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jet de fe contenter.

Par quel autre moyen, HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, que celui qui a été cidefius propose, voit-on jufqu'à present qu'on puiffe parvenir à une heureuse fin de cette Guerre? Et quelle autre attente, pourroit-on avoir, finon fort tragique, fi par impatience & par chagrin de fuporter ces charges pefantes, ou pour ou pour d'autres causes & d'autres vûës, ce louable zéle qu'on a eu jufqu'à préfent pour terminer la Guerre d'une maniére convenable, venoit à fe rallentir, ou que les moyens né ceffaires pour cette fin vinffent à être diminucz ou négligez? Au moins, humainement parlant, eft-il certain qu'une telle diminution, où négligence, empêcheroit qu'on ne pouffat les avantages qu'on a déja obtenus, & qu'on n'en obtint d'autres; & que l'Ennemi fe tiendroit plus ferme dans l'éloignement qu'il a pour une paix raisonnable, quand il verroit qu'il n'auroit plus à craindre de nouvelles pertes: De cette maniére, la Monarchie d'Efpagne avec plufieurs de fes dépendances, les Indes avec leurs Trefors, demeureroint dans une feule & même Maifon; ce qui feroit entiérement pancher

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la Balance de fon côté, & la mettroit en état de donner la Loi à toute l'Europe: Extremité qui a paru tellement à craindre, que pour la prévenir, il a fallu s'engager dans cette Guerre, parcequ'il n'y avoit pas moyen de le faire par aucune voie de douceur & de Négocia ion. On perdroit toute la gloire des Armes, & les Conquêtes qu'on a faites, quelque cher qu'elles aient coûté; & l'on verroit les affaires reduites aux termes, ou d'une Guerre défensive, plus onereufe & plus desavantageufe à differens égards qu'une Guerre offenfive; ou bien d'une très mauvaife Paix, qui ne fetoit ni affûrée ni durable, qu'autant qu'il plairoit à la France, comme ont été celles des Pirenées, d'Aix La Chapelle, de Nimegue, la Tréve de 20. Ans, & la Paix de Ryswick, qui chaque fois, & peu de temps après leur conclufion, ont été rompuës par cette Couronne, & n'ont fervi qu'à lui donner quelque repos pour rétablir fes Forces, & pour former d'autres mauvais deffeins, & de nouvelles entreprifes, contre quelquesuns de fes Voifins. Certainement, les affaires ont été pouffêcs trop loin, & font préfentement dans un trop bon train pour

fe rallentir. Après tant de Victoires, il ne manque, pour ainfi dire, qu'un pas à faire pour avancer jufques dans le cœur de la France, & la forcer à une Paix raifonnable. Il y a un peu plus de 150 Ans, que le gain que l'Espagne fit de la Bataille de St. Quentin, (ainfi qu'il à déja été dit) lui procura une Paix très-mémorable. On eft aujourd'hui auffi avancé que le Rol Philippe II. l'étoit alors, & l'on fe trouve en beaucoup meilleur état. En peu de temps encore, & avec un heureux Exploit de Guerre, par l'affiftance Divine, on pourra venir à bout de ce qui refte à faire, & l'on entrera comme avec vent & marée dans le Port d'un Repos affuré, & d'une ftable Paix, pour laquelle on travaille depuis fi longtemps.

Qui pourroit donc, HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, manquer de perféverance, & voyant les affaires dans un fi bon état? Comment pourroit-on fe dif culper envers la Pofterité, fi le grand but de cette Guerre, favoir une bonne & fû -'re paix, à l'acquifition de laquelle il man◄ que à prefent fi peu, étoit hazardé, & peut-être manqué? Si l'on avoit fuporté en vain tant de Charges & d'Impôts, &

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file fang de tant de braves gens avoit été repandu pour néant? Et tout cela feulement, parcequ'on n'auroit pas trouvé bon de faire, pendant encore très-peu de temps, les derniers efforts, & d'employer pour ce fujet tous les moyens imaginables & poffibles. Certes, cette conduite ne feroit pas moins à blâmer, que le fut autrefois celle de ce Roi, qui ayant défait jufqu'à 3. fois les Siriens fes Ennemis

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s'arrêta tout à coup, & perdit par là l'occafion de les fubjuguer Et il ne conviendroit -nullement à la reconnoiffance que nous devons à Dieu, de toutes les Victoires qu'on a obtenues, ni à la prudence & à la faine raifon, que deformais on demeurat dans l'inaction & qu'on perdit mal à propos de fruit des Victoires ci-deffus marquées; ainfi que fit autrefois cette Nation fituée fur les Côtes de la Mer Méditerranée, qui au lieu de poursuivre la Victoire qu'elle avoit remportée contre fon Ennemi, perdit par fon inaction tout le fruit quelle en pouvoit attendre, & fut - contrainte de faire une Paix très-defavan-itageufem

COP On entend quelquefois alleguer l'im• puiffinée, pour sexempter de payer les

Impofitions néceffaires ou pour refuser d'y donner le confentement. Mais outre que cette raifon d'impuiffance ne peut pas être reçûé à l'égard des Provinces qui ont déja donne leur confentement, & à qui il n'eft furvenu aucun accident fubit, qui les ait jettées dans une telle im puiffance; il a été fouvent reconnu que cette raifon procédoit plûtôt de l'impatience de porter de fi groffes Charges, que d'une impuiffance effective ainui qu'on l'alleguoit: On ne peut donc s'imaginer, que cette pretendue impuiffance aille fi loin, que pour un temps fi court, dans une fi avantageufe crife d'affaires, on ne puiffe faire encore un dernier effort. En verité, la fermeté de nos Ancêtres l'avoit tout autrement compris, lorfque fans la moindre répugnance, ils fourniffoient tout ce qu'ils avoient, pour fe defendre de l'impofition du Dixiéme Denier, qu'on avoit introduite illegi timement fur eux, afin de ne pas fouffrir qu'on fit la moindre brêche à leurs Droits & à leur Priviléges. Cet exemple eft trop puiffant, pour n'être pas fuivi, avec encore plus de zéle, puis que l'avancement du bonheur Public par une

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