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l'ouverture d'une succession, pour connaître d'une demande en partage de cette succession (ou en rescision de partage), n'est point une incompétence absolue, mais seulement relative. En conséquence, lorsque la demande en partage d'un immeuble faisant partie d'une succession non encore partagée, a été introduite par le cessionnaire de la part indivise de l'un des héritiers, devant un tribunal autre que celui de l'ouverture, l'incompétence de ce tribunal doit être invoquée par le défendeur, avant toute exception ou défense au fond, sous peine de déchéance (Florence 9 mai 1810; Metz, 4 août 1821 (1); — Conf. Metz, 29 août 1818, aff. Wendel).

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pétence des tribunaux; Attendu que le comte Armand Pignatelli de Fuentes est décédé, laissant pour héritiers, savoir: dans la ligne paternelle, la duchesse de Villa-Hermosa, le comte de Fuentès, et Charles Pignatelli de Gonsagues, tous trois Espagnols; et dans la ligne maternelle, le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency, l'un et l'autre Français; Que, sur la demande en liquidation et partage de cette succession, portée devant le tribunal de première instance du département de la Seine, il a été rendu entre le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency, et les héritiers du comte de Fuentès et Charles Pignatelli de Gonsagues, sous les dates des 14 fév. 1822 et 9 fév. 1826, des jugements qui ont fixé les bases de la liquidation de ladite succession; -Attendu que le duc de Villa-Hermosa, qui n'avait pas été partie dans ces jugements, a formé depuis, devant le même tribunal de la Seine, une demande tendante à ce qu'il lui fût attribué une part dans ladite succession; Attendu que, sur cette demande, le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency ont conclu à ce que les jugements des 14 fév. 1822 et 9 fév. 1826 fussent déclarés communs avec le duc de Villa-Hermosa;-Que, de leur côté, la veuve et les héritiers du comte de Fuentes ont combattu la demande du duc de Villa-Hermosa, en lui opposant que les biens dans lesquels il prétendait avoir droit de prendre part se trouvaient compris dans une donation que la duchesse, sa mère, et lui, avaient faite an comte de Fuentes, par acte passé devant notaire à Madrid, le 5 sept. 1814;- Attendu que le tribunal de première instance du département de la Seine et la cour royale de Paris se trouvaient régulierement et compétemment saisis de l'action en pétition d'hérédité du duc de Villa-Hermosa, soit parce que cette demande était dirigée et devait être dirigée, tant contre les héritiers paternels espagnols, que contre les héritiers maternels regnicoles; soit parce que la liquidation et le partage de la succession avaient été ordonnés par des jugements rendus contre lesdits héritiers, par le tribunal civil de la Seine; Attendu qu'il est de principe que le juge de l'action est juge de l'exception; qu'ainsi le tribunai civil du département de la Seine, et la cour royale de Paris, compétents pour connaitre de l'action en pétition d'hérédité formée par le duc de VillaIlermosa, étaient également compétents pour juger si les biens par lui réclamés se trouvaient encore compris dans la donation qui lui était opposée; d'où il suit qu'en rejetant le déclinatoire proposé par la duchesse et les enfants du duc de Fuentès, l'arrêt attaqué n'a ni commis un excès de pouvoir ni violé les règles de la compétence des tribunaux français;... Rejette, etc.

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Du 2 fév. 1852.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Moreau, rap. (1) 1 Espèce :-(Giovanpaolo C. Petrusco.)-Simon et César Giovanpaolo avaient cédé à Petrusco leurs droits sur une pièce de terre située dans l'arrondissement d'Arezzo, et provenant de la succession d'un de Jeurs parents décédé dans le mème arrondissement. Ils la possédaient par indivis avec Antoine Giovanpaolo. Petrusco demande le partage de l'immeuble; il porte son action devant le tribunal de Montepulciano, dans le ressort duquel A. Giovanpaolo était domicilié. - Celui-ci défend à la demande, et soutient que Simon et César lui ont vendu à lui-même leurs droits sur l'immeuble. Sans égard à ce moyen, le tribunal ordonne le partage.

Appel par Antoine Giovanpaolo. Il soutient que le tribunal était incompétent, tant parce que l'immeuble litigieux est situé dans le ressort du tribunal d'Arezzo, que parce que la succession, dont il dépend en partie, s'est ouverte dans le même ressort; que, sous ce double rapport, la contestation ne pouvait appartenir qu'aux juges d'Arezzo. Petrusco répond qu'il ne s'agit pas, dans l'espèce, d'une action en partage de succession, puisque Giovanpaolo n'est pas héritier de l'auteur de ses cédants, mais simplement d'une action en partage de biens indivis, communi dividundo, action mixte, qui peut être portée, au choix du demandeur, devant le tribunal de la situation des biens, ou devant le tribunal du domicile du défendeur. En tout cas, ajoute-t-il, le tribunal n'était pas incompétent à raison de la matière; ce qui caractérise l'incompétence absolue ou à raison de la matière, c'est que, quelles que soient les circonstances du fait, la cause est placée par la loi, non-seulement hors de la connaissance du tribunal qui en a été saisi, mais encore de tous les tribunaux de la même branche de l'administration judiciaire; c'est ce qui ne se préBente pas dans l'espèce. Le renvoi devait donc être demandé in limine litis, et ne peut plus l'être en cour d'appel. Arrêt.

La même doctrine résulte implicitement d'un arrêt de la cour suprême, qui a décidé que, lorsque le curateur d'une succession vacante a consenti à ce que la demande en partage d'une autre succession sur laquelle la succession vacante a des droits, fût portée devant un autre tribunal que celui de l'ouverture, les créanciers de la succession vacante ne peuvent plus demander que le partage se fasse devant le tribunal originairement compétent (Req., 15 avril 1820) (2).

Enfin, on peut encore induire d'un autre arrêt de la même cour, que l'attribution au tribunal de l'ouverture d'une succession, des contestations entre héritiers, n'établit point pour tou.

LA COUR ; Considérant que, même en admettant qu'il s'agisse dans la cause de matière de succession, l'incompétence du tribunal de Montepulciano n'aurait pas été absolue, mais relative, et fondée sur la circonstance accidentelle que la succession du défunt s'est ouverte dans l'arrondissement du tribunal d'Arezzo; Que cette exception de fait n'a point été proposée par l'appelant en première instance, et qu'ainsi elle n'a pu être suppléée par le juge qui était certainement compétent pour statuer en matière de succession:-Dit qu'il a été bien et compétemment jugé. Du 9 mai 1810.-C. de Florence.

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2 Espèce (Couturier.) LA COUR; Attendu, sur l'appel du jugement rendu le 1er mars 1821, par le tribunal de Thionville, et qui a rejeté le déclinatoire proposé par Couturier de Bouzonville, qu'il est certain que l'incompetence que l'on faisait résulter de l'art. 59, § 6, c. pr., n'était point matérielle et absolue, mais purement relative, ainsi que la cour l'a jugé en cas semblable par arrêt du 29 août 1818; que la juridiction du tribunal de Thionville a donc pu être prorogée; qu'elle l'a été en effet par le consentement de Couturier de Bouzonville, à plaider au fond, à l'audience du 11 avril; que les réserves par lui faites d'appeler du jugement de compétence du 1er mars, ne lui donnent aucun droit de revenir par appel contre le jugement; que Couturier aurait dù faire défaut lors du jugement du 11 avril, pour pouvoir plus tard appeler du premier jugement, pour cause d'incompétence; que la cour au surplus a déjà établi par plusieurs arrêts, qu'en matière d'incompétence ratione persona, la juridiction d'un tribunal se trouve fixée dès que l'on a plaidé au fond, et quelles que soient les réserves qu'on ait faites d'appeler du jugement sur le déclinatoire.

Du 4 août 1821.-C. de Metz, ch. corr.-M. Colchen, pr.

(2) Espèce: (Bastiole C. Dupin.)-Le 2 mars 1800, décès à Moz. tauban, lieu de son domicile, de Paul Martin, laissant pour héritiers Eugène Martin et la dame de la Bastiole, ses enfants. Cette succession était encore indivise, lorsque, le 14 nov. 1802, Martin fils mourut à Paris, où il résidait depuis longtemps. Sa succession fut acceptée, sous bénéfice d'inventaire, par la dame Bastiole, sa sœur.-En 1812, la dame de la Bastiole fait nommer un curateur à la succession de son frère, et forme, contre ce curateur, une demande tendante à ce qu'il soit pro cédé au compte qu'elle doit rendre de son administration, comme héritiere bénéficiaire, et préalablement à ce compte, à ce qu'il soit procédé à l'estimation des immeubles dépendants de la succession de feu Paul Martin, leur père commun, à l'effet de constater que, loin d'avoir rien à réclamer dans cette succession, Martin fils ou ses ayants-cause sont tenus d'y rapporter 54,857 fr., pour lesquels elle demande condamnation contre le curateur à la succession vacante.

Le 28 août 1812, jugem. du trib. de la Seine, qui porte que, pour déterminer ce dont la dame de la Bastiole doit rendre compte, en sa qua, lité d'héritière sous bénéfice d'inventaire d'Eugène Martin, il faut constater ce qui compose la succession de ce dernier; attendu que la succession de Paul Martin père, à laquelle ledit Martin fils avait été appelé pour moitié, n'a point été liquidée avant le décès de ce même Martin fils; attendu que, pour vérifier si réellement ce que celui-ci doit à la succession de son père, réduit sa part béréditaire, il est de toute nécessité de connaître la valeur réelle des immeubles dépendants de cette succession; ordonne que, par experts, chacune de ces successions sera estimée. Cette expertise a lieu et le rapport des experts est homologué le 5 juin 1815.

En 1816, les sieurs Dupin, créanciers de Martin fils, signifient leurs titres à la dame de la Bastiole. Le 14 mars, celle-ci les assigne devant le tribunal de la Seine, pour faire ordonner qu'il leur sera défendu d'exercer aucunes poursuites contre elle, sauf à eux à intervenir en l'instance pendante devant ce même tribunal. - Le 51 mai 1818, les sieurs Dupin, comme exerçant les droits de Martin fils, ont assigné cette dame devant le tribunal de Montauban, lieu de l'ouverture de la succession de Martin père, à fin de liquidation et partage de cette succession. dame de la Bastiole demande le renvoi de la cause devant le tribunal de la Seine, par le motif que l'action des sieurs Dupin a le même objet que l'un des chefs de la demande de la dame de la Bastiole, celui tendant à la liquidation de la succession de Martin père. Le 28 juin 1819, le tribunal de Montauban, considérant qu'il n'y a dans les deux demandes ni même objet ni connexité, retient la cause.

La

autre tribunal d'arrondissement une incompétence ratione materia (Req., 27 avril 1837, aff. Villedieu, V. Exception).

82. Néanmoins, il a été jugé, en sens contraire, par la cour de Bordeaux, que, quand des mineurs sont intéressés dans la succession au partage de laquelle il est procédé devant un tribunal autre que celui de l'ouverture, l'incompétence du tribunal peut, dans l'intérêt des mineurs, être proposée après les défenses au fond, et même pour la première fois en appel (Bordeaux, 20 avril 1831, aff. Lynck, V. Succession).

83. Et la même cour a décidé encore que si l'un des cohéritiers, décédé pendant l'instance en partage, laisse des biens autres que sa part dans ceux qui sont l'objet de cette instance, c'est devant le tribunal de son domicile que le partage de sa propre succession doit être demandé, même quant à sa portion dans les biens au sujet desquels il existait déjà une instance en partage ouverte devant un autre tribunal, et encore bien que, relati- | vement à cette portion, les copartageants aient d'abord consenti

Pourvoi en règlement de juges de la part de la dame de la Bastiole. -Elle soutient: 1° qu'il y a identité dans les demandes; 2° que le curateur à la succession de Martin fils, ayant consenti à ce que l'action fût portée devant le tribunal de la Seine, les défendeurs sont, comme créanciers, non recevables à se plaindre. Ceux-ci répondent, sur ce point, que le consentement d'ailleurs non exprès, et résultant du seul silence du curateur, n'a pas suffi pour attribuer compétence au tribunal de la Seine et pour lier les créanciers.

LA COUR;

Arrêt.

Considérant que la demande formée devant le tribunal civil de la Seine, par la dame de la Bastiole, contre le curateur à la succession vacante de Guillaume-Eugene Martin, son frère, avait le double objet de faire apurer son compte d'héritière bénéficiaire de son frère, et de parvenir à la liquidation de la succession de Paul-Daniel-Martin, leur père commun; que le curateur a consenti a plaider devant ce tribunal, sur cette demande qui a mème été suivie de plusieurs jugements interlocutoires; qu il a ainsi renoncé à plaider devant tout autre tribunal, à supposer qu'il eût le droit d'y demander son renvoi; Considerant que la demande formée au tribunal civil de Montauban, contre la dame de la Bastiole, par les frères Dupin de Saint-André, comme exerçant les droits de Martin fils, leur debiteur, a pour objet de faire procéder aux compte, liquidation et partage de la succession du sieur Martin père, devant les juges du lieu de l'ouverture de ladite succession; mais que cette demande a le même objet qu'un des chefs de la demande pendante devant le tribunal civil de la Seine, entre la dame de la Bastiole et le curateur à la succession vacante de son frère; que ce curateur qui représente le sieur Martin fils, ayant consenti à plaider devant ce tribunal, les sieurs Dupin de Saint-André, qui agissent comme exerçant les droits du sieur Martin fils, ne peuvent se refuser à plaider devant les juges légalement saisis de la liquidation et du partage de la succession du sieur Martin père; qu'ils ont mème été assignés à cet effet devant le tribunal de la Seine, avant qu'ils eussent porté devant le tribunal de Montauban une demande qui se trouve connexe avec celle formée par la dame de la Bastiole, contre le curateur à la succession du sieur Martin fils; qu'ainsi, sous tous les rapports, la dame de la Bastiole a été bien fondée à décliner la juridiction du tribunal civil de Montauban, et à demander que le tribunal civil de la Seine fùt compétent pour connaître de la demande formée par les sieurs Dupin de Saint-André; Par ces motifs, sans s'arrêter ni avoir égard au jugement rendu par le tribunal civil de Montauban, le 28 juin 1819, qui est déclaré nul et comme non avenu, ainsi que tout ce qui a été fait en exécution d'icelui; Ordonne que les parties plaideront devant le tribunal civil de la Seine, sur la demande ormée par les sieurs Dupin de Saint-André, le 51 mai 1818.

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Du 13 avr. 1820.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Favard, rap. (1) Espèce: — (Savy-Binlou C. Durif de Cressac.) — En mess. an 7, Dereix-Desgraviers décéda dans l'arrondissement du tribunal d'Angoulème, laissant pour héritières une sœur germaine, Marie Dereix, veuve de Cressac, et trois sœurs consanguines; la première, pour les cinq huitièmes de la succession; les trois autres, pour les trois huitièmes restants. - Pendant l'instance en partage, qui fut portée devant le tribunal d'Angoulême, la veuve Cressac décéda elle-même dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, avant que les biens de Desgraviers eussent été partagés, laissant à ses héritiers, en assez grand nombre, les cinq huitièmes encore indivis, et en outre le domaine de Lagrange.

En exécution du jugement qui ordonnait le partage de la succession Desgraviers, Vedrenne, l'un des héritiers, fit signifier un acte dans lequel il établissait la liquidation ordonnée, ainsi que le partage, entre les ayants droit, des cinq huitièmes revenant à l'hérédité de la veuve de Cres

sac.

Après avoir adhéré d'abord à l'homologation de cette liquidation, Savy-Binlou, autre héritier, s'y opposa, et demanda que toutes les opérations relatives au partage et à la liquidation de la succession de la veuve Gressac, soit entre les divers héritiers, soit entre les créanciers, fussent

à procéder devant ce dernier tribunal. En cas pareil, il ne doit y avoir qu'un partage de toute la succession du cohéritier défunt, et elle doit, même dans un intérêt d'ordre public, avoir lieu devant le tribunal de son domicile (Bordeaux, 19 mai 1835) (1). 84. Demandes intentées par des créanciers du défunt jusqu'au partage. Il importe de centraliser toutes les opérations relatives à la liquidation de la succession; et, d'un autre côté, c'est au lieu où cette succession est ouverte que doivent naturellement se trouver les titres qui peuvent servir à repousser les demandes formées contre elle; de là la disposition qui attribue compétence au tribunal de ce lieu pour les demandes intentées par les créanciers du défunt jusqu'au partage.

Cette disposition ne se trouvait point dans le projet du code, qui portait seulement que le défendeur serait assigné, « en matière de succession, sur les demandes entre héritiers et autres parties intéressées, jusqu'au partage inclusivement, et sur celles à fin d'exécution des dispositions à cause de mort, jusqu'au ju

renvoyées devant le tribunal de Ribérac, lieu de l'ouverture de la succession de la veuve Cressac. Le tribunal d'Angoulême, statuant sur les conclusions prises à cet égard par Savy-Binlou, contre Durif de Cressac et autres intéressés, les rejeta en ces termes :

«Attendu que toute demande en partage et liquidation d'une succession doit être portée devant le tribunal du domicile du défunt, d'après l'art 59 c. pr.; mais que la contravention à cet article de loi autorise le défendeur à proposer un moyen d'incompétence qui, d'après l'art. 169 du même code, doit être présenté avant toutes autres exceptions et défenses; - Attendu que, dans l'espèce, ce moyen d'incompétence a été couvert par toutes parties; qu'en effet la cause a été instruite, et qu'il a même été signifié, dans l'instance, une liquidation dans laquelle la part revenant à Marie Dereix, veuve Cressac, a été divisée et répartie entre les divers cohéritiers de ladite veuve Cressac; que des conclusions ont même été prises par les sieur et dame Savy, le 31 mars 1829, pour demander acte au tribunal de ce qu'ils s'en rapportaient à sa prudence sur l'homologation de ladite liquidation; qu'à la vérité, cette liquidation ne contient rien de définitif; mais que c'en est assez pour qu'aucune partie ne puisse aujourd'hui proposer d'incompétence ratione persona; - Par ces motifs, le tribunal déclare les sieur et dame Savy purement et simplement non recevables dans leur de mande; ordonne que les parties plaideront au fond. »

Appel de Savy-Binlou. Le tribunal de Ribérac, disait-il, lieu de l'ouverture de la succession de Marie Dereix, est le seul devant lequel il soit permis de procéder au partage de cette succession: il y a d'autant moins de difficulté à renvoyer devant ce tribunal, que le tribunal d'Angoulême n'a pas été légalement saisi de la demande en partage des cinq huitièmes entre ceux qui y ont droit, puisque l'assignation introductive de l'instance portée devant ce tribunal avait pour objet le partage de la succession entre les héritiers de Desgraviers, sa sœur germaine, et ses trois sœurs consanguines, mais nullement la subdivision ultérieure qui devait être faite de la portion afférente à la première entre ses héritiers particuliers. - Durif de Cressac, intimé, répondait que la demande en renvoi était tardivement proposée, puisque déjà toutes les parties avaient accepté la juridiction des juges d'Angoulême. — Arrêt.

LA COUR;

Attendu qu'indépendamment de certains biens immeubles situés dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, la succession de la dame de Cressac se compose des cinq huitièmes recueillis par cette dame, dans l'hérédité du sieur Dereix-Desgraviers, son frère; - Attendu que la succession de la dame de Cressac s'est ouverte dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, - Attendu qu'à la vérité le tribunal d'Angoulême était suffisamment nanti de la demande en homologation de la liquidation qui avait été signifiée dans l'instance, puisque les héritiers de Cressac, d'une part, et les époux Savy, de l'autre, avaient accepté la juridiction de ce tribunal, et que ce contrat judiciaire ne devait pas avoir moins d'autorité qu'une assignation où l'on aurait conclu au partage de la succession de la dame de Cressac; qu'ainsi, le premier moyen développé dans l'intérêt des époux Savy, doit être rejeté; Attendu que la liquidation embrassait les cinq huitièmes de la succession dont on a déjà parlé; - Al tendu qu'après avoir procédé au partage des cinq huitièmes devant la tribunal d'Angoulême, il aurait encore fallu s'occuper, devant le tribunal de Ribérac, du partage des autres biens délaissés par la dame de Cressac; qu'il est par conséquent démontré que la prétention du sieur de Cressac tend à faire partager partiellement la succession de la dame de Cressac, prétention qui, si elle était consacrée, entraînerait les abus les plus graves, et que l'on peut même considérer comme portant atteinte à l'ordre public; Par ces motifs, faisant droit de l'appel interjeté par les conjoints SavyBinlou, du jugement rendu par le tribunal de premiere instance d'Angoulème, du 22 avril 1855, met l'appel, ainsi que ce dont a été appelé, au néant; émendant, et faisant ce que les premiers juges auraient dù faire, déclare n'y avoir lieu de procéder devant le tribunal civil d'Angoulême. Du 19 mai 1835.-C. de Bordeaux, 4 ch.-M. Dégranges, pr.

l'ouverture d'une succession, pour connaître d'une demande en partage de cette succession (ou en rescision de partage), n'est point une incompétence absolue, mais seulement relative. En conséquence, lorsque la demande en partage d'un immeuble faisant partie d'une succession non encore partagée, a été introduite par le cessionnaire de la part indivise de l'un des héritiers, devant un tribunal autre que celui de l'ouverture, l'incompétence de ce tribunal doit être invoquée par le défendeur, avant toute exception ou défense au fond, sous peine de déchéance (Florence 9 mai 1810; Metz, 4 août 1821 (1); - Conf. Metz, 29 août 1818, aff. Wendel).

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pétence des tribunaux; Attendu que le comte Armand Pignatelli de Fuentes est décédé, laissant pour héritiers, savoir dans la ligne paternelle, la duchesse de Villa-Hermosa, le comte de Fuentès, et Charles Pignatelli de Gonsagues, tous trois Espagnols; et dans la ligne maternelle, le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency, l'un et l'autre Français; Que, sur la demande en liquidation et partage de cette succession, portée devant le tribunal de première instance du département de la Seine, il a été rendu entre le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency, et les héritiers du comte de Fuentes et Charles Pignatelli de Gonsagues, sous les dates des 14 fév. 1822 et 9 fév. 1826, des jugements qui ont fixé les bases de la liquidation de ladite succession; -Attendu que le duc de Villa-Hermosa, qui n'avait pas été partie dans ces jugements, a formé depuis, devant le même tribunal de la Seine, une demande tendante à ce qu'il lui fût attribué une part dans ladite succession; Attendu que, sur cette demande, le duc de Luynes et la duchesse de Montmorency ont conclu à ce que les jugements des 14 fév. 1822 et 9 fév. 1826 fussent déclarés communs avec le duc de Villa-Hermosa;-Que, de leur côté, la veuve et les héritiers du comte de Fuentes ont combattu la demande du duc de Villa-Hermosa, en lui opposant que les biens dans lesquels il prétendait avoir droit de prendre part se trouvaient compris dans une donation que la duchesse, sa mère, et lui, avaient faite au comte de Fuentès, par acte passé devant notaire à Madrid, le 5 sept. 1814; - Attendu que le tribunal de première instance du département de la Seine et la cour royale de Paris se trouvaient régulièrement et compétemment saisis de l'action en pétition d'hérédité du duc de Villa-Hermosa, soit parce que cette demande était dirigée et devait être dirigée, tant contre les héritiers paternels espagnols, que contre les héritiers maternels regnicoles; soit parce que la liquidation et le partage de la succession avaient été ordonnés par des jugements rendus contre lesdits héritiers, par le tribunal civil de la Seine; Attendu qu'il est de principe que le juge de l'action est juge de l'exception; qu'ainsi le tribunai civil du département de la Seine, et la cour royale de Paris, compétents pour connaitre de l'action en pétition d'hérédité formée par le duc de VillaIlermosa, étaient également compétents pour juger si les biens par lui réclamés se trouvaient encore compris dans la donation qui lui était opposée; d'où il suit qu'en rejetant le déclinatoire proposé par la duchesse et les enfants du duc de Fuentès, l'arrêt attaqué n'a ni commis un excès de pouvoir ni violé les règles de la compétence des tribunaux français;... Rejette, etc.

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Du 2 fév. 1852.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Moreau, rap. (1) 1re Espèce :-(Giovanpaolo C. Petrusco.)-Simon et César Giovanpaolo avaient cédé à Petrusco leurs droits sur une pièce de terre située dans l'arrondissement d'Arezzo, et provenant de la succession d'un de leurs parents décédé dans le même arrondissement. Ils la possédaient par indivis avec Antoine Giovanpaolo. Petrusco demande le partage de l'immeuble; il porte son action devant le tribunal de Montepulciano, dans le ressort duquel A. Giovanpaolo était domicilié. — Celui-ci défend à la demande, et soutient que Simon et César lui ont vendu à lui-même leurs droits sur l'immeuble. Sans égard à ce moyen, le tribunal ordonne le partage.

Appel par Antoine Giovanpaolo. Il soutient que le tribunal était incompétent, tant parce que l'immeuble litigieux est situé dans le ressort du tribunal d'Arezzo, que parce que la succession, dont il dépend en partie, s'est ouverte dans le même ressort; que, sous ce double rapport, la contestation ne pouvait appartenir qu'aux juges d'Arezzo. Petrusco répond qu'il ne s'agit pas, dans l'espèce, d'une action en partage de succession, puisque Giovanpaolo n'est pas héritier de l'auteur de ses cédants, mais simplement d'une action en partage de biens indivis, communi dividundo, action mixte, qui peut être portée, au choix du demandeur, devant le tribunal de la situation des biens, ou devant le tribunal du domicile du défendeur. En tout cas, ajoute-t-il, le tribunal n'était pas incompétent à raison de la matière; ce qui caractérise l'incompétence absolue ou à raison de la matière, c'est que, quelles que soient les circonstances du fait, la cause est placée par la loi, non-seulennent hors de la connaissance du tribunal qui en a été saisi, mais encore de tous les tribunaux de la même branche de l'administration judiciaire; c'est ce qui ne se présente pas dans l'espèce. Le renvoi devait donc être demandé in limine litis, et ne peut plus l'être en cour d'appel. — Arrêt.

La même doctrine résulte implicitement d'un arrêt de la cour suprême, qui a décidé que, lorsque le curateur d'une succession vacante a consenti à ce que la demande en partage d'une autre succession sur laquelle la succession vacante a des droits., fût portée devant un autre tribunal que celui de l'ouverture, les créanciers de la succession vacante ne peuvent plus demander que le partage se fasse devant le tribunal originairement compétent (Req., 15 avril 1820) (2).

Enfin, on peut encore induire d'un autre arrêt de la même cour, que l'attribution au tribunal de l'ouverture d'une succession, des contestations entre héritiers, n'établit point pour tou.

LA COUR; Considérant que, même en admettant qu'il s'agisse dans la cause de matière de succession, l'incompétence du tribunal de Montepulciano n'aurait pas été absolue, mais relative, et fondée sur la circonstance accidentelle que la succession du défunt s'est ouverte dans l'arrondissement du tribunal d'Arezzo; Que cette exception de fait n'a point été proposée par l'appelant en première instance, et qu'ainsi elle n'a pu être suppléée par le juge qui était certainement compétent pour statuer en matière de succession: Dit qu'il a été bien et compétemment jugé. Du 9 mai 1810.-C. de Florence.

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2e Espice : (Couturier.) LA COUR Attenda, sur l'appel du jugement rendu le 1er mars 1821, par le tribunal de Thionville, et qui a rejeté le déclinatoire proposé par Couturier de Bouzonville, qu'il est certain que l'incompetence que l'on faisait résulter de l'art. 59, § 6, c. pr., n'était point matérielle et absolue, mais purement relative, ainsi que la cour l'a jugé en cas semblable par arrêt du 29 août 1818; que la juridiction du tribunal de Thionville a donc pu être prorogée; qu'elle l'a été en effet par le consentement de Couturier de Bouzonville, à plaider au fond, à l'audience du 11 avril; que les réserves par lui faites d'appeler du jugement de compétence du 1er mars, ne lui donnent aucun droit de revenir par appel contre le jugement; que Couturier aurait dù faire défaut lors du jugement du 11 avril, pour pouvoir plus tard appeler du premier jugement, pour cause d'incompetence; que la cour au surplus a déjà établi par plusieurs arrêts, qu'en matière d'incompétence ratione persona, la juridiction d'un tribunal se trouve fixée dès que l'on a plaidé au fond, et quelles que soient les réserves qu'on ait faites d'appeler du jugement sur le déclinatoire.

Du 4 août 1821.-C. de Metz, ch. corr.-M. Colchen, pr.

(2) Espèce: (Bastiole C. Dupin.)-Le 2 mars 1800, décès à Moz tauban, lieu de son domicile, de Paul Martin, laissant pour héritiers Eugène Martin et la dame de la Bastiole, ses enfants. Cette succession était encore indivise, lorsque, le 11 nov. 1802, Martin fils mourut à Paris, où il résidait depuis longtemps. Sa succession fut acceptée, sous bénéfice d'inventaire, par la dame Bastiole, sa sœur.- En 1812, la dame de la Bastiole fait nommer un curateur à la succession de son frère, et forme, contre ce curateur, une demande tendante à ce qu'il soit pro cédé au compte qu'elle doit rendre de son administration, comme héritière bénéficiaire, et préalablement à ce compte, à ce qu'il soit procédé à l'estimation des immeubles dépendants de la succession de feu Paul Martin, leur père commun, à l'effet de constater que, loin d'avoir rien à réclamer dans cette succession, Martin fils ou ses ayants-cause sont tenus d'y rapporter 54,857 fr., pour lesquels elle demande condamnation contre le curateur à la succession vacante.

Le 28 août 1812, jugem. du trib. de la Seine, qui porte que, pour déterminer ce dont la dame de la Bastiole doit rendre compte, en sa qua. lité d'héritière sous bénéfice d'inventaire d'Eugène Martin, il faut constater ce qui compose la succession de ce dernier; attendu que la succession de Paul Martin père, à laquelle ledit Martin fils avait été appelé pour moitié, n'a point été liquidée avant le décès de ce même Martin fils; attendu que, pour vérifier si réellement ce que celui-ci doit à la succession de son père, réduit sa part héréditaire, il est de toute nécessité de connaître la valeur réelle des immeubles dépendants de cette succession; ordonne que, par experts, chacune de ces successions sera estimée. Cette expertise a lieu et le rapport des experts est homologué le 5 juin 1815.

En 1816, les sieurs Dupin, créanciers de Martin fils, signifient leurs titres à la dame de la Bastiole. Le 14 mars, celle-ci les assigne devant le tribunal de la Seine, pour faire ordonner qu'il leur sera défendu d'exercer aucunes poursuites contre elle, sauf à eux à intervenir en l'instance pendante devant ce même tribunal. - Le 31 mai 1818, les sieurs Dupin, comme exerçant les droits de Martin fils, ont assigné cette dame devant le tribunal de Montauban, lieu de l'ouverture de la succession de Martin père, à fin de liquidation et partage de cette succession. -- La dame de la Bastiole demande le renvoi de la cause devant le tribunal de la Seine, par le motif que l'action des sieurs Dupin a le même objet que l'un des chefs de la demande de la dame de la Bastiole, celui tendant à la liquidation de la succession de Martin père. Le 28 juin 1819, le tribunal de Montauban, considérant qu'il n'y a dans les deux demandes ni même objet ni connexité, retient la cause.

autre tribunal d'arrondissement une incompétence ratione materia (Req., 27 avril 1837, aff. Villedieu, V. Exception).

82. Néanmoins, il a été jugé, en sens contraire, par la cour de Bordeaux, que, quand des mineurs sont intéressés dans la succession au partage de laquelle il est procédé devant un tribunal autre que celui de l'ouverture, l'incompétence du tribunal peut, dans l'intérêt des mineurs, être proposée après les défenses au fond, et même pour la première fois en appel (Bordeaux, 20 avril 1831, aff. Lynck, V. Succession).

83. Et la même cour a décidé encore que si l'un des cohéritiers, décédé pendant l'instance en partage, laisse des biens autres que sa part dans ceux qui sont l'objet de cette instance, c'est devant le tribunal de son domicile que le partage de sa propre succession doit être demandé, même quant à sa portion dans les biens au sujet desquels il existait déjà une instance en partage ouverte devant un autre tribunal, et encore bien que, relativement à cette portion, les copartageants aient d'abord consenti

Pourvoi en règlement de juges de la part de la dame de la Bastiole. -Elle soutient: 1° qu'il y a identité dans les demandes; 2° que le curateur à la succession de Martin fils, ayant consenti à ce que l'action fùt portée devant le tribunal de la Seine, les défendeurs sont, comme créanciers, non recevables à se plaindre. Ceux-ci répondent, sur ce point, que le consentement d'ailleurs non exprès, et résultant du seul silence du curateur, n'a pas suffi pour attribuer compétence au tribunal de la Seine et pour lier les créanciers.

Arrêt.

LA COUR; Considérant que la demande formée devant le tribunal civil de la Seine, par la dame de la Bastiole, contre le curateur à la succession vacante de Guillaume-Eugene Martin, son frère, avait le double objet de faire apurer son compte d'héritière bénéficiaire de son frère, et de parvenir à la liquidation de la succession de Paul-Daniel-Martin, leur père commun; que le curateur a consenti a plaider devant ce tribunal, sur cette demande qui a même été suivie de plusieurs jugements interlocutoires; qu'il a ainsi renoncé à plaider devant tout autre tribunal, à supposer qu'il eût le droit d'y demander son renvoi; - Considerant que la demande formée au tribunal civil de Montauban, contre la dame de la Bastiole, par les frères Dupin de Saint-André, comme exerçant les droits de Martin fils, leur débiteur, a pour objet de faire proceder aux compte, liquidation et partage de la succession du sieur Martin pere, devant les juges du lieu de l'ouverture de ladite succession; mais que cette demande a le même objet qu'un des chefs de la demande pendante devant le tribunal civil de la Seine, entre la dame de la Bastiole et le curateur à la succession vacante de son frère; que ce curateur qui représente le sieur Martin fils, ayant consenti à plaider devant ce tribunal, les sieurs Dupin de Saint-André, qui agissent comme exerçant les droits du sieur Martin fils, ne peuvent se refuser à plaider devant les juges légalement saisis de la liquidation et du partage de la succession du sieur Martin père; qu'ils ont même été assignés à cet effet devant le tribunal de la Seine, avant qu'ils eussent porté devant le tribunal de Montauban une demande qui se trouve connexe avec celle formée par la dame de la Bastiole, contre le curateur à la succession du sieur Martin fils; qu'ainsi, sous tous les rapports, la dame de la Bastiole a été bien fondée à décliner la juridiction du tribunal civil de Montauban, et à demander que le tribunal civil de la Seine fût compétent pour connaître de la demande formée par les sieurs Dupin de Saint-André; Par ces motifs, sans s'arrêter ni avoir égard au jugement rendu par le tribunal civil de Montauban, le 28 juin 1819, qui est déclaré nul et comme nou avenu, ainsi que tout ce qui a été fait en exécution d'icelui; - - Ordonne que les parties plaideront devant le tribunal civil de la Seine, sur la demande ormée par les sieurs Dupin de Saint-André, le 51 mai 1818.

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Du 15 avr. 1820.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Favard, rap.

(1) Espèce: (Savy-Binlou C. Durif de Cressac.)- En mess. an 7, Dereix-Desgraviers décéda dans l'arrondissement du tribunal d'Angoulème, laissant pour héritières une sœur germaine, Marie Dereix, veuve de Cressac, et trois sœurs consanguines; la première, pour les cinq huitièmes de la succession; les trois autres, pour les trois huitièmes restants. ← Pendant l'instance en partage, qui fut portée devant le tribunal d'Angoulême, la veuve Cressac décéda elle-même dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, avant que les biens de Desgraviers eussent été partagés, laissant à ses héritiers, en assez grand nombre, les cinq huitièmes encore indivis, et en outre le domaine de Lagrange.

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En exécution du jugement qui ordonnait le partage de la succession Desgraviers, Vedrenne, l'un des héritiers, fit signifier un acte dans lequel il établissait la liquidation ordonnée, ainsi que le partage, entre les ayants droit, des cinq buitièmes revenant à l'hérédité de la veuve de CresAprès avoir adhéré d'abord à l'homologation de cette liquidation, Savy-Binlou, autre héritier, s'y opposa, et demanda que toutes les opérations relatives au partage et à la liquidation de la succession de la veuve ressac, soit entre les divers héritiers, soit entre les créanciers, fussent

sac.

à procéder devant ce dernier tribunal. En cas pareil, il ne doit avoir qu'un partage de toute la succession du cohéritier défunt, et elle doit, même dans un intérêt d'ordre public, avoir lieu devant le tribunal de son domicile (Bordeaux, 19 mai 1835) (1). 84. Demandes intentées par des créanciers du défunt jusqu'au partage. Il importe de centraliser toutes les opérations relatives à la liquidation de la succession; et, d'un autre côté, c'est au lieu où cette succession est ouverte que doivent naturellement se trouver les titres qui peuvent servir à repousser les demandes formées contre elle; de là la disposition qui attribue compétence au tribunal de ce lieu pour les demandes intentées par les créanciers du défunt jusqu'au partage.

Cette disposition ne se trouvait point dans le projet du code, qui portait seulement que le défendeur serait assigné, « en matière de succession, sur les demandes entre héritiers et autres parties intéressées, jusqu'au partage inclusivement, et sur celles à fin d'exécution des dispositions à cause de mort, jusqu'au ju

renvoyées devant le tribunal de Ribérac, lieu de l'ouverture de la succession de la veuve Cressac. Le tribunal d'Angoulême, statuant sur les conclusions prises à cet égard par Savy-Binlou, contre Durif de Cressac et autres intéressés, les rejeta en ces termes :

« Attendu que toute demande en partage et liquidation d'une succession doit être portée devant le tribunal du domicile du défunt, d'après l'art 59 c. pr.; mais que la contravention à cet article de loi autorise le défendeur à proposer un moyen d'incompétence qui, d'après l'art. 169 du même code, doit être présenté avant toutes autres exceptions et défenses; - Attendu que, dans l'espèce, ce moyen d'incompétence a été couvert par toutes parties; qu'en effet la cause a été instruite, et qu'il a même été signifié, dans l'instance, une liquidation dans laquelle la part revenant à Marie Dereix, veuve Cressac, a été divisée et répartie entre les divers cohéritiers de ladite veuve Cressac; que des conclusions ont même été prises par les sieur et dame Savy, le 31 mars 1829, pour demander acte au tribunal de ce qu'ils s'en rapportaient à sa prudence sur l'homologation de ladite liquidation; qu'à la vérité, cette liquidation ne contient rien de définitif; mais que c'en est assez pour qu'aucune partie ne puisse aujourd'hui proposer d'incompétence ratione persona; - Par ces motifs, le tribunal déclare les sieur et dame Savy purement et simplement non recevables dans leur de mande; ordonne que les parties plaideront au fond. »>

Appel de Savy-Binlou. Le tribunal de Ribérac, disait-il, lieu de l'ouverture de la succession de Marie Dereix, est le seul devant lequel il soit permis de procéder au partage de cette succession: il y a d'autant moins de difficulté à renvoyer devant ce tribunal, que le tribunal d'Angoulême n'a pas été légalement saisi de la demande en partage des cinq huitièmes entre ceux qui y ont droit, puisque l'assignation introductive de l'instance portée devant ce tribunal avait pour objet le partage de la succession entre les héritiers de Desgraviers, sa sœur germaine, et ses trois sœurs consanguines, mais nullement la subdivision ultérieure qui devait être faite de la portion afférente à la première entre ses héritiers particuliers. de Cressac, intimé, répondait que la demande en renvoi était tardivement proposée, puisque déjà toutes les parties avaient accepté la juridiction des juges d'Angoulême. - Arrêt.

LA COUR;

Durif

Attendu qu'indépendamment de certains biens immeubles situés dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, la succession de la dame de Cressac se compose des cinq huitièmes recueillis par cette dame, dans l'hérédité du sieur Dereix-Desgraviers, son frère; - Attendu que la succession de la dame de Cressac s'est ouverte dans l'arrondissement du tribunal de Ribérac, Attendu qu'à la vérité le tribunal d'Angoulême était suffisamment nanti de la demande en homologation de la liquidation qui avait été signifiée dans l'instance, puisque les héritiers de Cressac, d'une part, et les époux Savy, de l'autre, avaient accepté la juridiction de ce tribunal, et que ce contrat judiciaire ne devait pas avoir moins d'autorité qu'une assignation où l'on aurait conclu au partage de la succession de la dame de Cressac; qu'ainsi, le premier moyen développé dans l'intérêt des époux Savy, doit être rejeté; - Attendu que la liquidation embrassait les cinq huitièmes de la succession dont on a déjà parlé; - Attendu qu'après avoir procédé au partage des cinq huitièmes devant la tribunal d'Angoulême, il aurait encore fallu s'occuper, devant le tribunal de Ribérac, du partage des autres biens délaissés par la dame de Cressac; qu'il est par conséquent démontré que la prétention du sieur de Cressac tend à faire partager partiellement la succession de la dame de Cressac, prétention qui, si elle était consacrée, entraînerait les abus les plus graves, et que l'on peut même considérer comme portant atteinte à l'ordre public; Par ces motifs, faisant droit de l'appel interjeté par les conjoints SavyBinlou, du jugement rendu par le tribunal de première instance d'Angoulême, du 22 avril 1855, met l'appel, ainsi que ce dont a été appelé, au néant; émendant, et faisant ce que les premiers juges auraient dù faire, déclare n'y avoir lieu de procéder devant le tribunal civil d'Angoulême. Du 19 mai 1855.-C. de Bordeaux, 4 ch.-M. Dégranges, pr.

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gement définitif, devant le juge de la succession. » La rédaction actuelle a été adoptée d'après les observations suivantes du Tribunat: «Que faut-il entendre par parties intéressées? Il ne peut s'agir que de pourvoir à trois espèces d'intérêts: 1° à l'intérêt des héritiers, respectivement considérés; 2o à l'intérêt des légataires, considérés respectivement aux héritiers; 3° à l'intérêt des créanciers du défunt. Les créanciers d'un des héritiers ne peuvent avoir plus de droits que lui. L'art. 882 c. civ. a d'ailleurs suffisamment garanti leurs droits. L'article du projet énonce expressément les héritiers et les légataires. Il ne resterait donc que les créanciers du défunt, qui alors seraient compris dans ces termes de l'article: et autres parties intéressées. Mais pourquoi ne pas employer des termes plus précis? Un autre motif, c'est qu'il est nécessaire de distinguer l'exercice des actions personnelles et l'exercice des actions réelles. Point de doute que les actions réelles, que des tiers croient devoir intenter, même avant le partage, ne doivent être portées exclusivement devant le tribunal de la situation de l'objet litigieux. — A l'égard des actions personnelles, il pourrait y avoir quelque doute, attendu que, dès l'instant du décès, les actions actives et passives se divisent de plein droit entre les héritiers. Cependant il est plus conforme à la justice, aux convenances, que, jusqu'au partage, le créancier ne soit pas obligé de poursuivre chaque héritier. Jusqu'au partage, la succession n'est encore qu'un être moral qui représente le défunt; c'est donc devant le tribunal du lieu où la succession est ouverte que les actions personnelles doivent être portées, tant que le partage n'est pas effectué : c'est là aussi que les béritiers auront plus de moyens et plus de facilités pour se défendre. »

(1) 1re Espèce :-(Dallard C. Gras.) Le 1er floréal an 13, décès de Gras, domicilié à Paris. Sa succession est acceptée, sous bénéfice d'inventaire, par la dame Dallard, sa sœur et son unique héritière; celle-ci était domiciliée à Montélimart, où se trouvaient également les immeubles de la succession. La dame Gras, veuve du défunt, assigne la dame Dallard, devant le tribunal de Montélimart, en restitution de sa dot et payement de ses reprises matrimoniales. La dame Dallard répond qu'en sa qualité d'héritière bénéficiaire, elle ne peut être assignée, ni devant le tribunal de son domicile, ni devant le tribunal de la situation des biens; elle demande son renvoi devant celui de Paris, lieu de l'ouverture de la succession. Le 11 février 1806, le tribunal de Montélimart accueille le déclinatoire, et se déclare incompétent. Appel par la veuve Gras. Le 21 août 1806, arrêt infirmatif de la cour de Grenoble, qui renvoie les parties devant le tribunal de Montélimart; « Considérant qu'il n'y a que les contestations contre ceux qui ont des droits à la succession, qui soient de la compétence du juge du lieu où la succession est ouverte, et encore cela n'a-t-il lieu qu'autant que le partage n'a pas été fait. Considérant que la dame Dallard était seule et unique héritière du sieur de Gras, son frère; que, conséquemment, il ne pouvait y avoir lieu à partage de la succession; que la veuve de ce dernier ayant une action mixte à exercer, elle avait eu le choix du tribunal; Considérant, d'ailleurs, qu'elle a une hypothèque légale sur les biens de l'hoirie situés dans l'arrondissement de Montélimart, etc. » Pourvoi en règlement de juges de la part de la dame Dallart. Elle fait observer que l'art. 5 de la loi du 26 ventôse an 4, reproduit dans l'art. 59 c. pr., saisit le tribunal de l'ouverture de la succession des demandes formées contre elle, parce que, jusqu'au partage, les biens de la succession ne sont pas confondus avec ceux des héritiers, et qu'il y a encore lieu à la distinction des patrimoines. Or, il y a les mêmes raisous, et plus encore, pour appliquer ce principe à une succession qui n'a été acceptée que sous bénéfice d'inventaire. En effet, l'héritier bénéficiaire n'est qu'un administrateur comptable (c. civ. 803); il ne confond pas ses biens avec ceux de la succession (802); c'est au greffe du tribunal de l'ouverture de la succession qu'il déclare ne l'accepter que sous bénéfice d'inventaire; cette déclaration n'a pas pour effet, comme le partage entre héritiers purs et simples, de faire reposer, sur lui personnellement, les actions actives et passives de la succession; il n'est personnellement tenu que de rendre compte ; ce compte ne peut lui être demandé que devant le tribunal de l'ouverture de la succession; ce n'est, par conséquent, que devant ce tribunal qu'il est obligé de répondre à une demande formée contre elle. Admettre qu'il puisse être assigné devant le tribunal de son domicile et devant tous ceux où sont situés des biens appartenant à la succession, ce serait l'exposer à plaider à la fois devant vingt tribunaux différents, à rendre autant de comptes, puisque chaque créancier a le droit de l'exiger, et à produire, en vingt endroits différents et à la fois, ses pièces justificatives. Un principe d'où découlent de telles conséquences est nécessairement faux. Arrêt.

LA COUR; Attendu que ce n'est que par exception au principe gé

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85. Le principe que les créanciers doivent citer les héritiers, avant le partage, devant le tribunal de l'ouverture de la succes. sion, est sans application lorsqu'il n'existe qu'un seul héritier. même bénéficiaire, et qu'ainsi il n'y a pas lieu à partage. Il ré sulte, en effet, de ces expressions de l'art. 59, avant le partago, que cet article ne s'applique qu'au cas où il existe plusieurs héritiers, et non à celui où il n'en existe qu'un seul. Peu importe, du reste, que cet héritier unique n'ait accepté que sous bénéfice d'inventaire la loi n'a fait nulle part de cette circonstance la base d'une exception aux règles générales de compétence (Req., 18 juin 1807; Bourges, 2 mai 1831) (1).

Il résulte également d'un arrêt de la cour de Paris, que le légataire universel, seul appelé à recueillir la succession du testateur, peut être assigné, par les créanciers de celui-ci, devant le tribunal de son domicile, quoique ce tribunal ne soit pas celui du lieu où la succession s'est ouverte : « Considérant, porte cet arrêt, que l'action intentée par la partie de Papelin contre celle de Maréchal, simple légataire universel, et n'ayant à procéder à aucun partage, n'est point dans le cas prévu par le § 6 de l'art. 59 c. pr. » (Paris, 26 fév. 1810, aff. Duplessis C. Demauperché. Conf. Riom, 6 janv. 1815, aff. Foucault C. Degain).

86. Enfin, il a encore été jugé, d'après la même règle, que lorsqu'il n'existe qu'un seul héritier même bénéficiaire, les demandes formées contre lui par les créanciers de la succession, même celle en reddition de compte de bénéfice d'inventaire, doivent être portées devant le tribunal du domicile de cet héritier (Req., 20 avril 1856) (2);

Et que la demande en séparation de patrimoines formée par les créanciers du défunt contre l'héritier unique de celui-ci, doit

néral, que des créanciers ne peuvent citer les héritiers, avant le partage, que devant le tribunal de l'ouverture de la succession; - Que cette exception ne peut être appliquée qu'au cas pour lequel le législateur l'a admise; que ce cas n'existe point dans l'espèce, puisque, l'héritier bénéficiaire étant unique, il ne peut y avoir lieu à partage, Statuant par voie de règlement de juges, déboute le demandeur des fins de sa requête.

LA COUR;

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Du 18 juin 1807.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, 1er pr.- Basire, rap. 2o Espèce: - (Normand C. Béthune.) Normand, porteur d'uno obligation de 4,500 fr., souscrite par de Béthune, l'a fait, après le décès de celui-ci, notifier à de Béthune-Sully fils, et héritier du défunt, avec commandement d'en payer le montant. - Sur l'opposition formée à ce commandement, Normand fait assigner son débiteur, en débouté, devant le tribunal d'Issoudun, dans l'arrondissement duquel de Béthune-Sully a son domicile. Ce dernier prétend que, n'étant héritier de son père que sous bénéfice d'inventaire, et la succession ayant été ouverte à Paris, c'est là que doivent être portées toutes les actions contre la succession. - Jugement qui accueille cette exception. — Appel. Arrêt. Considérant que l'art. 59 c. pr. civ. exige, il est vrai, que les demandes intentées par les créanciers du défunt, avant le partage, soient portées devant le tribunal du lieu où la succession est ouverte; mais que, dans l'espèce, l'intimé est seul héritier du défunt, ses coheritiers ayant renoncé à la succession; qu'il n'y a point, dès lors, de partage à opérer, et qu'ainsi les dispositions de l'art. 59 n'étant pas applicables, l'intimé a dû être assigné devant le tribunal d'Issoudun, qui est celui de son domicile; - Que la loi n'établissant aucune différence entre l'héritier pur et simple et l'héritier bénéficiaire, l'intimé excipe inutilement de son acceptation sous bénéfice d'inventaire pour établir le fondement de son exception d'incompétence; - Dit qu'il a été mal jugé, que la demande a été compétemment portée devant le tribunal d'Issoudun. Du 2 mai 1831.-C. de Bourges, 1re ch.-M. Mater, pr.

(2) Espèce : — (Périssé C. Puthod.) — En 1826, Line décède à Paris, lieu de son domicile, après avoir institué pour sa légataire universelle la dame Périssé, domiciliée à Oloron (Basses-Pyrénées). Cette dame accepte la succession sous bénéfice d'inventaire. En 1834, la damo Puthod, créancière du défunt, assigne la dame Périssé devant le tribunal d'Oloron, en reddition de compte de bénéfice d'inventaire. — La défenderesse oppose que c'est devant le tribunal de l'ouverture de la succession. que l'action doit être portée, et elle fait assigner en conséquence les créanciers du défunt devant le tribunal de la Seine, pour recevoir son compte.

Mais, le 18 nov. 1834, le tribunal d'Oloron rejette ce déclinatoire : «Attendu, d'une part, qu'aux termes de l'art. 59 c. pr., le défendeur doit, en matière personnelle, être assigné devant le tribunal de son domicile; Attendu qu'une action en reddition de compte est essentiellement personnelle, et que, dès lors, c'est avec raison que la dame Putbod a porté sa demande devant le tribunal de céans, qui est celui du domicile de la dame Périssé: -- Attendu, d'une autre part, que, d'après l'art.

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