Page images
PDF
EPUB

fions des Etrangers, que tous les autres moyens qu'on a pûy employer, & que par là ils ont jouï d'une tranquilité parfaite 'pendant une longue fuite d'années; au lieu qu'au contraire, ceux qui l'ont méprifée, ou iaiffê perdre, ont vêcu dans une continuelle incertitude, dans le pé. fil, dans les allarmes, & avec le temps ont vû entiérement tomber leur profperité, & font même devenus la proie de leurs Ennemis. C'eft pourquoi auffi la gloire a été quelques fois affez juftement comparée à l'écorce ou envelope des Fruits, qui demeurant en fon entier, lcs conferve long-temps, mais dés qu'elle eft offenfée, ou ôtée, le fruit fe corrompt.

Pour ce qui regarde les Conquêtes, & les Frontiéres qu'elles ont étendües fi loin, pour ne parler que de ce qui concerne directement ces Provinces & le Païs voifin, parce qu'il a été affez parlé de l'Allemagne, de l'Italie, & des Païs plus éloignez, en d'autres occafions; on peut remarquer que l'Ennemi, qui au commencément de cette Guerre s'éioit étendu ju qu'aux Frontiéres de cet Etat, & comme jufqu'à leur vûë, depuis l'E

clufe

clufe en Flandres, jufqu'au Vahal & au Rhin, eft prefentement repouffé jufques à fes anciennes Frontiéres: On en a entierement purgé le Bas-Rhin, qui dans les trois Guerres qu'on a euës contre la France, depuis l'An 1672., avoit toûjours été le premier Théatre de la Guerre, & par où l'Ennemi croyoit plus aisement pénetrer jusques dans le cœut de nôtre Pais: Là Meuse a été remise fous le pouvoir des Alliez, jufques, proche de l'endroit où elle, reçoit la Sambre; il en eft de même de l'Escaut, jufqu'au deflus de Tournay, & par confequent plus loin qu'il n'étoit arrivé depuis 40. ans, & de même auffi de la Lis, autant qu'elle eft navigablé : On a reduit la Province de Gueldres, c'eft à dire, la portion qui en étoit de meurée à l'Espagne, après la Paix de Mun fter & les Provinces de Limbourg, de Brabant, Malines, Flandres, les deux tiers du Hainaut, Lille, Tournay, & une grande partie de l'Artois : D'autres Provinces plus éloignées ont été contraintes de payer des Contributions, & pendant la derniere Campagne, le Siege de Ja Guerre a été dans les extremitez du Hainaut, & jusqu'aux fources de la Scar

pe

pe & de la Lis; Rivieres qui, par le mo yen de la Deule & fon Canal de commu nication, auffi-bien que celui de la Scarpe & de l'Efcaut, ont favorifé autrefois les Invafions reiterées de l'Ennemi, & prefque continuelles depuis l'An 1665, dans les Province Efpagnoles des Païs-Bas: Les Armées de part & d'autre ont vêçu fur les Terres de l'Ennemi, &y ont tout confumé; & par confequent il lui fera fort difficile, quelque depenfe qu'il faffe, & quelque peine qu'il prenne, de faire voiturer de fes Provinces éloignées, des fourages fecs, aux extremitez de fes Frontiéres, & à fes Places les plus expofées; ou plutôt il lui fera impoffible d'y en faire mener la quantité néceffaire, pour y faire fubfifter pendant l'Hiver un Corps extraordinaire de Troupes; particulierement de Cavalerie,& pour en fournir au commencement du Printemps prochain, & de bonne heure, pour l'entretien d'une Armée formidable, avant que l'herbe foit affez grande pour nourrir les Chevaux.

Au contraire, il eft facile à V. H. Puiffances & à leurs Alliez, par le moyen defditez Riviéres, dont on eft maître

de

faire remplir de Foin & d'Avoine les Magafins de leurs Plaices & Villes qui font les plus proches de l'Ennemi, moyennant qu'on prenne bien fon temps & qu'on y emploie les moyens requis, par où conféquemment on fera en état d'y tenir l'Hiver prochain un nombre convenable de Troupes, & de fe mettre au Printemps de bonne heure en Campagne avec une Armée formidable, pour prévenir l'Ennemi; Si bien que de cette maniére, il y a beaucoup d'aparence que de nos Frontiéres prefentes on pourra, comme d'un plein faut, & par un feul heureux exploit de Guerre, pénétrer jusqu'à la Source de l'Efcant, jusqu'à la Somme & à l'Oife, même jufqu'a la Seine & à la Capitale du Royaume, ainfi qu'autrefois les Espagnols auroient pû le faire après la fameufe Bataille de St. Quentin, fi les paffions humaines n'euffent pas prévalu fur les veritables intérêts de l'Etat, & arrêté les progrès des Vainqueurs. Et comme alors, pour foûtenir le Royame chancelant, & (G l'on peut s'exprimer ainfi) pour étayer le Sceptre & la Couronne, on fut obligé de raffembler toutes les Forces de la Fran& d'en tirer par tout ou l'on pouvoir,

ce,

même du Royaume de Naples, & de re noncer à toutes les vûes qu'on avoit euës, & à toutes prétentions fur les autres Païs, il fallut encore avec cela en venir à conclure le fameux Traité de Paix du Château Cambrefis, par lequel on fit ceffion de 198 Villes, pour 3. feulement qui furent restituées par l'Espagne à la France en Picardie: De cette même maniére, l'Ennemi pourra, dans peu de temps, être contraint d'abandonner les Etats de l'Efpagne & ceux qui en dépendent, & d'accepter une bonne Paix, qui ne fera pas moins glorieufe aux Alliez, que durable.

Aprés avoir fait mention des Evenemens & fuccés de cette Guerre, il ne feroit peutêtre pas hors de propos de confiderer un peu de plus près, par quels moyens ils ont été obtenus, par quels efforts, avec quelle conduite, valeur, acti vité, conftance, la Guerre a été poulfée jufqu'à préfent. Mais comme cette matiere a déja été plufieurs fois agitée, on fe contentera d'obferver, que pour fondement de cette Guerre, on conclut l'an 1701. la fameufe Grande Alliance entre l'Empereur, S. M. la Reine de la G. Bretagne & cet Etat, dans laquelle plu

feurs

« PreviousContinue »