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tant, ni en ce temps-là, ni depuis elle n'a prétendu que l'Etat dût en porter plus de la moitié.

La diftinction qu'on fait entre les foixante mille hommes, qu'on fuppofe devoir fervir en Campagne, & les quarante deux mille qu'on applique aux Garnifons, merite bien une remarque particuliere. On prétend que les feuls foixante mille hommes doivent être confiderez dans la proportion à obferver entre les Troupes de Sa Majefté Britannique & celles des Etats Généraux; comme i l'entretien des quarante deux mille hommes, n'étoit qu'une charge particuliere, qui ne devroit point être comptée entre celles de la Guerre.

Mais qu'y a-t-il de moins raisonnable, que cette prétention? L'Etat le trouva comme bloqué, au commencement de la Guerre, par les Troupes de la France, & cela le mit dans la neceffité de renforcer fes Garnisons, à ce qu'on suppose, julqu'à quarante deux mille hommes, pendant que la Grande-Bretagne, par fon heureuse fituation, pouvoit fe paffer à beaucoup moins. Où eft là le fondement, où eft la raifon, pour prétendre que l'E

tat ne puiffe pas mettre ces Troupes là en Compte avec celles de Sa Majefté Britanique; finon en tout, du moins pour auFant qu'elles excedent en nombre les Gardes & Garnifons de la Grande-Bretagne. On ne peut pas nier, que quand deux Alliez d'une égale Puiffance, s'engagent à faire la Guerre en commun, de toutes leurs forces, omnibus viribus, & que l'un des deux fe trouve avoir besoin, par exemple de vingt mille hommes, plus que Pautre pour fes Garnisons il ne feroit en ce cas ni raisonnable ni possible, que celui là fortit en Campagne avec autant de Troupes que fon Allié: Combien moins donc, lorsque ce cas fe rencontre de deux Alliez d'inégale force, & que celui qui a besoin des vingt mille hommes de plus pour fes Garnifons, fe trouve fort inferieur à l'autre en Puiflance?

Mais poféque les Garnifons des Places de l'Etat, ne doivent point entrer, ni en tout`ni en partie, dans la Lifte des Troupes fournies contre l'Ennemi, ce feroit toûjours un grand mécompte de les faire monter pour toutes les années de la Guerre, à quarante deux mille hommes.

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eft vrai que la Lifte des Garnifons, qui fe fait tous les ans, avant que d'entrer en Campagne s'eft montée quelques années à quarante mille hommes; mais il eft affez connu, que dès que l'Armée a été formée, on a d'abord tiré des Places, qu'elle couvroit une partie des Garnisons qu'on y avoit mifes, & que le refte, à quelques Regimens près, a toûjours eu ordre de fe tenir en état de marcher au premier commandement, pour aller prendre la place des Regimens qui auroient le plus foufert dans les Siéges, & dans les Batailles; ce qui eft arrivé prefque tous les ans. De maniere que Leurs Hautes Puiffances ont été obligées de payer les Recruës & les Chariots, à une grande partie des Régimens qui étoient de Garnifon, comme à ceux qui étoient de Campagne.

Il n'eft pas moins connu, que jufqu'à la reduction du Brabant & de la Flandre, c'est-à-dire jusqu'en 1706. on a formé tous les ans en Flandres un Camp volant, tiré des Garnifons voisines, & qui emportoit un grand tiers de toutes les Garnifons en général; que ce Camp a obligé l'Ennemi à tenir un plus grand nombre

de Troupes dans le Païs de Waes & le long du Canal de Bruges; & que depuis l'année 1706, tant s'en eft falu, que les Garnisons de l'Etat ayent emporté plus de quarante deux mille hommes, que jamais on n'y en a employé le tiers. Tout le refte a été mis en Campagne, ce qui à été caufe que les Terres de l'Etat ont été fujettes à plus d'une invafion, ce qui ne seroit pas arrivé fi les Garnisons avoient été plus fortes.

Il eft vrai qu'une partie des Troupes de l'Etat ont été employées dans les Places Espagnoles, mais celles de Sa Majesté y ont fervi de même, & y fervent actuellement, auffibien que celles des Etats Généraux. Et fi depuis la reduction de Lil◄ le, Tournay, & autres Places conquifes dans la Flandre Françoife, & en Artois, on a été obligé d'y mettre des Garnisons ; celles du Païs-Bas Efpagnol, qu'elles cou vrent prefentement, ont été confidera blement diminuées : Outre que par la l'Ennemi eft reduit à la neceffité, pour affû rer les Frontieres, d'y redoubler fes Garnifons & d'en tenir jufques fur la Somme. On a donc tort de prétendre que l'Armée foit affoiblie par les Garnifons qu'il faut

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mettre dans les Places conquifes, & fur tout d'affirmer comme on fait, qu'encore à prefent, l'Etat y employe plus de 42. mille hommes.

De tout cela, il n'eft pas malaisé de conclure lesquels font les mieux fondez, de ceux qui pretendent que pendant toute cette Guerre l'Etat eft demeuré en refte aux Bais-Bas de 20837. hommes, & que la Grande-Bretagne en a fourni 13892. trop; ou de ceux qui foutiennent, au contraire, que la Grande-Bretagne n'a pas fourni la moitié de ce qu'elle devoit aux mêmes Païs-Bas, quand on accorderoit, ce que pourtant on n'accorde point, que les 42. mille hommes, qu'on fuppofe employes dans les Garnisons, ne devroient pas entrer en compte. Les premiers vont directement contre les Traitez du 3. Mars 1678 du 11. Novembre 1701. & de la Grande-Alliance; les autres s'y appuyent, & les fuivent à la lettre. Les premiers rejettent la proportion ci-devant reçuë, & les autres s'y attachent: Les premiers. n'ont aucun égard à la difference, qu'il y a entre les forces des deux Nations, & les autres croyènt que fuivant la teneur des Traitez elle fait la regle de la propor

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