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qui veut que le défendeur soit assigné en matière de société, tant qu'elle existe, devant le juge du lieu où elle est établie, s'applique aux sociétés civiles et aux sociétés commerciales indistinctement; mais il est étranger aux sociétés en participation, qui, ne consistant point dans une série d'affaires, n'ont pas d'assiette fixe, et cessent d'exister dès que la négociation particulière pour laquelle elles ont eu lieu est finie. Ainsi, P'un des

suivant ce qui a été allégué à l'audience au nom de la dame veuve Aumont, que cet acte pourrait être un testament; que la question qui doit se débattre, quant à présent, est donc une question de validité d'acte, question Besentiellement préjudicielle à l'action en partage de la succession, puisque S'il était convenu que des actes ou conventions valables empêchent la dame Godey et joints de faire valoir la qualité d'héritiers qu'ils tenaient de la loi, et qui n'est pas méconnue, il n'y aurait jamais à s'occuper des opérations du partage; — Considérant que sous ce rapport, qui est le seul sous lequel on doive l'envisager, d'après ce qui est précisé dans les conclusions, la demande de la dame Godey et joints, sur l'exception résultant des art. 822 c. civ. et 59 c. pr., attribue juridiction au tribunal du lieu de l'ouverture de la succession qu'elle neconstitue plus qu'une action personnelle soumise aux règles ordinaires du droit commun, qui veulent que la connaissance du litige appartienne au tribunal du domicile du défendeur ou de l'un des défendeurs, s'ils sont plusieurs, suivant le choix que peut faire à cet égard le démandeur; que dans cet état de choses on doit reconnaître que le tribunal de Caen est compétent, puisqu'il est constant que plusieurs des défendeurs sont domiciliés dans son ressort; Considérant que la circonstance que les actes qu'on prétendrait faire annuler ne sont pas produits ni même formellement déterminés, ne peut faire changer la décision, parce qu'il ne s'agit dans ce moment que d'une question de competence, et que pour la juger on ne doit s'arrêter qu'au titre et à l'objet de la demande, que l'appréciation des actes qui s'y rapporteraient appartient à T'examen de la demande même, et ne doit être faite que lors de cet examen.» Appel. — Arrêt.

LA COUR;

Considérant que, d'après l'instruction qui a eu lieu devant la cour, le caractère et l'objet de l'action du sieur Godey et des enfants Bisson sont maintenant bien déterminés; qu'il est constant que les dames Bisson et Godéy cédèrent, en 1802, tous leurs droits dans la succession de Pierre-François Aumont à Pierre Aumont, leur frère, moyennant une somme de 90 ou 100,000 fr., promise par ce dernier à chacune d'elles, et que cette cession est aujourd'hui attaquée comme étant entachée de dol; - Considérant que la cession dont il s'agit eut pour objet, en investissant Pierre Aumont de la totale succession du frère commun, de faire cesser l'indivision entre les cohéritiers, que par conséquent elle rentre dans la classe des actes que l'art. 888 c. civ. assimile à un partage; et que, dès lors, l'action qui a pour but de la faire rescinder doit être portée devant le tribunal de l'ouverture de la succession, aux termes de la dernière disposition de l'art. 822 du même code; Considérant qu'il est reconnu que la succession de Pierre-François Aumont s'est ouverte à Paris; Infirme le jugement dont est appel; en conséquence, dit que le tribunal de Caen ne pouvait connaitre de la contestation, et renvoie les parties procéder devant qui de droit.

Du 29 juin 1840.-C. de Caen, 4a ch.-M. Binard, pr.

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(1) 1TM Espèce :—(Pasquín C. Bertin.)—An 11, société en participation contractée à Paris entre Pasquin, Bertin et Jeanson. 1807, assignation par Bertin à Pasquin et Jeanson, devant le tribunal de Besançon, pour les faire condamner solidairement à rendre compte du produit d'une partie de marchandises vendues à la Martinique par l'un d'eux. quin, domicilié à Paris, demande le renvoi devant le tribunal de Paris, lattendu que la société a été contractée dans cette ville et n'est pas encore dissoute 17 oct. 4807, jugement qui rejette 4e déclinatoire.

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Pas

associés en participation doit assigner son coassocié, pour raison de l'association, au domicile de celui-ci, ou, s'il y a plusieurs associés défendeurs, au domicile de l'un d'eux, quoique l'association ait été contractée dans un autre arrondissement (Req., 14 mars 1810; 28 mai 1817; Paris, 31 août 1836 (1); 15 juill, 184C aff. Marchenaud C. Robilliard).

Si la société civile n'a pas de siége connu d'établissement, le

LA COUR;- Attendu que, suivant l'art. 59 c. pr., s'il y a plusieur défendeurs, le demandeur peut les assigner au domicile de l'un d'eux, à son choix; et que, dans l'espèce, Jeanson, l'un des défendeurs, a son domicile dans le ressort du tribunal de commerce de Besançon, ainsi que les arrêts dénoncés le constatent; Et attendu que la disposition du même article, qui veut que le défendeur soit assigné, en matière de société, tant qu'elle existe, devant le juge du lieu où elle est établie, n'est point applicable aux sociétés en participation, qui, ne consistant point dans une série d'affaires, n'ont pas d'assiette, et cessent d'exister, dès que la négociation particulière pour laquelle elles ont eu lieu, est finie; qu'au cas présent, il s'agit d'une société de cette espèce, ainsi que les memes arrêts le décident Rejette la demande en règlement de juges, etc. Du 14 mars 1810.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Cassaigne, rap.-Jourde, subst., c.' conf.-Cochu et Mailhe, av.

·

2o Espèce (Billet C. Astruc.) En 1815, les sieurs Astruc fils
tirent de Perpignan, sur Billet de Lyon et à l'ordre de Me Regnaud,
avoué,
une lettre de change de 4,535 fr., payable, valeur entendue.
Protet sur Billet.-Celui-ci est assigné devant le tribunal de commerce de
Perpignan, en payement de la traite.-Billet soutient ce tribunal incompé-

tent, et demande son renvoi devant le tribunal de Lyon, lieu de son domi-
cile; il déclare qu'il n'y a jamais eu de société entre lui et les sieurs Astruc.
Ceux-ci demandent à prouver qu'à dater du 1er juillet 1815 jusqu'an
4 janv. 1814, la maison Astruc a été associée en participation avec
Billet, pour les fournitures à l'armée. Le 17 fév. 1816, le tribunal,
avant de statuer sur le moyen d'incompétence, ordonne la preuve offerte.
Appel par Billet. 13 août 1816, arrêt confirmatif de la cour do
Montpellier.

--

Pourvoi par Billet. Il se fondait sur ce que le § 5 de l'art. 59 c. pr. ne s'appliquait pas aux sociétés en participation. Arrêt. LA COUR; Attendu que la disposition du§ 5 de l'art. 59 c. pr. qui veut que le défendeur soit assigné, en matière de société, tant qu'elle existe, devant le juge du lieu où elle est établie, n'est point applicable aux sociétés en participation, qui ne consistent point dans une série d'affaires, n'ont pas d'assiette, et cessent d'exister dès que la négociation particulière pour laquelle elles ont eu lieu est finie; et qu'au cas avenant, reglement de juges, casse et annule lo jugement rendu, le 17 fév. 1816, il s'agit d'une association de celle espèce; Statuant sur la demande en par le tribunal de commerce de Perpignan, l'arrêt confirmatif rendu le 13 août suivant par la cour royale de Montpellier, et tout ce qui s'en est ensuivi, et renvoie les parties à procéder devant le tribunal de Lyon, leur juge naturel.

Du 28 mai 1817.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Ménerville, rap.

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Espèce (Guibal C. Méchin.) Méchin avait établi à Paris une agence principale ayant pour objet la négociation des créances militaires de l'arriéré. Guibal, négociant à Toulouse, était l'associé de Méchin pour l'achat de ces valeurs dans la 10 division militaire. Cette société en participation a continué d'exister pendant cinq ans. - En 1855, Méchin assigna Guibal devant le tribunal de commerce de Paris, à fin de constitution d'un tribunal arbitral pour procéder à la liquidation de la société. Ce dernier demanda alors le renvoi de l'affaire devant les juges de Toulouse, lieu de son domicile. Jugement qui rejette le déclinatoire. Appel. Dans l'intérêt de l'intimé, on soutient que si des associés en participation convenaient d'établir le siége de leur société dans un lieu déterminé, cette convention serait obligatoire; que les juges peuvent faire ce que les associés n'ont pas fait, en déterminant, par la nature même de la société en participation, en quel lieu se trouvait l'établissement social; qu'il s'agit, dans l'espèce, de négociations de créances dont la liquidation ne peut avoir lieu qu'à Paris; que les livres de la maison Mechin peuvent seuls faire connaitre les résultats de l'association, et qu'ainsi tout démontre que, dans l'espèce, l'établissement social était à Paris. :Arrêt..

Appel par Pasquin. Les déc. 1807, arrêt confirmatif de la cour de Besançon ainsi conçu: Considérant, 4° que le sieur Jeanson, un des associés, demeure, sans contestation, dans le ressort du tribunal de commerce de Besançon; 2o que, suivant l'art. 59 c. pr., lorsqu'il y a deux ou plusieurs défendeurs, le demandeur peut se pourvoir devant le juge da domicile de l'un d'eux, à son choix; que le sieur Pasquin a objecté que, suivant le même article, l'action relative à une société doit être portée devant le juge du lieu où elle est établie tant qu'elle existe; mais que cette objection n'est pas fondée, d'abord parce qu'il ne s'agit pas ici d'une société consistant dans une série d'affaires, mais d'une so¿ciété en participation, qui cesse d'exister lorsque la négociation partieuliére pour laquelle elle est établie, est finie, et qu'ainsi on ne peut pas dire que la société en question existe encore; en second lieu, parce que la société étant censée exister dans le lieu où elle s'exerce -plutôt que dans le lieu où elle se contracte, souvent par occasion, il suit Ide là que la société dont il s'agit existerait ou aurait existé à la Martiaux sociétés ordinaires ; que la disposition de l'art. 59, §.5, c. pr. civ., nique, et n'aurait aucune assiette; et que, sous ce nouveau rapport, on ne peut que recourir au domicile de l'un des associés pour faire prononcer sur le compte demandé. »

Pourvoi en règlement de juges. — Arrêt.

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LA COUR:
O Considérant que les opérations auxquelles se livraient
Guibal et Méchin constituaient, de l'aveu des parties, une association an
parteipation ; qu'une association de ce genre n'étant point réglée par un
acte de la nature de ceux dont la loi ordonne la publication, et n'ayant
point de siége déterminé, ne peut être assimilée, quant à la compétence,

qui veut qu'en matière de société le défendeur soit assigné, tant que la
société existe, devant le juge du lieu où elle est établic, ne s'applique
point aux sociétés en participation; qu'à l'égard de ces sociétés, il faut
suivre la règle ordinaire, d'après laquelle le défendeur doit être assigné

3

demandeur peut porter son action devant le juge de l'un des défendeurs, à son choix (Arg. de l'art. 59 c. pr.). V. en ce sens M. Rodière, t. 1, p. 120.

Un cercle littéraire ne constituant pas une société dans le sens de l'art. 1852 c. civ., les actions de ce cercle contre les membres qui en ont fait partie, ne peuvent être portées devant le tribunal du lieu où il est établi, conformément à l'art. 59, 5 c. pr. ces défendeurs doivent être actionnés au tribunal de leur domicile (trib. de Sens, 20 mai 1847, aff. Nervaux, V. D. P. 47. 3. 112).

110. Une société commerciale doit être assignée devant le tribunal du lieu où ses statuts ont fixé son siége et le centre de son administration, et non aux lieux où elle possède des établissements, quelle que soit d'ailleurs leur importance. Par exemple, une compagnie constituée pour l'établissement d'un chemin de fer ne peut être assignée en dommages intérêts, pour avoir fait des actes de transport en dehors de l'enceinte de ce chemin, devant le tribunal où se trouve l'une des stations dudit chemin. On prétendrait à tort qu'une société doit avoir autant de domiciles commerciaux qu'elle a d'établissements : une société est un être moral dont la condition, sous le rapport du domicile, est déterminée par les art. 102 et suiv. c. civ. (Req. 4 mars 1845, aff. Duchemin, V. D. P. 45. 1. 208).

Toutefois, par exception à cette règle, lorsqu'une société de commerce a contracté des obligations, fait des livraisons de marchandises, promis d'effectuer des payements dans des lieux autres que celui du siége commercial, l'action dirigée contre elle peut suivre le forum contractus, plutôt que le forum rei, conformément à l'art. 420 c. pr. (même arrêt).

Il a été décidé avec raison, en ce sens, que lorsqu'une société commerciale a tout à la fois un établissement principal et des établissements secondaires, chaque succursale peut être considérée comme un domicile attributif de juridiction, pour les engagements souscrits par les personnes préposées à sa direction, ou pour ceux qui ont été indiqués payables à ce domicile (Req., 30 déc. 1846, aff. l'Agricole, D. P. 47. 1. 80).

devant le tribunal de son domicile ; - Infirme; au principal, renvoie la cause et les parties devant les juges qui doivent en connaître.

Du 31 août 1856.-C. de Paris.-M. Hardoin, pr.

(1) Espèce : — (Chaine C. Bozonnier.) — Chaine, négociant à Paris, contracte une société avec Bozonnier, négociant à Marseille; il est établi deux maisons, l'une à Paris, l'autre à Marseille; Chaine régit celle de Paris, Bozonnier celle de Marseille. Bozonnier demande la dissolution de la société devant le tribunal de Marseille. - Chaine propose le déclinatoire, fondé sur ce qu'il était domicilié à Paris, et que c'était là qu'était le principal siége du commerce.-Jugement du tribunal de commerce, du 21 prair. an 11, qui démet Chaine de son déclinatoire, attendu que la société avait été contractée à Marseille, et que, d'après le pacte social, le principal siége du commerce y était fixé. Pourvoi en règlement de juges de la part de Chaine. Jugement.

LE TRIBUNAL;-Attendu qu'en retenant la connaissance de la contestation dont il s'agit, et en déboutant le sieur Chaine du déclinatoire par lui proposé, le tribunal de commerce de Marseille n'a fait que se conformer à l'acte de société d'entre parties et à la disposition de l'art. 17, tit. 12, de l'ordonnance de 1673, concernant le commerce; Déboute le sieur Chaine de sa demande en règlement de juges.

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Du 18 pluv. an 12.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, pr.-Cassaigne, rap. (2) (Dagneau C. Chaix.) LA COUR; Attendu, en droit, qu'aux termes de l'art. 59 c. pr., le juge compétent en matière de faillite est celui du lieu où le failli avait son domicile; Et attendu, en fait, qu'il résulte des pièces respectivement produftes que la société Honoré Ardisson et comp. avait son principal établissement a Antibes, département du Var, où le sieur Honoré Ardisson, chef de la société, avait son domicile; que la société n'avait à Paris qu'un simple dépôt de marchandises;-Attendu, d'ailleurs, que le tribunal de commerce d'Antibes a été le premier saisi; 'que, sous ces différents rapports, c'est au tribunal d'Antibes que doivent être suivies les opérations de la faillite dont il s'agit;-Sans avoir égard aux procédures qui ont eu lieu devant le tribunal de commerce de Paris, non plus qu'aux jugements rendus par ce tribunal, lesquels sont déclarés nuls et seront considérés comme non avenus, ordonne que les parties continueront de procéder devant le tribunal de commerce d'Antibes, et, en cas d'appel, devant la cour royale d'Aix, etc.

Du 19 juill. 1858.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Brière, rap. (3) Espèce: — (Des Essarts C. Jeantin.)-La société Claveaud et Cie,

Mais il est des actions qui ne peuvent être formées que devant le juge du lieu de l'établissement principal; ce sont celles qui concernent l'intérêt général de la société; telle serait, par exemple, une demande en déclaration de faillite de cette société. V. MM. Pardessus, no 1357; Orillard, Compét. des trib. de commerce, no 601.

-

111. Lorsqu'une société a, dans des localités éloignées, deux maisons de commerce, régies chacune par l'un des associés, l'action en dissolution de la société peut être portée devant le juge du domicile du demandeur, bien que le défendeur allègue que le principal siége du commerce est au lieu de son propre domicile, si l'acte social porte, au contraire, que le principal établissement de la société est celui que dirige le demandeur (Req., 18 pluv. an 12) (1).

112. Le lieu du principal établissement d'une société commerciale est, en général, celui où le chef de cette société a son domicile. En conséquence, c'est au tribunal de ce domicile et non au tribunal du lieu où la société avait seulement établi un dépôt de marchandises, qu'appartient la connaissance de la faillite de cette société,... alors surtout que le tribunal dudit domicile a été le premer saisi (Req., 19 juill. 1838) (2).

113. Lorsqu'une société a dans un lieu des usines, et dans un autre son gérant, ses bureaux, ses livres, ses caisses, son banquier, l'assemblée de ses actionnaires, son comité de surveillance, et enfin son siége principal aux termes de l'acte qui la constitue, c'est ce dernier lieu qui doit être réputé le domicile réel de la société, et non le lieu où se trouvent les usines, alors qu'elles ont été établies après coup en vertu du droit que conférait l'acte social au gérant de déterminer les localités où les usines seraient formées, et sans que le gérant y ait transporté son domicile par suite, les opérations de la faillite de cette société sont de la compétence du tribunal de commerce du lieu où est son domicile réel (Req., 6 avril et 30 déc. 1840) (3).

De même, une société en nom collectif doit être réputée avoir conservé son siége principal dans le lieu où elle a été fondée primitivement, bien que son chef ait ensuite transporté sa rési

ayant pour objet la fabrication des clous par procédé mécanique, avait été constituée par acte notarié reçu à Paris le 1er avr.1858. Son siége avait été fixé à Paris, au domicile de Claveaud, qui était seul gérant responsable, et auquel l'acte social avait conféré le droit de fixer les localités où seraient établies les usines.-En vertu de ce droit, Claveaud avait pris à bail plusieurs bâtiments et terrains dépendant des forges d'Olésy, près Stenay, et y avait établi une clouterie mécanique dont il avait confié la direction à un régisseur sous ses ordres. L'administration principale continuait, par suite, à résider sur la tête de Claveaud, à Paris; c'était là que se tenaient les comptes des opérations de la fabrique, là qu'étaient les bureaux, la caisse et le portefeuille, là enfin qu'était organisé un comité de surveillance. La société ayant fait de mauvaises affaires, un jugement du tribunal de commerce de Montmédy, du 9 juill. 1859, l'a déclarée en état de failute, et a nommé Jeantin syndic provisoire. - De son côté, le tribunal de commerce de la Seine, sur la provocation du comité de surveillance, a fait une déclaration semblable par jugement du 25 juill. suivant, et a nommé Bernard des Essarts administrateur provisoire. Pourvoi de ce dernier en règlement de juges, à l'effet de faire déclarer que les opérations de la faillite seraient exclusivement continuées devant le tribunal de la Seine, comme étant celui du principal établissement de la société.

-

- Arrêt.

LA COUR ; Attendu que le tribunal civil de Montmédy, jugeant commercialement, et le tribunal de commerce de la Seine, se trouvent simultanément saisis des affaires de la faillite de la société Claveaud et comp. par la déclaration qu'ils ont faite respectivement de ladite faillite par jugements des 9 et 23 juill. dernier; Que ces deux tribunaux ne ressortissant pas à la même cour royale, il y a lieu, par la cour, aux termes de l'art. 363, § 4, c. pr., de déterminer celle des deux juridictions devant laquelle devront être portées les opérations de cette faillite; Attendu,

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au fond, que, d'après les faits exposés par le demandeur, rappelés cidessus et non contredits par le sieur Jeantin, qui a fait défaut, Paris est évidemment le siége de la société et le centre de toutes ses opérations; — Qu'ainsi, la juridiction du tribunal de commerce de la Seine doit avoir la préférence sur celle du tribunal de Montmédy; - Statuant, par voie do règlement de juges, donne défaut contre le sieur Jeantin non comparant, et, pour le profit, ordonne que les parties procéderont devant le tribunal de la Seine, etc.

Du 6 avril 1840.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Hervé, rap.Gillon, av. gén., c. conf.-Bénard, av.

Jeantin a formé opposition à cet arrêt. - Il a soutenu que le tribunal

'dence dans un autre lieu, pour y établir un comptoir, s'il n'a rien fait pour opérer légalement la translation de son domicile dans ce dernier lieu, et si le premier établissement de la société n'a pas cessé d'être le centre de ses spéculations principales, et renferme la majeure partie de son actif mobilier et immobilier (Req., 7 déc. 1841, aff. Lantelme, V. no 116).

114. Lorsque l'acte social prévoyant certaines difficultés spéciales qui pourraient s'élever entre les associés, dispose que les Arbitres chargés de les vider seront nommés par le président l'un tribunal déterminé, autre que celui dans le ressort duquel Be trouve la société, il n'y a pas lieu d'appliquer cette disposition à des contestations d'une nature différente de celles qui y sont spécifiées. Ainsi, par exemple, bien qu'il ait été stipulé, dans un acte provisoire de société, qu'en cas de difficultés relatives à la rédaction définitive de l'acte social, ces difficultés seraient vi

de Montmédy devait être seul chargé des opérations de la faillite, 1° parce que la société Claveaud et compagnie avait son principal établissement dans le ressort de ce tribunal (art. 458 c. com., loi du 8 juin 1358), et que le domicile de Paris n'avait d'utilité que pour le placement des actious, pour les relations du gérant et des actionnaires; 2° parce qu'il y a connexité entre cette faillite et celle de la société Mecquenem et compagnie dont le tribunal est saisi, connexité reconnue par jugement de ce même tribunal, en date du 51 juill. 1859.

Guiot et Brunet, syndics de la faillite Mecquenem et compagnie, ont fait signifier une requête en intervention. Après avoir établi leur qualité et leur intérêt, ils ont conclu, comme Jeantin et par les mêmes raisons, au renvoi des opérations de la faillite Claveaud devant le tribunal de Montmédy. Des Essarts, défendeur, a prétendu, au contraire, que le tribunal de la Seine doit seul statuer, parce que c'est à Paris que l'acte social fixe le siége de la société, au domicile même de Claveaud, gérant responsable; que là se font les écritures générales, que se tiennent les comptes des opérations de la fabrique, les bureaux, les caisses, les portefeuilles; parce que là sont les actionnaires, e. qu'à Paris enfin leur surveillance sera plus efficace pour la conservation de leurs intérêts. Olésy n'est au contraire qu'un lieu de fabrique et de manutention dont les dépenses devaient se payer à Paris. La fabrication ne s'y faisait pas même encore au moment de la faillite, puisqu'on ne s'occupait alors que de constructions pour l'établissement.

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19 août 1840, arrêt de la cour suprême qui restitue Jeantin contre l'arrêt par défaut par elle rendu le 6 avril de la même année. — Puis, au fond, après signification de cet arrêt et assignation aux parties. - Arrêt. LA COUR; Attendu que le tribunal civil de Montmedy jugeant commercialement et le tribunal de commerce de la Seine, se trouvent simultanément saisis des affaires de la faillite de la société Claveaud et compagaie, par la déclaration qu'ils ont faite respectivement de ladite faillite, par jugements des 9 et 25 juill. dernier; Que ces deux tribunaux ne ressortissant pas à la même cour royale, il y a lieu par la cour, aux termes de l'art. 565, § 4, c. pr., de déterminer celle des deux juridictions devant laquelle devront être portées les opérations de cette faillite ; tendu que l'intervention des sieurs Guiot et Brunet, en leur qualité de syndics de la compagnie des forges d'Olésy, est recevable; · Attendu, au fond, que la société des forges d'Olésy, sous la raison Mecquenem et compagnie, et la société Amédée Claveaud et compagnie pour la fabrication des clous, sont deux sociétés distinctes par les actes qui les constituent, par les personnes qui y figurent et par les objets auxquels elles s'appliquent; qu'il ne saurait done y avoir entre les deux sociétés une connexité de manière à entraîner la compétence, et qu'il s'agit uniquement dans le procès de la société A. Claveaud et compagnie;

At

Attendu que l'art. 5 de l'acte du 1er avril 1858 qui a constitué la société Claveaud et compagnie, avait fixé le siége de ladite société au donicile du sieur Claveaud, rue Laffitte, no 45, à Paris; - Attendu que e sieur Claveaud, seul gérant de cette société, a réellement occupé ledit domicile jusqu'au moment de sa disparition; qu'il y a établi les bureaux, es livres, la caisse de la société; - Attendu que c'était à Paris que réidait le banquier de la société, que devait avoir lieu l'assemblée générale des actionnaires, et que le comité de surveillance choisi par elle dans son sein, devait exercer ses fonctions; - Attendu que, s'il existe à Olesy des créanciers de la société, il en existe aussi à Paris, et que c'est à Paris que résident les actionnaires; Attendu que, dans de telles circonstances, il n'est pas possible de voir dans les usines que le gérant a formées à Olésy, en vertu du droit que lui conférait l'acte social de déterminer les localités où devaient être établies les usines, un établissement principal propre à fixer le domicile réel de la société; que les usines d'Olésy, où il ne parait pas d'ailleurs qu'aucune fabrication importante ait eu lieu, ne peuvent être considérées que comme les accessoires d'une société dont le siége et l'action commerciale étaient à Paris;

Par ces motifs, statuant par voie de règlement de juges, déclare l'intervention des sieurs Guiot et Brunet ès noms qu'ils agissent recevable, mais mal fondée, et sans y avoir égard, au fond, non plus qu'aux moyens

dées par des arbitres nommés par le président d'un tribunal de signé, autre que celui du siége de la société, cette convention ne fait pas obstacle à ce que la demande formée par l'un des associé en nullité de l'acte social, pour inobservation des formalités légales, soit portée devant le juge du lieu où la société est établie; attendu que cette dernière demande est préjudicielle à celle relative à la rédaction, pour laquelle seule les parties avaient dérogé à la disposition de l'art. 59, § 5 (Req., 6 juill. 1820) (1).

115. Bien qu'une maison de commerce ait des établissements sur le territoire continental de la France, néanmoins si son établissement principal est situé dans une colonie française, c'est devant le tribunal du lieu de cet établissement que la faillite de cette maison de commerce doit être poursuivie (Req., 18 août 1841) (2).

116. C'est pareillement au tribunal de commerce du lieu où

et exceptions des défendeurs, ordonne que le tribunal de commerce de la Seine restera seul saisi de tout ce qui concerne la faillite Claveaud et compagnie, et que les parties procéderont devant ledit tribunal sur les derniers errements de la procédure et en appel, s'il y a lieu, devant la cour royale de Paris, déclare le présent arrêt commun avec les intervenants, etc.

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Du 50 déc. 1840.-C. C. ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Hervé, rap. (1) Espèce :- (Guérin C. Brigues.)-Le 15 oct. 1816, un acte provisoire de société, sous seing privé, est rédigé entre Brigues, Desbladis et Guérin. La société avait pour objet l'exploitation de forges et usines dans l'arrondissement de Nevers, qui formait ainsi le lieu de l'établissement de la société. L'art. 8 de cet acte provisoire porte que, « en cas de contestations, relativement à la rédaction définitive d'un acte social, elles seront vidées en dernier ressort par des arbitres nommés par les parties, ou, en cas de refus de celles-ci, par le président du tribunal de commerce de Paris. » — La société avait reçu un commencement d'exécution lorsque Brigues et Desbladis, craignant qu'elle ne prospérât pas sous la direction de Guérin, demandèrent le partage de la société et la nullité de l'acte provisoire de société, en ce que les formes voulues par le code de commerce n'avaient pas été observées. Leur action fut portée devant lo tribunal de Nevers, lieu de la situation de l'établissement.

-

De son côté, Guérin les somme de comparaitre devant un notaire do Paris pour convertir en acte définitif l'acte d'association provisoire du 15 octobre 1816. - Sur leur refus, il les assigne devant le tribunal do commerce pour voir dire qu'il sera procédé par experts à la rédaction definitive de l'acte social. De la demande en règlement de juges. Guérin prétend que l'art. 8 du projet d'acte fait la loi des parties; qu'il investit le tribunal de commerce de la Seine des difficultés relatives à la rédaction de l'acte social; que la demande en nullité du projet d'acte, pour inobservation des formalités légales, forme une contestation relative à la rédaction de cet acte, etc. Brigues et Desbladis répondent qu'il s'agit d'une contestation relative au fond, à l'existence et à la continuation de la société; que les conventions des parties, contenues dans l'art. & du projet d'acte social n'ont pas dérogé à cet egard au droit commun; que les parties doivent donc, en conformité de l'art. 59, § 5, être renvoyées devant le juge du lieu où la societé est établie. - Arrêt. LA COUR Vu le § 5 de l'art. 59 c. pr., portant qu'en matière de société le défendeur sera assigné devant le juge du lieu de son établissement; Attendu que par leurs conventions les parties n'ont dérogé à cette règle que pour le cas de nomination d'experts, s'il survenait des difficultés relativement à la rédaction definitive de l'acte provisoire qui en renfermait les bases: qu'il s'agit d'une demande en nullité de l'acte social; que cette demande est préjudicielle à celle relative à la rédaction, puisque, si l'acte social etait nul, il n'y aurait plus lieu de s'occuper de sa rédaction définitive; Vu les pièces et mémoires à l'appui de la demande; Statuant par réglement de juges; Ordonne que les poursuites commencées devant le tribunal de Nevers, à la requête des parties de Nicod, seront continuées.

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Du 6 juill. 1820.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Rousseau, rap. (2) Espèce: (Maugendre C. Renaldis.) - En 1854, les frères Lecaudey, de Bordeaux, fondèrent une maison de commerce à la Pointe-àPitre (Guadeloupe). — En 1858, ils établirent un comptoir à Bordeaux, mais en ayant soin d'annoncer par leurs circulaires que ce comptoir no serait qu'use succursale de leur maison principale. En 1859, la succursale de Bordeaux, ayant cessé ses payements, fut déclarée en faillite par jugement du tribunal de commerce de cette ville, du 21 juin. — Le 10 sept. 1840, après de vaines tentatives d'arrangement avec les créanciers, la maison de la Pointe-à-Pitre fut elle-même déclarée en faillite par le tribunal de la colonie qui nomma un syndic et des directeurs à la faillite, conformément aux usages commerciaux et à l'ordonnance de 1673 en vigueur à la Guadeloupe. Avant ce dernier jugement, et par acte du 7 mars 1840, les créanciers de la succursale de Bordeaux avaient fait up contrat d'union et refusé d'admettre au passif de la faillite les créan

une société a son établissement principal à connaître des opérations de la faillite de cette société, alors même que le tribunal du lieu où elle a sou comptoir aurait été antérieurement saisi; et alors même que des poursuites criminelles en banqueroute frauduleuse seraient dirigées dans ce dernier lieu contre les associés (Req., 7 déc. 1841) (1).

117. Celui qui est actionné comme associé devant le tribu nal de la prétendue société, peut-il, s'il nie l'existence de la so ciété ou s'il prétend n'en pas faire partie, requérir son renvoi devant le juge de son propre domicile? Cette question est controversée. D'une part, on dit que la disposition qui attribue compétence, en matière de société, au juge du lieu où la société est établie, doit nécessairement s'appliquer même au cas

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ciers de la Guadeloupe. Ils prétendaient s'attribuer, exclusivement à | ceux-ci, l'actif de la faillite déclarée à Bordeaux.

Pourvoi en règlement de juges de la part de Maugendre et consorts, l'un syndic et les autres directeurs nommés à la Guadeloupe. Ils ont soutenu qu'aux termes des art. 59 c. pr. et 458 c. com., le tribunal de la Pointe-à-Pitre, siége du principal établissement de la société en nom collectif, était seul compétent pour connaitre des opérations de la faillite.

Pour Renaldis et Cortes, syndics de Bordeaux, on a répondu que la règle qui veut que la faillite d'une société qui a plusieurs établissements soit poursuivie devant le tribunal du lieu où est le principal de ces élablissements, ne s'applique qu'au cas où ils sont tous situés en France, et non à celui où l'un est en France, et l'autre aux colonies. - En effet, dit-on les colonies étant régiés par des lois speciales (art. 64 de la charte) qui different plus ou moins de celles de la métropole, on ne peut obliger les regnicoles à aller se soumettre à l'empire de lois qui ne sont faites que pour les colons. Il est de principe qu'une loi spéciale à une colonie ne peut être étendue au delà de son territoire; c'est ce que portent notamment les ordonnances législatives des 9 fév. et 4 juill. 1827, 24 sept., 12, 27 oct. et 31 déc. 1828. Les frères Lecaudey sont nés en France; le fait d'un établissement à la Guadeloupe n'a pu leur enlever leur nationalité; car ils sont présumés avoir conservé l'esprit de retour. Donc, ils 'ne sauraient être privés de la législation française à laquelle ils ont droit comme Français regnicoles. Au surplus, leur établissement de Bordeaux était distinct de celui de la Guadeloupe, chacun d'eux doit être régi par les lois locales. Les créanciers de Bordeaux ont traité avec l'établissement de Bordeaux directement: pourquoi donc les obliger à faire valoir leurs droits dans une faillite ouverte à la Guadeloupe et qui leur est etrangère? La faillite de Bordeaux a été déclarée un an avant celle de la Pointe-à-Pitre, nouvelle raison pour attribuer au tribunal de Bordeaux l'ensemble de toutes les operations. - Arrêt.

-

LA COUR; Attendu qu'il y a lieu à règlement de juges par la cour de cassation, lorsque deux jugements statuant d'une manière contradictoire entre les mêmes parties et sur un même fait, émanent de deux tribunaux qui ne ressortissent pas à la même cour royale; Attendu qu'il a été reconnu, en fait, que les frères Lecaudey, après avoir formé une maison de commerce à la Pointe-a-Pitre (ile de la Guadeloupe), ont établi plus tard un comptoir dans la ville de Bordeaux, et qu'ils ont annoncé dans les circulaires qu'ils firent distribuer à cette occasion, que ce comptoir ne serait que la succursale de leur maison principale; ce qui résulte notamment d'un arrêt rendu par la cour de Bordeaux, le 14 déc. 1810, Attendu que la maison Lecaudey frères, ayant suspendu ses payements, a été déclarée en faillite par deux jugements émaués des tribunaux de Bordeaux et de la Guadeloupe; Attendu que, lorsqu'il n'existe qu'une Seule maison de commerce, il ne peut y avoir qu'une faillite, et qu'elle doit être déclarée dans la ville où se trouve le siége du principal établisseinent; Attendu que, dans l'espèce, il est constaté que co principal tablissement est à la Guadeloupe, et la Guadeloupe étant une colonie française, les parties qui ont traité avec une maison etablie dans cette colonie, ont su que le règlement de leurs droits serait fait par les juges de turs débiteurs; que, des lors, c'est illégalement que la poursuite de la faillite a eu lieu à Bordeax; Déclare nulles toutes les poursuites dirigees devant le tribunal le commerce de Bordeaux, et tout ce qui en a elé in suite; et faisant dret a la demande en règlement de juges, renvoie les parties à procéder devant le tribunal de la Pointe-à-Pitre, etc. Du 18 août 1841.-C. (i., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Bayeux, rap.

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(2) E-pèce: (Lantelme C. Chapellier et Mordstadt.) — Les frères Mérentié ayant plusieurs établissements de commerce, notamment à Paris et à Marseille, ont té déclarés en état de faillite, le 8 juill. 1841, par le tribunal de commerce de Paris, et le 12 du même mois par celui de Marseille. Des syndics ont été nommés par l'un et l'autre tribunal. Pourvoi en règlement de juges de la part de Lantelme, Lançon et Caune, syndics nommés à Marseille. Ils demandent que le tribunal de commerce de cette ville reste seul saisi des opérations de la faillite, le fondement que la maison Mérentié, établie originairement à Marseille,

sur

où l'existence de la société est déniée; autrement on laisseraft au défendeur un moyen facile d'éluder à son gré la juridiction de ce tribunal par une simple dénégation du fait de la société, en l'absence de tout contrat social. Cette dénégation ne doit être considérée, au contraire, que comme une exception qu'il appartient au juge de l'action d'apprécier, dès que, par sa nature, elle ne sort pas des limites de la compétence de ce juge. D'un autre côté, on répond que le droit d'assigner au lieu du siége dé la société est une dérogation à la règle générale actor sequitur forum rei, dérogation qui doit, dès lors, être restreinte dans ses termes or l'art. 59, § 5, en 'disant que le défendeur sera assigné, en matière de société, tant qu'elle existe, 'devant le juge du lieu où elle est établie, suppose manifestement le fait

Y

avait toujours conservé son principal établissement; que, si Guillaume Mérentié, l'un des associés, était venu établir sa résidence à Paris, co n'était qu'en 1838 et seulement pour y chercher des moyens de crédit nécessaires pour les expéditions maritimes et le commerce des denrées coloniales qui étaient toujours le principal objet du négoce de la société; mais que Guillaume Mérentié avait conservé son domicile à Marseille, où il était inscrit sur la liste électorale et du jury; qu'il n'y avait à Paris qu'un comptoir et que les marchandises et immeubles de la société étaient à Marseille. Les demandeurs reconnaissent que des poursuites criminelles ont été dirigées à Paris contre les frères Mérentié; mais ils soutiennent qu'on ne peut en conclure que la connaissance de la faillite doive étre attribuée au tribunal de commerce de la Seine, parce que, d'après l'art. 59 c. pén., c'est le juge du domicile du failli qui est seul compétent en matière de faillite, tandis qu'en matière criminelle, aux termes de l'art. 23 c. inst. crim., les poursuites peuvent être faites indistinctement ou par le procureur du roi du lieu du crime, ou par celui de la résidence du prévenu, ou même par celui du lieu où le prévenu aurait été trouvé.

Chapellier et Mordstadt, syndics nommés à Paris, ont demandé que le tribunal de commerce de la Seine füt seul déclaré compétent. Ils ont soutenu que les frères Mérentié avaient transporté à Paris le siége principal de leurs affaires; que c'était la maison de Paris qui dirigeait toutes les opérations sociales, même celles relatives aux expeditions maritimes et au commerce des denrées coloniales; que Guillaume Mérentié, chef do fa société, résidait à Paris et y avait acheté des immeubles importants. Ils ont ajouté que l'intérêt des créanciers exigeait que les opérations. relatives à la faillite fussent suivies à Paris, où se poursuivait l'instruction sur la prévention de banqueroute frauduleuse et où, par suite, avaient été transportés tous les registres et papiers des faillis, même ceux tenus à Marseille; que c'était, d'ailleurs, à Paris que la faillite avait été d'abord déclarée. Ils ont prétendu enfin que le plus grand nombre des créanciers se trouvait à Paris; mais les syndics de Marseille ont prétendu, de leur côté, que c'était dans cette dernière ville qu'était la majeure partie des créanciers. — Arrêt.

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LA COUR; Attendu, en droit, que, suivant l'art. 59 c. pr. civ., le juge compétent en matière de faillite est celui du lieu où le failli a son domicile; Que le domicile d'une société, considérée comme être moral, est dans le lieu où la société a son principal établissement; que, par suite, aux termes de l'art. 458 c. com., la déclaration de faillite d'une société en nom collectif doit être faite au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le principal établissement de cette société; et que, dès lors, c'est devant ce tribunal que toutes les opérations de la faillite doivent être poursuivies; Et attendu, en fait, que la société Mérentié, fondée à Marseille par Joseph-Eustache Mérentié, puis continuée entre les frères Mérentié, avait son siége à Marseille où, dans les temps, elle s'occupait principalement du commerce des denrées coloniales et d'entreprises maritimes:- Que si, en 1858, Guillaume Mérentié, chef de la société, a transporté sa résidence à Paris où il a établi un comptoir, il n'a accompli aucune des formalités prescrites par la loi pour opérer la translation de son domicile à Paris, et qu'il ne résulte d'aucune circonstance la preuve qu'il eut l'intention de quitter le domicile qu'il avait à Marseille; Qu'il ne s'occupait à Paris que de procurer, à l'aide dur crédit, des ressources pécuniaires à l'établissement de Marseille qui a toujours continué d'être le principal établissement de la société et qui s'occupait sent des opérations relatives aux expéditions maritimes et au commerce des denrées coloniales, principales branchés des spéculations de la société; Que c'est à Marseille que se trouve la presque totalité de l'actif mobilier et immobilier de la société et des marchandises qui lui appartiennent et font partie de cet nelif;— Qu'ainsi, c'est le tribunal de commerce de Marseille qui est seal competent pour connaître des opérations relatives à la faillite des frères Mérentié; Par ces motifs, sans s'arrêter au jugement rendu, le 8 juill. 1844, par le tribunal de commerce du département de la Seine, non plus qu'aux actes et jugements qui en ont été la suite, lesquels sont déclarés nuls et non avenus; Ordonne que les parties continueront de procéder devant le tribunal de commerce de Marseille.

-

Du 7 déc. 1841.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Valigny, tap.Delangle, av. · gén., c. conf.-Victor Augier et Piet, av.

et,

préexistant el non contesté d'une société établie et reconnue, cela avec d'autant plus de raison que les sociétés, même commerciales, doivent être constatées par écrit, aux termes des art. 39, 40 el 44 c. com., et même rendues publiques, d'après l'art. 42 du même code. Vainement objecte-t-on la maxime que le juge de l'action est juge de l'exception; car l'applicabilité de celle maxime est subordonnée à l'existence d'un fait certain et avoué qui soit pour ce juge attributif de juridiction. — V. vis Arbitrage, n°483 et suiv.

118. Il a été jugé, conformément au premier de ces systèmes, que le créancier qui a fait condamner plusieurs associés au payement d'une lettre de change en les poursuivant devant le tribunal du lieu où la société existe, peut assigner en déclaration de jugement commun, devant le même tribunal, un autre associé non compris dans la première condamnation, encore que celui-ci conteste l'existence de la société, et soutienne

(1) Espèce: - (Jouenne C. Dumesnil, etc.) — En 1808, Beauvoisin tire de Bayeux, à l'ordre de Roussel, sur Lemoine, à Caen, une lettre de change de 1,000 fr. La traite est acceptée par Lemoine, et passee à l'ordre de Dumesnil père et fils, qui, faute de payement, font condamner, par le tribunal de commerce de Caen, Lemoine, Beauvoisin et Roussel, à leur en rembourser le montant. Ensuite les Dumesnil assignent, devant le même tribunal de Caen, le sieur Jouenne, de Versailles, pour voir déclarer commun avec lui ce jugement. Ils se fondaient sur ce que les 1,000 fr., montant de la traite, avaient servi à alimenter une manufacture exploitée en société, tant par Lemoine, Beauvoisin et Roussel, que par Jouenne. Celui-ci demande son renvoi devant ses juges naturels, sur le fondement que, n'ayant ni tiré, ni endossé, ni accepté la traite, et cette traite n'étant pas d'ailleurs annoncée avoir été tirée pour le compte de la société, il ne peut en être tenu solidairement comme associé, et parce que d'ailleurs la société qu'on prétendait exister entre lui, Lemoine et autres, société qui, du reste, était sous le nom de ces derniers, ne pouvait être réputée une société de commerce. Lemoine et consorts interviennent et concluent à ce que Jouenne soit tenu de les garantir...

Le 18 fév. 1809, jugement du tribunal de commerce de Caen, qui, sans s'arrêter au déclinatoire, a retenu la cause : « Attendu que la société des sieurs Jouenne, Roussel, Beauvoisin et Lemoine est véritablement spéculative, et que toutes les branches de ses diverses entreprises sont autant d'actes de commerce que par conséquent le sieur Jouenne, et tous les autres membres de la société, sont justiciables du tribunal de commerce, pour raison des obligations relatives à leurs diverses entreprises; que les sieurs Roussel, Lemoine et Beauvoisin sont valablement traduits en ce tribunal, non-seulement en raison de leur qualité d'associés et des actes de commerce, mais encore de la nature du titre qu'ils ont souscrit; et la question qui s'élève entre le sieur Jouenne étant uniquement de savoir si celui-ci est tenu solidairement avec eux de leur obligation, étant enfin obligé de défendre à la condamnation récursoire qu'ils ont conclue contre lui, il s'ensuit qu'il est, sous tous les rapports, obligé de plaider devant ce tribunal. » Pourvoi de Jouenne en règlement de juges. Arrêt.

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LA COUR ;-Attendu que, suivant l'art. 59 c. pr., le défendeur en matière de société, tant qu'elle existe, doit être assigné devant le juge du Jieu où elle est établie; que les sieurs Dumesnil allèguent, d'une part, l'existence d'une société établie dans l'arrondissement de Caen, entre le sieur Jouenne, demandeur, et les tireur et accepteur de la lettre de change passée à l'ordre des sieurs Dumesnil, et, d'autre part, prétendant que celle lettre de change n'avait été créée que pour les besoins de cette société, n'ont pu, d'après la disposition du code ci-dessus cité, assigner le sieur Jouenne que devant les juges de l'arrondissement de Caen ; et que c'était devant lesdits juges que le sieur Jouenne pouvait proposer ses défenses, soit sur l'existence de la société, soit sur les causes de la traite dont il s'agit ;-Déboute le sieur Jouenne de sa demande en règlement de juges.

Du 14 mars 1810.-C. C., sect. req.-MM, Henrion, pr.-Oudart, rap. (2) Espèce. (Willes et Williams C. Peyret.) — Ély, depuis tombé en faillite, avait acheté, à Saint-Étienne, de Peyret, une partie de marchandises montant à 31,000 fr. Ce dernier, prétendant que cet achat avail été fait pour le compte d'une société existante entre Ely, Willes et Williams, les fit citer devant le tribunal de Saint-Étienne, pour les faire condamner solidairement et par corps au payement de la somme demandéc. Ely fit défaut; mais Willes et Williams comparurent, et nierent qu'il y eût société entre eux et Ély; ils soutinrent qu'ils ne pouvaient pas être appelés devant le tribunal de Saint-Étienne, et demandèrent à ètre renvoyés devant leurs juges naturels, pour y plaider sur l'existence de la société. Le 7 sept. 1820, jugement par lequel le tribunal de SaintEtienne, sans rien préjuger sur le fond, démit Willes et Williams de leur déclinatoire.

Pourvoi en règlement de juges de la part de Willes et Williams. — Ils

qu'en tout cas la lettre de change n'est pas relative aux opérations de cette société (Reg, 14 mars 1810) (1);

Que, pareillement, le vendeur de marchandises peut pour suivre devant le tribunal du lieu où la vente a été faite et la marchandise livrée, non-seulement l'acheteur, mais les personnes qu'il prétend être les coassociés de celui-ci, sans que ces personnes puissent décliner la compétence de ce tribunal, en déniant la qualité d'associés (Req., 7 juin 1821) (2);

Que, de même, l'individu assigné comme coassocié par les représentants d'une société devant le tribunal de celle-ci, n'est pas fondé à assigner à son tour ces représentants devant le juge de son propre domicile pour faire déclarer qu'il n'est point associé c'est devant le tribunal de la société qu'il doit faire valoir ce moyen (Req., 9 mai 1826 (3); Conf. Rouen, 9 avril 1842, aff. Larcher C. Legrand);

Et qu'enfin, l'individu, traduit comme associé par les créan

se sont principalement fondés sur ce qu'étant avoué qu'ils n'avaient point contracté avec Peyret, ils ne pouvaient être justiciables du tribunal de Saint-Etienne que sous le prétexte de la société prétendue entre eux et Ely; mais que, déniant cette société, son existence donnait lieu à une question préjudicielle que, d'après les principes généraux de la compétence des tribunaux, ils avaient droit de discuter devant leurs juges naturels. Peyret a répondu que la dénégation de l'existence de la société ne rendait point le tribunal incompétent, car c'était une question purement commerciale, et agitée entre négociants. Il s'est encore fondé sur l'art. 420 c. pr., qui permet de citer devant le juge du lieu où le marché a été fait et la marchandise livrée, et sur l'art. 59 du même code, qui, dans le cas de plusieurs défendeurs, permet au demandeur de faire choix du juge de l'un d'eux, et d'y porter la contestation. — Arrêt. LA COUR;

Considérant qu'il est avoué au procès que le marché fait avec le sieur Ély, et la livraison des marchandises, ont eu lieu à SaintÉtienne; ce qui, aux termes de l'art. 420 c. pr., suffit pour déterminer la compétence du tribunal de Saint-Étienne; Considérant que, par suite de la prétention que Willes et Williams étaient débiteurs solidaires en leur qualité d'associés d'Ely, Peyret a pu les citer au même tribunal en exécution de l'art. 59 du même code; que la dénégation d'être associés et conséquemment débiteurs n'est autre chose qu'une exception au fond, dont la connaissance appartient au tribunal investi de la demande principale, et qu'elle ne donne lieu qu'à une question qui, tant par sa nature que par la qualité des parties, tombe dans la compétence du tribunal de commerce, et que toutes exceptions ont été réservées; - Rejette la demande en règlement de juges.

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Du 7 juin 1821.-C. Č., sect. req.-MM. Lasaudade, pr.-Brillat, rap. (3) Espèce :- (Salvador-Ayon, etc. C. Cohen, etc.) Une ordonnance du 24 déc. 1817 avait déclaré que les communautés d'israélites d'Avignon et de Lille seraient réputées existantes à l'égard des créanciers, jusqu'à leur entière liquidation. Celle de Lille devait 65,428 fr., dont la répartition devait être faite par le consistoire, et le payement intégral effectué en dix ans par dixième. - Salvador-Ayon fut compris dans le rôle de contribution de 1818 pour 1,875 fr., montant de son contingent pour le premier dixième. Le 26 nov. 1818, Cohen, percepteur de la société, décerna une contrainte tant contre Salvador que contre ses neveux. Opposition de la part de ceux-ci. Elle est rejetée par le conseil de préfecture. Pourvoi au conseil d'Etat.-Ce pourvoi n'étant pas suspensif, Salvador paye. Enfin, ordonnance qui annule la décision du conseil de préfecture et renvoie devant les tribunaux. Alors Salvador, tant pour lui que pour ses mineurs, assigne à Béziers, lieu de leur domicile, le sieur Cohen, et conclut à la nullité des poursuites et à la décharge de toute contribution, par le motif que ni lui ni ses neveux n'ont jamais fait partie de la société et qu'ils ne sont les représentants d'aucun de ses membres. - Coben et les syndics répartiteurs, mis en cause, déclinent la compétence du tribunal, attendu que, s'agissant de la liquidation d'une société, c'est le tribunal du lieu, où cette société est établie, qui doit connaitre de la contestation.

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Le 22 nov. 1822, le tribunal se déclare compétent et ordonne de plaider au fond. Appel, et, le 17 déc. 1825, arrêt infirmatif de la cour de Montpellier, en ces termes : « Attendu que la société israélite, dont il est question, quoique dissoute, est censée existante tant que ses dettes ne seront pas liquidées, et que, dès lors, d'après l'art. 59 c. pr., toutes les contestations relatives à cette société doivent être portées devant le tribunal du lieu où elle était établie, d'où il suit que c'est mal à propos que le tribunal de Béziers s'est déclaré compétent. » Pourvoi de SalvadorAyon pour violation du § 1 de l'art. 59 c. pr., et fausse application du § 5 de cet article. — Arrêt. LA COUR Attendu, en droit, qu'en matière de société, tant qu'elio existe, le défendeur doit être assigné devant le juge du lieu où elle est établie ; Que le juge de l'action est le juge de l'exception, lors surtout que l'exception, et par sa nature, et par la qualité des parties, rentre dans les limites de sa juridiction; Et attendu qu'il est constant et re

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