Page images
PDF
EPUB

tions de nouvel œuvre, complaintes, actions en réintégrande, et autres actions possessoires fondées sur des faits également commis dans l'année;-2o Des actions en bornage et de celles relatives à la distance prescrite par la loi, les règlements particuliers et les usages locaux, pour les plantations d'arbres ou de haies, lorsque la propriété ou les titres qui l'établissent ne sont pas contestés; -30 Des actions relatives aux constructions et travaux énoncés dans l'art. 674 c. civ., lorsque la propriété ou la mitoyenneté du mur ne sont pas contestées; - 4o Des demandes en pension alimentaire n'excédant pas 150 fr., et seulement lorsqu'elles seront formées en vertu des art. 203, 206 et 207 c. civ. »Il convient d'examiner séparément chacune de ces dispositions.

§ 1.-Actions possessoires.

255. La disposition qui attribue aux juges de paix la connaissance de toutes les actions possessoires, ne fait que reproduire le texte de l'art. 10, no 2, de la loi de 1790, mais en le développant de manière à faire cesser à l'avenir plusieurs difficultés que faisaient naître quelques expressions de cette loi.

256. On a proposé à la chambre des députés, de déclarer que « dans les actions possessoires, l'indemnité réclamée règle seule la compétence et non la valeur de l'objet pour lequel la demande en maintien de possession est faite. » Mais cette proposition a été rejetée; et la loi décide, au contraire, que les juges de paix ne connaissent des actions possessoires qu'à charge d'appel. Par là se trouve tranchée une question sur laquelle la jurisprudence de la cour de cassation avait varié sous la loi de 1790. Le motif de la décision adoptée par le législateur de 1838 a été que les actions possessoires exerçant toujours une influence plus ou moins grande sur le sort de la propriété, il convenait de laisser toute espèce de garantie pour ces sortes d'actions. V. Act. posses.

257. Pour que les entreprises sur les cours d'eau soient de la compétence des juges de paix, il faut que l'action ait tous les caractères de l'action possessoire. (V. en ce sens Carré, no 397, et M. Foucher, no 258). — Une demande tendant à la répression d'un trouble possessoire, et, par exemple, d'une entreprise sur un cours d'eau, et au rétablissement des choses dans leur ancien état, ne cesse pas d'être de la compétence des juges de paix, quoique le demandeur ait aussi conclu à des dommages-intérêts à raison du préjudice causé par l'entreprise, ces dommages-intérêts n'étant que l'accessoire de la demande possessoire (Amiens, 3 juill. 1822, aff. Blattier, V. Act. poss., no 46).

258. Les entreprises commises dans l'année sur les cours d'eau paraissaient ne rentrer, sous la loi de 1790, dans la compétence des juges de paix, que lorsqu'il s'agissait de cours d'eau servant à l'arrosement des prés. La cour de cassation n'avait cependant pas attribué à ces mots un sens limitatif; elle avait jugé, au contraire, que les juges de paix devaient connaître des entreprises sur toute espèce de cours d'eau : « Attendu que l'art. 10, tit. 3 de la loi du 24 août 1790, loin de restreindre aux cours d'eau servant à l'arrosement des prés ou aux entreprises commises sur de tels cours d'eau la juridiction des justices de paix, s'étend au contraire à toutes les actions possessoires » (Req., 2 mars 1809, aff. Bardet, V. Action possess., ' 368; 24 janv. 1822, aff. Artur C. Ourry, M. Vallée, rap,; 30 déc. 1823, aff. Descuret C. Dalzou, M. Favard, rap.).

[blocks in formation]

LOUIS, etc.;-Considérant, en ce qui concerne la demande sur laquelle il a été statué par le jugement du 3 août 1823, qu'elle avait pour objet la possession d'un emplacement dont les sieur et dame Graillot prétendent être propriétaires; que ces sortes de demandes sont de la compétence de l'autorité judiciaire, et que, par conséquent, le conflit élevé par le préfet de la Drôme est à cet égard mal fondé ;- Considérant, en ce qui concerne l'ordonnance du 7 août 1823, qu'en prescrivant que les travaux dont il s'agissait fussent interrompus, le juge de paix de Saint-Vallier a mis obstacle à l'exécution des divers actes de l'autorité administrative, en

Mais cette décision rencontrait des contradicteurs. Elle est mise aujourd'hui hors de doute par les termes de la loà nouvelle. Il est désormais incontestable que toutes les contestations dérivant d'un fait commis dans l'année, soit par entreprise, soit autrement, sur les eaux courantes autres que celles déclarées dépendances du domaine public, sont de la compétence du juge de paix.-Quant aux difficultés qui s'élèveraient au sujet de ces dernières, c'est à l'autorité administrative qu'il appartient d'en connaître (c. civ. 644, 558; 1. 29 flor. an 10).

259. Il ne faut pas induire de ces mots : sur les cours d'eau, que la loi ait voulu interdire aux juges de paix la connaissance des actions relatives aux eaux mortes. Une solution contraire résulte de la disposition de notre article qui réserve à ces magistrats toutes les autres actions possessoires. Or l'action possessoire peut être intentée aussi bien à l'occasion de la possession d'un étang, d'une mare, d'une citerne, que de celle d'un ruisseau.

260. La loi nouvelle réserve expressément la compétence de l'autorité administrative dans les cas spécifiés par les lois et les | règlements. Ces cas seront indiqués au traité des Eaux.

261. Du reste, que la question du fond soit de la compétence de l'autorité administrative ou de l'autorité judiciaire, pour ce qui est de l'action possessoire, toutes les fois qu'il y a lieu de l'intenter, le juge de paix est seul compétent pour en connaître, cette action n'ayant pour objet que la constatation d'un fait, celui de la possession-Ainsi, il a été décidé que c'est au juge de paix et non à l'autorité administrative de connaître de l'action possessoire ayant pour objet : 1o la cessation de travaux exécutés au nom de l'autorité administrative sur un terrain que le demandeur prétend lui appartenir, et que le préfet qui a élevé un conflit soutient être une place publique (ord. cons. d'Ét. 18 fév. 1824) (1). Toutefois le juge excède ses pouvoirs en ordonnant que les travaux commandés par l'autorité administrative seront interrompus (même décision); — 2o La destruction d'une scierie établie sur un terrain qu'un acquéreur de domaines nationaux prétend être compris dans son adjudication (ord. cons. d'Ét., 26 juill. 1826) (2);-3° La cessation de travaux faits sur un terrain vicinal et qui, au dire du demandeur, ont pour effet d'établir une servitude d'écoulement d'eau sur un fonds inférieur à lui appartenant (Cass., 22 juin 1835, aff. Gelis, V. Action poss., no 597). 262. La question de savoir quelle influence la loi de 1838 doit avoir sur le système des actions possessoires est traitée à l'article Act. poss.; nous n'avons point à nous en occuper ici.

[blocks in formation]
[ocr errors]

263. Actions en bornage. Sous la loi de 1790, les juges ne connaissaient que des actions possessoires en déplacement de bornes; la loi nouvelle leur attribue, en outre, la connaissance des actions en bornage et de celles relatives à la distance prescrite pour les plantations d'arbres ou de haies, lorsque la propriété ou les titres qui l'établissent ne sont pas contestés. — Il est traité avec étendue du bornage et de la délimitation vis Bornage et Forêts, nos 224 et suiv.-On se borne à en parler ici sous le rapport de la compétence des juges de paix.

264. Il a été reconnu, lors de la discussion de la loi à la chambre des députés, que ces mots : lorsque la propriété ou les

vertu desquels ils avaient été entrepris: d'où il suit qu'à cet égard le conflit a été élevé régulièrement;

Art. 1. L'arrêté de conflit pris par le préfet de la Drôme, le 11 aoû 1823 est annulé relativement à la demande sur laquelle il été statué par le jugement du 3 du même mois. — Art. 2. Cet arrêté est confirmé relativement à la demande sur laquelle il a été statué par l'ordonnance du 7 du même mois. Art. 3. Ladite ordonnance est considérée comme non avenue, etc.

Du 18 fév. 1824.-Ord. cons. d'État.-M. Tarbé, rap. (2) (Desarcis C. Breysse.) CHARLES, etc.; Considérant, dans l'espèce, que l'instance n'est relative qu'à la possession du terrain dont il s'agit; que le juge de paix de Montpezat, en statuant sur l'action possessoire qui lui était soumise, n'a pas excédé ses pouvoirs ; rêté de conflit pris par le préfet de l'Ardèche, le 24 mars 1826, est annulé.

Du 26 juill. 1826.-Ord. cons. d'Ét.-M. de Broé, rap.

Art. 1. L'ar

titres qui l'établissent ne sont pas contestés, se rapportent également à chacune des dispositions qui les précèdent, c'est-à-dire tant aux actions en bornage qu'à celles relatives à la distance prescrite par les lois ou usages. Un membre demanda alors comment on pouvait supposer qu'un procès en bornage s'établirait, forsqu'il n'y aurait pas contestation sur le titre. « Lorsque le titre n'est pas contesté, répondit le rapporteur, et que les parties ne sont pas d'accord sur le lieu du bornage, chacun remet ses titres au juge de paix qui fait une visite des lieux ou qui ordonne que la borne sera placée à l'endroit déterminé par un expert; si l'on conteste le titre, alors ce sera une question de propriété, il faudra aller devant les tribunaux ordinaires. >>

265. Toute action en bornage doit désormais être portée devant le juge de paix, quand même le demandeur prévoirait que ca propriété ou son titre sera contesté; car il ne sera certain de la contestation que lorsqu'elle aura eu lieu devant ce juge. Toutefois, lorsqu'elle est jointe à une action en délimitation de propriété, la demande en bornage cesse d'être de la compétence du juge de paix; car, dans ce cas, il y a contestation sur la propriété. V. M. Foucher, nos 279 et 280.

[ocr errors]

266. L'action en bornage sort de la compétence du juge de paix, lorsque, n'y ayant pas de titre, les parties sont en contestation sur l'étendue respective de leurs héritages limitrophes (Req., 1er fév. 1842) (1). Cela résulte, en effet, de ces expressions de la loi lorsque la propriété ou les titres qui l'établissent ne sont pas contestés. Par ces mots, le législateur prévoit également le cas où il n'y a pas de titres et celui où il en existe. Dans la première hypothèse, il ne confère au juge de paix le droit de statuer sur l'action en bornage qu'autant que, à défaut de titres, les limites des propriétés respectives des parties sont re

[ocr errors]

(1) Espèce: (Olivier C. Truc.) - Olivier a fait citer Truc devant le juge de paix, pour voir ordonner qu'il serait procédé au bornage de eurs propriétés respectives, suivant la ligne divisoire qu'il indiquait. Truc a contesté cette ligne divisoire. Jugement qui ordonne l'accès des lieux. Au jour indiqué pour la visite, Truc oppose l'incompétence du juge de paix pour statuer sur la contestation de propriété par lui élevée. Mais le juge de paix, sans s'arrêter à cette exception, a procédé à l'audition des témoins produits par Olivier, et a posé ensuite les bornes d'après les résultats de l'enquête.

Appel. 17 mars 1841, jugement du tribunal de Grasse, qui annule, pour cause d'incompétence, la sentence du juge de paix, et ordonne la destruction des bornes plantées par ce magistrat : -(( Attendu, porte ce jugement, que le sieur Olivier et le sieur Truc, dès leur première comparution à l'audience tenue par le second suppléant de la justice de paix de Saint-Vallier, pour y faire statuer sur la demande formée par ledit sieur Olivier, ont réciproquement élevé des prétentions à la propriété d'une partie de leurs fonds respectifs, et n'ont invoqué ni l'un ni l'autre aucun titre d'après lequel les bornes pussent être posées; - Attendu que l'art. 6 de la loi du 25 mai 1838 ne place le bornage dans les attributions des juges de paix que lorsqu'il n'y a contestation ni sur la propriété du fonds ni sur les titres produits; que, dès lors, le second suppléant de la justice de paix de Saint-Vallier devait se déclarer incompétent, puisque la propriété était contestée; - Attendu que le juge, en ordonnant son transport sur les lieux pour procéder au bornage des propriétés des sieurs Olivier et Truc, en faisant cette opération malgré l'exception d'incompétence proposée par le sieur Truc et en se fondant uniquement sur des déclarations de témoins auxquelles Truc n'a pas adhéré, a excédé les bornes de sa compétence et méconnu les règles tracées dans la loi du 25 mai précitée, etc. » — - Pourvoi d'Olivier. - Arrêt. LA COUR; Attendu qu'aux termes de l'art. 6 de la loi des 25 mai6 juin 1838, la connaissance de l'action en bornage n'est dévolue au juge de paix que par une exception au droit commun, et seulement lorsque la propriété, ou les titres qui l'établissent, ne sont pas contestés; Et attendu que, dans l'espèce, il est constaté, par le jugement attaqué, qu'il y avait absence de titres et que les parties contestaient sur l'étendue respective de leurs héritages limitrophes, ce qui donnait évidemment lieu à une question de propriété, et, par conséquent, écarte la prétendue violation de la loi précitée; - Rejelte.

[ocr errors]

Du 1 fév. 1842.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Duplan, rap. (2) Espèce :- (Dumet C. Noël et cons.) - Dumet fut assigné en bornage, à la requête de Noël, son voisin. Celui-ci prétendait avoir souffert une diminution sensible dans sa propriété et alléguait que la contenance de celle de Dumet lui paraissait s'être accrue à son préjudice: il demanda, en conséquence, que le mesurage de cette dernière propriété fût fait et que l'excédant de mesure lui fût attribué. Dumet répondit qu'il n'était pas le seul propriétaire voisin de Noël; que le mesurage réclamé par le demandeur devait aussi s'appliquer aux autres propriétés limitrophes ; qu'en

connues par elles. Dans la seconde hypothèse, il faut que les titres produits ne soient pas contestés, en sorte que le juge do paix n'ait qu'à en faire l'application. La loi n'a pas voulu qu'en aucun cas, le juge de paix pût résoudre une question de propriété et c'est pourtant ce qui aurait lieu si on lui reconnaissait le pouvoir de fixer les limites de deux héritages qui ne sont précisées ni par la reconnaissance des parties ni par des titres avoués par elles. Sous la forme d'une action en bornage, on attribuerait ainsi à cette juridiction exceptionnelle une véritable action en revendication.

267. Il a été jugé qu'il suffit que la contestation de propriété soit élevée en termes exprès, quoique sans énonciation de motifs, pour que le juge de paix doive se dessaisir de l'action en bornage portée devant lui, attendu que l'appréciation de ces motifs est hors de la compétence du juge de paix, et qu'ainsi tout développement à cet égard est sans objet (Cass., 12 avr. 1843) (2). Mais nous pensons, au contraire, avec MM. Carou, no 318, et Curasson, t. 1, p. 369, qu'une simple allégation ne saurait avoir pour effet de dessaisir le juge de paix; qu'il faut que l'exception présente le caractère d'un moyen sérieux; et que si le juge de paix n'a pas le pouvoir d'apprécier les motifs de la contestation de propriété quant à la décision de la question au fond, il a du moins le droit et le devoir de les apprécier pour le règlement de sa compétence.-V. au surplus ce qui a été dit sur une question analogue vo Compét. adm., nos 246 et suivants.

268. Il résulte d'un arrêt récent que le juge de paix ne cesse pas d'être compétent pour procéder au bornage, bien que le défendeur réclame sa maintenue en possession d'une contenance excédant celle fixée par son titre, si d'ailleurs il n'élève aucune contestation sur les énonciations de ce titre, et si, en outre, il

---

effet, il ne suffisait pas qu'un excédant de mesure pût se manifester dans la parcelle de sa propriété riveraine de Noël, pour qu'elle dût être considérée comme étant le résultat d'une anticipation commise au préjudice de celui-ci, puisque Dumet ayant d'autres propriétés attenantes à celle à l'égard de laquelle le mesurage est demandé, une augmentation de contenance pouvait aussi bien avoir été prise sur ces dernières propriétés que sur celles de Noël. Le juge de paix n'accueillit pas ce système et ordonna une expertise et le mesurage de la seule propriété de Dumet. Sur cette sentence, celui-ci contesta les titres de propriété de Noël, opposa la prescription et déclina la compétence du juge de paix. Premier juge ment par lequel le juge de paix donna acte à Dumet de ce qu'il contesto les titres de propriété de son adversaire; second jugement par lequel le juge de paix, considérant la contestation des titres de propriété comme tardivement proposée, passe outre au mesurage ordonné; puis, par troisième jugement, il statue au fond.

Sur l'appel de Dumet, jugement du tribunal de Troyes, du 13 juin 1839, lequel, sans s'occuper de la contestation de propriété élevée et du motif par lequel le juge de paix avait retenu la connaissance de la cause, confirme sa sentence définitive. Pourvoi de Dumet, pour violation de l'art. 6, § 2, de la loi du 25 mai 1838. Arrêt.

[ocr errors]

LA COUR; - Vu l'art. 6, no 2, de la loi du 25 mai 1838; - Attendu que, dans l'instance pendante devant le juge de paix du canton d'Aix-en-Othe, entre les frères Noël et Dumet, ce dernier avait déclaré contester le titre et la propriété de Noël, et qu'il lui avait été donné acte par le juge de paix de cette déclaration; Que, dès lors, une question de propriété se trouvait engagée devant le juge de paix; - Qu'il importait peu que la contestation sur la propriété n'eût été déclarée que dans une seconde audience et après un jugement qui avait ordonné le transport sur les lieux contentieux; - Que, d'une part, aucune disposition de la loi n'oblige à proposer une semblable exception in limine litis; que, d'un autre côté, cette exception portant sur la juridiction du tribunal de paix, elle ne pouvait être couverte par aucun acte de procédure ou d'invait, même de son propre mouvement, déclarer son incompétence; struction, et que, dès l'instant où elle était produite, le juge de paix de

---

Attendu que c'est sans fondement que le jugement attaqué a considéré comme vague la contestation de propriété, lorsque cette contestation avait été soulevée en termes exprès, et que le juge de paix en avait lui-même donné acte; Qu'enfin, le défaut d'indication des motifs sur lesquels l'exception de propriété pouvait être appuyée, s'explique suffisamment par la considération que leur appréciation étant, comme la propriété ellemême, hors de la compétence du juge de paix, tout développement à cel égard était sans objet; - Qu'en décidant, dans de telles circonstances, que le juge de paix avait pu retenir la connaissance de la cause, le juge ment attaqué a formeliement violé les dispositions de la loi précitée, Par ces motifs; - Casse.

D1 12 avril 1843.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1 pr.-Barennes, rap.-Hello, av. gén., c. conf.-Lebon et Chambaud, av.

[blocks in formation]

269. A quelque phase de la procédure que les titres de propriété aient été contestés devant le juge de paix saisi d'une action en bornage, ce magistrat doit, même de son propre mouvement, se déclarer incompétent: il commet un excès de pouvoir, s'il passe outre au bornage, sous prétexte que l'exception d'incompétence résultant de la question de propriété aurait dû être proposée in limine litis (Cass., 12 avr. 1843, aff. Dumet, V. no 267).

270. Du reste, il appartient au juge de paix de statuer sur tous les débats qui surgissent au cours de l'opération du bornage, pourvu qu'ils ne portent ni sur la propriété ni sur le titre qui l'établit, comme lorsqu'il s'agit, par exemple, de déterminer le mode à suivre pour le bornage.

271. L'effet de la contestation sur le droit au fond n'est pas seulement d'obliger le juge de paix à surseoir au jugement de "'action en bornage jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le fond du droit par les tribunaux appelés à en connaître; il doit se déclarer incompétent et renvoyer pour le tout les parties devant qui de droit. Dans ce cas, en effet, il est rationnel que la compétence du juge de paix cesse entièrement, dès que la condition à laquelle elle était subordonnée, c'est-à-dire l'absence de toute contestation sur le droit de propriété, vient à manquer. Il est d'ailleurs tout naturel que le tribunal d'arrondissement, après avoir déter miné les droits respectifs des parties, ordonne de suite le placement des bornes; cette marche est plus prompte et plus simple que s'il était tenu de renvoyer de nouveau les parties devant le juge de paix pour faire procéder à cette opération. C'est ce que décident, avec raison, ce semble, MM. Carou, no 499, et Marc Deffaux, p. 109. Cependant M. Benech émet une opinion contraire, p. 176.-V.au surplus nos observations v° Bornage, no 26 et suiv. 272. Actions relatives aux distances prescrites pour les plantations. De même que les actions en déplacement de bornes, celles relatives à la distance prescrite pour les plantations d'arbres ou de haies ne rentraient, sous la loi de 1790, dans les attributions des juges de paix que lorsqu'elles constituaient des actions possessoires. Aujourd'hui, cette condition n'est plus nécessaire; les actions dont il s'agit sont de la compétence des juges de paix, alors même qu'elles seraient basées sur un fait remontant à plus d'une année, pourvu, d'ailleurs, que la propriété ou les titres qui l'établissent ne soient pas contestés.

273. D'après cela, il est évident que, lorsque les parties étant d'accord que les bornes existantes forment les limites de leurs propriétés, la contestation qui les divise porte seulement sur le point de savoir si la haie plantée sur l'immeuble de l'une d'elles est, relativement à l'immeuble contigu de l'autre, à la distance voulue par la loi, cette contestation, dans laquelle la question de propriété n'est nullement engagée, est du domaine de la justice de paix (Req., 21 août 1844, aff. Goutant C. Bourgeois, M. de Gaujal, rap.).

274. Mais la compétence de cette juridiction cesse, en cas de contestation sur les titres invoqués, alors même que cette contestation ne porte point sur la fixation de la ligne séparative des fonds des parties, mais seulement sur le point de savoir si l'une d'elles est, ou non, autorisée par ces titres, lesquels consistent en des actes de partage intervenus entre elles, à faire des plantations à une distance moindre que la distance légale (Cass., 20 juill. 1847, aff. Amiot, Voy. D. P. 47. 1. 243).

275. Quant au règlement de la distance à laquelle les propriétaires riverains des chemins publics peuvent planter sur le bord de ces chemins, soit des arbres, soit des haies vives, il appartient à l'autorité administrative.

276. C'est devant le juge de paix de la situation des biens que doivent être portées soit les actions en bornage, soit celles relatives à la distance prescrite pour la plantation des arbres. 277. Dans quelques localités, l'usage veut qu'un propriétaire

[merged small][merged small][ocr errors]

ne puisse établir de fossés sur son fonds qu'à une certaine distance du fonds voisin. En admettant, avec la cour de Dijon, que cet usage doive être respecté (Dijon, 22 juill. 1836, aff. Sigault, vo Servitude), il est du moins hors de doute que la contestation relative à la distance à observer pour l'établissement des fossés ne saurait être considérée comme rentrant par sa nature dans la juridiction des juges de paix, aucune loi ne leur ayant expressément conféré cette attribution. V. en ce sens M. Benech,

p. 283.

[blocks in formation]
[ocr errors]

· Actions relatives aux travaux énoncés dans l'art. 674 c. civ.

278. L'art. 674 c. civ. dispose que « celui qui fait creuser un puits ou une fosse d'aisance près d'un mur mitoyen ou non ; celui qui veut y construire cheminée ou âtre, forge, four ou fourneau, y adosser une étable, ou établir contre ce mur un magasin de sel ou amas de matières corrosives, est obligé à laisser la distance prescrite par les règlements et usages particuliers sur ces objets, ou à faire les ouvrages prescrits par les mêmes règlements et usages, pour éviter de nuire au voisin. » Les actions relatives aux constructions et travaux énoncés dans cet article, ont été déférées, comme on l'a vu, par la loi de 1838, aux juges de paix lorsque la propriété ou la mitoyenneté du mur ne sont pas contestées.-V. Servitude, Travaux publics, Voirie.

279. La loi, par cette disposition, n'a-t-elle entendu attribuer aux juges de paix que les actions fondées sur l'art. 674, celles tendant à faire appliquer aux constructions et travaux mentionnés dans cet article, les prescriptions des usages ou règlements; ou bien a-t-elle voulu soumettre à ces magistrats toutes les actions relatives à ces travaux et constructions, et, par exemple, les demandes en indemnité du préjudice qui peut en résulter, alors même qu'on s'est conformé pour leur exécution aux mesures exigées par les règlements ou usages locaux? La première interprétation est admise par M. Foucher, qui décide en conséquence que l'action en indemnité pour dommages causés malgré l'observation des règlements, n'ayant pas sa base dans l'art. 674 c. civ., mais bien dans l'art. 1382, n'est de la compétence du juge de paix que dans les limites de l'art. 1 de la loi, c'est-àdire lorsqu'elle n'excède pas 200 fr. --L'opinion contraire est néanmoins plus conforme à la lettre de la loi qui défère aux juges de paix toutes les contestations relatives aux travaux énoncés dans l'art. 674, ce qui semble comprendre toutes les difficultés qui peuvent surgir à leur occasion. C'est aussi l'opinion de M. Masson, no 260 de son Commentaire; et M. Carou décide pareillement, no 529, que la demande en réparation du préjudice occasionné par ces travaux est indistinctement de la compétence du juge de paix, soit quand elle se trouve formée accessoirement à l'action en exécution des dispositions de l'art. 674, soit quand elle est formée principalement.

280. Il est des travaux autres que ceux énoncés dans l'art. 674 c. civ., qui exigent, de même que ceux-ci, des mesures de précaution. Mais la disposition de notre article ne saurait être appliquée à des contestations concernant des travaux dont l'art. 674 ne fait pas mention.

281. Il ne faut pas confondre les actions relatives aux constructions énoncées dans l'art. 674 c. civ., avec celles tendantes à régler l'exercice du droit de mitoyenneté d'un mur. Dans le premier cas, il s'agit seulement de la distance et des travaux intermédiaires requis pour ces sortes de constructions; dans le second, il est question de la propriété même du mur mitoyen. De ces deux classes d'actions, la première seule rentre dans les attributions du juge de paix. Aussi a-t-il été décidé que ce n'est point à ce magistrat, mais au tribunal civil à statuer sur la demande en suppression d'une cheminée que l'un des copropriétaires d'un mur mitoyen y a fait pratiquer sans le consentement de l'autre (Bastia, 8 fév.1840) (1).

282. Ces expressions restrictives: lorsque la propriété ou

sait pas aux droits de son voisin. — Assignation de la part de Louis Ta vera devant le tribunal civil d'Ajaccio pour faire ordonner le rétablisse ment des lieux. Une expertise est ordonnée, de laquelle il résulte que le mur mitoyen a une épaisseur de 58 centimètres, et que l'enfoncement

la mitoyenneté du mur ne sont pas contestées, signifient que la compétence du juge de paix ne cesse pas lorsque celui des propriétaires qui entreprend les travaux dont parle notre article, reconnaît soit le droit de mitoyenneté, soit le droit exclusif de propriété de son voisin sur le mur auquel doivent être adossés les travaux; mais que cette compétence cesse lorsqu'au contraire celui qui veut faire les travaux se prétend seul et unique propriétaire du mur, et que cette prétention est combattue par le voisin. Il faut remarquer, en effet, que celui-ci, dans le cas où il ne réclamerait aucun droit de propriété ou de mitoyenneté, ne serait pas recevable à se plaindre des travaux.

283. Si, sans contester le droit de propriété ou de mitoyenneté du voisin, celui qui a fait effectuer les constructions prévues par l'art. 674, prétendait avoir acquis par titre ou prescription le droit de se dispenser des travaux de précaution auxquels veut l'obliger le demandeur, cette exception aurait pour effet, suivant M. Carou, no 625, de faire sortir la contestation de la compétence du juge de paix, attendu, dit cet auteur, « que la loi n'a entendu attribuer à ce magistrat que les difficultés relatives aux distances à observer, à la nature des travaux à faire pour ne pas nuire au voisin, à l'exécution, en un mot, de l'art. 674, mais non celles relatives à des droits particuliers résultant, en faveur du défendeur, d'un titre ou de la prescription; ne s'agissant plus, dans ce dernier cas, de l'application de l'art. 674, l'affaire prend le caractère d'une contestation ordinaire qui sort, par sa nature même, des attributions du juge de paix. » Cependant, cette solution n'est pas à l'abri d'objections assez graves. S'il ne faut pas étendre arbitrairement la juridiction des justices de paix, il ne faut pas non plus la restreindre en deçà des limites que la loi lui assigne. Or, dans l'espèce en question, la contestation est relative à des travaux de la nature de ceux énoncés dans l'art. 674; d'autre part, aucun débat ne s'élève sur la propriété ou la mitoyenneté du mur; donc les deux conditions auxquelles seules la loi subordonne la compétence du juge de paix se trouvent remplies; donc le procès est de son ressort. C'est le cas d'appliquer la maxime que le juge de l'action est juge de l'exception.

§ 4.

- Demandes de pensions alimentaires. 284. Le dernier paragraphe de l'art. 6 a été vivement critiqué à la chambre des pairs. Il conférait, disait-on, aux juges de paix une attribution exorbitante. La position de ces magistrats n'était ni assez élevée ni assez indépendante pour qu'ils pussent prononcer avec impartialité sur des demandes de la nature de celles dont il s'agit. On a répondu, avec raison, qu'il convient de soumettre les actions alimentaires à un tribunal domestique « qui ait le moins de retentissement possible, parce qu'il naît de ces procès un scandale qu'il faut éviter... Il arrive souvent que l'extrême misère d'un père le prive de porter à la ville un procès qui est dicté par des besoins supérieurs. Le juge de paix, qui est le juge du lieu, qui connaît la situation des familles, fera, dans cette situation, entendre de bonnes paroles; on se rendra à son avis, il n'y aura point de scandale, point de jugement; et, en

pratiqué par Pascal Tavera n'est que de 14 centimètres. En conséquence, jugement qui, « vu l'art. 662 c. civ., et attendu que le demandeur n'éprouve aucun préjudice, le déboute de la demande sans préjudice de ses droits de pratiquer également de son côté dans le mur mitoyen tout enfoncement qu'il croirait utile. » — Appel de Louis Tavera.

On soutient, dans son intérêt, que l'art. 662 c. civ. ne va pas jusqu'à permettre de pratiquer une cheminée dans le corps du mur mitoyen; que les art. 657 et 674 font suffisamment connaître qu'on peut seulement adosser une cheminée en faisant les ouvrages nécessaires, mais jamais la construire dans le mur même. Subsidiairement l'appelant demande à prouver, au moyen de nouveaux experts, qu'en l'état des lieux, il ne pourrait plus lui-même pratiquer aucun enfoncement de son côté, soit pour construire une cheminée, soit pour faire un placard. — L'intimé oppose une fin de non-recevoir fondée sur ce que la demande aurait dû être portée devant le juge de paix, d'après la loi du 6 juin 1838, et que par suite le jugement de première instance devait être réputé rendu en dernier ressort. Au fond, il soutient le bien jugé des premiers juges.-Arrêt (ap. un long délib. en la ch. du cons.).

LA COUR; Attendu que si l'art. 6, §3, de la loi du 6 juin 1838, attribue aux juges de paix la connaissance des actions relatives aux constructions et travaux énoncés en l'art. 674 c. civ., il ne s'ensuit pas que le juge de paix soit compétent pour connaître des contestations qui s'élè

supposant même qu'il y ait jugement, point d'appel, soyez-en sûr, celui qui aura refusé des aliments à son père, et qui aura été condamné par le juge de paix à lui payer une pension alimentaire de 100 fr., ne se résoudra pas à appeler, à aller devant les tribunaux porter en appel le scandale de ses refus. >>

285. Deux conditions sont indispensables pour qu'une demande en pension alimentaire puisse être compétemment portée devant le juge de paix: 1° que cette demande n'excède pas 150 fr.; 2° qu'elle soit formée en vertu de l'un des art. 205, 206, 207 c. civ. 286. Les demandes en pensions alimentaires sont de la compétence des juges de paix, lors même qu'elles sont formées par ou contre des enfant naturels (l'art. 205 ne distinguant pas entre les enfants légitimes ou naturels), à moins qu'il n'y ait contestation sur la qualité d'enfant naturel, auquel cas il s'élève une question préjudicielle dont le juge de paix ne peut connaître.

287. Quant aux demandes formées par ou contre des enfants adoptifs, M. Foucher les considère comme n'étant point comprises dans la disposition limitative de notre article, attendu qu'elles ont pour fondement, non l'art. 205, mais l'art. 349 c. civ. Pour nous, nous pensons que, dès que l'existence ou la validité de l'a doption n'est pas contestée, le juge de paix est compétent.

288. Que faut-il décider par rapport aux demandes qui seraient formées par des enfants adultérins ou incestueux? « A leur égard, dit M. Foucher, no 319, le droit aux aliments est fondé, non sur les art. 205, 206 et 207, mais bien sur les art. 763 et 764, qui se compliquent de questions successorales et de reconnaissances dont l'examen est interdit aux juges de paix. » Mais lorsque la qualité d'enfant adultérin ou incestueux, étant reconnue par un jugement, la demande alimentaire se présente dégagée de toutes difficultés préjudicielles, sur quels motifs peut-on en enlever la connaissance à la justice de paix?

289. Nul doute que les actions alimentaires formées par les conjoints ou les frères et sœurs entre eux, par les donateurs contre les donataires, etc., ne soient hors des attributions du juge de paix.

290. En ce qui concerne les alliés, ce magistrat n'a juridiction que pour statuer sur les demandes formées par les beauxpères et belles-mères contre leurs gendres ou belles-filles, et réciproquement. - - Quant à la signification de ces mots beaupère, belle-mère, belle-fille, ce n'est point ici le lieu de la déterminer; on peut consulter à cet égard, ainsi que pour la solution des questions diverses que soulèvent les art. 205, 206 et 207, le mot Mariage où ces difficultés sont examinées avec détail.

291. Le juge de paix peut-il ordonner que celui qui doit des aliments recevra dans sa demeure, nourrira et entretiendra le parent auquel les aliments sont dus? M. Foucher admet l'affirmative, quoiqu'il s'agisse, dans ce cas, d'une obligation indéterminée. « Prétendre le contraire, ce serait, dit-il, aller contre le but de la loi, car les art. 210 et 211 c. civ. ont autorisé les tribunaux à rendre une pareille décision, pour venir surtout au secours des personnes peu fortunées qui ne pourraient payer la pension alimentaire; et c'est spécialement dans ce cas que l'in

vent entre les propriétaires d'un mur mitoyen; qu'il ne faut pas confondro l'action possessoire résultant du préjudice qu'éprouverait l'un des voisins, par suite de certaines constructions que l'autre voudrait faire près ou à côté d'un mur dont il aurait même la propriété exclusive, avec l'action immobilière tendante à régler l'exercice du droit de mitoyenneté ; que, dans le premier cas, il s'agit seulement de la distance et des travaux intermédiaires requis pour ces sortes de constructions, ainsi que le porte la rubrique de la section que ledit art. 674 compose à lui seul. Dans le second cas, au contraire, il est question de la propriété même du mur mitoyen, pour laquelle le législateur a eu soin de faire exception par la disposition finale du même art. 6, invoqué par l'intimé; -- Qu'ainsi c'est à tort que celui-ci prétend que la demande de l'appelant, qui lui conteste le droit de pratiquer une cheminée dans le mur mitoyen, aurait dû être portée devant le juge de paix, et que par suite le jugement rendu par le tribunal de première instance est en dernier ressort; Rejette la fin de non-recevoir; Et avant dire droit au fond, sauf et sans préjudice des droits et exceptions des parties, ordonne que par des experts il sera procédé à reconnaître si l'appelant peut ou non de son côté pratiquer dans le dit mur mitoyen une cheminée, placard ou toute autre commodité, dé pens réservés.

-

--

Du 8 lév. 1840.-C. de Bastia.-MM. Galeazzini, f. f. de pr.-Giordani, rap.-Sorbier, 1er av. gén., c. conf.-Suzzoni et Benigni, av.

rervention paternelle et de famille du juge de paix est efficace. » Cette solution est incontestable pour le cas où le demandeur a réclamé, soit simplement une pension annuelle n'excédant pas 150 fr., soit alternativement, ou cette pension ou le droit d'être reçu et nourri dans la maison du défendeur. Mais si la demande ne contenait que cette dernière conclusion, il est évident qu'elle serait indéterminée, et, à ce titre, hors de la compétence du juge de paix.

292. Il appartient à ce magistrat, quand la pension réclamée n'excède pas 150 fr. par an, soit de déterminer dans quelles proportions elle doit être payée par ceux qui la doivent, soit de décider si, à raison de circonstances survenues, il y a lieu d'en modifier ou d'en faire cesser le payement.

293. Lorsqu'un seul des enfants a été actionné par le père, et qu'ayant omis d'appeler ses frères en garantie, il a été condamné seul au payement d'une pension alimentaire, peut-il, après la condamnation, assigner ses frères par action principale devant le juge de paix à fin de répartition de la pension? L'affirmative est, avec raison, enseignée par M. Carou, no 242, non pour le cas où la pension a été fixée proportionnellement aux facultés du fils (car alors il serait sans action contre ses frères), mais pour le cas où elle a été fixée en raison des besoins réels du père. « La demande du fils contre ses frères se lie essentiellement, dit très-bien M. Carou, à celle précédemment formée contre lui. Puisque le juge de paix en eût pu connaître par action en garantie, pourquoi ne le pourrait-il pas par action principale ? Les mêmes raisons de convenance et de morale qui ont fait attribuer compétence au juge de paix pour connaître de la demande du père, militent pour déférer celle du fils contre ses frères à la même juridiction. »>

294. C'est devant le juge du domicile du défendeur que doivent être portées les demandes de pensions alimentaires. ART. 6.-De la prorogation de la compétence des juges de paix. 51. Prorogation légale (demandes reconventionnelles ; demandes réunies dans la même instance).

Paul 200 fr., et Paul 200 fr. à Pierre, le juge de paix jugera; ce sont deux procès, sur chacun desquels il est compétent. - II jugera par un seul jugement et à la suite d'une même instance, parce que deux procédures multiplieraient sans nécessité les frais, et parce que du conflit des prétentions opposées, naît la nécessité de régler entre les parties un compte dont la discussion et l'apurement s'opéreront plus convenablement par un juge unique.-L'art. 7 s'occupe d'abord des demandes reconventionnelles, ou en compensation, qui consistent à joindre à un procès existant un ou plusieurs autres procès entre les mêmes parties, mais avec interversion des rôles, le défendeur au premier procès se portant demandeur dans les autres; le juge de paix ne demeurera juge nécessaire de tous ces procès, que si chacun d'eux est renfermé dans les limites de sa compétence. L'article suivant trace les règles à suivre pour le cas où l'une des demandes excéderait la compétence du juge de paix. Mais il est une espèce particulière de demandes reconventionnelles qui ne constituent pas un procès nouveau annexé au premier procès, et qui, au contraire, ne sont autre chose que la dérivation et la conséquence de la première demande. Ce sont les réclamations; des dommages-intérêts destinés à réparer le tort causé au défendeur par l'existence de la demande principale elle-même. Cette nature de demande, évidemment accessoire à la demande principale, doit en suivre le sort et en demeurer inséparable. Le juge de paix en connaîtra, quel que puisse être le montant des dommages-intérêts réclamés. Décider autrement, ce serait mettre l'ordre et le choix des juridictions à la merci du défendeur, qui serait toujours le maître de se soustraire à la compétence du juge de paix, en demandant, à titre de dommages-intérêts, une somme supérieure à cette compétence. »

297. Il faut entendre par demandes reconventionnelles toutes celles formées par le défendeur incidemment à la demande principale, et qui sont de nature à exercer quelque influence sur celle-ci. Il n'est pas nécessaire que la contre-prétention du défendeur dérive de la même origine que la demande principale, pour qu'elle soit recevable, mais il faut qu'il y ait entre elles connexité; il va de soi qu'une demande du défendeur qui n'aurait nul rapport avec la demande principale, et serait sans influence sur elle, ne saurait être considérée comme une demande incidente, reconventionnelle.-V. au surplus ce qui a été dit à cet égard vo Compét. civ. des trib. d'arrondiss., nos 236 et suiv.

298. Il ne suffit pas, pour que le juge de paix puisse connaître de la demande reconventionnelle, qu'elle rentre par sa valeur (sauf le cas de prorogation prévu par l'art. 7 c. pr.) dans la compétence de ce magistrat; il faut aussi qu'elle y rentre par sa nature. L'art. 7 n'a pas pour but d'étendre la juridiction du

295. Lorsqu'à une demande principale, une demande reconventionnelle ou en compensation est opposée, on soutient, l'une part, qu'il faut régler la compétence en ayant égard au chiffre total de ces diverses demandes additionnées ensemble; et, d'autre part, qu'on doit la régler en considérant le chiffre de chacune d'elles, prise isolément? La loi nouvelle a consacré ce dernier système par son art. 7 ainsi conçu : « Les juges de paix connaissent de toutes les demandes reconventionnelles ou en compensation qui, par leur nature ou leur valeur, sont dans les limites de leur compétence, alors même que, dans les cas pré-juge de paix ratione materiæ, mais seulement de lui donner le vus par l'art. 1, ces demandes, réunies à la demande principale, s'élèveraient au-dessus de 200 fr. — Ils connaissent, en outre, à quelques sommes qu'elles puissent monter, des demandes reconventionnelles en dommages-intérêts fondées exclusivement | sur la demande principale elle-même. »>

296. Ces dispositions, qui reproduisent celles de l'art. 2 de la loi du 11 avril 1838, sur les tribunaux de première instance (V. Degrés de juridict.), ont été parfaitement expliquées et motivées dans le passage suivant du rapport de M. Renouard : « Le projet de loi, y est-il dit, décide que l'attribution de compétence résultera de l'appréciation distincte de chacune des demandes. (principale et reconventionnelle). Si Pierre demande à

(1) (Hubert C. Bernard.) LA COUR; Considérant que dans la cause il s'agissait de dommages causés à une vigne par un voisin qui, en labourant sa terre, avait anticipé sur la vigne et en avait détruit plusieurs plants; que l'action ayant eu lieu dans l'année, était formellement déclarée de la compétence exclusive du juge de paix par l'art. 3 c. pr. civ.; que la distinction pour dommages causés aux récoltes, et ceux portant sur le fonds même, est condamnée par le texte même de cet article qui, après avoir attribué aux juges de paix, dans le n° 1, la connaissance des actions pour dommages aux champs, fruits et récoltes, ajoute dans le n° 2, comme pour prévenir toute difficulté sur le sens des dispositions contenues au premier numéro, les déplacements de bornes, usurpations de terres, arbres, haies, etc.; que l'incompétence tenant à l'intérêt public a pu être proposée par Hubert en tout état de cause; que la demande reconventionnelle en bornage n'y faisait point obstacle; que cette demande, TOME XI.

moyen de statuer, par un seul jugement, sur les demandes respectives des parties, pourvu que chacune de ces demandes soit dans les limites de sa compétence, tant par son objet que par sa quotité.— Mais le juge de paix est compétent pour statuer sur la demande reconventionnelle qui ne serait pas de la même nature que la demande principale, pourvu qu'elle soit de sa juridiction.

299. Il a été jugé, sous la loi de 1790, et cette décision ne saurait faire aujourd'hui l'objet d'un doute, qu'une demande reconventionnelle en bornage, incidente à une demande principale en dommages-intérêts pour dommages causés aux champs, n'empêche pas celle-ci d'être de la compétence du juge de paix (Bourges, 27 mars 1829) (1).

postérieure à la demande introductive d'instance, ne pouvait en changer la nature à l'effet de rendre le tribunal compétent; qu'elle n'y était même pas tellement connexe, qu'elle dût nécessairement être jugée avec la demande en dommages-intérêts; que le tribunal l'a lui-même reconnu puisqu'il a statué d'abord sur la demande en dommages-intérêts, en ordonnant aux parties d'instruire sur la demande en bornage; qu'ainsi il a lui-même réfuté par son jugement, le seul motif qui aurait pu servir de prétexte pour retenir la connaissance de la demande en dommages-intérêts; Considérant qu'il importe de maintenir dans ses attributions la juridiction paternelle et peu dispendieuse des juges de paix, et d'assurer la prompte réparation des dommages causés aux propriétés; — Dit qu'il a été nullement et incompétemment jugé par les premiers juges; renvoie les parties à se pourvoir devant qui de droit.

Du 27 mars 1829.-C. de Bourges, 2 ch.-M. Trottier, pr.

20

20

« PreviousContinue »