cette matière le déclinatoire fondé sur ce que le tribunal saisi n'est point celui du domicile des époux est un déclinatoire d'ordre public et d'incompétence matérielle; que, dès l'instant que la séparation était prononcée par un tribunal autre que celui du domicile des époux, elle était nécessairement sans effet, puisque les formalités prescrites par la loi n'avaient pas été observées.

Le défendeur propose une fin de non-recevoir tirée du décès de Béchard fils. Il prétend que l'arrêt d'admission a été signifié à la requête de la maison de commerce, sous le titre collectif Béchard père et fils; que cette société a été dissoute depuis la mort de Béchard fils, arrivée antérieurement à cette signification, et que, dès lors, l'assignation devant la chambre civile a été faite à la requête de personnes sans qualité pour agir.

Au fond, il soutient que lorsque le mari, assigné en séparation de biens devant un tribunal autre que celui de son domicile, n'excipe point de l'incompétence de ce tribunal, les créanciers ne peuvent la proposer; que c'est là une de ces formalités dont l'inexécution, aux termes de l'art. 869 c. proc. civ., ne peut être opposée par le mari ou ses créanciers; que cette décision résulte clairement du texte et de l'esprit de la loi; que, de l'autre côté, il n'était pas question, dans les art. 871, 872, 873, 869, 865 et suiv. c. proc. civ., de la juridiction du tribunal, comme d'une condition essentielle à la validité de la demande; qu'on devait, par conséquent, rester dans les termes de la règle ordinaire qui considère l'incompétence personnelle comme la source d'une nullité seulement relative qui peut être couverte par le silence des parties; d'où suit que les demandeurs ne pouvaient se prévaloir de cette incompétence.-Arrêt (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir, tirée du décès de Béchard fils:- Attendu que le pourvoi en cassation a été régulièrement introduit, devant la cour, à la requête du sieur Béchard père et du sieur Béchard fils, procédant conjointement (comme ils l'avaient fait, tant en première instance qu'en appel), mais non pas en nom social ou collectif; — Que, si Béchard fils est décédé le 7 sept. 1834, postérieurement à l'introduction du pourvoi, cette circonstance n'a influé en rien sur la réguJarité de l'arrêt d'admission, rendu le 2 déc. suivant, et en exécution duquel Béchard père procède, encore aujourd'hui, avec une égale réguJarité; Rejette la fin de non-recevoir;

Et de suite, statuant au fond: Vu les art. 59 et 871 c. proc. civ., ainsi conçus: — « Art. 59. En matière personnelle, le défendeur sera assigné devant le tribunal de son domicile..... en matière de société, tant qu'elle existe, devant le juge du lieu où elle est établie..... Art. 871. Les créanciers du mari pourront, jusqu'au jugement définitif (de la séparation)..... intervenir, pour la conservation de leurs droits, sans préliminaire de conciliation; »

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Attendu que, si, dans les art. 865 et suiv. c. proc., le législateur n'a pas textuellement désigné le tribunal devant lequel la demande en séparation devait être portée, c'est évidemment parce qu'il s'en est référé ux règles générales de compétence tracées par son art. 59;- Que, suiant ce dernier article, la demande en séparation étant une action pure personnelle, qui tend à la dissolution, quant aux biens, de la société conjugale, cette action doit être portée devant le tribunal du domicile du mari défendeur, tribunal qui est aussi celui du lieu où cette société est établie et du domicile de la femme elle-même, pendant le mariage (art. 108 c. civ.);

Attendu que, sous l'empire de la législation antérieure au code de procédure civile, les créanciers du mari avaient indéfiniment le droit de former tierce opposition à la sentence de séparation, à quelque moment qu'elle leur füt opposée; - Que ce code, en prescrivant, par ses art. 866 et suiv., des formalités propres, par leur publicité, à avertir les créanciers de contredire une demande dont l'effet peut préjudicier à leurs drois, ■ statué, par son art. 873, que, si ces formalités ont été remplies, les TOME XI.

chéance du délai fixé par l'art. 873, d'exercer indéfiniment la tierce opposition, dont le résultat pourrait être de faire rétracter la séparation elle même. Or un jugement de séparation, nul à l'égard d'un ou de plusieurs créanciers, ne saurait être valable l'égard d'un ou de plusieurs autres, parce que l'état de la femme est lui-même indivisible; d'où il faut conclure que, lorsqu'un tel jugement est encore à rendre, le créancier intervenant, qui a intérêt à ce que l'état de la femme soit fixé à l'égard de tous les créanciers, d'une manière invariable, a le droit (soit qu'il réside ou non dans le ressort du tribunal où la demande a été portée) de se prévaloir de l'exception d'incompétence, si elle existe, pour empêcher ce jugement d'être rendu.-Peu importe que le mari ac

créanciers du mari ne seront pas reçus, après le délai d'un an, à se ren dre tiers opposants; — Qu'il a été, ainsi, pourvu très-libéralement à la sécurité de la femme séparée, mais à la double condition par elle, 1° d'ac complir, aux termes des art. 866 et suiv., diverses formalités dont le but est d'appeler les créanciers dans l'instance même de séparation; 2° de faire, suivant l'art. 872, publier la sentence qui l'aurait prononcée, dans les tribunaux de première instance et de commerce du domicile du mari, ce qui achève de prouver que le législateur a considéré le tribunal du domicile de ce même mari, comme essentiellement compétent pour connaître de la demande en séparation;

Attendu qu'il ne doit pas être loisible aux époux de porter la demande en séparation et de remplir les formalités de publicité préliminaires au jugement, dans un tribunal qui ne serait pas celui du domicile du mari, et qui pourrait être choisi par eux à une telle distance, que les créanciers, résidant le plus souvent dans le lieu même du domicile conjugal, et, dans tous les cas, ne pouvant raisonnablement rechercher qu'au greffe ou dans l'auditoire du tribunal de ce domicile les notions indicatives du changement d'état de la femme, seraient dans l'impuissance, pour ainsi dire absolue, d'intervenir en temps opportun dans l'instance de séparation, pour la conservation de leurs droits; - Qu'il est hors de doute que, dans cette hypothèse, la limitation du délai de tierce opposition établie par l'art. 873, ne saurait être opposée aux créanciers qui ne seraient pas intervenus dans l'instance de séparation, et qu'on ne pourrait conséquemment pas leur contester le droit de rentrer ainsi dans la faculté indéfinie de tierce opposition, dont le résultat pourrait être de faire rétracter la séparation elle-même;

Attendu qu'un jugement de séparation, nul à l'égard d'un ou de plusieurs créanciers, ne saurait être valable à l'égard d'un ou de plusieurs autres, parce que l'état de la femme est lui-même indivisible; d'où il faut conclure que, lorsqu'un tel jugement est encore à rendre, le créancier intervenant, qui a intérêt à ce que l'état de la femme soit fixé, à l'égard de tous les créanciers, d'une manière invariable, a droit (soit qu'il réside ou non dans le ressort du tribunal où la demande a été portée) de se prévaloir de l'exception d'incompétence, si elle existe, pour empêcher ce jugement d'être rendu;

Attendu qu'il importe peu que le mari acquiesce, soit expressément, soit tacitement, à la juridiction du tribunal incompétemment saisi (ce qui paraît avoir été le motif déterminant des premiers juges), parce que, dans une instance de séparation, la collusion des époux est toujours présumable, ainsi que le témoigne l'art. 870, portant que « l'aveu du mari ne fera pas preuve, lors même qu'il n'y aurait pas de créanciers; » — Que, vainement encore, pour écarter l'exception d'incompétence proposée par Béchard père et fils, l'arrêt attaqué s'est fondé sur ce que «l'intervention ne pouvant (art. 340) retarder le jugement de la cause principale,» l'intervenant doit procéder devant le tribunal saisi, et qu'il ne lui appartient pas de proposer de déclinatoire; - Que ce principe, vrai en thèse générale de procédure, peut bien s'appliquer à celui qui intervient spontanément et par la seule impulsion de son libre arbitre, dans un procès mû entre deux parties qui ont saisi ou accepté, sans fraude et sans arrière-pensée, la juridiction d'un tribunal que le défendeur aurait pu et n'a pas voulu décliner; mais qu'on ne saurait l'appliquer, sans injustice, à celui qui n'intervient que forcément, pour obéir à l'appel d'une loi restrictive de ses droits et pour éviter une déchéance fatale; qu'il devient, alors, un véritable défendeur, appelé par la loi ellemême en déclaration de jugement commun, et auquel toutes les exceptions, même celle d'incompétence, deviennent également communes;

Altendu, enfin, qu'il résulte, en fait, de l'arrêt attaqué, que le tribunal de première instance de Troyes est celui du domicile du sieur Nicas, et du lieu où est établie la société dont sa femme demande la dissolution; Qu'en retenant une compétence qui lui était déniée par la loi, le tribunal de Montargis a commis un excès de pouvoir, et que l'arrêt de la cour royale d'Orléans, qui a confirmé le jugement par lequel l'intervention a été repoussée par fin de non-recevoir et la séparation a été prononcée, a faussement appliqué l'art. 340, expressément violé l'art. 59, et, par suite, l'art. 871 c. proc. civ.- Donnant défaut contre Nicas non comparant, ni avocat pour lui; Casse et annulc.

Du 18 nov. 1855.-C. C.,ch.-civ.-MM. Dunoyer, f. f. de pr.-Quéquet, rap.-de Gartempe fils, av. gén., c. conf.-Latruffe et Mandaroux, av. 9

quiesce à la juridiction du tribunal incompétemment saisi; car, dans une instance de séparation, la collusion des époux est toujours présumable (argum. de l'art. 870 c. pr.). Vainement encore, voudrait-on écarter l'exception d'incompétence invoquée par le créancier, sur le motif que l'intervention ne pouvant retarder le jugement de la cause principale (c. pr. 340), l'intervenant doit procéder devant le tribunal saisi, sans pouvoir proposer le déclinatoire : ce principe, applicable à celui qui intervient spontanément dans un procès mù entre deux parties qui ont saisi ou accepté sans fraude la juridiction d'un tribunal que le défendeur aurait pu décliner, ne saurait être appliqué sans injustice à celui qui n'intervient que forcément, pour obéir à l'appel d'une loi restrictive de ses droits et pour éviter une déchéance fatale: il devient alors un véritable défendeur, appelé par la loi ellemême en déclaration de jugement commun, et auquel toutes les exceptions, même celle d'incompétence, deviennent également communes.

29. La règle qui veut que l'incompétence des tribunaux civils pour connaître d'une affaire civile sur laquelle il eût dû, régulièrement, être statué par un autre tribunal du même ordre, ne soit que relative, souffre encore exception en matière d'expropriation forcée, ainsi qu'on le verra plus bas.

Quant à l'incompétence fondée sur ce que la connaissance de l'exécution d'une sentence arbitrale a été attribuée à un tribunal autre que celui qui a rendu l'ordonnance d'exécution, il a été jugé qu'elle ne constitue point une incompétence ratione materiæ, et que, par suite, elle ne peut être invoquée pour la première fois en cause d'appel (Montpellier, 22 juill. 1836, aff. Courech, V. Arbitr., no 1180).

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30. L'art. 59 c. pr. porte, comme on l'a vu, que « en matière personnelle, le défendeur sera assigné devant le tribunal de son domicile; s'il n'a pas de domicile (du moins de domicile connu), devant le tribunal de sa résidence; s'il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un deux, au choix du demandeur; en matière réelle, devant le tribunal de la situation de l'objet litigieux; en matière mixte, devant le juge de la situation ou devant le juge du domicile du défendeur. »

31. Mais que faut-il entendre par matières personnelles, réelles et mixtes? Cette question est traitée au mot Action. Bornons-nous à rappeler ici brièvement que les matières personnelles sont celles dans lesquelles le défendeur est obligé personnellement en vertu d'un contrat ou quasi-contrat, d'un délit ou quasi-délit, ou d'une prescription de la loi, et où il transmet son engagement à ses héritiers ou successeurs universels; que les matières réelles sont celles où le défendeur n'est point lié au demandeur par une obligation personnelle, et ne peut être actionné qu'à raison de la détention qu'il a de la chose litigieuse; et que les matières mixtes sont celles où le défendeur est obligé tout à la fois personnellement et réellement.

32. Ces diverses définitions rappelées, il convient de reprendre successivement chacune des dispositions ci-dessus citées de l'art. 59 c. pr.- On comprend aisément le motif qui, en matière personnelle, a fait attribuer compétence au tribunal du domicile, ou, à défaut de domicile, de la résidence du défendeur. Il importe, en effet, à celui-ci d'être jugé par des magistrats qui le connaissent et de ne pas subir les dérangements qu'un plaideur de mauvaise foi voudrait lui imposer.

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33. Il faut prendre garde de donner ici aux mols matières personnelles une acception trop restreinte: la compétence du tribunal du domicile du défendeur ne s'applique pas seulement aux actions à l'appui desquelles le demandeur invoque une créance; elle s'étend à toutes les actions autres que celles qui sont réelles immobilières. Ainsi, par exemple, la contestation élevée sur l'état d'une personne doit être régie par le maxime actor sequitur forum rei. Cette maxime est la règle générale qui doit être suivie toutes les fois que le procès n'a pas pour objet des immeubles et qu'il n'y a pas été fait exception par un texte formel. Les actions mobilières, alors même qu'elles ne sont pas personnelles, mais réelles, comme lorsqu'elles ont pour objet la revendication contre le détenteur d'une chose perdue ou volée, sont assimilées, quant à la compétence, aux actions personnelles, et sont dès lors soumises à la règle actor sequitur forum rei. ---Les meubles sont considérés comme situés fictivement au domicile de celui qui en a la possession.

34. Le domicile d'une personne est au lieu où elle a son principal établissement (c. civ. 102). C'est aux tribunaux à déterminer, d'après les circonstances, quel est l'établissement principal (Req., 24 fév. 1855, aff. Angénieur, V. Domicile). — Le changement de domicile s'opère par l'habitation réelle dans un autre lieu, jointe à l'intention d'y fixer son principal établissement, intention qui se prouve par une déclaration faite tant à la municipalité du lieu que l'on quitte qu'à celle du lieu où l'on se transporte, et, à défaut de cette déclaration, par des circonstances (c. civ. 105-103), telles que l'entreprise d'un commerce, le service de la garde nationale, etc.-La femme mariée a son domicile chez son mari, le mineur non émancipé chez ses père et mère ou tuteur, l'interdit chez son tuteur. Ceux qui travaillent habituellement et demeurent chez autrui ont leur domicile dans la maison de la personne avec laquelle ils demeurent (c. civ. 108, 109). Enfin, le citoyen remplissant des fonctions conférées à vie, a son domicile au lieu où il les exerce (c. civ. 107).-V. Domicile. 35. Il est évident, d'après le principe posé par le § 1 de l'art. 59 c. pr., que, dans le cas d'une vente mobilière qui n'a point le caractère commercial, le vendeur ne peut être assigné en résiliation du contrat que devant le tribunal de son domicile, et non devant celui du lieu où la vente a été faite (Req., 24 oct. 1792) (1).

Il ne faut cependant pas pousser trop loin l'application de ce principe. La simple résidence, même momentanée, d'une personne dans un lieu autre que son domicile, doit suffire pour la rendre justiciable du tribunal de ce lieu, lorsqu'il s'agit de la contraindre à exécuter les contrats usuels et de peu d'importance qu'elle y a contractés; autrement, le recouvrement des créances les plus minimes ne s'opérerait souvent qu'avec lenteur et exigerait des frais considérables.

Ainsi, malgré les termes généraux de l'art. 59, il a été jugé, et avec raison, ce semble, qu'un marchand qui a fourni des objets à l'usage personnel ou domestique d'un individu, a le droit d'assigner celui-ci en payement au lieu où il a fait les fournitures, bien que le débiteur ait ailleurs son domicile réel et de droit, attendu que le marchand ne peut connaître d'autre domicile que celui où il a livré sa marchandise (Paris, 2 juill. 1850) (2).

36. Un autre arrêt a aussi jugé que, lorsqu'un comédien ne justifie pas, par une résidence constante d'une année, du domicile qu'il s'attribue; que, d'ailleurs, d'après sa profession, il peut être considéré comme n'ayant point de domicile fixe, s'il s'élève des contestations relativement à des engagements par lui pris, c'est devant le tribunal de l'arrondissement où il a con

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tracté qu'elles doivent être portées (Nimes, 4 pluv. an 9)(1).— Cette décision est juste. Il peut arriver que le défendeur, exerçant une profession qui nécessite des déplacements continuels, n'ait ni domicile ni résidence fixe; et dans ce cas il est raisonnable qu'il puisse être assigné devant le tribunal dans le ressort duquel se sont accomplis les actes ou les faits qui donnent naissance à l'action. C'est aussi ce que décide avec raison M. Rodière, Exposition raisonnée des lois de la compét. et de la procédure, l. 1, p. 110.

37. La demande en dommages-intérêts résultant d'un délit, intentée par l'une des parties lésées, après le jugement qui a statué sur l'action publique, doit être portée devant le tribunal du domicile de l'accusé acquitté, conformément à l'art. 59 c. pr.; et cela alors même qu'une demande analogue, précédemment formée, conjointement avec l'action publique, par une autre partie lésée, aurait été renvoyée, en suite de la cassation de la disposition de l'arrêt rendu sur cette demande par la juridiction triminelle, devant un tribunal autre que celui du domicile du défendeur, tribunal où elle se trouverait actuellement pendante. En effet, la circonstance que l'une des parties lésées par le délit a choisi la voie criminelle de préférence à la voie civile, ne peut réagir sur la position judiciaire de celle qui a voulu attendre l'issue du procès criminel, et intenter séparément son action civile devant la juridiction indiquée par le droit commun (Req., 11 août 1842, aff. Soucsme, V. no 262).— Il n'est pas exact de prétendre qu'il ya, dans ce cas, connexité entre les deux demandes: bien qu'elles aient une origine commune, elles diffèrent par des points essentiels qui dispensent d'en ordonner la jonction (même arrêt).

38. Lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, l'action est portée devant le tribunál du domicile de l'un d'eux, au choix du demandeur (c. pr. 59, alin. 2), afin d'éviter les frais qui résulteraient de la multiplicité des actions, s'il fallait poursuivre chacun des défendeurs devant le juge de son propre domicile.

s'agit d'une demande qui ne laisse pas d'être une, nonobstant la pluralité des défendeurs; il est évident que la loi n'a pas entendu permettre au demandeur, en réunissant diverses actions sans rapport entre elles, de soustraire plusieurs des défendeurs à leurs juges naturels.

Il y a lieu de considérer comme codéfendeurs plusieurs individus qui se sont engagés ensemble et par un seul et même acte, quoiqu'ils ne soient pas obligés solidairement, et que la dette soit divisible. Exiger que, dans ce cas, chaque débiteur soit appelé devant le tribunal de son domicile, ce serait multi. plier inutilement les frais, empêcher le créancier d'agir contre tous ses débiteurs à la fois, puisqu'il ne pourrait produire dans le même temps son titre devant des tribunaux divers, et enfin méconnaître la lettre et l'esprit de l'art. 59, § 2.-V. aussi en co sens Carré, loc. cit.

Il y a pareillement lieu de réputer codéfendeurs deux personnes contre lesquelles l'action du demandeur dérive du même délit. Ainsi, en matière de contrefaçon, le tribunal du domicile du tiers qui débite le produit de la contrefaçon est compétent pour connaître de la demande en indemnité dirigée simuitanément contre le débitant et le contrefacteur, alors surtout que le débitant a assigné en garantie le contrefacteur déjà actionné (trib. de com. de Paris, 12 nov. 1833) (2).

39. La disposition ci-dessus de Part. 59 c. pr. ne s'applique pas au cas où l'action n'est que feinte ou secondaire, à l'égard de l'un des défendeurs, et a pour objet de distraire la véritable et principale partie de ses juges naturels. C'est là une règle d'équité, nécessaire pour déjouer les calculs de la mauvaise foi, et dès lors tout à fait conforme à l'esprit de l'art. 59. Elle a été expressément consacrée par la cour de cassation qui a jugé en conséquence que l'action en réparation civile exercée contre l'auteur et l'imprimeur d'un écrit, ne doit pas être portée devant le juge du domicile de l'imprimeur, quand l'auteur a déclaré

Mais cette disposition n'est applicable que dans le cas où il prendre fait et cause pour celui-ci (Req., 5 juill. 1808) (3).

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(1) (Erulo C. Darius.) LE TRIBUNAL; Considérant qu'en droit le domicile de fait ne s'acquiert que par la résidence constante d'un an dans la même commune et le payement de-la contribution mobiliaire; que Darius ne justifie pas qu'il fût domicilié à Paris, et ce fait fut-il vrai, Darius ayant quitté Paris depuis plusieurs années avait perdu son domicile; que, d'ailleurs, par sa profession de comédien, il ne peut être considéré comme ayant un domicile fixe, ainsi que l'explique Rodier dans la quest. 1 sur l'art. 9, tit. 2, ord. 1667, les comédiens variant leur résidence suivant les engagements qu'ils contractent; que, dans l'espèce présente, Darius était à Toulon dans le mois de pluv. an 8, d'où il écrivit à Brulo pour lui proposer un engagement avec lui; qu'il se rendit à Nimes, où il contracta un engagement le 4 germ., qui a donné lieu aux contestations; que Darius a reconnu lui-même qu'il n'avait pas de résidence fixe, puisque, dans son acte du 29 du même mois, il ne donna pas cette résidence; que le domicile par lui élu dans ce même acte à Marseille ne peut être considéré que comme une précaution prise par lui pour s'assurer des significations qui pourraient lui être faites; que cette élection de domicile pouvait d'autant moins le rendre justiciable du tribunal de Marseille qu'il n'y était arrivé, suivant la lettre du 21 germ., que le 22 ou le 25; que s'il avait été cité devant le tribunal de Marseille, il aurait été fonde dans on système à proposer l'incompétence; que s'il n'a pas été cité à cri public d'apres l'ordonnance de 1667, c'est qu'il avait fait une élection de domicile où toutes les significations ont pu lui être faites, ce qui n'a pu que lui être utile, puisque, s'il eût été cité à cri public, il aurait pu ignorer les poursuites dirigées contre lui; qu'ainsi Darius, n'ayant aucun domicile fixe, était, pour l'action résultant de son engagement du 4 germ. an S, justiciable du tribunal dans l'arrondissement duquel cet engagement fut contracté; que les fins de non-procéder par lui opposées étant mal fondées, le tribunal de première instance a bien jugé;-Déboute Darius de son appel.

Du 4 pluv. an 9.-Trib. d'app. de Nîmes.

(2) Espèce (Chevrier, etc. C. Rossignol.)-Rossignol frères, de Laigle, prétendant que Carton, Bertin et autres marchands de Paris ont, sur des paquets d'aiguilles exposés par eux en vente et provenant de la fabrique de Chevrier et Duval, de Rugle, contrefait la marque de leur maison, assignent les uns et les autres devant le tribunal de commerce de la Seine en condamnation à une indemnité de 20,000 fr. et en suppression de la marque usurpée. - Chevrier et Duval, appelés en outre en garantie par quelques-uns des actionnés, soutiennent l'incompétence du tribunal de commerce de Paris et demandent leur renvoi devant les juges d'Évreux. Ils disent: Nous sommes les auteurs principaux du délit de contrefaçon dont se plaignent les sieurs Rossignol; les débitants

de Paris ne sont tout au plus que des complices; le tribunal compétent est donc le tribunal de notre domicile. Les sieurs Rossignol soutiennent que le délit qui sert de base à la demande est complexe et indivisible, qu'il se compose du débit et de la contrefaçon. Jugement.

LE TRIBUNAL; Attendu qu'il y a dans la cause plusieurs défendeurs, et qu'aux termes de l'art. 59 c. pr. la partie demanderesse a pu assigner devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, à son choix; que d'ailleurs, plusieurs des assignés ont appelé en garantie Chevrier et Duval, et que, d'après les dispositions de l'art. 181 du code précité, l'appelé en garantie est tenu de plaider devant les juges saisis de la demande principale qu'ainsi le tribunal de commerce de Paris, saisi de la demande principale, est compétent sous tous les rapports; — Par ces motifs, déboute da renvoi, et ordonne qu'il sera plaidé au fond.

Du 12 nov. 1833.-Trib. de comm. de Paris.-M. Ferron, pr.

(3) Espèce: - (Lacan C. Alix et Aubry.) - En 1807, Lacan, président du tribunal de Clamecy, fit citer, devant le bureau de paix, Alix, ancien colonel, domicilié dans l'arrondissement de ce tribunal, et Aubry, imprimeur à Paris, pour se concilier sur la demande qu'il se proposait de former contre eux, en suppression d'un libelle signé Alix, et imprimé par Aubry. Devant le bureau de paix, Alix a déclaré prendre le fait et cause d'Aubry. La conciliation n'ayant pu s'opérer, Lacan fit assigner, devant le tribunal civil de la Seine, tant Alix qu'Aubry, pour voir ordonner la suppression du libelle, et se voir condamner en 40,000 fr. de dommages-intérêts.

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Depuis, Alix a, de son côté, fait citer Lacan, d'abord au bureau de paix, et ensuite devant le tribunal civil de Clamecy, en suppression de plusieurs écrits rendus publics par l'impression et par des affiches, comme Clamecy, Lacan a excipé de la demande par lui formée contre Alix et calomnieux et injurieux. Cette dernière cause portée au tribunal do Aubry, devant le tribunal de la Seine; et, attendu la connexité de cette demande avec celle formée contre lui par Alix, il a conclu au renvoi de la cause devant le tribunal de la Seine.

Le 1er oct. 1807, jugement par lequel le tribunal de Clamecy a délaissé les parties à se pourvoir en règlement de juges, « attendu que les deman des respectives ont le même objet, ou, du moins, ont entre elles uno connexité telle, qu'elles ne présentent qu'un même différend.»-Le 16 dứ même mois, jugement par lequel le tribunal civil de la Seine, sur la de mande formée par Lacan, et sur le déclinatoire proposé par Alixy a dé claré surseoir à prononcer, eta renvoyé Lacan à se pourvoir en règlement de juges, « attendu que les faits des deux demandes ont des relations entre eux, et que, dans le jugement à intervenir, ils peuvent être appréciés les uns par les autres. »

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40. M. Carré décide dans le même sens que l'art. 59, § 2, est sans application au cas où les défendeurs ne sont pas obligés d'une manière égale et semblable; dès que l'engagement de l'un n'est qu'accessoire à celui de l'autre, le domicile de ce dernier détermine la compétence (L. de la proc., art. 59). C'est aussi ce qu'a jugé un arrêt récent (Douai, 12 juin 1844) (1).-On conçoit, toutefois, que lorsqu'il y a un obligé principal et une caution solidaire, le demandeur peut, comme s'il y avait deux obligés principaux, les assigner au domicile de la caution (Grenoble, 2 avr. 1830) (2).

Le créancier qui demande la nullité d'une constitution de dot, comme faite en fraude de ses droits par son débiteur à sa fille, peut aussi, à son choix, porter son action devant le tribunal du

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Du 6 avr. 1808.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Lasaudade, rap. Alix a formé opposition à cet arrêt; et, tout en rendant hommage au principe qui sert de base au renvoi ordonné, il a soutenu que le tribunal de Clamecy était seul compétent, les deux parties principales étant domiciliées dans le ressort de ce tribunal.-Deuxième arrêt. LA COUR;

Considérant que l'action en suppression et réparation d'injures par écrit est personnelle; - Que les sieurs Lacan et Alix, respectivement demandeurs et défendeurs en suppression et réparation d'injures écrites, sont domiciliés dans le ressort du tribunal de première instance de Clamecy;-Qu'encore bien que chacune desdites deux demandes ait pour objet des écrits différents, néanmoins, de l'aveu des parties et de l'avis des deux tribunaux, elles ont entre elles une telle affinité et connexité, qu'elles ne présentent qu'un même différend; Que les faits, prétendus de part et d'autre injurieux et calomnieux, ont entre eux des rapports tels, qu'ils peuvent être appréciés les uns avec les autres ; Que les juges naturels des parties sont plus à portée d'apprécier ces faits, et qu'aucuns motifs de récusation n'ont été allégués contre eux;

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Considérant que, d'après les déclarations faites, tant au bureau de paix qu'au tribunal civil de l'arrondissement de Paris, par lesdits sieurs Alix et Aubry, dont le sieur Lacan a requis acte, lesquelles déclarations ont été réitérées en cette cour, le sieur Alix, défendeur, est devenu la partie principale du sieur Lacan; Et qu'encore bien qu'aux termes de l'art. 59 c. proc., lorsqu'il y a deux défendeurs à une demande, elle puisse être portée devant le tribunal du domicile de l'un des défendeurs, au choix du demandeur, ce serait abuser de cette disposition que de se servir d'une action feinte ou secondaire, dans la seule vue de distraire la véritable et principale partie de ses juges naturels; - Ordonne, que sur les demandes respectives des parties, elles procéderont devant le tribunal civil de l'arrondissement de Clamecy, suivant les derniers errements.

Du 5 juill. 1808.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Lasaudade, rap.

(1) (Lemaire C. Massart.)-LA COUR; - Attendu que la demande en payement de 2,000 fr. n'a pas été formée contre Adrien Massart et conire Narcisse Massart, considérés par Lemaire comme obligés tous deux également au payement de cette somme; qu'elle a été formée contre Adrien, comme débiteur principal des 2,000 fr., et contre Narcisse assigné pour le cas seulement où la demande principale ne serait pas complétement accueillie, et où ledit Narcisse serait tenu, comme garant, d'indemniser Lemaire de tout ce que ce dernier ne toucherait pas d'Adrien; que, dès lors, ledit Adrien Massart ne pouvait, en vertu du deuxième paragraphe de l'art. 59 c. pr., sainement entendu, être distrait du tribunal d'Avesnes, par le seul motif que Narcisse, débiteur éventuel el subsidiaire, était domicilié dans l'arrondissement de Valenciennes; que, dès lors, les premiers juges se sont, avec raison, déclarés incompétents; Met l'appellation au néant.

Du 12 juin 1844.-C. de Douai.-M. Leroux de Bretagne, pr.

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(2) Espèce :- (Clot C. Girard.) — La maison Girard, qui avait fait des fournitures à Clot fils, cautionné par son père, les a assignés l'un et l'autre solidairement devant le tribunal de commerce de Briançon, licu du domicile du père. Le fils a prétendu qu'on aurait dû l'assigner devant le tribunal d'Angers où il était domicilié; qu'on ne pouvait le forcer de plaider au domicile de sa caution; que l'art. 59 n'était pas applicable à la caution, et n'avait entendu parler que de deux obligés principaux.Le père a adhéré à ces conclusions.-Jugement qui rejette le déclinatoire. Appel. Arrêt.

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domicile des époux donataires, ou du domicile du père donateur. On prétendrait à tort que celui-ci est sans intérêt à la contestation, et n'y est point défendeur réel (Req. 1er août 1833) (3). 41. Lorsque l'un des défendeurs n'est obligé qu'éventuellement, tandis que les autres le sont principalement, il est de toute évidence qu'on ne peut assigner ceux-ci devant le juge du domicile de celui-là. On ne saurait considérer comme l'un des défendeurs, dans le sens de l'art. 59, celui qui n'a pas un intérêt actuel à la contestation, et dont la présence n'est indispensable ni pour engager le litige ni pour en déterminer la décision il y a lieu de penser que sa mise en cause n'a eu pour objet que de distraire de leurs juges naturels les défendeurs principaux (Nancy, 28 janv. 1841, 27 fév. 1841) (4).

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nérales et absolues, et attributives du droit au demandeur de choisir le tribunal du domicile de l'un des défendeurs, pour y porter sa demande; que, dans l'espèce, Clot père étant obligé de payer la dette de son fils vis-à-vis la maison Salomon, doit, en cette qualité, être considéré comme l'un des défendeurs à l'action, que la maison Salomon avait droit d'exercer contre le père et le fils; - Confirme,... etc. Du 2 avril 1830.-C. de Grenoble, 2 ch.-MM. Vincendon, av. gén. (3) Espèce (Rochechouart C. Séguin.) Le contrat de mariago de la demoiselle Ouvrard avec le comte de Rochechouart porte qu'elle se constitue en dot, personnellement, un million de francs; cette somme a été immédiatement comptée au futur époux. Séguin, créancier d'Ouvrard père, pensant qu'une telle constitution de dot était faite en fraude de ses droits, a assigné, devant le tribunal de la Seine, Ouvrard père et les époux de Rochechouart, pour la voir déclarer nulle. Il a conclu, en outre, à ce que Rochechouart fut condamné à rapporter le million qu'il avait reçu. Les époux de Rochechouart, prétendant avoir, dès 1829, renoncé à leur domicile de Paris, et l'avoir transféré à Jumilhac, ont décliné la compétence du tribunal de la Seine. Un jugement par défaut a rejeté leur déclinatoire.

Pourvoi des époux de Rochechouart en règlement de juges. — Ils ont demandé le renvoi de la cause devant le tribunal de Nontron, tribunal do leur domicile. Ensuite, prévoyant l'objection que tirerait le défendeur de ce qu'Ouvrard père, domicilié à Paris, avait été conjointement assignó avec les demandeurs, ils ont soutenu qu'elle était sans force dans la cause; qu'en effet, les scules parties intéressées, celles qui défendaient réellement a l'action de Séguin, n'étaient autres que les époux de Rochechouart, sur lesquels portait tout le poids des condamnations demandées, tandis qu'Ouvrard père, sans intérêt matériel, n'avait à redouter aucune condamnation. Arrêt.

LA COUR ; — Considérant que la demande du sieur Séguin a été dirigéo non-seulement contre les sieur et dame de Rochechouart, mais aussi contre le sieur Ouvrard, domicilié à Paris, qui, ayant un intérêt évident à la contestation, a été assigné et pouvait être assigné devant le tribunal civil de la Seine; - Considérant que, suivant l'art. 59 c. pr., lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur peut, à son choix, assigner les défendeurs devant le tribunal du domicile de l'un d'eux ; qu'ainsi le tribunal de la Seine a été régulièrement saisi par le sieur Séguin; - Rejelto la demande en règlement de juges; ordonne que les parties continueront do procéder devant le tribunal de première instance de Paris, etc. Du 1er août 1833.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Jaubert, rap.Nicod, av. gén., c. contr.-Scribe et Gayet, av.

(4) 1re Espèce: (Méquignon C. Marcel.) — LA COUR ; - Attenda que si l'art. 59, § 2, c. pr. permet, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, d'assigner devant le tribunal du domicile de l'un deux, au choix du demandeur, cette disposition ne peut recevoir d'application que lorsque tous les défendeurs sont obligés d'une manière égale, et non pas lorsque les uns sont obligés principalement et les autres éventuellement; que, dans l'espèce, la demande des syndics a pour objet 1° de faire coadamner Méquignon, Pourrat et Chalendrie à leur payer, en leur qualité, solidairement et par corps, la somme de 6,414 fr. avec intérêts, pour l'impression des deux premiers volumes et des dix premières feuilles du troisième volume de la Bible de Carrière, impression qui a eu lieu avant la déclaration de la faillite de l'abbé Marcel; 2o de faire déclarer le jugement à intervenir commun avec Delandine, et ce nonobstant la cession qui aurait été faite à ce dernier de cette somme par ledit abbé Marcel; que ce n'est que par provision, et pour le cas seulement où Méquignon, Pourrat et Chalendrie viendraient à opposer des exceptions à la demande, suivant l'acte extrajudiciaire qu'ils ont fait signifier, que Gentil, Thouvenel et Lejeune ont été assignés, comme s'étant chargés de la continuation do l'impression de cette Bible, afin de faire accueillir les conclusions principales; - Qu'ils ne sont pas défendeurs actuels et nécessaires à la demande; que leur présence n'était pas indispensable pour engager le litige; qu'elle ne l'est pas davantage pour en déterminer la décision; qu'ils n'ont été évidemment mis en cause que pour soumettre les défendeurs principaux à la juridiction du tribunal de commerce de Nancy, à laquelle Mé

42. On ne peut pas non plus, en cas de faillite, considérer comme un défendeur sérieux, le failli mis en cause par les syndics, dans une instance qu'ils ont formée contre un tiers devant le tribunal du lieu de l'ouverture de la faillite (Rej., 10 juill. 1837, aff. Girard, V. n° 119). En effet, comme après la faillite toutes les actions judiciaires, actives et passives du failli, sont concentrées entre les mains des syndics, il est manifeste que ceux-ci, en mettant inutilement en cause le failli, dont ils sont les représentants légaux, n'ont d'autre but que de se procurer un prétexte abusif pour soustraire le tiers, seul véritable défendeur, à la juridiction du tribunal de son propre domicile.

43. Enfin, il faut encore induire du principe qui restreint l'application du § 2 de l'art. 59 au cas où les divers défendeurs sont obligés d'une manière égale et semblable, que le cessionnaire d'une créance n'est pas fondé à assigner le débiteur devant le tribunal du domicile du cédant, celui-ci n'étant point l'obligé direct et principal (Toulouse, 11 janv. 1839) (1).—A plus forte raison en est-il de même si la cession n'a pas été notifiée au débiteur, ou si le prétendu cessionnaire n'est que le prête-nom du cédant (même arrêt).

quignon, Pourrat, Delandine et Chalendrie, qui sont domicilés à Paris et à Besançon, sont étrangers;

Attendu que si le même art. 59, § 7, porte qu'en matière de faillite, les défendeurs seront cites devant le juge du domicile du failli, cette disposition s'applique au cas où le failli lui-même, ou les syndics de la faillite, sont défendeurs, et non à celui où ils sont demandeurs en matière purement personnelle; que si le failli ou les syndics de la faillite ont intérêt, lorsqu'ils procèdent en défendant, à plaider devant le juge du lieu où la faillite a éclaté, la partie contre laquelle ils agissent a, de son côté, un intérêt égal à rester devant son juge naturel; que l'art. 59 n'a pas dérogé, en ce qui le concerne, à l'ordre naturel des juridictions; - Attendu que c'est donc à tort que les premiers juges ne sont déclarés compétents; - Infirme.

Du 28 janv. 1841.-C. de Nancy, ch. civ.-M. Coste, pr.

2o Espèce :- - (Mayer C. Barbier.) — La cour; Attendu que si, aux termes de l'art. 59, § 2, c. pr., le demandeur peut, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs domiciliés dans des arrondissements différents, assigner à son choix, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, ce n'est qu'autant qu'ils ont un intérêt réel et actuel dans la contestation, qu'il n'y sont pas appelés pour déroger à l'ordre légal des juridictions et pour priver les parties de leurs juges naturels; que, dans l'espèce, il paraît certain, d'après les explications qui ont été données à l'audience, que les syndics, en disposant de 1,945 fr. sur Barbier et en endossant au profit de Charles Simonin, l'un d'eux, la traite qu'ils ont émise, ont eu pour but d'obliger ledit Barbier à venir plaider, loin des juges de son domicile, devant une juridiction qui lui est étrangère; que la justice ne peut pas sanctionner une telle fraude à la loi; que, d'ailleurs, tout ce qui tient aux pouvoirs des juridictions est d'ordre public;

Attendu que si le même art. 59, § 7, porte qu'en matière de faillite, les défendeurs seront assignés devant le tribunal du domicile du failli, cette disposition n'a pas pour effet d'attribuer exclusivement à ce tribunal la connaissance de toutes les contestations qui peuvent exister entre les syndics et des tiers; qu'elle constitue seulement à la faillite, c'est-à-dire à la masse des créanciers et aux syndics qui la représentent, un domicile légal indépendant du domicile réel de chacun d'eux et défère au tribunal qui a déclaré la faillite, le jugement de celles de ces contestations qui Constituent des matières de faillite, ou, en d'autres termes, qui prennent naissance dans le fait même de la faillite, qui sont soulevées à raison de ce fait et qui en sont des conséquences nécessaires; que c'est dans ce sens que l'art. 59 doit être entendu; que l'on ne peut pas considérer comme formant des matières de faillite les engagements qui sont intervenus plus ou moins longtemps avant la faillite entre celui qui depuis a failli et des tiers; que l'événement de la faillite ne peut produire aucune influence, soit sur la nature des engagements contractés par ces derniers, soit sur le caractère des poursuites à diriger contre eux, soit sur la compétence des juridictions appelées à connaître de ces poursuites; que les syndics qui sont chargés de l'administration des biens du failli n'ont pas, sous ces différents rapports, plus de pouvoirs que le failli lui-même n'en avait lorsqu'il était in bonis;

Qu'en vain l'on prétend que la liquidation de la faillite doit être faite avec ensemble et d'une manière uniforme; -Que le juge-commissaire ne peut pas se transporter dans toutes les juridictions où des contestations qui la concernent sont soulevées à l'effet d'exercer la surveillance qui lui est dévolue et de faire les rapports que ces contestations rendent nécessaires; Que les syndics ne peuvent pas se dessaisir des papiers et livres de la faillite pour les exhiber aux juges chargés de prononcer sur ces contestations; Qu'enfin, ils ne peuvent pas être tenus de se présenter devant ces juges pour défendre les droits de la masse des créanciers;

44. Toutefois, il a été jugé qu'une action est régulièrement portée devant le tribunal du domicile de l'un des défendeurs, bien que celui-ci n'ait au fond aucun intérêt dans l'affaire, si le demandeur a eu juste sujet de croire qu'il était intéressé, et s'il est constant qu'il n'a point eu l'intention de distraire les autres parties de leurs juges naturels (Bordeaux, 22 mars 1842, de Ségur et Martin C. Pelletan).

45. Il appartient souverainement aux juges du fait de décider si l'action intentée contre l'un des codéfendeurs n'est pas sérieuse et n'a eu pour objet que de distraire les principales et véritables parties de leurs juges naturels; ainsi, par exemple, si, de trois copropriétaires, l'un a cédé ses droits à un tiers, et si les deux autres sont assignés, conjointement avec le cédant, devant le tribunal du domicile de celui-ci, par le cessionnaire, en communication des titres de la propriété commune, il appartient à la cour d'appel, saisie de l'affaire, de décider que le cédant n'a été appelé dans l'instance que pour distraire les autres défendeurs des juges de leur domicile, sans que cette décision puisse tomber sous la censure de la cour de cassation (Req., 27 avril 1837) (2).

Que ces objections ne sont pas fondées; qu'en effet, les décisions qui interviennent sur les différends étrangers au fait de la faillite peuvent bien intéresser la liquidation en tant qu'elles prononcent des condamnations au profit de la masse des créanciers, mais qu'elles n'epèrent pas par ellesmêmes cette liquidation; qu'elles renferment, il est vrai, des éléments qui sont destinés à en faire partie, mais que ces éléments n'y entrent réellement que lorsqu'il est procédé à la formation de l'ensemble de la liquidation; Que l'assistance du juge-commissaire n'est indispensable que lorsqu'il s'agit d'opérations qui ont leur principe dans le fait même de la faillite; que toutes ces opérations sont par leur nature attribuées au tribunal du domicile du failli; que le juge-commissaire n'a donc pas à se déplacer; Que si les syndics ne peuvent pas se dessaisir des livres ou papiers de la faillite, il leur est facile d'y suppléer par des extraits ou copies en bonne forme; Qu'enfin ils ne sont pas tenus de se rendre en personne devant les tribunaux saisis des demandes intentées à leur requête; qu'ils peuvent se faire représenter par des avoués, agréés ou mandataires; que si l'éloignement du domicile des personnes avec lesquelles ils procèdent rend leur position plus difficile, c'est un inconvénient qui est commun à tous les demandeurs en général, et qui ne présente pas, en ce qui les regarde spécialement, un caractère de gravité assez prononcé pour que le législateur ait fait fléchir à leur égard le principe général posé dans la première partie de l'art. 59, principe qui garantit à chaque défendeur les juges de son domicile;

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Attendu que la demande formée par les syndics contre Barbier n'a pas pris naissance lors de la faillite de Mayer David; qu'elle a pour objet un fait qui est antérieur à cette faillite, et qui n'a pas avec elle une relation nécessaire; que c'est donc à tort que cette demande a été portée devant le tribunal de commerce de Nancy et que ce tribunal en a retenu la connais

sance.

Du 27 fév. 1841.-C. de Nancy, ch. civ.-M. Coste, pr.

(1) Espèce :-(Carrère C. Pujol etc.)-En 1838, Pujol se disant créancier de Carrère pour une somme de 694 fr., par suite d'une cession qui lui en aurait été faite par Ebelot, de Saint-Gaudens, cite devant le tribunal de cette ville tant Ebelot que Carrère. Carrère, domicilié à Auch décline la compétence du tribunal de Saint-Gaudens qui rejette le déclinatoire proposé. Appel.

LA COUR;

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- Arrêt.

Attendu que l'art. 59 c. pr. veut qu'en matière personnelle le défendeur soit assigné devant le tribunal de son domicile; - Attendu que, par exception, le deuxième alinéa du même art. permet au demandeur, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, d'assigner devant le domicile de l'un d'eux; Attendu que, dans l'espèce, il n'y avait réellement qu'un seul défendeur, de là qu'il résulte des circonstances de la cause que Pujol n'était que le prête-nom d'Ebelot; d'autre part, qu'en fait, la cession, tardivement faite à Pujol, n'aurait pas été notifiée à Carrère; par où ce dernier n'avait pour créancier qu'Ebelot: - Que, d'ailleurs, en principe, la deuxième disposition de l'art. 59 ne s'applique qu'au cas où les défendeurs sont obligés d'une manière égale et semblable; ce qui ne se rencontre pas dans l'espèce, Ebelot n'étant pas l'obligé direct, nisa créance n'étant pas de sa nature indivisible, n'étant pas non plus solidaire d'où il suit que Carrère seul était débiteur principal; qu'à ce titre, son domicile déterminait la compétence du tribunal qui devait connaître de la contestation; que c'est donc incompétemment que l'action a été introduite devant le tribunal de Saint-Gaudens: Par ces motifs, réformant le jugement, en ce qu'il aurait dû rejeter les poursuites dirigées contre Carrère, comme incompétemment introduites devant le tribunal de SaintGaudens, etc.

Du 11 janv. 1839.-C. de Toulouse.

(2) Espèce:-(Mallez C. Verhaighe.)-30 déc. 1813, acte notarié par

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