Page images
PDF
EPUB

FABRICATION DES MÉDAILles.

477

leurs ateliers; 4° obligation imposée aux industriels qui font usage de balanciers pour leur industrie, d'obtenir, pour posséder ces machines (A. 3 germinal an IX), l'autorisation des préfets, qui peuvent la refuser, et, dans tous les cas, doivent, dans leurs arrêtés de permissions, interdire par clause spéciale la fabrication des médailles sans autorisation du ministre des finances, en visant l'article 3 de l'arrêté du 5 germinal de l'an XII.

Une circulaire du ministre de l'intérieur du 40 avril 1873 'porte

Voici le texte de cette importante circulaire : 1« Paris, le 10 avril 1873. Monsieur le préfet, depuis quelques années, certains iudustriels détiennent des balanciers et frappent illégalement des médailles et des jetons d'or, d'argent ou de cuivre. Quelques-uns se sont même permis de répandre dans le commerce des pièces offrant une grande analogie avec notre monnaie courante. M. le ministre des finances me signale les graves inconvénients qui résultent de cette fabrication, au double point de vue du préjudice causé à l'État et du danger qui menace l'ordre public. En présence des nombreuses infractions aux lois qui régissent la matière, mon département a le devoir de prêter le concours le plus actif à l'administration des finances, pour faire promptement cesser cet état de choses par un énergique retour à la légalité. L'article 1 de l'arrêté du 5 germinal an XII, qui n'est pas abrogé, contient deux dispositions principales: la première est une défense expresse de faire frapper des médailles, jetons ou pièces de fantaisie, ailleurs que dans les ateliers de l'hôtel de la Monnaie à Paris. L'autorisation, dont les industriels sont obligés de se pourvoir en exécution de l'arrêté du 5 germinal an XII et de l'ordonnance du 24 mars 1832, pour faire frapper des médailles, est délivrée dans les bureaux de mon ministère, à Paris; elle tient lieu de l'autorisation exigée par l'article 22 du décret du 17 février 1852, et doit mentionner les peines encourues en cas d'infraction. La seconde disposition de l'article 1 de l'arrêté du 5 germinal an XII est relative à l'autorisation spéciale que les fabricants doivent obtenir du gouvernement, pour pouvoir frapper légalement des médailles dans leurs ateliers. Les permissions de cette nature ont été, jusqu'à présent, constamment refusées par M. le ministre des finances qui, seul, à le droit de les accorder. Toute contravention à ces deux dispositions légales devra être, à l'avenir, rigoureusement déférée aux tribunaux. Dans l'intérêt d'une prompte répression, je crois devoir, monsieur le préfet, rappeler à votre attention les termes de l'arrêté du 3 germinal an IX, dont l'exécution est plus spécialement confiée aux fonctionnaires de mon ministère. L'arrêté précité impose aux industriels qui font usage de balanciers l'obligation d'obtenir la permission de posséder ces machines. Quant aux personnes qui en détiennent sans autorisation, elles doivent en faire la déclaration à la préfecture de leur département. L'administration, ayant le droit incontestable d'accorder aux particuliers la faveur de se servir de balanciers pour leur industrie, peut, par contre, leur refuser cette permission, lorsque la demande n'est justifiée ni par la moralité du pétitionnaire, ni par les besoins réels de son exploitation. Quand vous jugerez à propos d'accueillir des instances de cette nature, vous viserez dans l'autorisation l'article 3 de l'arrêté du 5 germinal an XII, et vous interdirez formellement et par clause spéciale la fabrication des médailles, à moins que l'on n'ait obtenu du ministre des finances l'autorisa

478

NOTION DE LA MONNAIE; PRINCIPES

que les permissions du ministre des finances, dont il vient d'être parlé, sans lesquelles nul industriel ne peut frapper des médailles dans ses ateliers, « ont été jusqu'à présent constamment refusées»>, mais constate l'existence de trop nombreuses contraventions.

508. Après avoir ainsi retracé les règles suivies dans le passé et dans le présent par le service administratif de la fabrication des monnaies et des médailles, nous devons traiter de la partie de la législation monétaire relative au système monétaire lui-même, dont la mise à exécution et la garde sont confiées au service monétaire; nous devons aussi définir la monnaie et fixer sa notion.

Les lois monétaires de la France consacrent quatre grandes règles qui sont l'exacte application des saines notions de l'économie politique; elles résultent de la loi du 7 germinal de l'an XI. Elles constituent la théorie économique et légale des monnaies dites courantes, ou de la véritable monnaie, c'est-à-dire, dans l'état actuel de notre législation, de toutes nos monnaies d'or et de la pièce de 5 francs argent; telles étaient aussi d'après la loi de l'an XI nos autres monnaies d'argent. Voici ces règles :

509. 4° La monnaie doit avoir, en métal fin, une valeur réelle égale (et non pas inférieure) à la valeur nominale fixée sur son empreinte; d'où suit que l'alliage, partie de la pièce sans valeur,

tion exigée par l'article 1 de l'arrêté précité. Dans ce cas, c'est-à-dire lorsque cette faveur exceptionnelle aura été concédée, vous délivrerez à l'intéressé, conformément à l'article 22 du décret du 17 février 1852, une autorisation pour chaque spécimen soumis à votre examen. Si les médailles présentées offrent des inconvénients au point de vue moral, politique ou religieux, vous n'hésiterez pas à en défendre la publication, et même à poursuivre les délinquants, dans le cas de distribution ou de mise en vente sans autorisation. J'attache, monsieur le préfet, la plus grande importance à la stricte exécution des arrêtés du 3 germinal an IX et du 5 germinal an XII. L'administration arrivera ainsi à tarir, à leur source, les abus qui ont lieu dans la fabrication des médailles et qui, en se perpétuant, pourraient causer les plus grands dommages au Trés de l'État et à la confiance publique. Telles sont, monsieur le préfet, les instruetions que j'ai cru nécessaire de vous transmettre sur une question qui touche à de graves intérêts. Grâce à votre concours empressé sur lequel je compte, elles produiront, j'en ai l'assurance, les meilleurs résultats. Je ne dois pas vous laisser ignorer, d'ailleurs, que, de son côté, M. le ministre des finances deil prescrire à ses agents des mesures de surveillance et de contrôle qui contribueront à faire rentrer dans le devoir ceux qui se sont permis d'usurper un des priviléges de l'État. Recevez, monsieur le préfet, etc. Le ministre de riatérieur, E. DE GOULARD ».

ÉCONOMIQUES; LOI DU 7 GERMINAL AN XI.

479

ne doit s'y trouver que dans la proportion jugée scientifiquement nécessaire pour la rendre suffisamment résistante au frottement. C'est ce principe que proclame la loi de l'an XI dans sa disposition préliminaire: «< Cinq grammes d'argent, au titre de neuf dixièmes » de fin, constituent l'unité monétaire, qui conserve (lois des 18 ger» minal et 28 thermidor de l'an III) le nom de franc »>; elle l'applique sans distinction à toutes les monnaies françaises d'or et d'argent, toutes frappées, aux termes de cette loi, au titre de 900 millièmes. Les principes économiques veulent qu'il en soit ainsi. La monnaie n'est pas un simple signe représentatif de la valeur des marchandises, pouvant impunément n'avoir pas en elle-même cette valeur intrinsèque, et puisant toute sa vertu d'échange dans la seule empreinte de l'autorité publique. La monnaie est une marchandise, c'est-à-dire une chose utile et échangeable, servant de mesure aux valeurs, parce qu'elle est elle-même une valeur. De sorte que la mission de l'autorité publique en matière monétaire consiste à certifier la valeur réelle de la pièce; ce qui condamne à la fois la doctrine du prétendu droit de seigneuriage, la pratique des anciennes altérations monétaires, la disposition regrettable de l'article 1895 du Code civil qui les suppose, et l'émission des papiers-monnaies conséquence extrême de la théorie de la monnaie-signe. Les pièces de monnaie ne sont donc que des lingots d'or ou d'argent certifiés par l'État quant à leur poids et à leur titre, qu'il serait bon d'inscrire sur les pièces, ainsi que le font déjà certains peuples [n° 517].

510. 2o La seconde règle, comme toutes les autres, découle logiquement de la première. La monnaie a le cours forcé sans limite (Code pénal, art. 475 no 44; avis du conseil d'État du 14 germinal an XI). Le cours forcé illimité constitue la grande caractéristique de la monnaie; il a sa raison d'être au point de vue économique et juridique en ce qui concerne la monnaie-marchandise, puisque l'accipiens reçoit une valeur effective absolument égale à la valeur nominale des pièces. Mais en dehors de la monnaie-marchandise, le cours forcé, au point de vue des principes consacrés par la loi de l'an XI, ne peut être qu'un expédient; des circonstances diverses peuvent l'expliquer (notamment le décret loi du 15 mars 1848 et la loi du 12 août 1870, décrétant le cours forcé des billets de la Banque de France qui, à cette dernière époque, a duré plus de six années et n'a cessé que le 1er janvier 1878 [no 578]. La loi consacre alors au profit d'un signe, bien que le plus digne de

480

SUITE DE LA THÉORIE DE LA MONNAIE-MARCHANDISE. confiance, une véritable usurpation du rôle de la monnaie; il est grave d'en user, et dangereux d'en abuser.

511. 3o La liberté du monnayage est aussi la conséquence rationnelle de la monnaie-marchandise; les particuliers, les commerçants en métaux précieux, la Banque de France, tout le monde peut, comme l'État lui-même, apporter des lingots et matières d'or ou d'argent au bureau du change de l'hôtel des monnaies pour les faire transformer en espèces monnayées, remises en échange dans les délais fixés pour la fabrication par le bon du change ou bon de monnaie [no 503 à 506].

512. Enfin 4o cette liberté du monnayage est illimitée. Cette règle est à la fois juste et sans danger, puisqu'il s'agit de monnaies-marchandises, et que c'est la même valeur (moins la retenue du change ou prix de fabrication) qui est remise, sous la forme monétaire, aux porteurs des matières d'or et d'argent. Cette liberté illimitée est salutaire, puisqu'elle offre le meilleur moyen de proportionner la quantité de monnaie aux besoins des transactions, d'équilibrer l'offre et la demande. Elle consacre heureusement l'une des applications du principe de la liberté commerciale. Il est bien entendu seulement que, dans notre approbation absolue de la liberté illimitée du monnayage, nous réservons tout ce qui es relatif à la question du double étalon et de la préférence méritée par l'unité d'étalon d'or [nos 547 à 523], et que nous approuvons entièrement toutes limitations apportées à ce principe de la liberté illimitée du monnayage, en ce qui concerne la fabrication des pièces de 5 francs argent, par les conventions internationales et par la loi [no 5416 et suivants].

543. Des nécessités particulières, surtout le besoin de porter remède à la disparition des pièces divisionnaires d'argent, sont venues contraindre le législateur français, à la suite des législa teurs des pays environnants, à déroger aux principes de la loi de l'an XI, pour les pièces d'argent de 20 cent., 50 c., 4 fr. et 2 fr., transformées en monnaies d'appoint avec un abaissement de titre å 835 millièmes. Une loi du 25 mai 1864 avait commencé l'œuvre pour les deux plus faibles de ces pièces. Nous n'eûmes pas de peine à prédire alors' qu'il faudrait bientôt comprendre les deut

Février 1865, La monnaie au point de vue de l'économie politique et à droit, et du Service monétaire de la France comparé à celui des principa Etats europeens, page 26.

THÉORIE DES MONNAIES D'APPOINT.

481

autres dans la mesure, et que l'expression matérielle du franc telle ue le définit la loi de l'an XI pourrait être uniquement repréentée dans son quintuple, c'est-à-dire la pièce de 5 francs. C'est ce qu'a fait la convention monétaire intervenue le 23 décembre 1865 ntre la France, la Belgique, la Suisse et l'Italie, par laquelle ces uatre puissances, « animées du désir d'établir une plus complète harmonie entre leurs législations monétaires, de remédier aux inconvénients qui résultent pour les communications et les transactions entre les habitants de leurs États respectifs de la diversité du titre de leurs monnaies d'appoint en argent, et de contribuer, en formant entre eux une union monétaire, aux progrès de l'uniformité des poids, mesures, et monnaies », s'engagcaient otamment à frapper toutes leurs monnaies divisionnaires d'arent (2 fr., 4 fr., 50 et 20 cent.) au titre de 835 millièmes. Il est ésulté de la loi monétaire du 14 juillet 1866 qui a modifié dans ce ens la loi de l'an XI, qu'il n'y a plus en France, ainsi que dans les ois autres pays contractants, de véritable monnaie d'argent que pièce de 5 francs; les autres pièces d'argent ne sont plus depuis 66 que du billon d'argent.

514. Aussi cet acte international et la loi du 14 juillet 1866, se nformant aux principes économiques, se sont bien gardés de nfondre avec les monnaies proprement dites ces pièces d'arnt cessant d'être monnaies-marchandises; elles ont suivi, en qui les concerne, quatre règles directement contraires à celles, -dessus exposées [no 509 à 512], édictées par la loi de l'an XI et i ne s'appliquent plus qu'à nos pièces d'or et à la pièce de 5 francs argent.

4° Les pièces, réduites à 835 millièmes, n'ont plus une valeur elle égale à leur valeur nominale; la différence entre les deux leurs est des 65 millièmes de métal fin retirés ; 2o en conséence, ces pièces n'ont plus le cours forcé sans limite entre partiliers, et sont réduites, comme le billon de cuivre limité à 5 francs r le décret du 10 août 1810, bien que dans une limite plus large, rôle de monnaies d'appoint, jusqu'à concurrence de 50 francs. ur chaque paiement, sauf pour les caisses publiques; la loi de 54 fixait cette limite à 20 francs, et elle était préférable. L'exemde l'Angleterre et les désirs des États contractants ont fait mettre en 1865 celle de 50 francs. Toutefois, dans quelques étassements coloniaux de la France, où il a même fallu admettre visoirement la circulation de certaines monnaies étrangères, il

T. I.

31

« PreviousContinue »