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fournie, dans l'endossement d'une lettre de change, n'en change point le caractère, et ne peut dès lors faire obstacle à ce que l'accepteur soit poursuivi commercialement (Rej., 21 oct. 1825, aff. Marsault, V. no 194).-V. cependant Bastia, 4 janv. 1832, aff. Cagnazoli, no 193.

180. Du reste, une lettre de change, qui ne peut valoir comme telle, pour défaut d'énonciation de l'espèce de valeur fournie, n'en constitue pas moins, lorsque les signataires sont commerçants,

fraudes qui auraient pu dériver de la simple dénégation vague et générique d'une lettre de change tirée pour valeur reçue; — Qu'il suit de là qu'une lettre de change qui n'est conçue que dans ces termes n'est pas une véritable lettre de change, parce qu'elle ne contient point l'explication que la loi requiert pour l'essence d'une lettre de change;

Attendu, en fait, que l'effet dont est porteur la maison de commerce intimée, énonce simplement la valeur reçue, sans autre indication, el conséquemment il rentre dans la classe des obligations ordinaires ;-Que, dès lors, l'affaire n'a pu être de la compétence du tribunal de commerce; - Qu'on ne pourrait, pour soutenir, en l'espèce, la compétence des juges-consuls, s'étayer de la circonstance de l'endossement fait par celui au profit duquel l'effet a été tiré, que l'on qualifie de négociant, à la maison de commerce intimée, par la raison que ce transport n'a pu d'aucune manière déroger à la nature primitive de l'obligation, et d'ordinaire qu'elle était, la faire devenir commerciale, vu surtout que ni l'avocat Paul Miroglio, tireur, ni le notaire Pecchio, acceptant, ne sont point négociants; Qu'inutilement encore invoquerait-on la disposition des art. 636 et 637 c. com.; car l'exception introduite par ces articles ne s'applique qu'aux lettres de change, qui sont réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, savoir, dans les cas où il y a supposition, soit de nom, suit de qualité, soit de domicile, soit des lieux où elles sont tirées, ou dans lesquels elles sont payables, et le motif qui a pu déterminer le législateur à maintenir la connaissance aux tribunaux de commerce, toutes les fois qu'on n'aurait point proposé de déclinatoire, est vraisemblablement celui que lesdites lettres portant dans leur extrinsèque tous les caractères d'une lettre de change, les juges-consuls avaient pu d'abord être saisis de la juridiction, tandis qu'un effet tel que celui dont il s'agit, qui manque de l'un des caractères essentiels de la lettre de change, n'a pu être envisagé un seul instant comme un effet privilégié, et soumis, par sa nature, à la juridiction d'exception attribuée aux jugesconsuls; Déclare nul, comme incompétemment rendu, le jugement du tribunal de commerce dont est appel.

Du 13 mars 1811.-C. de Turin.

2o Espèce:- (Legorgeu C. Busnel.) Considérant que LA COUR ;le sieur Legorgeu propose le même déclinatoire, en l'appuyant sur un nouveau moyen; que, d'ailleurs, ce moyen nouveau, fût-il considéré comme demande nouvelle, serait recevable sur l'appel, d'après les art. 464, 470 c. pr.; Attendu que ce moyen consiste à soutenir que le titre dont il s'agit, ne contenant pas l'énonciation de la valeur fournie par le preneur au tireur, ne peut être considéré comme une véritable lettre de change; Attendu qu'il n'y a de véritable lettre de change que celle qui réunit toutes les parties exigées par l'art. 110 c. com.; Que cet article exige la mention de la valeur fournie; — Qu'à la vérité il ne dit pas expressément que ce sera la valeur fournie par le preneur au tireur; mais qu'il résulte de l'esprit de la loi, tel qu'on doit le reconnaître dans les art. 157 et 188 du même code, que nul ne peut être considéré comme propriétaire légal d'une lettre de change ou autre effet négociable, s'il n'est constant, par son titre même, qu'il en a fourni la valeur, et de quelle manière il l'a fournie, Que tel est le sens dans lequel on a toujours entendu les lois anciennes et nouvelles qui ont exigé mention de la valeur fournie...; – Infirme.

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Du 17 août 1825.-C. de Caen, 4o ch.-M. Gauthier, pr. 3o Espèce : (Debonnevalière C. Foubert-Delaise.) Une traite de 2,500 fr. est tirée par les frères Foubert-Delaise, négociants, sur Debonnevalière, non négociant: celui-ci accepte. A l'échéance, protêt. Debonnevalière, assigné devant le tribunal de commerce, se laisse, deux fois, condamner par défaut. Appel. Il soutient, alors seulement, que la traite ne doit être réputée qu'une simple promesse, parce qu'elle ne contient pas la nature de la valeur fournie; il décline, en conséquence, la compétence commerciale. - Arrêt.

LA COUR; Considérant que la juridiction commerciale est une juridiction d'exception, à laquelle il n'appartient de compétence qu'autant qu'il lui en est expressément attribué par la loi; - Que si l'art. 652 c. com. attribue la connaissance des contestations relatives aux lettres de change entre toutes personnes aux tribunaux de commerce, il est évident que cette compétence extraordinaire ne peut exister que dans le cas même prévu par cet article, savoir: lorsque l'acte réunit toutes les conditions nécessaires pour la validité d'une lettre de change, parce que, dans le cas contraire, les choses reprennent leur cours naturel, et la justice commerciale devient incompétente à raison de la matière, à moins que la lettre de change irrégulière n'eût pour cause un fait de commerce

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attributif par lui-même de juridiction spéciale, indépendamment de la forme de l'acte qui constate la créance à laquelle il a donné lieu;

Attendu que la traite souscrite par Riquier-Debonnevalière n'exprime pas la nature de la valeur fournie; que, dès lors, elle manque d'un des caractères constitutifs de la lettre de change et se trouve, par conséquent, réduite à l'effet d'une simple promesse de laquelle les tribunaux civils peuvent seuls prendre connaissance, puisque Debonnevalière n'est pas commerçant, et que ladite traite n'est point le résultat d'une opération de change ou de commerce; - Que, dès qu'il s'agit, dans l'espèce, d'incompétence à raison de la matière, cette incompétence peut être opposée, mème pour la première fois, sur l'appel; que l'art. 636 c. com. n'y fait nullement obstacle, attendu que cet article n'est applicable qu'aux lettres de change déclarées simples promesses, aux termes de l'art. 112, c'est-à-dire à celles qui réunissent tous les signes extérieurs, quoique fictifs, de la lettre de change, et qu'il ne s'étend point aux actes qui, comme celui dont il est question au procès, n'en comportant pas même le formulaire, n'offrent plus aucun motif pour déroger à l'ordre général des juridictions; Réforme.

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Du 31 janv. 1826.-C. de Caen, 4o ch.-M. Dupont-Longrais, pr. 4 Espèce: (Gilides C. Garrigues et Ferras.) - LA COUR; Attendu que l'obligation souscrite par le sieur Gilidé en faveur de Ferras, le 28 juin 1825, n'énonçant pas la valeur fournie, n'est ni une lettre de change, aux termes de l'art. 110 c. com., ni un billet à ordre, aux termes de l'art. 188 du même code; - Attendu que l'art. 112 c. com. ne disposant que pour les lettres de change, l'art. 657 du même code pour les lettres de change réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, et pour les billets à ordre, ces deux articles sont inapplicables à l'obligation consentie par Gilide; - Attendu, dès lors, que ledit Gilide ayant conclu, devant le tribunal de commerce de Castres, à son renvoi devant les juges compétents, c'est le cas de dire droit sur le déclinatoire par lui proposé. Du 2 mai 1826.-C. de Toulouse.-M. d'Ayguesvives, pr. (1) Espèce : (Heysch C. Baudino et Biodo.) Le 22 oct. 1810, société entre Heysch et Biodo. Heysch tire bientôt sur son associé une lettre de change de 1,000 fr. Il n'y est pas exprimé que la valeur en a été reçue. Acceptation de cette traite par Biodo, qui meurt. Ses frère et sœur lui succèdent. Présentation de la lettre de change. Refus de payement; protét. Le 4 mai 1811, assignation de Heysch par Baudino, porteur, devant le tribunal de commerce. Recours en garantie du tireur contre les héritiers Biodo, et demande en nomination d'arbitres pour procéder à la liquidation de la société. Il soutient ensuite, contre le porteur, que la lettre de change n'énonçant pas la valeur reçue, le tribunal de commerce est incompétent pour connaitre de la contestation. Les héritiers Biodo prétendent, de leur côté, que le tribunal de commerce est également incompétent, parce qu'il ne peut juger s'ils sont ou non héritiers; ils reconnaissent cependant avoir pris la qualité d'héritiers bénéficiaires. Le 30 mai 1811, jugement qui rejette le déclinatoire proposé par Heysch, le condamne à payer la lettre de change, et renvoie les parties devant qui de droit pour faire statuer sur les questions relatives à la société.

Appel par Heysch. Sur la demande principale, il persiste à soutenir l'incompétence du tribunal de commerce; sur la demande en garantie, il prétend que si le tribunal de commerce est compétent pour connaitre de l'action principale, il l'est également pour statuer sur l'action en garantie et en liquidation de la société, puisque les intimés, étant héritiers bénéficiaires, ont qualité pour paraître en justice. Baudino, le porteur, soutient qu'à son égard l'appel est non recevable, parce que l'objet de la demande n'excède pas 1,000 fr.; car on ne peut joindre à cette somme, ainsi que l'a fait l'appelant, les intérêts courus depuis le protêt et les frais de ce protêt. — Arrêt.

LA COUR; Considérant, sur la compétence, que, d'après les art. 651, 652 c. com., les juges-consuls peuvent connaître de toutes contestations entre négociants, relatives à des actes de commerce; Que la même loi range parmi les actes de commerce les obligations passées entre négociants, marchands et banquiers;- Qu'en l'espèce, la qualité de né gociant, tant par rapport à Heysch, tireur, que de Baudino, porteur, et de feu Jean Biodo, accepteur, n'étant point douteuse ni contestée, peu importe que l'effet dont il s'agit soit une véritable lettre de change ou un simple billet de promesse, pour établir la jurisprudence consulaire, dès que, dans un cas comme dans l'autre, il s'agirait d'une obligation passée entre négociants, dépendamment de la négociation qu'ils avaien entreprise:

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C. Bettendorff. Décis. analogue: Toulouse, 28 mai 1825, aff. Pomarède, V. Effets de com.). — Il suffit même que l'accepteur d'une pareille lettre soit commerçant au moment de l'acceptation pour qu'il ne puisse décliner la juridiction commerciale (Liége, 10 janv. 1815) (1).

181. La traite tirée à l'ordre du tireur lui-même, et à son domicile, endossée en blanc à un tiers, qui l'a transmise par endos régulier daté de la ville même où elle est payable, ne contient pas remise de place en place, et par conséquent constitue une simple obligation civile (Toulouse, 20 juin 1855, aff. Lissençon, V. Effets de com.; Paris, 6 nov. 1840, aff. Combarel, V. eod.).

Par suite, l'aval donné sur cette traite par un non-commerçant n'est pas de la compétence des tribunaux de commerce (même arrêt de la cour de Paris, du 6 nov. 1840).

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Ces tribunaux sont pareillement incompétents pour connaître d'une lettre de change à l'ordre du tireur lui-même, si elle n'a été endossée qu'après la date de son échéance. C'est ce que la cour de Bruxelles a jugé en ces termes : « Attendu que les effets datés du bois de Lessines, le 27 mars 1812, étaient à l'ordre du tireur lui-même; que jusque-là ils ne pouvaient pas avoir le caractère d'une lettre de change, et qu'ayant été endossés après la date de leur échéance ils ne portaient plus cette époque future de payement qui fait ainsi l'un des caractères essentiels d'une lettre de change, d'après l'art. 110 c. com.; Déclare que la cause a été incompétemment portée devant le tribunal de commerce. » (Du 17 janv. 1815, C. de Bruxelles, 2e ch., aff. X...) 182. Lorsqu'il y a contestation sur le caractère même de la lettre de change, et qu'aux termes de l'art. 112 elle est réputée simple promesse, parce qu'elle contient supposition, soit de nom, soit de qualité, soit de domicile, soit du lieu d'où elle est tirée ou dans lequel elle est payable, il faut alors distinguer, quant à la compétence du tribunal de commerce: si la lettre de change ne porte que des signatures d'individus non négociants, si elle n'est pas faite pour opérations de commerce, trafic, banque ou courtage, le tribunal est tenu de renvoyer devant le tribunal civil, s'il en est requis par le défendeur. Mais, si elle porte des signatures d'individus négociants et d'individus non négociants, ou seulement des

Considérant, sur la fin de non-recevoir, qu'aux termes de l'art. 646 du même code, l'appel d'un jugement rendu par les tribunaux de commerce n'est point recevable, lorsque le principal, comme en l'espèce, n'excède pas la somme ou la valeur de 1,000 fr.;- Qu'en vain l'appelant, pour former un excédant de ladite somme, voudrait y cumuler les frais du protêt et les intérêts depuis échus; car le protèt étant une sorte de commencement d'action qui se lie avec la demande judiciaire à laquelle il donne ouverture, les frais du protêt et les intérêts du principal échus depuis le protêt se confondraient tellement à ne pouvoir se rattacher au principal, ni prendre la nature des accessoires échus avant la demande judiciaire, pour ne former avec lui qu'une seule somme, comme dans les cas ordinaires, telle étant l'intelligence que les art. 644, 645 et 646 c. com. ont reçue par les préjugés de la cour régulatrice;- Que, cela posé, la cour serait dispensée d'entrer dans aucune disposition sur le fond; Considérant que la demande en garantie formée par Heysch contre les héritiers de Biodo, accepteur, n'ayant pour objet que d'être relevé du payement du montant de l'effet de commerce et accessoire dont est cas, rencontrerait le même obstacle pour être discutée en cette instance; Que, d'ailleurs, cette question n'ayant point encore été décidée par les premiers juges, elle pourra aisément être vidéo par-devant les arbitres dans l'arrangement des comptes sociaux, ainsi qu'il sera dit ci-après;

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Considérant, en ce qui regarde la société de brasserie de bière qui a éu lieu entre Heysch et feu Jean Biodo, que ce n'était pas le cas de renvoyer les parties par-devant le tribunal civil pour y régler la qualité d'béritiers dudit Biodo, selon l'art. 426 c. pr.; Car, quand même ils ne se seraient portés que comme héritiers bénéficiaires, rien n'empêcbait qu'en cette qualité ils ne pussent liquider les comptes de la société susdite; Qu'en effet, selon les art. 802 et suiv. c. civ., l'héritier bénéficiaire étant chargé de l'administration des biens de la succession, et élant tenu d'en rendre compte aux créanciers et légataires, il peut, en cette qualité, ester en justice, contester et payer les dettes héréditaires, même en jugement d'ordre, lorsqu'il y a des créanciers opposants, sinon acquitter les eréanciers et les légataires à mesure qu'ils se présentent; - Que, par conséquent, les premiers juges auraient dû passer outre, et pourvoir pour la nomination des arbitres, en conformité des art. 51 et suiv. c. com.; Par ces considérations, statuant entre Heysch et Baudino, dit le jugement du 30 mai dernier échu avoir été compétemment rendu par le tribunal de commerce de cette ville; Et en ce qui concerne le fond, déclare

-

premiers; si, quels que soient les signataires, elle est faite pour opération de commerce, le tribunal de commerce est compétent; mais il ne peut prononcer la contrainte par corps contre les individus non négociants, à moins qu'ils ne soient engagés à l'occasion d'opérations de commerce, trafic, banque ou courtage. C'est ce qui résulte des dispositions combinées des art. 636 et 637 c. com. Il faut reconnaître toutefois que la rédaction du premier de ces articles n'est pas exempte d'obscurité. « Lorsque, dit-il, les lettres de change ne seront réputées que simples promesses, aux termes de l'art. 112, ou lorsque les billets à ordre ne porteront que des signatures d'individus non négociants et n'auront pas pour cause des opérations de commerce, trafic, banque ou courtage, le tribunal de commerce sera tenu de renvoyer au tribunal civil, s'il en est requis par le défendeur.» Cet article contient deux dispositions bien distinctes, l'une relative aux lettres de change, l'autre aux billets à ordre. D'après la première, il semblerait qu'il suffit qu'une lettre de change soit réputée simple promesse pour que le tribunal puisse être dessaisi, encore qu'elle soit souscrite par des négociants, et faite pour opérations de commerce, etc. Mais cette interprétation serait fausse. La preuve en est dans l'art. 637, d'après lequel ces lettres de change ou ces billets à ordre,c'est-à-dire les lettres de change et les billets à ordre dont vient de parler l'art. 636, sont de la compétence des tribunaux de commerce, s'ils contiennent des signatures d'individus négociants et d'individus non négociants; à plus forte raison, si toutes les signatures sont de commerçants. Le même art. 657 veut que la contrainte par corps soit prononcée contre les signataires non négociants d'une lettre de change réputée simple promesse, s'ils se sont engagés pour opération de commerce, etc. Il y aurait donc inconséquence à déclarer le tribunal de commerce incompétent, par le motif que la lettre de change ne serait pas revêtue de signatures de négociants.

183. L'art. 636, comme on vient de le voir, ne s'occupe que des lettres de change réputées simples promesses en vertu de l'art. 112 c. com. On a élevé la question de savoir si, lorsqu'elles étaient souscrites par une femme non commerçante et regardées, à ce titre, comme simples promesses, aux termes de l'art. 113, la compétence du tribunal de commerce pouvait être déclinée. Mer

Heysch non recevable dans l'appel du jugement susénoncé; - Et, faisant droit entre Heysh et Biodo, décerne défaut contre ce dernier, et, pour le profit, en ce qui concerne la demande en garantie des poursuites exercées par Baudino contre Heysch, déclare celui-ci non recevable dans son appel; Et pour ce qui regarde les demandes concernant la société de la brasserie dont il s'agit, met ce dont est appel au néant; émendant, ordonne que les parties se pourvoiront en conformité des art. 5 et suiv. c. com.; condamne Heysch à l'amende, etc.

Du 1er août 1811.-C. de Turin.-MM. Creppi et Damarguerita, av.

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(1) Espèce: (Favechamps C. Souplet.) — N... tire une lettre de change sur Favechamps, fabricant à Visé, pour une somme dont il lui est redevable. Cette traite, passée à l'ordre de la veuve Souplet, est protestée faute de payement, et Favechamps est assigné devant le tribunal de commerce de Liége. Il décline la compétence, sur le fondement que la traite n'énonce pas la valeur fournie; qu'elle est donc réputée simple promesse, aux termes de l'art. 110 c. com.; qu'à la vérité il était commerçant à l'époque de l'acceptation; mais que pour qu'un billet souscrit par un commerçant soit censé fait pour son commerce, aux termes de l'art. 658 c. com., il faut que ce billet soit revêtu de toutes les formalités qui le constituent, et notamment qu'il énonce en quoi la valeur a été fournie. Jugement qui rejette le déclinatoire, et condamne Favechamps à payer le montant du billet. Signification, commandement à fin de saisieexécution. - Appel du jugement sur la compétence, signifié au domicile élu par le commandement. La veuve Souplet prétend que cet appel est nul pour n'avoir pas été signifié à sa personne ou à son domicile.-Arrêt. LA COUR; Attendu que l'appel ayant été signifié au domicile élu dans le commandement de vingt-quatre heures, qui précède toute saisieexécution, doit être déclaré valable, conformément à la disposition énoncée dans l'art. 594 c. pr.; Attendu qu'à l'époque de l'acceptation de l'effet de commerce dont il s'agit, l'appelant, qui a fait cette acceptation était fabricant de sucre indigène; qu'ainsi, dans tous les cas, ledit effet est un billet souscrit par un commerçant ou fabricant, qui, dès lors, es censé fait pour son commerce ou sa fabrique, puisqu'aucune autre cause' n'y est énoncée; d'où il suit que, d'après la disposition de l'art. 638 c. com., le tribunal de commerce était compétent; Sans avoir égard à la fin de non-recevoir, statuant au fond, met l'appellation au néant, etc. Du 10 janv. 1815.-C. de Liége.-MM. Fraiture et Hubert. av.

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in enseigne la négative, « attendu que, d'une part, l'art. 632 c. com. soumet généralement les lettres de change, entre toutes pertonnes, à la juridiction commerciale, et que, de l'autre, l'art.113 du même code n'òte pas à la lettre de change souscrite par une lemme ou une fille non négociante ou marchande publique le caractère (commercial) qui lui est propre, mais dit seulement que la signature de cette femme ou fille ne vaut, à l'égard de celle-ci, que comme simple promesse » (Rép., t. 16, p. 651).-Nous avons soutenu la même opinion dans la première édition de cet ouvrage, et nous croyons devoir y persister. En effet, l'art. 656 ne permet de décliner la juridiction consulaire que lorsque les lettres de change sont réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, et non lorsqu'elles sont réputées telles en vertu de l'art.113. C'est vainement, ce nous semble, qu'on prétendrait qu'il y a parité entre les deux cas, l'obligation ayant le même caractère dans l'un et dans l'autre ; de telle sorte que si l'art. 113 ne se trouve pas mentionné dans l'art. 656, on ne doit attribuer cette omission qu'à un oubli. On peut répondre d'abord que s'agissant d'étendre une juridiction exceptionnelle, il n'est pas permis de suppléer arbitrairement au silence de la loi; et, en second lieu, qu'il y a une assez grande différence entre les lettres de change réputées simples promesses à cause de l'une des omissions énumérées dans l'art. 112, et celles qui ne sont telles qu'à l'égard des femmes et filles non marchandes qui les ont souscrites. Les premières n'ont pas la forme intrinsèque et substantielle des véritables lettres de change; les secondes, au contraire, sont en elles-mêmes des lettres de change parfaites,

(1) 1re Espèce:- (Delarose C. Texandier.) · Deux lettres de change avaient été souscrites par la dame Delarose, ex-religieuse. Actionnée devant le tribunal de commerce par Texandier, porteur des lettres, la dame Delarose conclut à ce que le tribunal se déclarât incompétent, attendu que les lettres avaient été souscrites pour fails étrangers au commerce, et qu'elles ne portaient la signature d'aucun négociant. Jugement qui rejette le déclinatoire. Appel. Arrêt.

LA COUR; Considérant que les deux effets dont l'intimé est porteur ont été tirés de place en place; qu'ils sont datés de Bordeaux et tirés sur Henri Michel et Bordeau, négociants à Limoges; Qu'ils sont souscrits par l'appelante au profit de Fournier, et passés par ce dernier à l'ordre de intimé; que ces effets ont, par conséquent, la forme distinctive et constitutive de la lettre de change;-Considérant que le dernier paragraphe de l'art. 652 c. com. porte: « Entre toutes personnes, les lettres de change ou remises d'argent faites de place en place; » que l'art. 631 du même code déclare que les actes de commerce sont de la compétence des tribunaux de commerce; Que l'intimé, après avoir fait protester, faute de payement, les deux engagements dont il était porteur, a agi régulièrement, en traduisant l'appelante qui les avait souscrits devant le tribunal de commerce de Limoges;

Considérant que si l'art. 113 du même code porte que la signature des femmes et des filles non marchandes publiques, sur des lettres de change, ne vaut, à leur égard, que comme simple promesse, il en résulte seulement que les femmes ou filles non marchandes publiques ne sont point contraignables par corps, à raison des lettres de change par elles souscrites ; Mais il n'en résulte nullement qu'elles ne soient point justiciables des tribunaux de commerce; En effet, les art. 636 et 637 c. com. n'exceptent, quant à la compétence des tribunaux de commerce, que les lettres de change réputées simples promesses, parce qu'elles contiennent supposition, soit de nom, soit de qualité, soit de domicile, soit des lieux où elles sont tirées et où elles sont payables, exceptions prévues par l'art 112 du même code; Si le législateur avait entendu que les lettres de change signées par les femmes ou les filles non marchandes publiques, ne fussent point du ressort et de la compétence des tribunaux de commerce, il n'aurait pas manqué de faire la même exception relativement à l'art. 113: cette exception ne se trouvant point prononcée, il faut s'en tenir aux deux principes généraux établis par ce code : le premier, que les lettres de change sont réputées acte de commerce entre toutes personnes; le deuxième, que les tribunaux de commerce connaîtront, entre toutes personnes, des contestations relatives anx actes de commerce; sans avoir égard à l'appel pour incompétence, etc;-Dit avoir été bien jugé, mal appelé... etc..

Du 19 mai 1815.-C. de Limoges.

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qui rentrent par conséquent dans la compétence du tribunal do commerce, et qui entraîneraient, contre les négociants qui les auraient revêtues de leur signature, les mêmes effets que toutes les autres lettres de change. On conçoit, dès lors, que le législateur ait laissé aux tribunaux de commerce la connaissance de ces obligations commerciales de leur nature, tout en affranchissant les personnes du sexe, qui ne font pas habituellement le commerce, des rigueurs de la contrainte par corps.

Toutefois, la doctrine contraire est soutenue par Delvincourt, t. 2, p. 95, et par MM. Despréaux, no 467, et Orillard, no 386. Ils pensent que, dès que la lettre de change portant la signature d'une femme non marchande publique, ne vaut, à l'égard de celle-ci, que comme simple promesse, et ne constitue dès lors qu'une obligation civile, le tribunal de commerce se trouve par cela même incompétent pour en connaître (quand d'ailleurs la lettre de change ne porte pas en même temps des signatures de commerçants), sans qu'il soit besoin que cette incompétence, dérivant des règles générales sur les attributions des tribunaux consulaires, se trouve établie en outre par un texte de loi spécial. · Conf. M. Nouguier, t. 2, p. 176.

184. Les tribunaux sont également divisés sur la question: ainsi, d'une part, il a été jugé que la femme non marchande, signataire d'une lettre de change (ne portant aucune signature de commerçant) est justiciable du tribunal de commerce, qui ne peut néanmoins prononcer contre elle la contrainte par corps (Limoges, 19 mai 1813; Aix, 22 fév. 1822; Cass., 6 nov. 1843 (1); Toulouse, 19 mai 1820, aff. Dubois C. Resseguier; Req., 20 fév.

LA COUR; Attendu que les tribunaux de commerce connaissent, entre toutes personnes, des contestations relatives aux actes de commerce (c. com., 631, 652); que la loi répute acte de commerce les lettres de change, quelles que soient les personnes qui les signent et les endossent (c. com. 636, 657); d'où il suit que, quels que soient les signataires ou les endosseurs d'une lettre de change, les tribunaux de commerce sont saisis des contestations qui en naissent; - Attendu qu'il n'est qu'un cas

où ils soient obligés de renvoyer ces contestations aux tribunaux civils, c'est lorsque les lettres de change ne sont réputées, par leur essence, que simples promesses, aux termes de l'art. 112, c'est-à-dire, quand elles contiennent supposition de nom, de qualité, de domicile ou de lieu;-Attendu, en fait, qu'il n'est pas prouvé qu'il y ait eu aucune de ces suppositions dans la lettre dont il s'agit; - Attendu que, quoique la signature des femmes ou filles non marchandes publiques sur lettres de change ne vaille que comme simple promesse, la lettre qui en est revêtue ne cesse pas d'ètre lettre de change, et, par conséquent, soumise à la juridiction commerciale tout ce qu'opère le sexe du signataire est l'exemption de la contrainte par corps et de la solidarité, puisque l'art. 113 du code, qui s'occupe de ces lettres, n'en prononce pas la nullité, comme l'art. 114 pour celles souscrites par les mineurs non négociants; il ne dit même pas que la lettre de change ne sera réputée que simple promesse, comme au cas de l'art. 112, mais seulement et laxativement, que la signature des femmes et des filles ne vaudra que comme simple promesse, à laquelle la loi n'accorde pas le bénéfice de l'art 656; Confirme. Du 22 fév. 1822.-C. d'Aix.-M. Cappeau, pr.

5 Espèce: (De Vaux C. Bourgeois-du-Cherray.) - Les dames de Vaux et de la Morlière avaient souscrit, le 14 sept. 1827, payables à une année de date, au profit de Ribon, deux lettres de change de la valeur totale de 1,500 fr. en capital. — Bourgeois-du-Cherray, en élant devenu porteur, voulut, le 22 août 1838, c'est-à-dire plus de dix ans après leur date, en poursuivre le recouvrement. Il cita les dames de Vaux et de la Morlière devant le tribunal civil du Puy, pour voir dire qu'elles eussent à reconnaître ou à dénier leurs signatures et écriture, sinon voir tenir pour reconnues lesdites signature et écriture, et s'entendre condamner au payement des effets. Ces dames opposèrent un déclinatoire fondé sur la nature de leur obligation, et conclurent à être renvoyées devant le tribunal de

commerce.

28 juin 1839, jugement par lequel le tribunal retint l'affaire : « Attenda que les dames de Saint-Haon, seules signataires des lettres de change qui font l'objet de la demande, ne sont pas reconnues être ni négociantes ni marchandes publiques: Attendu qu'aux termes de l'art. 115 c. com., la signature des femmes et des filles non négociantes ou marchandes publiques, sur lettres de change, ne vaut à leur égard que comme simple promesse; Attendu qu'il résulte évidemment de ces expressions que le législateur a voulu formellement dépouiller de tout caractère commercial l'engagement des femmes et des filles non marchandes, contracté même sous la forme de lettres de change; qu'il n'y a et ne peut y 270ir, de leur part, dans ce cas, qu'une obligation purement civile, qui, par sa nature et dans ses effets, doit rester dans le droit commun et n'être soumise, par conséquent, qu'à la juridiction çivile et ordinaire; — Attendu que si,

1922, même affaire, M. Borel, rap.; Limoges, 21 mars 1838, aff. Fray C. Brigueil; Req., 30 janv. 1849, aff. Bancel, D. P. 49.1.59).

185. Et, d'autre part, au contraire, il a été décidé que, dans ce cas, le tribunal de commerce ne peut, sans abus de pouvoir, refuser de prononcer le renvoi requis par la femme ou fille non marchande (Bordeaux, 11 août 1826 (1); Limoges, 16 fév. 1855, aff. Tharaud, V. Acte de comm., no 199).

186. Les lettres de change souscrites par des mineurs non

d'après l'art. 651 même code, les tribunaux de commerce connaissent, entre loutes personnes, des contestations relatives aux actes de commerce; que si, d'autre part, l'art. 632 répute actes de commerce, entre toutes personnes, es lettres de change, cela ne peut s'entendre que des lettres de change réelles et valables comme telles, soit en la forme, soit au fond, et non pas de celles qui, déjà, par une disposition antérieure et précise du code, avaient perdu leur caractère distinctif, et ne pouvaient plus être considérées que comme de simples promesses; Attendu que, pour soutenir la ompetence exclusive du tribunal de commerce, on exciperait en vain de Tart. 636 qui ordonne le renvoi aux tribunaux civils des lettres de change réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, et qui garde le silence sur celles dont il est question dans l'art. 113; car, dans le premier cas, une disposition législative était nécessaire pour opérer ce renvoi, lorsqu'il était requis, puisque, malgré la supposition de nom, ou de qualité ou de lieu qui viciait la lettre de change, elle n'en conservait pas moins tous les caractères apparents de la véritable lettre de change, et, comme telle, était justiciable du tribunal de commerce; dans le second cas, au contraire, dès que le législateur avait posé en principe que la lettre de change signée par des femmes non marchandes ne valait, à leur egard, que comme simple promesse, c'est-à-dire comme simple engagement civil, il était inutile de prescrire le renvoi aux tribunaux civils ordinaires, qui seuls, de plein droit, pouvaient en être saisis, sauf le cas special et prévu de l'intervention des tiers; Attendu qu'il serait peu conséquent de vouloir que, dans l'hypothèse en question, la lettre de change, dégénérée en simple promesse, en conservât néanmoins un de ses effets les plus importants, celui relatif à la juridiction; qu'il est difficile de comprendre que, vis-à-vis de la même personne, elle puisse être tout à la fois et une lettre de change, un contrat de change, quant à la compétence du tribunal devant lequel on doit poursuivre la condamnation, et une simple promesse, un simple engagement civil, quant à l'exécution de la condamnation; que, de plus, restreindre l'effet de l'art. 113 au seul affranchissement de la contrainte par corps, en faveur des femmes su filles non marchandes publiques, signataires de lettres de change, ce serait reconnaitre que le législateur a inséré dans le code un article entier surabondant ou complétement inutile, ce qui ne saurait être, puisque déjà, par la loi du 15 germ. an 6, il avait décrété formellement que les femmes et les filles non marchandes ne pouvaient être contraignables par corps au payement des lettres de change qu'elles avaient signées, disposition qui a été renouvelée en termes exprès dans l'art. 2 du tit. 1 de la loi du 17 avril 1832 sur la contrainte par corps; et, comme dans la loi, point de redondance vicieuse, point de répétition sans utilité, sans motifs, on doit donc en conclure que l'art. 113 a une tout autre portée; Altendu, d'ailleurs, que les tribunaux civils ont la juridiction ordinaire el générale entre toutes personnes et en toute matière, tandis que les tribunaux d'exception, dont fait partie le tribunal de commerce, ne doivent connaitre que des contestations qu'une disposition législative spéciale et précise leur attribue, et que si des diverses décisions judiciaires, rendues jusqu'à présent et en sens contraire, il peut naître du doute sur la question à vider, il est plus prudent et plus sage de rester dans le principe général, plutôt que de se jeter dans l'exception; - Attendu, enfin, que la partie de Mathieu ne saurait se plaindre d'avoir été traduite devant une juridiction moins rapide dans ses formes et plus douce dans ses conséquences que celle devant laquelle elle demande à être renvoyée; qu'il y a d'autant plus absence d'intérêt de sa part, qu'un des chefs de la demande, celui de la reconnaissance des signatures, ne pouvait être porté que devant le tribunal civil, et qu'il lui importait, ce semble, de n'avoir qu'un procès au lieu de deux;-Par ces motifs, le tribunal rejette le déelinatoire, se déclare compétent,.... tient pour reconnues et sincères les Pignatures, etc. »-Sur l'appel des dames de Saint-Haon et de la Morlière, rret confirmatif de la cour de Riom, du 8 avril 1840, avec adoption pure A simple de motifs.

Pourvoi des dames de Vaux et de la Morlière, pour violation des art. 651, 632 c. com., et fausse application des art. 112, 113, 656, 637 c. com. Arrêt.

LA COUR; Vu les art. 113, 631 et 632 c. com.; Attendu qu'en régie générale, et d'après les art. 631 et 632 c. com., les tribunaux de commerce connaissent, entre toutes personnes, des contestations relatives aux lettres de change ou remises d'argent faites de place en place; --Attendu qu'en exceptant de la compétence commerciale les prétendues lettres de change auxquelles l'art. 112 refuse ce caractère, et qu'il répute simples promesses, parce qu'elles ne proviennent pas d'une remise d'argent réellement faite de place en place et régulièrement attestée, l'art. 656 du

négociants sont nulles à leur égard, sauf les droits respectifs des parties, conformément à l'art. 1312 c. civ. (c. comm. 114). Il a été jugé que si le souscripteur d'une lettre de change, dont l'état de minorité est reconnu, décline la juridiction consulaire, en soutenant que sa signature sur la lettre de change ne vaut, à son égard, que comme simple promesse, ce déclinatoire doit être accueilli (Toulouse, 24 août 1825) (2); et que, dans ce cas, le tribunal de commerce doit se déclarer incompétent, alors

même code garde le silence sur les lettres de change, qui, bien que provenant d'un véritable contrat de change, sont signées seulement par des femmes et des filles non négociantes ou marchandes publiques, et ne valent, à leur égard, que comme simples promesses, en vertu de l'art.115; Attendu qu'il résulte de ce silence que la loi n'a pas voulu déroger, dans les cas dont parle l'art. 113, aux principes généraux de la compétence, ni étendre à cet article la disposition que l'art. 656 a limitée aux cas de l'art. 112; - Attendu, en fait, que les demanderesses en cassation ont été assignées devant le tribunal civil du Puy, tant en reconnaissance des écritures qui auraient été apposées par elles au bas de deux lettres de change, qu'en condamnation du montant desdites lettres de change, avec intérêts et frais: - Attendu que l'arrêt attaqué, en rejetant le déclinatoire opposé par elles, tant en première instance qu'en appel, et en confirmant la condamnation es payement des lettres de change, prononcée par le tribunal civil de première instance, a méconnu les règles de sa compétence, et expressément violé les lois précitées; Casse, etc.

Du 6 nov. 1843.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Renouard, rap.Pascalis, av. gén., c. conf.-Nachet et Galine, av.

(1) (Bonneau C. Vieillefond.) — LA COUR; Attendu qu'aux termes de l'art. 113 c. com., la signature des femmes ou des filles non négociantes ou marcbandes publiques sur lettres de change ne vaut, à leur égard, que comme simple promesse; qu'il est reconnu par toutes parties que la veuve Bonneau n'est ni négociante ni marchande publique; que son engagement, ainsi dépouillé, par l'autorité de la loi, du caractère commercial qui autorisait le tribunal de commerce à en connaitre, elle a été fondée à demander son renvoi devant ses juges naturels, et le tribunal a commis un abus de pouvoir en refusant de prononcer ce renvoi et en la condamnant au payement de la lettre de change; - Attendu que c'est vainement que, pour motiver son jugement, le tribunal de commerce a excipé de l'art. 656, qui ordonne le renvoi aux tribunaux civils des lettres de change réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, et qui garde le silence sur celles réputées simples promesses, aux termes de l'art. 113; que tout ce qui résulte des dispositions bien entendues de l'art. 656, combinées avec l'art. 112, c'est que les lettres de change dont il est question dans cet article, et qui sont celles qui contiennent soit supposition de noms, soit de qualité, soit de domicile, soit de lieux d'où elles sont tirees ou dans lesquels elles sont payables, conservant toutes les apparences de véritables lettres de change, il fallait une disposition formelle de la loi pour les soustraire à la compétence des tribunaux de commerce, lorsque le renvoi en était requis, tandis que les lettres de change dont parle l'art. 113, et qui ne concernent que celles qui portent la signature des femmes ou filles non négociantes ou marcbandes publiques, étant dépouillées, par cet article, du seul caractère qui les constituait effet commercial, et ne pouvant plus valoir que comme simples promesses, rentrent de plein droit dans le domaine des engagements civils dont la connaissance ne peut appartenir qu'aux juges naturels des parties, et que, dès lors, il n'a pas été nécessaire, comme dans le cas de l'art. 112, d'une nouvelle disposition de la loi pour faire ordonner le renvoi de ces lettres de change aux tribunaux civils;-Reçoit la veuve Bonneau opposante envers l'arrêt par défaut du 30 août 1825, et, sur l'appel, émendant, annulle le jugement du 5 mars précédent, comme incompétemment rendu; renvoie les parties à se pourvoir ainsi que de droit.

Du 11 août 1826.-C. de Bordeaux, 4 ch.-MM. Duprat, pr.

(2) Espèce: (Dutert C. Konigs.) - Le 17 juin 1824, lettre de change de 1,400 fr. souscrite au profit de Konigs, par la dame et la demoiselle Rouillan, encore mineure, pour achat d'un piano. A l'échéance, la demoiselle Rouillan et Dutert, son mari, soutiennent que la lettre de change est nulle conime souscrite en minorité, et déclinent la compétence du tribunal de commerce, devant lequel Konigs les avait cités. Ce tribunal se déclare compétent et condamne les défendeurs. Appel par les époux Dutert. Arrêt.

LA COUR;-Attendu qu'aux termes de l'art. 114 c. com., toute lettre de change souscrite par un mineur est frappée de nullité, et se trouve, par voie de suite, réduite aux termes d'une simple promesse; que si la forme du titre rendait le tribunal de commerce compétent, il cessait de l'être à l'instant où on lui faisait connaître l'âge de l'un de ceux qui l'avaient souscrit; que, relativement à la dame Rouillan, le tribunal de commerce a bien jugé; mais que, quant à la dame Dutert, en statuant sur une lettre

même que le mineur est poursuivi conjointement avec d'autres signataires de la lettre de change valablement obligés (même arrêt).

l'opinion contraire, après avoir cherché à établir que l'incompëtence est matérielle et non personnelle, semblent-ils se réduire à soutenir que si le tribunal saisi n'est pas tenu de la prononcer d'office, du moins elle peut être proposée en tout état de cause. Mais il n'y a que deux sortes d'incompétence, celle qui est personnelle et doit être proposée à limine litis, et l'incompétence matérielle, qui non-seulement peut être proposée en tout état de cause, mais encore doit être suppléée par le juge. On ne connaît pas en droit une troisième espèce d'incompétence qui pourrait être présentée à toutes les phases du procès, sans que ce fut un devoir pour le juge de la déclarer d'office. Si donc la loi dispose que le tribunal de commerce ne se dessaisira qu'autant qu'il en sera requis par les parties, il faut nécessairement conclure que cette incompétence doit être proposée avant toute défense, et pour ainsi dire sur le seuil du prétoire. Telle est, au surplus,

187. Quel est le caractère de l'incompétence du tribunal de commerce, dans le cas prévu par l'art. 656, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit de lettres de change réputées simples promesses, aux termes de l'art. 112, ou de billets à ordre ne portant que des signatures de non-commerçants et n'ayant pas pour occasion des opérations de commerce? Cette incompétence est-elle absolue ou relative? L'exception qui en résulte doit-elle être proposée in limine litis sous peine d'être couverte? peut-elle être proposée pour la première fois en appel ou en cassation?-Sous l'ord. de 1673, l'incompétence de la juridiction consulaire pour connaître d'un billet à ordre souscrit par un non-commerçant, et n'ayant pas pour cause un fait de commerce, était absolue; les juges devaient la prononcer d'office (Cass., 14 oct. 1791) (1). —Aujour-l'opinion de MM. Delvincourt, Cours de droit comm., 2o édit., d'hui la disposition finale de l'art. 636, en n'astreignant le tribunal de commerce à prononcer le renvoi de l'affaire que s'il en est requis, ne permet pas de douter que l'incompétence dont il s'agit ne soit purement relative: aussi les partisans de

de change souscrite par une mineure, il a dépassé ses pouvoirs, et que sa décision doit être annulée;

Attendu que l'art. 473 c. pr. donne à la cour le droit d'évoquer, pour quelque cause que la décision des premiers juges soit annulée; qu'il suffit que, comme dans l'espèce, la cour puisse statuer sur le tout, par un seul et même arrêt;— Altendu, au fond, que toutes parties sont d'accord qu'un piano a été vendu par Konigs à la demoiselle Rouillan; que cette dernière tient encore le piano en sa possession; qu'il suffit de connaître la valeur dudit instrument pour pouvoir statuer sur-le-champ; que cette valeur est fixée non-seulement par la convention primitive faite avec la dame de Rouillan et sa fille, mais encore par le silence gardé par elles pendant une année, durant laquelle elles n'ont jamais réclamé contre le prix fixé le 17 juin 1824 ; qu'enfin le sieur Dutert, après avoir fait examiner le piano au bout de ce terme, alors que cet instrument avait souffert par suite des voyages dans le Gers, l'a évalué encore, et en a offert 1,200 fr.; d'où suit qu'il n'y eut pas de lésion dans la vente primitive; -Par ces motifs, disant droit sur l'appel de la dame Dutert, annule, en ce qui la concerne, le jugement du tribunal de commerce, et les poursuites qui l'ont suivi; évoquant, en vertu de l'art. 473 c. pr., annulant la lettre de change, condamne la dame Dutert à payer à Konigs la somme de 1,400 fr., avec les intérêts légitimement dus; condamne Kœnigs aux dépens exposés devant le tribunal de commerce, et en ceux occasionnés par les saisies, et condamne la dame Dutert aux entiers dépens de l'appel envers Konigs.

Du 24 août 1825.-C. de Toulouse, 1re cb.-M. Hocquart, pr.

(1) (Communeau C. Boucher-Colas.) LE TRIBUNAL; Attendu, 1° que, par l'art. 2, tit. 12, de l'ord. de 1673, conforme, en cette disposition, à l'art. 3 de l'édit de 1563, la compétence des juges-consuls est restreinte « aux billets de change faits entre négociants et marchands, ou dont ils devront la valeur, et ne peut avoir lieu entre d'autres personnes que pour lettres de change, où remise d'argent faite de place en place; » 2° que l'art. 3 du même titre leur défend de connaitre « des billets de change entre particuliers, autres que négociants et marchands, ou dont ils ne devront pas la valeur, voulant qu'en ce cas les parties se pourvoient par-devant les juges ordinaires, ainsi que pour de simples promesses;» et après qu'il est apparu, par la représentation du billet de 450 liv., souscrit le 14 nov. 1789, par Communeau, fermier de l'un des domaines que possédaient les bénédictins de la maison dite de BonneNouvelle, d'Orléans, dans les dépendances de Châteaudun, payable à Boucheron, procureur de ladite maison, ou à son ordre, que ledit billet est causé pour fermages: d'où il résulte que c'est un engagement ordinaire et nullement commercial; d'où il résulte aussi, par suite, l'incompétence absolue de la juridiction consulaire d'Orléans; Par ces motifs; Casse, etc.

·

Du 14 oct. 1791.-C. C., sect. cass.-MM. Dunoyer, pr.-Maleville, rap. (2) 1re Espèce: (N... C. N...) — Le porteur d'un billet à ordre, souscrit par plusieurs individus non négociants, les assigna au tribunal de commerce, où ils se laissèrent condamner par défaut. Plusieurs d'entre eux interjetèrent appel. — Nouvelle condamnation par défaut. Opposition; seulement alors ils soutinrent que le tribunal de commerce avait été incompétent pour les juger, attendu qu'ils n'étaient pas négociants et ils demandèrent à être renvoyés devant un tribunal civil. L'intimé répondit que ce déclinatoire était tardivement proposé en appel. Cependant, l'un des signataires qui n'avait pas appelé et qui avait payé le montant des billets, avait exercé son action récursoire sur ses cosignalaires, en les assignant devant le tribunal de commerce. Ceux-ci compaJurent, et requirent leur renvoi; le demandeur soutint que le tribunal,

t. 2, p. 490, et Pardessus, t. 4, p. 56; et cette doctrine est sanctionnée par de nombreux arrêts (Bruxelles, 31 juill. 1809; Paris, 16 août 1811; Metz, 12 avril 1820; Bruxelles, 20 sept. 1822; Paris, 1er déc. 1831 (2); Bruxelles, 17 mars 1812, aff.

ayant connu de l'action principale, devait connaître de l'action en garantie. - Le tribunal de commerce se déclara compétent pour connaître de l'action récursoire. Appel de ce second jugement. Arrêt (sur les deux appels).

LA COUR;- - Attendu qu'en supposant que les appelants eussent été fondés à décliner le tribunal de commerce de Mons, ils n'ont pas usé de la faculté qui leur est accordée par l'art. 636 c. com., de requérir leur renvoi, par où ils ont reconnu la compétence, et ne sont plus recevables à exciper d'incompétence en cause d'appel; - Attendu que le tribunal de commerce ayant été saisi de la cause d'où dérive l'action récursoire exercée contre les appelants, et même d'une condamnation commune aux appelants, ceux-ci ont été compétemment poursuivis devant le même juge; - Reçoit les appelants opposants à l'arrêt par défaut du 15 mai dernier; et, sans s'arrêter à l'opposition dont ils sont déboutés, ordonne que ledit arrêt sera exécuté selon sa forme et teneur, etc. Du 31 juillet 1809.-C. de Bruxelles.

2o Espèce: :(Poniatowska C. Normand.) - Le 9 mai 1809, la princesse Poniatowska, polonaise, souscrivit, au profit de le Normand, marchand, une traite de 6,474 fr. N'ayant point payé cette traite à son échéance, le Normand la fit assigner au tribunal de commerce, qui le 2 juill. 1811, la condamna, par corps, au payement, attendu que, la princesse étant étrangère, la loi du 10 sept. 1807 lui était applicable.

Appel par la princesse. Elle soutint: 1° que le tribunal de commerce avait été incompétent, puisque la contestation avait pour objet une lettre de change souscrite par une femme non marchande, et qui ne devait être considérée que comme simple promesse (c. com. 113); · 2o que c'était à tort qu'on lui avait appliqué la loi du 10 sept. 1807, car cette loi n'atteignait que les étrangers non domiciliés en France; or, elle y était domiciliée.

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3 Espèce (Mayer-Samuel C. N...) — La veuve Mayer-Samuel, assignée devant le tribunal de commerce, en payement d'un billet à ordre qu'elle avait souscrit, a décliné la juridiction de ce tribunal, sur le motif qu'elle n'était pas commerçante; que le billet n'était revêtu d'aucune signature de négociant, et qu'il était fait pour une cause étrangère au commerce. Ce déclinatoire est rejeté par jugement du 14 avril 1819; alors la veuve Samuel plaide sur le fond, et un second jugement, du 19 mai suivant, la condamne au payement du billet. Appel, par la veuve Samuel, de ces deux jugements. Arrêt.

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LA COUR; Considérant qu'à la vérité, les juridictions sont d'ordre public, et qu'il est de principe que, lorsqu'un tribunal est averti de son incompétence, à raison de la matière, il doit, d'office, se dessaisir de la connaissance de la cause, et qu'en pareil cas, les parties peuvent, en tout état de la procédure, proposer l'incompétence; mais qu'il n'en est pas ainsi lorsque l'incompétence n'existe qu'en raison des qualités per

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