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LA COUR; Considérant, sur le premier moyen, que ce n'est pas à raison de la matière que les tribunaux ordinaires sont incompétents pour connaître des affaires de commerce; que si ces sortes d'affaires ont été distraites de leur juridiction, c'est uniquement dans l'intérêt des commerçants, dans la vue de faire juger plus promptement et à moins de frais les contestations qui les concernent; qu'il suit de là qu'en matière de commerce, l'incompétence des tribunaux ordinaires n'est pas absolue, mais seulement relative, et par conséquent qu'elle peut être couverte et qu'elle l'est effectivement, lorsque, comme dans l'espèce, les parties qui pouvaient s'en prévaloir ont renoncé à cette exception, et n'ont pas présenté de déclinatoire;

Sur le deuxième moyen:- Vu les art. 1323 et 1324 c. civ.; -Attendu qu'il résulte de ces articles que lorsque l'héritier déclare ne pas reconnaître la signature de son auteur, la vérification en est ordonnée en justice, expressions impératives qui annoncent que cette vérification doit être ordonnée d'office, alors même qu'il n'y a pas de conclusions prises à ce sujet; Attendu qu'il résulte des actes du procès, que Miquel a déclaré qu'il ne connaissait pas la signature de son père, et qu'il a constamment soutenu que l'acte au bas duquel elle se trouvait, était faux; qu'ainsi l'arrêt attaqué, en ordonnant l'exécution de cet acte, sans en avoir fait vérifier la signature, a contrevenu aux articles ci-dessus cités; → Casse. Du 10 juill. 1816.-C. C., sect. civ.-MM. Desèze, 1o pr.-Zangiacomi, | rap.-Cahier, av. gén., c. conf.-Barrot et Guichard,

av.

3o Espèce: - (Armand et comp. C. Roucamps.) - Dans l'espèce, un arrêt de la cour de Caen, en date du 20 déc. 1831, avait constaté, en fait, qu'une convention verbale avait eu lieu entre les parties toutes commerçantes, en vertu de laquelle leurs différends, s'il s'en élevait dans les opérations qui avaient lieu entre eux, devaient être soumis à un arbitrage volontaire; que, néanmoins, quoiqu'il s'agit de contestations entre négociants, les parties avaient renoncé à cet arbitrage lui-même, en procédant toutes deux devant les juges civils, et la cour avait conclu de ces faits que les tribunaux ordinaires étaient compétents pour cette contestation. Pourvoi d'Armand et comp.: 1° Violation de l'art. 1134 c. civ., en ce que l'arrêt attaqué, après avoir reconnu, en fait, que les parties étaient convenues de faire juger par des arbitres les contestations qui s'élèveraient à raison de leurs conventions, a néanmoins jugé que les tribunaux ordinaires étaient compétents pour y statuer; 2o violation de l'art. 631 c. com., en ce que la cour s'est immiscée dans la connaissance d'une contestation qui, soulevée entre négociants, était spécialement de la juridiction consulaire. Arrêt.

LA COUR;-Sur les deux moyens: Altendu, en droit, que, s'il n'est permis aux parties de saisir la juridiction exceptionnelle des tribunaux de commerce que dans les cas déterminés par la loi, puisque, hors ces cas, ces tribunaux sont d'une incompétence absolue, les mêmes parties peuvent toujours, en renonçant à une juridiction introduite en leur faveur personnelle, rentrer dans la juridiction ordinaire des tribunaux civils, leurs juges naturels, et dont l'incompétence, pour les cas exceptés, n'est que purement relative; Attendu que, si ce principe est vrai, quand même la juridiction exceptionnelle dérive de la loi, il doit être, à plus forte raison, reçu lorsqu'il s'agit d'un arbitrage volontairement consenti par les parties, puisque, nudi consensus obligatio contrario consensu dissolvitur. L. 35, ff., de reg. jur.;- Et attendu qu'il est constant et reconnu, en fait, dans la cause; 1° que l'arbitrage dont il s'agit a été volontairement consenti par les parties dans leur convention verbale du 2 juill. 1850; 2 que ce sont les demandeurs en cassation eux-mêmes qui ont assigné Roucamps et consorts par-devant le tribunal civil de Caen, qu'ils y ont instruit leur action, et que Roucamps et consorts y ont fourni leur défense; - Que, d'après ces faits et en refusant le renvoi par-devant les arbitres, réclamé par les demandeurs en cassation, l'arrêt attaqué a fait une juste application des lois de la matière; -Rejette.

Du 24 avril 1834.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Lasagni, rap. 4 Espèce: (Crabère C. Schilt, etc.)-En 1825, Cazebonne, membre de la chambre de garantie de Pau, donna sa démission. Les membres restants présentèrent pour son successeur Crabère, qui fut agréé par la caisse hypothécaire, de laquelle ressortit la chambre de garantie, mais sous la condition de fournir, avant d'entrer en fonctions, le cautionnement de 12,000 fr. exigé par les statuts de la société. Comme la retraite de Cazebonne lui donnait le droit de répéter contre la chambre de garantie près de 6,000 fr., qu'il avait lui-même versés à titre de cautionnement, et comme, d'ailleurs, il avait à réclamer sa part dans les bénéfices réalisés, il intervint, le 29 mars 1826, une transaction entre lui et la chambre, agissant tant en son nom personnel que comme se portant fort pour Crabere, qui y a donné plus tard son adhésion, par laquelle il abandonna à ce dernier tous ses droits à charge de prendre la responsabilité de ses opétions. — De plus, quant aux 6,000 fr. de cautionnement,'il paraît que

Chéret C. N...; Lahaye, 4 juin 1817, aff. M... C. S...; Bruxelles,' 8 juin 1822, aff. Decoster C. Vercanteren; Colmar, 5 fév. 1826,

Crabère, par des accords arrêtés entre lui et la chambre de garantie s'était engagé à les rembourser à Cazebonne.

Cette dernière convention a été constatée par jugement commercial du 29 mai 1830, et par arrêt confirmatif du 31 août 1832, lesquels, sur l'action de Cazebonne, en remboursement de son cautionnement, ont condamné Schilt, Dupouy, et les autres membres de la chambre de garanti à payer à Cazebonne 5,685 fr. 20 c., avec les intérêts à 6 p. 100. Ces jugement et arrêt étaient étrangers à Crabère, qui n'y avait pas été appelé. En fait, il avait déjà donné sa démission, sans avoir fourni encore aucun cautionnement, mais après avoir pris part à plusieurs opérations.

Cependant, en 1836, Schilt et consorts ont fait pratiquer à son préjudice, entre les mains du maire de Tilhouse, son débiteur, une saisie-arrêt jusqu'à concurrence de 5,683 fr. 20 c., avec intérêts légitimes depuis le 29 mars 1826. Cette saisie-arrêt était fondée sur l'obligation résultant du jugement du 29 mai 1830, et de l'arrêt du 31 août 1832. — Assigné en validité, Crabère, sans proposer de déclinatoire, a conclu à la nullité de la saisie, comme n'ayant pas été dénoncée régulièrement, comme faite sans titre et sans permission du juge, enfin comme faite sans cause. Jugement du tribunal civil qui valide l'opposition dans la forme, et as fond, renvoie les parties à se pourvoir devant les juges compétents.

Appel par Crabère, qui, cette fois encore, n'attaque pas la compétence de la cour royale jugeant civilement, mais se borne à reproduire ses moyens de nullité.- 1er déc. 1837, arrêt de la cour de Pau, qui valide la saisie arrêt, tant en la forme qu'au fond, c'est-à-dire pour la somme demandée de 5,683 fr. 20 c., avec les intérêts. Entre autres motifs, la cour royale considère que les saisissants ayant payé le montant des condamnations portées dans l'arrêt du 31 août 1832, à la charge de Crabère, qui en était tenu, suivant leurs conventions, se sont trouvés légalement subrogés au bénéfice de cet arrêt, et que, dès lors, ils ont pu s'en servir comme d'un titre suffisant pour motiver la saisie-arrêt pratiquéo contre Crabère.

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- Arrêt.

Pourvoi de ce dernier. -1° Incompétence, excès de pouvoir, violation des art. 19 et 631 c. com., 473 c. pr., de la loi du 1er mai 1790, et de celle des 16-24 août de la même année, tit. 4, art. 5, en ce que la cour royale était incompétente pour juger civilement, entre associés, le mérite des titres invoqués pour justifier la saisie-arrêt.-Le tribunal de première instance, dit-on, n'avait validé la saisie qu'en la forme; au fond, il s'était reconnu incompétent parce que les titres étaient relatifs à des actes et faits commerciaux concernant des associés ou actionnaires d'une société commerciale, car tel est le caractère des chambres de garantie dont les opérations se rattachent à celles de la caisse hypothécaire. La cour de Pau, jugeant sur appel, était donc aussi incompétente sous ce dernier rapport; et l'incompétence, dans ce cas, était ratione materiæ, c'est-àdire qu'elle aurait dû être déclarée d'office. Bien plus, la chose jugée faisait obstacle à ce que la cour royale pût statuer au fond, car le chef du jugement qui admettait l'incompétence n'était pas déféré sur l'appel.— 2o Violation des art. 557, 558 et 559 c. pr., en ce que le titre qui, à défaut de permission du juge, est nécessaire pour pratiquer une saisiearrêt, n'existait pas dans l'espèce ; qu'on ne saurait, en effet, réputer tel l'arrêt du 31 août 1832, étranger au demandeur; que, tout au plus, la quittance d'où la cour royale a fait résulter une subrogation légale, aurait pu constituer un titre pour la saisie; mais que cette quittance n'était pas même énoncée dans l'exploit de saisie-arrêt; que, si l'on y trouve l'allégation vague d'une obligation du sieur Crabère, cette allégation n'a pu remplir le vœu de la loi. LA COUR; - Sur le premier moyen : Attendu, en fait, que ni en première instance ni en appel, l'incompétence du tribunal civil n'a été proposée par le demandeur, et qu'en appel il a conclu au fond ;—Attendu, en droit, que l'incompétence des tribunaux civils pour statuer en matièro commerciale n'est pas absolue ; — Que les commerçants peuvent renoncer à demander leur renvoi, et qu'ils sont présumés y avoir renoncé, s'ils ne l'ont pas demandé in limine litis; - Attendu enfin que les qualités de l'arrêt indiquent que la matière était disposée à recevoir une décision définitive; Sur le deuxième moyen : - Attendu qu'il est constaté pat l'arrêt que l'exploit de saisie énonce qu'elle fat faite pour avoir payement d'une somme de 5,683 fr. 20 c., somme que le demandeur avait pris l'engagement de rembourser en sa qualité de membre de la chambre de garantie de Pau, ainsi que cela résultait du jugement du tribunal de commerce de cette ville du 29 mai 1830, et d'un arrêt de la cour royale du 31 août 1832; - Attendu que les qualités de l'arrêt attaqué indiquent aussi que le payement de cette somme eut pour effet d'opérer, en faveur des saisissants, une subrogation légale sur le demandeur; — Que leur droit se fondait sur un arrêt qui les avait condamnés à payer la dette du demandeur; D'où l'arrêt attaqué a pu induire que cette décision judiciaire était obligatoire contre lui; Attendu que, dès lors, il a été satisfait aux dispositions des art. 557 et 559 c. pr. civ.;- Rejette, etc. Du 18 mars 1839.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Jaubert, rap.-Hervé. f. f. d'av. gén., c. conf.-Moreau, av.

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aff. Stahl C. Rist; Caen, 23 juill. 1827, aff. Legoherel, V. Faillite; Bordeaux, 1er fév. 1831, aff. Fontémoing C. N...; Bourges, 11 juin 1831, aff. Berger C. Denizot; Bordeaux, 7 avr. 1832, aff. Corneille C. Longpré; Poitiers, 12 juill. 1853, aff. E. Seignette C. A Seignette; Req., 9 janv. 1838, aff. Loisel C. Pluchard; Limoges, 10 déc. 1840, aff. Chabrier C. Comte, Paris, 3 fév. 1843, aff. canal de l'Ourcq C. Coic).- V. Cassation, no 1827.

220. Il a encore été jugé, conformément au même système 1o que la disposition de l'art. 51 c. com. portant que toute contestation élevée, en matière de société commerciale, entre les associés, et pour raison de la société, sera jugée par des arDitres, ne fait pas obstacle à ce que les tribunaux civils puissent, comme juges ordinaires, prononcer, à la différence des tribunaux de commerce, sur des contestations de cette nature, quand le déclinatoire n'a pas été proposé in limine litis (Rej., 9 avr. 1827) (1).— V. Arbitrage, nos 111 et suiv.

221. 2° Que, pareillement, l'incompétence absolue des tribunaux de commerce pour juger les contestations entre associés, expressément dévolues à des arbitres, résultant de ce que leur juridiction est exceptionnelle, ne s'applique point aux tribunaux civils ni aux cours d'appel qui jouissent de la plénitude de juridiction; de sorte que lorsque des contestations de ce genre ont été portées soit devant un tribunal civil, soit devant une cour, même par voie d'appel d'une sentence consulaire, la demande en renvoi devant des arbitres doit être formée devant le tribunal ou la cour, avant toute défense au fond, à peine de n'être plus recevable ultérieurement (Req., 29 mai 1845, aff. Dupasseur, D. P. 45. 1. 349).— V. eod., no 112.

222. 3° Et que de même, lorsque des personnes associées pour un négoce, se trouvant impliquées dans plusieurs procès connexes entre eux, dont les uns sont commerciaux et les autres civils, sont convenues par transaction de les faire juger tous par les tribunaux civils, cette convention est valable et doit recevoir son' effet; de manière que le jugement qui en ordonne l'exécution en maintenant la connaissance de tous les procès dont il s'agit à la juridiction civile ne peut être attaqué comme violant Part. 51 c. com., ni aucune autre loi (Req., 20 avr. 1825, aff. Durand, V. eod., no 112).

223. La faculté de proroger, renfermée dans les limites cidessus tracées, comprend celle de conférer au tribunal, dont la juridiction est prorogée, le pouvoir de juger en dernier ressort (V. à cet égard ce qui a été dit vo Appel civil, nos 221 et suiv., ainsi que nos observations v° Degrés de juridiction). — Bien entendu que, dans les causes dont la valeur excède le taux du derpier ressort, le juge ne peut décider sans appel que quand il y est autorisé formellement par le consentement de toutes les parties; le consentement non accepté d'une seule partie est insuf

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(1) Espèce: (Pannetrat C. Merle et Foin.)- En 1822, Pannetrat, associé avec Merle et Foin pour une opération commerciale formée en 1817, est assigné par ceux-ci devant le tribunal civil de Clamecy.-Jugement; et, sur l'appel, arrêt de la cour de Bourges, du 6 juin 1823, qui condamne Pannetrat à rapporter à la société 2,482 fr. Il est à remarquer qu'aucune des parties ne s'est prévalue de l'incompétence des juges civils ni en première instance ni en appel. Pourvoi de la part de Pannetrat, pour violation de l'art. 51 c. com. - Arrêt.

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LA COUR; Attendu que c'est devant le tribunal civil de Clamecy, comme tribunal civil, que la cause a été portée; qu'elle y a été discutée et jugée sans que, ni en première instance ni en appel, son renvoi devant arbitres ait été demandé; Attendu que les tribunaux civils sont les juges naturels des parties; - Que l'art. 51 c. com., invoqué par le demandeur à l'appui de son pourvoi, n'a disposé que pour le cas où ce serait un tribunal de commerce qui se trouverait saisi; - Que cet article restrictif de la juridiction exceptionnelle des tribunaux de commerce ne peut exercer aucune influence sur la compétence des tribunaux ordinaires, auxquels il est parfaitement étranger; - Que, dès lors, le tribunal civil de Clamecy et la cour royale de Bourges ont été compétents pour connaître de la contestation qui s'était élevée entre les parties, dès lors surtout qu'aucune d'elles n'avait décliné sa juridiction; -- Rejette.

Du 9 avril 1827.-C. C., ch. civ.-MM. Brisson, pr.-Carnot, rap.-Joubert, 1er av. gén., c. conf.-Leroy et Dalloz, av.

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fisant (Cass., 2 mess. an 10, aff. Christi, V. Degrés de juridiction). Il est à remarquer cependant que le droit que nous reconnaissons aux parties de conférer à un tribunal de première instance le pouvoir de prononcer en dernier ressort sur leur contestation, leur a été dénié, au contraire, par une décision du conseil d'État, qui a déclaré nulle, comme contraire à l'ordre public, la clause d'un marché administratif par laquelle le conseil de préfecture était institué juge en dernier des contestations que ce marché pourrait faire naître entre les contractants (cons. d'Ét., 18 déc. 1839) (2). Mais, malgré l'autorité de cette décision, nous ne saurions considérer les lois qui consacrent le droit d'appel, comme des dispositions d'ordre public auxquelles on ne puisse valablement déroger.

224. On ne peut déférer à un tribunal de première instance la décision d'un appel : ce serait introduire le désordre dans la hiérarchie judiciaire (V. Degrés de juridiction).— Les parties ne peuvent pas non plus conférer à un tribunal en corps, même au juge de paix, le pouvoir de prononcer, sous leur qualité de juges institués par la loi, comme arbitres, et, à plus forte raison, comme amiables compositeurs (Rej., 30 août 1813, aff. Michaux, V. Arbitrage, no 556; Conf. Carré, 1. 594).

225. Il suffit, pour opérer la prorogation de compétence, dans les cas où elle est autorisée, que le défendeur ait présenté des défenses ou des exceptions qu'il ne devait faire valoir qu'après avoir proposé le déclinatoire (c. pr. 169). Par exemple, lorsque la juridiction ordinaire a été saisie d'une contestation susceptible d'être soumise à des arbitres, la déclaration de s'en rapporter à droit, faite à l'audience par le défendeur principal, attribue irrévocablement au tribunal la connaissance de la cause (Bourges, 4 juin 1839, aff. Charbonneau, vo Exception).

226. Si le défendeur à une action commerciale portée devant un tribunal civil est censé accepter la compétence de ce tribunal en n'invoquant pas le déclinatoire in limine litis, à plus forte raison le demandeur qui a saisi le tribunal dont il s'agit d'une semblable action, n'est-il plus recevable à la porter ensuite devant la juridiction consulaire. C'est ce qui a lieu, par exemple, lorsque le porteur d'une créance commerciale, après avoir fait pratiquer une saisie-arrêt sur son débiteur, a assigné celui-ci devant le tribunal civil à l'effet, non-seulement de reconnaître la signature apposée au titre de la créance, mais encore de voir condamner le tiers saisi à vider ses mains, jusqu'à due concurrence, dans celles du saisissant une telle assignation attribue évidemment au tribunal civil la connaissance de la validité et do l'exécution de l'acte en vertu duquel a eu lieu la saisie; de sorte que le créancier n'est pas recevable à former ensuite devant le tribunal de commerce une autre demande tendante à obtenir une condamnation par corps pour la même dette (Colmar, 23 nov. 1815) (3).—Le jugement du tribunal de commerce prononçant,

de préfecture du département de la Seine, du 15 juin 1856 qui a rejeté la demande qu'ils avaient formée (contre la ville de Paris), d'une indemnité montant à la somme de 269,550 fr., à raison du préjudice que leur auraient causé le mauvais état des machines de Chaillot et la dégra dation de la conduite montante et des bassins réservoirs de Chaillot; ce faisant, ordonner qu'il sera fait liquidation à leur profit de tous dommages et intérêts et indemnités que leur assure l'adjudication qui leur a été consentie du chautage des pompes à feu de Chaillot, condamner, en outre, le préfet de la Seine en tous les dépens;- Vu la loi du 28 pluv.

an 8;

Sur la fin de non-recevoir résultant de ce qu'une disposition du cahier des charges aurait institué le conseil de préfecture juge en dernier ressort; Considérant que les juridictions sont d'ordre public; qu'il ne peut y être dérogé par des conventions particulières des parties, et que, dès lors, le pourvoi peut nous être déféré par la voie contentieuse.

Du 18 dec. 1859.-Ord. cons. d'Ét.-MM. Montaud, rap.-Germain, concl.-Maulde et Latruffe-Montmeylian, av.

(5) Espèce (Dockes.) Lazare Dockes, commerçant, afin d'avor payement d'un billet de 1,200 fr., souscrit à son profit par Isaac Dockes, aussi commerçant, a formé, le 8 juill. 1814, une saisie-arrêt entre les mains de Landwerlin, débiteur de ce dernier. — Le 14 du même mois, i a denoncé cette saisie à Isaac Dockes, avec assignation devant le tribunal civil, pour voir dire qu'il serait tenu de venir reconnaître sa signature, sinon qu'elle serait tenue pour reconnue, que la saisie-arrêt serait déclarée valable, et que les sommes dont ce tiers saisi se reconnaîtrait débiteur seraient versées entre les mains du saisissant jusqu'à concurrence de sa

dans ce cas, le renvoi de l'affaire devant le juge civil devrait être maintenu, alors même que le créancier, en y formant appel, aurait déclaré se désister de la partie de ses premières conclusions tendante à être payé par le tiers saisi, et se restreindre ainsi à demander la reconnaissance de la dette et la validité de la saisiearrêt (même décision).

ticuliers qui demandent justice; s'ils ont trop de travail, le gou→ vernement y pourvoit en créant des chambres temporaires, et nous ne concevrions pas comment les juges des tribunaux civils, mieux rétribués que les juges de paix, pourraient, au grand détriment des parties qu'ils obligeraient à se pourvoir sur nouveaux frais, rejeter un surcroît d'occupations qu'un juge de paix, dans des circonstances analogues, ne saurait décliner d'après la doctrine généralement reçue. »Malgré ces raisons, qui ne sont point, on le voit, dénuées de force, nous inclinons à croire que la disposition de l'art. 7 c. pr. est particulière aux juges de paix; que les autres tribunaux ne sont point dans l'obligation de juger les procès qui ne leur sont pas naturellement dévolus, et qu'ils devraient même s'en abstenir si, leurs rôles étant surchargés, ils ne pouvaient statuer sur ces procès sans apporter un trop long retard à la décision des affaires portées devant eux par les

227. La prorogation de compétence, dans les cas où elle est valablement consentie par les parties, est-elle obligatoire pour le tribunal qui en est l'objet ? Cette question est controversée. A l'appui de la solution affirmative, on invoque l'art. 7 c. pr., portant que les parties pourront toujours se présenter volontairement devant un juge de paix, auquel cas il jugera leur différend, encore qu'il ne fût le juge naturel des parties ni à raison du domicile du défendeur, ni à raison de la situation de l'objet litigieux. Ces termes impératifs : auquel cas il jugera leur différend, expriment suffisamment que le juge de paix n'a pas seule-justiciables de leurs ressorts respectifs.-Il a été jugé ainsi qu'il ment la faculté, mais bien l'obligation de juger la contestation qui lui est soumise par les parties, quoiqu'il ne soit point leur juge naturel. Or, il y a, prétend-on, identité de motifs pour appliquer aux divers tribunaux la disposition que l'art. 7 c. pr. a spécialement établie pour les tribunaux de paix. « Les juges, dit M. Rodière, t. 1, p. 138, doivent tous leurs moments aux par

créance. Isaac Dockes ayant constitué avoué et signifié des défenses au fond, l'instance s'est trouvée liée devant le tribunal civil. Néanmoins, pendant cette instance, Lazare Dockes a formé, le 28, devant le tribunal de commerce, une autre demande tendant à ce que son débiteur fût condamné par corps à lui payer le montant du billet dont il s'agit. Isaac Dockes a soutenu que l'instance pendante au tribunal civil formait obstacle à ce qu'il en fût introduit une nouvelle au tribunal de commerce. - Le 50 nov. 1814, jugement qui accueille le déclinatoire et renvoie les parties devant le tribunal civil. Revenu devant ce tribunal, Lazare Dockes s'est désisté de ses premières conclusions, tendant à ce que le tiers saisi fùt tenu de vider ses mains, et s'est restreint à demander contre la partie saisie la reconnaissance de la signature et la validité de l'opposition. — Un jugement du 5 janv. 1815 l'a démis, quant à présent, de cette demande. Appel du jugement du tribunal de commerce, du 30 nov. 1814. — Arrêt. LA COUR; Considérant que la juridiction consulaire est, par sa nature, une juridiction d'exception, et que l'attribution des affaires commerciales, que la loi défère spécialement aux tribunaux de commerce, n'est pas tellement absolue qu'elle rende, de plein droit, les tribunaux ordinaires incompétents pour prononcer sur les mêmes matières, lorsqu'ils en sont saisis par les parties, et que ni l'une ni l'autre tre demande le renvoi; que, par contre, l'incompétence des tribunaux consulaires, quant aux affaires non commerciales, est tellement radicale, que non-seulement elle ne peut-être couverte même par le consentement des parties, mais qu'encore l'art. 424 c. pr. enjoint à ces mêmes tribunaux de renvoyer, encore que le déclinatoire n'ait pas été proposé; qu'en résultat la juridiction consulaire, qui donne aux commerçants l'avantage d'être jugés par leurs pairs, est un droit que la loi leur confère, duquel ils peuvent user facultativement, mais auquel aussi ils peuvent renoncer; - Considérant que cette renonciation peut être expresse ou tacite, et qu'elle est tacite toutes les fois que l'acte duquel on veut la faire résulter présente ou présuppose un acquiescement à la juridiction du tribunal civil, qu'il est de principe, à cet égard, que les moyens d'incompétence doivent toujours être proposés avant les défenses au fond, en telle sorte que les défenses au fond emportent acquiescement et soumission à la juridiction du tribunal devant lequel on est assigné, et par cela même renonciation à tous moyens d'incompétence; que, s'il en est ainsi quant au défendeur assigné devant un juge incompétent, il doit en être de même, et à beaucoup plus forte raison, lorsque c'est le demandeur qui, de sa libre volonté, saisit un tribunal civil de la connaissance du fond d'une demande commerciale par sa nature;

Considérant que, par l'assignation donnée le 14 juill. 1814 devant le tribunal civil de Colmar, par suite de la saisie-arrét faite le 8 du même mois, Lazare Dockes, partie de Raspieler, a conclu non-seulement à la reconnaissance de la signature apposée au bas de la promesse souscrite par Isaac Dockes, partie de Sandherr, mais encore à ce que les deniers dus par le tiers saisi soient délivrés au requérant, jusqu'à concurrence de ses prétentions en principal, intérêts et frais, à quoi ledit tiers saisi sera contraint, etc.; qu'une pareille assignation attribuait évidemment au tribunal civil la connaissance de la validité et de l'exécution de la promesse en vertu de laquelle se faisait la saisie-arrêt, puisque, d'une part, Lazare Dockes demandait la reconnaissance de la signature, reconnaissance dont Feffet naturel devait être d'authentiquer l'acte, de lui donner la même force que s'il eût été passé en justice ou devant notaire, et même de le purger de toutes les discussions qui pouvaient s'élever sur sa validité; et que, d'autre part, il demandait, en présence de son débiteur, et contradictoirement avec lui, que le tiers saisi fût condamné à le payer en l'acquit de ce ème débiteur, ce qui offrait une demande réelle en payement, et ce qui

est facultatif à un tribunal de commerce ou à un tribunal civil d'arrondissement de se déclarer d'office incompétent pour connaître d'une contestation entre parties qui ne sont pas ses justiciables, bien que cette contestation ne soit pas par sa naturo hors de ses attributions (Req., 11 mars 1807; Rennes, 22 mars 1838) (1).—Toutefois, il a été décidé, au contraire, mais à entraînait nécessairement la discussion de tous les moyens qu'Isaac Dockes pouvait être en droit d'invoquer quant au fond, puisque le seul moyen possible de contester la demande était de contester la créance qui lui servait de base exclusive, et qu'en ne contestant pas, le créancier saisissant aurait été judiciairement autorisé à toucher le montant de sa créance deş mains du tiers saisi, ce qui en aurait opéré la reconnaissance tacite, et, par suite, l'extinction; que, dès lors, toute discussion possible eût été terminée; que, d'un autre côté, au moyen de ce que le tiers saisi avait, dès le principe, et au bas de la saisie même, déclaré devoir une somme de beaucoup supérieure à celle due par Isaac Dockes, Lazare Dockes demandait, de fait, tout ce qu'il avait intérêt de demander, et qu'il n'eût pas agi autrement, s'il avait voulu se désister de son droit à la juridiction consulaire, et saisir de son choix, de son plein gré, le tribunal civil; qu'ayant sous sa main une somme plus que suffisante pour se remplir, il était assez naturel qu'il ne mit pas d'importance à la contrainte par corps, et qu'il cherchât à accélérer l'instant de son payement, en saisissant la tribunal civil de tout ce qu'il avait intérêt de demander, et en évitant do saisir cumulativement le tribunal de commerce;

Qu'à la vérité, la demande en validité de saisie-arrêt ne pouvait, d'après la loi, être portée que devant le tribunal civil; mais que si l'intention de Lazare Dockes, en se conformant à cette disposition de la loi, eût été de ne faire qu'un acte conservatoire, et de saisir exclusivement le tribunal de commerce de la connaissance du fond, c'est-à-dire du mérite et de la validité du titre en vertu duquel il agissait, il n'aurait pas, en concluant à la reconnaissance de la signature et à la main-vidange, saisi de fait le tribunal civil de la connaissance de tout ce qui pouvait concerner ce même titre, quant au fond, et il se serait toujours réservé, d'une manière expresse, d'y faire statuer par les juges consulaires; qu'en n'agissant pas ainsi, qu'en saisissant sans réserve aucune le tribunal civil de toute discussion relative au titre, il est évident qu'il a par là renoncé à la juridiction consulaire, ainsi qu'il en avait la faculté; que, dès lors, et au moyen de l'acte siguifié le 10 nov. 1814, à la requête d'Isaac Dockes, et par lequel il renonçait de fait à demander son renvoi, le tribunal civil de Colmar s'est trouvé valablement et irrévocablement saisi, et que, par suite, le jugement dont est appel, qui n'a fait qu'appliquer ces principes incontestables, est à l'abri de toute critique;

Considérant qu'on ne peut faire résulter aucune induction de ce que, par jugement du 5 janv. 1815, le tribunal civil de Colmar a débouté, quant à présent, Lazare Dockes de sa demande, ni de ce qu'avant ce jugement, duquel il n'y a pas d'appel, et qui est postérieur à celui du tribunal de commerce du 30 nov. 1814, le demandeur Lazare Dockes avait restreint ses demandes et conclusions à la reconnaissance de la signature et à la validité de la saisie, et qu'en ne concluant plus à la main-vidange," il divisait une action qui ne pouvait plus l'être, au moyen de ce que le tribunal civil avait été précédemment saisi de tout ce qui pouvait concerner le titre et la saisie-arrêt; - Par ces motifs, et adoptant, au surplus, ceux des premiers juges, a mis et met l'appellation au néant; ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, sauf à la partie de Raspieler à se pourvoir devant le tribunal civil, comme et ainsi qu'elle avisera, etc. Du 25 nov. 1815.-C. de Colmar.-MM. Raspieler et Sandherr, av.

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fort, ce nous semble, que le tribunal civil qui a été saisi d'une contestation commerciale, et dont la juridiction n'a point été déclinée par le défendeur, ne peut, d'office, renvoyer les parties devant d'autres juges (Colmar, 6 août 1827 (1); Douai, 9 déc. 1843, aff. Dujardin C. Descamps, V. Compét. com., no 400).

228. La prorogation n'a point d'effet à l'égard des tiers, par exemple à l'égard des garants, des coobligés res inter alios icta tertio non nocet (V. Carré, t. 1,p. 586).—Mais lorsqu'il y a plusieurs parties défenderesses solidaires, la convention passée de bonne foi par l'une d'elles avec le demandeur et par laquelle | elle a consenti à ce que la contestation, bien qu'appartenant d'après sa nature à la juridiction commerciale (ou des juges de paix) fût jugée par un tribunal civil d'arrondissement, doit avoir son effet à l'égard des autres codéfendeurs, et les rend non recevables à opposer le déclinatoire...; alors surtout que l'objet de la contestation est indivisible (Aix, 15 avril 1833) (2).

229. Une question fort grave se présente, c'est celle de savoir s'il est loisible aux parties de convenir d'avance que les contestations relatives à l'exécution de leurs engagements seront soumises à tel tribunal qu'elles indiquent, ou à des arbitres. Cette convention qu'on appelle soumission de juridiction, paraît à M. Carré, t. 1, p. 599, devoir être régie par les mêmes règles que la prorogation volontaire, dont elle ne diffère point quant à

son essence.

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230. Cette question ne nous paraît point devoir être résolue dans ces termes généraux. D'abord, une première distinction doit être faite, à nos yeux, entre le cas où la convention déroge à la compétence quant au domicile, et celui où elle la modifie quant à la nature des contestations qui peuvent diviser les contractants. Dans la première hypothèse, la loi elle-même autorise la stipulation d'un domicile d'élection (c. civ. 111), laquelle, on le sait déjà, ne se réfère qu'à des convenances privées, à un intérêt purement civil. Les stipulations de la seconde hypothèse ont une tout autre gravité, elles tendent à intervertir l'ordre des juridictions que la loi a établie suivant la nature des causes; et si, pour des cas assez rares, tels que ceux que l'incertitude des plaideurs, leur bonne foi ou les accidents de la vie font naître, un tribunal ayant juridiction générale peut être régulièrement saisi, ce n'est point une raison pour qu'on doive maintenir des conventions qui tendraient à lui donner, contrairement à l'intention du législateur, des attributions dont il a voulu le décharger dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice,

sieur Batbié d'Auch, lequel ensuite l'assigne comme endosseur, et avec lui le tireur de Cologne. - Aubagès, tireur, comparait et soutient que le porteur actuel est un prête-nom; et cependant il défend au fond sans proposer un déclinatoire. Le 14 brum. an 15, le tribunal de commerce constate que Batbié est un prête-nom; que Bégué est le véritable propriétaire de la lettre de change; et, par suite, il se déclare incompétent.

Pourvoi de Bégué, pour un prétendu déni de justice, en ce que le tribunal de commerce d'Auch n'avait pu se déclarer incompétent, bien qu'il ne fut le juge ni du lieu ni des personnes, attendu que le consentement des parties avait suffi pour lui conférer juridiction, la matière étant commerciale.-M. Daniels, substitut du procureur général, a pensé que le consentement des parties avait conféré au tribunal de commerce la faculté de connaitre de l'affaire, mais ne lui en avait pas imposé la nécessite; que le principe contraire tendrait à épuiser les forces d'un juge, en l'obligeant de se prêter à tout le monde. Il citait Becmann, dans ses Annotations sur Boehmer, Introd. in jus Digest., ad tit. De jurisd., § 21. — Arrêt. LA COUR; Attendu qu'aucune loi n'oblige un tribunal à juger des parties qui ne sont pas ses justiciables, alors même qu'elles auraient consenti à être jugées par lui; - Rejette.

Du 11 mars 1807.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, 1er pr.-Rupérou, rap.-Daniels, subst. c. conf.-Mailbe, av.

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2o Espèce (Walmard C. Darrieu.) LA COUR ; Attendu que, si, dans l'espèce, les parties pouvaient proroger, comme elles l'ont fait, a juridiction du tribunal de Morlaix, et lui soumettre la demande dont il s'agit, aucun texte de loi n'imposait à ce tribunal l'obligation d'en connaitre; Qu'en effet, il est de principe admis par les auteurs, et consacré par la jurisprudence, que la prorogation de juridiction consentie par les parties n'oblige pas les juges de sortir du cercle de leurs attributions, et leur en donne seulement la faculté; Que la disposition impérative de l'art. 7 c. pr. n'est qu'une exception à la règle posée, et ne saurait, par conséquent, être étendue aux tribunaux ; Que, d'après les motifs qui siennent d'être déduits, les premiers juges ont pu, d'office, se déclarer in

et qui d'ailleurs, portant sur la juridiction, c'est-à-dire sur uD objet d'ordre public, ne serait valable qu'autant que la loi l'aurait formellement déclaré.- Relativement aux stipulations d'arbitrage ou clause compromissoire, c'est autre chose, on a soutenu leur validité dans l'intérêt du commerce et en présence d'usages anciens auxquels la loi nouvelle ne semblait point avoir dérogé.V. Arbitrage, no 454.

231. La soumission de juridiction s'opère aussi par la simple élection de domicile dans un acte (c. civ. 111). – L'élection de domicile faite dans un contrat antérieur au code civil, produit le même effet que celle faite sous le code, lequel n'a fait que consacrer un principe anciennement établi.-V. Carré, t. 1, p. 600. 232. Un débiteur peut, par contrat, se soumettre, à raison de sa dette, à la juridiction d'un certain nombre de tribunaux déterminés et désignés dans l'acte : mais la clause par laquelle il se soumettrait à tel tribunal qu'il plaira au créancier de choisir, serait sans effet (projet de la cour de cassation, art. 139): une telle clause, si elle était permise, deviendrait de style dans tous les contrats, au grand préjudice des débiteurs.

233. La soumission de juridiction peut avoir lieu, tant pour les matières réelles que pour celles personnelles il suffit que le juge auquel on convient de soumettre le différend ne soit pas incompétent ratione materiæ. La même décision est applicable au cas où la soumission de juridiction résulte de la simple élection de domicile. Toutefois, ni une soumission expresse ni

une élection de domicile ne pourraient attribuer à un autre tribunal que celui de la situation, la connaissance d'une saisie immobilière. Les poursuites en expropriation intéressent les créanciers du saisi aucune prorogation de juridiction ne peut être faite à leur préjudice. V. Carré, nos 270 et suiv.

234. Du reste, le tribunal qui a rendu un jugement sur prorogation ou soumission de juridiction, est compétent pour connaître de l'exécution de ce jugement, à moins que la prorogation n'ait été stipulée en faveur d'un tribunal d'exception, ou qu'il ne s'agisse d'actes d'exécution spécialement attribuées par la loi à un autre tribunal. V. Carré, t. 1, p. 685. 235. Prorogation légale. La prorogation de juridiction a lieu par la seule force de la loi en matière de reconvention, de garantie et de demandes incidentes ou connexes.

236. Reconvention. Les Romains appelaient conventio la demande introductive d'instance, et reconventio la demande incidente formée par le défendeur comme moyen de défense; de là

compétents pour connaître de la demande portée devant eux ;-Confirme. Du 22 mars 1858.-C. de Rennes, 5 ch.-M. Pothier, pr.

commerce.

(1) Espèce. (Coquebert C. Samuel.) Assignée par Samuel devant le tribunal civil de Strasbourg, la dame Coquebert répond à la demande, sans élever de déclinatoire. Le 8 mai 1827, jugement par lequel le tribunal se déclare, d'office, incompétent, et renvoie devant le tribunal de - Appel par la dame Coquebert. L'intimé soutient que les tribunaux civils peuvent bien, si les parties ne s'y opposent point, statuer sur des affaires commerciales, mais qu'ils n'y sont point obligés, et qu'ils ont le droit de se dessaisir d'office. Arrêt. LA COUR; Attendu que les tribunaux de commerce n'ont été établis que dans l'intérêt des commerçants; que les affaires commerciales ne sont pas distraites d'une manière absolue de la juridiction des juges ordinaires, lesquels sont compétents pour en connaître lorsqu'on n'a pas décliné leur juridiction; qu'au cas particulier, le tribunal civil de Strasbourg ayant été régulièrement saisi par les conclusions respectivement prises, il ne dépendait pas de lui de renvoyer les parties devant d'autres juges;-Déclare le jugement nul, sauf aux parties à se pourvoir où et ainsi qu'elles aviseront. Du 6 août 1827.-C. de Colmar, 3 ch.-M. Marquair, pr.

(2) (Roche et Viala C. comp. des bat. à vapeur.) - LA COUR ; Considérant que, par ses accords avec la compagnie des bateaux à vapeur de Samuel frères, Lespigne avait accepté la juridiction du tribunal de première instance de Tarascon; Considérant que ces accords faits de bonne foi, et sans qu'aucuns faits de collusion et de fraude aient été justifiées, ont été sanctionnées par le jugement du tribunal dont Viala et Roche ont seuls appelé, mais qui ont été acquiescé par Lespigne; - Altendu que celui-ci étant, par le résultat de ce jugement, soumis irrévocablement à la juridiction du susdit tribunal, ses corrées Viala et Roche ne peuvent s'y soustraire, et sont tenus d'y procéder conjointement avec lui; Que, de plus, les divers faits dont il s'agit dans cette cause sont indivisibles, et, dès lors, doivent être appréciés dans leur ensemble et sur une seule et même discussion; - Par ces motifs, confirme. Da 15 avril 1853.-C. d'Aix, ch. civ d'Arlatan-Lauris, pr.

l'origine de notre mot reconvention. « La reconvention a lieu, disait le projet du code de procédure de la cour de cassation, lorsque le défendeur forme, dans la même instance, une ou plusieurs contre-prétentions. » Voët définit aussi la reconvention petitio quá reus vicissim quid ab actore petit ex eadem vel diversa causa. Mais ce n'est point ainsi que la reconvention a été et est généralement entendue dans notre droit. Pour former une demande incidente qui puisse, à ce titre, être introduite durant l'instance sur l'action principale, il est nécessaire que la demande incidente soit connexe et même forme défense à celle originaire. Cette opinion semble, il est vrai, contredite par quelques paroles émises à la chambre des députés, lors de la discussion de la loi du 11 avril 1838, sur les tribunaux de première instance. « La définition des demandes reconventionnelles, disait M. Parant, a toujours été l'objet de graves difficultés parmi les jurisconsultes, je dirai même de beaucoup de subtilités. Il faut qu'il soit bien entendu que par ces expressions de la loi: demandes reconventionnelles et en compensation, nous avons voulu parler de toutes les demandes formées incidemment par le défendeur contre le demandeur principal. » Mais cette définition improvisée pèche, ce semble, par trop de généralité. Le caractère des demandes reconventionnelles est d'avoir pour objet de repousser la demande primitive. Aussi M. Gasparin, dans son rapport sur la loi du 25 mai 1838, relative aux justices de paix, nous paraît-il avoir émis une doctrine plus exacte que M. Parant. Ila défini ainsi la demande reconventionnelle : « Il faut qu'elle soit connexe et même forme défense à l'action originaire; qu'elle ait une influence quelconque sur le sort de celle-ci; en un mot, qu'elle ait pour objet de l'anéantir on de la restreindre... » comme, par exemple, quand elle tend à opérer une compensation.-On ne pourrait, dit Toullier, t. 7, p. 428, sans les embrouiller toutes les deux, instruire et juger simultanément deux affaires qui n'ont entre elles nulle connexité. Et si on les instruisait et jugeait séparément, comme la raison l'exige, pourquoi enlever injustement à ses juges naturels le demandeur originaire, devenu défendeur en reconvention. - V. dans le même sens, Carré, 1, 564. V. aussi Degrés de jurid. 237. A plus forte raison, une demande ne peut-elle être réputé reconventionnelle, quand elle n'est point liée à une demande principale actuellement existante; elle constitue elle-même alors une demande principale de la compétence du juge du domicile de la partie contre laquelle elle est formée (Agen, 7 mars 1812) (1).

238. En général un tribunal est tenu de statuer sur les demandes reconventionnelles, sans pouvoir en renvoyer la décision au juge qui serait compétent pour en connaître comme demandes principales. Cela résulte, et de ce que la reconvention n'est admise que quand elle peut influer sur l'action principale, et de ce que les juges doivent statuer sur toutes les conclusions des parties (Carré, no 256). Toutefois le président Henrion décide, avec raison, que si la demande reconventionnelle présentait des difficultés sérieuses, ou pouvait entraîner des longueurs considérables, le tribunal devrait la renvoyer devant le juge naturel el statuer sur la demande originaire (De l'autorité jud., p. 239). | 239. La compensation peut être admise reconventionnellement, comme étant une défense à l'action principale, quoique la somme à compenser ne soit pas liquide et exigible. Ainsi, dit Henrion, eod., « le défendeur qui a fait pour le demandeur des avances et fournitures de nature à donner lieu à des difficultés,

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(1) (Verdier C. Pagès.) LA COUR; Attendu que Verdier avait bien du porter la demande devant le juge du domicile de Pagès et son épouse; que, sur cette demande, les parties de Pouydebat pouvaient bien former des demandes reconventionnelles, et auraient pu en poursuivre :ffet devant le tribunal de Cahors, si ledit Verdier y eût porté la denande principale, parce que lesdites parties de Pouydebat devenaient Lors demanderesses par exception, qu'elles ne pouvaient l'être qu'autant que leur défense était liée à une demande principale; mais qu'ayant ellesmêmes formé directement l'action devant le tribunal de Cahors, elles sont devenues demanderesses principales pour le payement de la somme de 400 fr.; que cette action n'étant unie à aucune demande principale, fournie contre elles, est devenue dès lors de leur part une demande principale, qu'elles n'ont pu former contre le défendeur qu'en le citant devant le tribunal de son domicile; d'où il suit qu'en retenant et jugeant cette action, le tribunal de Cahors a contrevenu à l'art. 59 c. pr., etc. Du 7 mars 1812.-C. d'Agen.-M. Bergognić, pr.

TONE XI.

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peut demander, reconventionnellement, que le compte qu'il présente soit débattu avant toute procédure ultérieure; et, dans ce cas, le tribunal doit instruire et juger cette demande à raison des résultats que la décision est susceptible d'avoir sur celle à rendre sur la demande principale. » Cette doctrine est adoptée par Toullier, t. 7, p. 485, et Carré, t. 1, p. 567. Le cas dont il s'agit diffère de celui où le défendeur oppose en compensation une somme liquide et exigible, en ce que, dans cette dernière hypothèse, le défendeur se borne à invoquer une exception, et ne forme pas réellement une demande reconventionnelle; aussi n'y a-t-il pas lieu de suivre alors les formalités exigées pour former les demandes incidentes.

240. Quelques jurisconsultes, notamment Toullier, soutenaient qu'un tribunal n'est compétent pour statuer par reconvention, qu'autant que la demande reconventionnelle a pour objet de parvenir à la compensation d'une somme qui n'est pas encore liquide. Pigeau, au contraire, admet la reconvention, non-seulement dans le cas de compensation et dans tous les cas où l'on peut imputer l'objet demandé par l'assigné sur celui de la demande principale, mais aussi toutes les fois que la demande reconventionnelle tire son principe de la même cause que la première demande, ou procède de la même affaire ou de la même convention. Ainsi, dit-il, supposez qu'un propriétaire demande, contre son locataire, qu'il soit tenu de garnir les lieux loués, celui-ci peut se défendre en demandant que le propriétaire fasse faire auparavant les réparations nécessaires pour les rendre habitables. Les deux demandes tirent leur principe de la même cause, qui est le bai!. Telle est aussi l'opinion de Carré, t. 1, p. 568. Ce jurisconsulte n'admet, et nous n'admettons avec lui de limites à la faculté de former une demande reconventionnelle, que quand l'objet de cette demande n'a pas de connexité avec l'action principale, ou lorsque étant connexe, elle n'est pas la défense à cette action.

241. Il est bien entendu que lorsque le demandeur n'agit qu'au nom d'autrui, par exemple comme mandataire, la reconvention pour une dette qui lui est personnelle serait inadmissible, et vice versa.

242. La reconvention n'est point recevable, si le juge est incompétent à raison de la matière qui fait l'objet de la reconvention. L'effet de celle-ci est d'étendre les bornes de la compétence personnelle et territoriale du tribunal devant lequel elle est formée, de développer le germe d'un pouvoir que ce tribunal tient de la loi, mais non de lui conférer des attributions nouvelles. Si donc la reconvention est formée devant un tribunal de commerce, et que son objet ne soit pas du ressort d'un pareil tribunal, il est obligé, même d'office, de se déclarer incompétent quant à la demande reconventionnelle; en d'autres termes, la compétence des tribunaux de commerce ne peut être prorogée de re ad rem, mais seulement de personá ad personam (Bruxelles, 28 juillet 1818, aff. M... C. N...). Mais si la reconvention, ayant pour objet une affaire de commerce, est formée devant un tribunal de première instance, ce tribunal doit la juger (projet de la c. de cass., art. 148. Conf. Toullier, t. 7, n° 417),

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243. Aussi a-t-il été décidé que les tribunaux civils, compétents pour statuer sur l'action en payement d'une obligation civile, le sont également pour prononcer sur l'exception de compensation tirée d'une créance de nature commerciale (Limoges, 13 août 1840) (2).

(2) Espèce: (Bousquet C. Majour.) — Majour ou son représentant était actionné par Bousquet en payement de diverses sommes dont l'origine était une obligation civile. Majour oppose, par voie reconventionnelle, la compensation tirée de créances de nature commerciale (une vente de bestiaux en foire). Il offrait de faire preuve de l'existence de sa créance et de ses droits à faire valoir le moyen de la compensation. Le demandeur s'oppose à la preuve offerte en déclinant la compétence du tribunal civil. Jugement du tribunal d'Ussel, du 29 août 1859, qui res Jette le déclinatoire par le motif suivant : - Attendu que la disposition finale de l'art. 1541 c. civ. contient une exception, quant à la preuve testimoniale, pour le matières commerciales; que, en examinant la nature de l'action du sieur Majour, on voit qu'elle prend sa source dans une opération de commerce; qu'en effet, Pierre M jour était commerçant, qu'il en était de même de François Bousquet; que la vente dont il s'agit a eu lieu un jour de foire; qu'il suit de là, par une double conséquence, que le tribunal est compétent pour statuer sur l'action reconventionnelle, puis

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