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venir. On fe plaignoit affez du côté de P'Etat de cette disproportion; mais il faloit prendre patience, & fe confoler dans l'ef perance que fi la Guerre continuoit, elle feroit redreffée dans la fuite.

Maintenant, pour faire voir combien ces deux Propofitions font mal fondées, on fe contentera de dire que de la part de la Grande-Bretagne, on eft bien affuré, quon ne poura jamais prouver que les Etats Généraux fe foient obligez à entretenir foixante mille hommes en Campagne, & quarante deux mille en Garniton; ni qu'ils ayent reconnu, ce qui pourtant eft le point effentiel, que la Grande-Bretagne pût fatisfaire à tous fes engagements, en fourniffant feulement quarante mille hommes, contre les cent deux mille de l'Etat, ni enfin qu'ils foient convenus d'obferver à l'avenir cette inégale proportion dans l'entretien des Troupes, dont on pourroit renforcer dans la fuite l'Armée des Païs-Bas.

Auffi n'y avoit il pas la moindre raifon pour celà. La Grande-Bretagne & cet Etat font également obligez par le 3. Article du Traité du 3. Mars 1678. & par 7. Article du Traité du 11. Novem

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bre

bre 1701. de s'affifter reciproquement de toute leur Puiffance, & de toutes leurs Forces par Mer & par Terre, & par le 4. Article du Traité de la Grande-Alliance, on s'eft pareillement engagé à fe foutenir l'un l'autre omnibus viribus, de toutes fes forces. Le Grande-Bretagne étoit alors, ce qu'elle eft à prefent fans concredit, bien plus-puiffante, que cet Etat; & comme elle ne pouvoit pas, au commencement de la Guerre, bonifier en Efpagne ou en Italie, ce qui manquoit ailleurs à fes forces, ainfi qu'elle la pû faire depuis, il eft évident que pour fatisfaire aux fufdits Traitez du 3. Mars 1678. du 11. Novembre 1701. & de la GrandeAlliance, elle auroit du néceffairement augmenter confiderablement fes Troupes en Flandres, & y entretenir un Corps d'Armée bien plus nombreux que celui de l'Etat. C'étoit l'unique endroit où les deux Puiffances avoient alors des Armées, & fi l'on vouloit obferver quelque raisonnable proportion, c'étoit là qu'elle devoit paroître.

Touchant la nature de cette proportion, fi on avoit voulu prendre par Terre celle qu'on avoit établie pour la Mer,

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& qui avoit été fuivie dans le dénombrement du Secours mutuel ftipulé par le fufdit Traité du 3. Mars 1678., au premier des Articles feparez, il auroit du être de cinq contre trois, c'eft à dire que la Grande-Bretagne auroit dû fournir cent feptante mille hommes, contre les cent deux mille, qu'on prétend que l'Etat fe foit obligé d'entretenir en Flandre pour la Compagne & pour les Garnilons. Quand on dit cent feptante mille hommes, on y comprend les Gardes & Garnifons néceffaires dans la Grande-Bretagne, autrement la proportion auroit pû être reduite a cent mille hommes, contre les foixante mille de l'Etat, qu'on pretand devoir entrer feuls dans le compte de la proportion, quoique fans fondement, ainfi qu'on le fera voir ci après.

Que fi l'on vouloit fuivre la proportion de deux contre un, laquelle a été gardée pendant la Guerre en diverfes autres occafions; en ce cas la Grande-Bretagne auroit du mettre en Campagne cent vingt mille hommes, contre les foixante mille, ou pour mieux dire elle auroit dû fournir deux cens quatre mille hommes, contre les cent deux mille de l'Etat, y com

pris les Gardes & Garnisons.

Enfin fi au lieu de cerches la proportion dans l'augmentation des Troupes de la Grande-Bretagne, par raport à celles de l'Etat, on aimoit mieux la prendre dans la Reduction des Troupes de l'Etat par raport à celles de la Grande-Bretagne, il fe trouvera que les Etats Généraux n'auroient dû fournir, fur le pied de trois contre cinq, que vingt mille, ce qui auroit entiérement rempli leur proportion, avec les quarante mille hommes de la Grande-Bretagne: Au lieu, que fuivant le propre état remis à la Chambre des Communes, ils n'ont pas fourni feulement foixante mille hommes, mais bien 68242. non compris là dedans les quarante deux mille pour les Garnifons. Par où l'on voit que l'Etat n'a point eu de raifon pour fe foûmettre à une proportion fi peu raisonnable, que celle qu'on met en avant, ni de s'en conten

ter.

Supofé, préfentement que l'Etat, fermant les yeux fur une fi exceffive disproportion, eut accepté, comme on le prétend, au commencement de la Guerre, de fournir aux Païs Bas foixante mille 25

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hommes en Campagne, & quarante deux mille en Garnison, contre les quarante mille de la Grande-Bretagne, il ne s'enfaivroit nullement de là, qu'il dût fe foumettre à la même difproportion à l'égard des Troupes, dont les deux Puiffances ont crû devoir augmenter leurs forces depuis, pour pouffer la Guerre avec plus de vigueur en Flandres.

Au contraire, on auroit dù préfumer,, que la Grande-Bretagne, confiderant l'excès de cette difproportion & la bonne volonté de l'Etat à faire d'abord les plus grands efforts pour animer les au tres par fon exemple, fe feroit porté d'elle-même à fe charger feule des nouvelles dépenfes que l'on auroit jugées néceffaipes pour le bien de la Caufe Commune,. foit qu'elles euffent regardé le Païs Bas, ou les autres Païs, jufques à ce que la difproportion eut entierement ceffé.

Et quoique, lors qu'on refolut d'augmenter de vingt mille hommes l'Armée du Pais-Bas, ci qui fût la feconde année de la Guerre, la Grande-Bretagne ne put être difpofée à prendre fur foi toute la dépenie de cette augmentation, jamais pour

tant,

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