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fieurs autres Princes font entrez depuis. Les Haut-Alliez s'y font engagez réciproquement, à employer toutes leurs Forces par Terre & par Mer, pour contrebalancer efficacément celles de la France, & fpécialement pour faire obtenir à S. M. Imperiale une jufte & raisonnable fatisfaEtion, au fujet de fes Prétentions légitimes & fi bien fondées, fur la Monarchie d'Espagne, échûë & dévolue à fa Maison par la mort de Charles II. de glorieufe Memoire Comme auffi pour faire avoir à S. M. I. & à cet Etat, une particuliere ́ & fuffifante fûreté, pour les Etats & Païs de leur Domination, & pour le Commerce & la Navigation de leurs Sujets; Particulierement pour faire enforte que les PaïsBas Elpagnols puiffent fervir de Barriére & de féparation, pour éloigner la France de cet Etat. Que pareillement en feroit donner aux autres Hauts-Alliez, fuivant les Conventions faites au temps qu'ils feroient entres dans ladite Grande Alliance, une équitable fatisfaction fur leurs Griefs, afin de rétablir ainfi la Tranquillité commune.

Ce fut à peu près de certe maniere qu’eutrefois, avant-que la Dignité Imperia

le,

le, la Couronne d'Efpagne, les Païs-Bas & les Indes fuffent tombez dans une même main, & lors-que la France, qui a toûjours été d'un efprit inquiet, infeftoit continuellement d'Italie; divers Princes & Etats, à chacun defquels elle étoit fuperieure, formement des Ligues enfemble pour la contrebalancer. C'eft ainfi que lors que Charles VIII. Roi de France, avoit comme inondé d'Italie à l'impourvû, les cinq principales Puiffances de ces Païs là fe liguérent, & par leurs communs efforts délivrérent leur Patrie: Que peurde emps après, Louis XII. fut cont aint par la Ligue, nommée la Sainte Ligue, d'abandonner le Milanois, la Toscane, & plufieurs autres Provinces voifines, qu'il avoit conquifes par la fuperiorité de fes Forces.

Ce Contrepoids fut encore plus neceffaire, lorsque par la Bataille de Formigni, la France ayant reduit fous fon Pouvoir diverfes Provinces confidérables, & peu de temps après en ayant annexé d'autres, non moins puiffantes, à fa Couronné, Elle s'éleva de plus en plus; En forte que le Royaume d'Angleterre (fur tout après la fin des differends entre les Maisons

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d'Yorc & de Lancaftre,) la Maifon de Bourgogne, & enfuite celle d'Autriche, fe virent contraintes d'y avoit l'œil; & que Henri VIII., Roi d'Angleterre, plus jaloux de l'acroiffement de la Puiffance de François, & moins épargnant que Henri VII. fon Perci& Prédeceffeur, s'allia plus d'une fois avec d'autres Princes, pour donner des bornes à cette augmentation de pouvoir.

La Nation Angloife, réprefentée par fon Parlement, n'en a pas eu moins de jalousie ni de crainte que fes Rois; & à peine pourroit-on trouver d'exemple que dans une circonftance, où la Guerre ait été jugée néceffaire pour donner un fein à la France, ce Parlement n'y ait efficacement & promptement concouru: Auffi depuis plus de 220. ans, a-t-il toûjours tâché de tenir dans l'équilibre la plupart des Princes & Maifons Puiffantes de l'Europe. Il est vrai que depuis la mort de Henri II., fous la Régence de Catherine de Médicis, & encore longtemps après, jufqu'à la Majorité du Roi à prefent regnant, cette Courronne ayant prefque toûjours été troublée & agité par des Guerfes Civiles & des Differends Domiftiques,

&

& étant par la tombée dans une grande décadence & dans l'impuiffance, ces précautions n'étoient pas fi néceffaires qu'au paravant. Mais dans la fuité, & fur tout par le fuccés de la Guerre, qui fut terminée par le Traité des Pirenées d'une façon defavantageuse pour l'Espagne, les Païs Bas étant devenus de plus l'objet des ambitieux défirs de la France (comme autrefois l'Italie l'avoit été pendant le Régre de la Mailon de Valois;) Et après la mort de Philippe IV., Roi d'Espagne, ces Pais ayant été attaquez de nouveau par les François, il a fallu encore un Contrepoids à cette Couronne, comme aupa

ravant.

Pour y parvenir, la fameufe Triple Alliance auroit été fans doute d'un grand effet, fi le Bien public n'avoit pas été contraint de ceder à une Politique intereffée & blâmable. Apres la fin de la premiére Guerre contre la France, on y travailla de nouveau: Mais la feconde Guerre étant furvenue, on forma pour la premiére fois l'Alliance, qui à été renouvellée au commencement de la préfente Gerre, en la mêine maniére, & pourles mêmes fins qui viennent d'être all guées.

De

A

De la part de l'Ennemi, il a fouvent ofé fe flater qu'une telle Alliance, faite entre tant de Puiffances, ne pourroic durer longtemps, & qu'aprés les premiers efforts, elle ne manqueroit pas de se dis fiper: Que bien-tôt la méfintelligence la jaloufie, la défiance, la diverfité de vûes & d'intérêts cauferoient du refroidiffement & de la diffention entre les HautsAlliez, quoique liguez enfemble par un intérêt commun contre la trop grande Puiffance de cet Ennemi: Que même leurs fuccés, quels qu'ils puiffent être, bons ou mauvais, feroient naître de la divifion entr'eux, & les defuniroient. La différence même de la Conftitution de chaque Etat & Pays des Hauts Allicz, & de la forme de leur Gouvernement, lui a fait regar der comme une chofe impoffible, fur tour par raport à cette République, & traiter de chimére (tout de même qu'autrefois à l'égard de la République de Venise, pendant les Guerres d'Italie) le deffein d'opofer un Contrepoids à fa Puissance. Cependant avec tout cela, il n'y a point d'artifice ni de rufe dont il n'ait ufé, pour faire naître de mauvais foupçons entre les Hauts-Allicz, ou pour leur fufciter des Tom. I. I

trou

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