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Une indépendance absolue et isolée seroit ab Surde; car en supposant que la France renonçat à toute prétention de souveraineté, elle deviendroit bientôt la proie de la première flotte anglaise qui feroit voile pour l'Amérique. En se donnant à l'Angleterre, les colons auroient une constitution politique, civile et commerciale infiniment plus dure et plus oppressive que celle qui leur est offerte. Indépendamment de la différence de langage, de moeurs et de religion, le joug de la France sera toujours pour eux le plus léger, le plus supportable.

Mais quelle est la constitution qui convient à nos colonies, et quels sont les rapports qui doivent nous unir avec elles? Il seroit prématuré d'examiner le fond de la question; nous attendrons pour cola que les plans soient proposés à l'assemblée nationale. A nibsob ziov

Nous dirons seulement que, comme il y a deux parties intéressées, il faut qu'elles discutent ensemble leurs intérêts respectifs avant de faire une convention qui les lie.

Le vieu de la France est exprimé dans son assemblée nationale; le vœu des colonies n'a pas été encore bien distinctement articulé. Leurs soidisans députés à l'assemblée nationale ont été nommés à Paris, et à l'insu de leurs commettans; ils n'ont aucun caractère légal; ils sont en trop petit nombre:

Il faudroit donc que les colonies envoyassent en France une députation nombreuse, chargée de négocier avec le corps législatif. Il faudroit que les articles convenu's avec la députation fussent ratifiés par les colonies, pour former une base d'union permanente entre elles et la métropole.

Mais afin que les colons aient enfin une véritable représentation, afin que leur vou parvienne distinctement à la nation, il est nécessaire, il est No. 66,

de toute justice que le corps législatif prescrive le mode des élections, et règle definitivement ce qui doit donner le droit de suffrage. Il seroit indispensable aussi que l'assemblée nationale envoyat des commissaires aux iles pour y assurer l'exécution de ses décrets. Sans ces précautions, l'assemblée nationale n'aura à la place du véritable voeu des colonies que des projets de quelques individus cabaleurs et puissans dont l'unique but seroit de tyranniser les hommes, et de ruiner le commerce de France.

En attendant ces arrangemens ultérieurs et permanens, le corps législatif, comme gardien de la liberté et des propriétés nationales, doit surveiller et diriger l'administration des colonies; tout ha- • bitant de ces parages lointains, qui sera ami de l'ordre et du bonheur de sa patrie, se fera un devoir d'obéir à ses augustes décrets.

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De l'impót.

L'impôt pèse immédiatement et sans relâche sur chaque individu, de, la société. Les hommes ajoutent une importance plus ou moins grande aux choses, selon que ces choses les touchent de plus ou moins près. L'impôt est donc l'objet le plus important pour la totalité des citoyens, et même des prolétaires de l'empire.

Dans notre contrat social, l'impôt est le signe de la propriété et le caractère matériel du citoyen. Puisqu'il faut établir une cotisation générale pour subvenir aux charges et aux dépenses de l'état, il est donc nécessaire et juste que chaque citoyen y contribue; mais en se soumettant à payer sa contribution, il ne peut ni ne doit endurer qu'il soit porté atteinte à sa propriété ou à sa libérté.

De sorte que la tâche du législateur se réduit à trouver la solution de ce problême;

Quel est le mode d'imposition par lequel on peut asseoir et répartir egalement, en raison des localités, l'impot entre les citoyens, sans attenter en aucune manière à leur proprieté et à leur liberté?

Cette solution devient difficile à ceux qui, cernés dans la routine, et captivés par les préjugés ne savent étal lir la Louvelle machine de l'impôt qu'avec les roues et les ressorts de l'ancienne. Ils sont nécessairement conduits à une complication de moyens; cette complication présente aux hommes probes le double inconvénient de mal faire, parce qu'on fit nal autrefois, et de sacrifier de bonnes idées inalliables à des principes vicieux et enchevêtrés; cette complication présente aux fripons le double avantage de pouvoir tendre aux abus à travers des améliorations illusoires et inconséquentes, et de dérober au peuple la counoissance du mal à la faveur de l'inextricabilité de la machine.

De tout temps les charlatans ont eu pour but de duper les hommes, et pour moyens le talent d'obscurcir leur science; de là vient que chaque partie de l'administration avoit une argue particulière, moins pour déterminer des significations que pour masquer des frípóneries.

Ce n'est qu'aux hommes simples et près de la nature que la solution du problême de l'impôt devient aisée. Sans attachement pour les intérêts privés, ans respect pour les usages, ils pèsent les choses dans leur nature; et comme leurs combinai ons sont simples, leurs résultats sont faciles.

Il a été proposé plusieurs plans sur l'impôt à l'assemblée nationale; les discussions ont roulé sur la question de savoir comment on le percevroit, plus que sur la nature dont il devroit être. A la honte du temps présent, on n'a guère été en discord sur l'admission des assises du temps passé.

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Dans la dispute, on s'est à-peu près borné jusqu'ici à vouloir réparer le monstrueux colosse de Fimpôt qui écrase la France; et de tant de réparateurs, pas un n'a songé à le refondre, ou ne l'a pas osé s'il en a eu l'idée, tant est grande et active l'influence des desservans de l'idole et des ministres de l'impôt..

3.

Nous oserons proposer cette refonte, et réduire l'impôt à des moyens simples. L'impôt ne peut se réduire ou s'étendre qu'à deux modes, l'impôt direct et l'impôt indirect. L'impôt direct est celui qui frappe directement sur le contribuable, en raison de sa propriété foncière, ou de sa consistance dans la société. L'impôt indirect est celui qui frappe sur les choses usuelles, de manière, que celui qui se sert de ces choses, paye une ou plusieurs aliquotes de cet impôt, en raison de la quantité de ces choses qu'il consomme ou qu'il employe.

L'impôt direct est juste, parce qu'il peut être justement assis, et appliqué en proportion des moyens de celui qui le supporte; parce qu'il est, évident qu'une fois déterminé, il donne au contribuable une mesure fixe de sa dette envers l'état ; que cette mesure étant fixe, le contribuable n'a plus qu'à aligner son travail et sa prévoyance sur cette mesure, et que, hors de ce soin, il jouit pleipement de ses moyens physiques et moraux, conserve la paix et le repos de l'esprit, est délivré de tout arbitraire, et ne craint pas de voir så propriété et sa liberté attaquées.

L'impôt indirect est inique de tout point, dans Je fond et dans la forme. Dans le fond, parce que cet impôt frappe sur le pauvre plus que sur le riche, dans la proportion d'un à cent; car le riche individuel ne mange pas plus que le pauvre, le crédit et le bon marché ne sont que pour lẻ riche; dans ce crédit et ce bon marché il trouvé

nullité de son impôt. Lé pauyre paye comptant

et cher, parce qu'il paye en détail; toutes ses facultés étant employées à sa subsistance, si sa sub sistance paye un sixième d'impôt, il est clair que lé riche qui n'employe à se nourrir que la centième partie de ses facultés, ne paye qu'un six centième sixième de cet impôt ror, c'est sur la consommation de première nécessité qu'on est d'usage d'asseoir l'impôt indirect.

Quand cette assise seroit mieux faite, l'impôt indirect est vicieux dans la forme, telle qu'elle puisse être, parce qu'il ne peut être établi sans perception, et que cette perception ne peut être imaginée ni déterminée sans attaquer la propriété par l'arbitraire, qui en est inséparable, et la liberté par les recherches qu'elle nécessite.

il ne faut donc qu'un impôt direct.

Les besoins annuels de l'état excèdent la contribution possible de son territoire. Première vévité. Les non-propriétaires de terres doivent payer leur part de l'impôt : seconde vérité.

Nous faisons cette question: Sur quoi la société peut-elle, dans le principe strict, asseoir les contributions qu'elle veut ramasser dans l'état? Nous répondons sur son sol et sur les hommes qui l'habitent. Sur le sol, en tant qu'il est possédé et cultivé par ces hommes. Sur les hommes, dans les facultés au moyen desquelles ils tirent un revena de la société par l'intervention des sociétaires. Hors de ces deux points d'assise, fondés en droit naturel et public, la société ne peut avoir que des droits conventionnels sur le reste. Toutes les fois qu'au moyen de certaines conventions plus ou moins légitimes, plus ou moins sophistiques, la société se donnera le droit d'asseoir l'impôt autre part que sur la terre et sur les hommes, elle portera la peine d'avoir violé le droit naturel; elle se donnera des chaînes de toute espèce: et mes preuves les plus courtes sont dans l'expérience, qui nous montre qu'en aucun temps, en aucun lieu, chez aucun peuple, l'im

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