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RENOUVELLEMENT DU SÉNAT.

nomment 3, cinquante départements en nomment 2; le territoire de Belfort, les trois départements de l'Algérie et les quatre grandes colonies, nomment chacun sénateur (L. C. 24 février, art. 2).

44. Les 75 sénateurs élus par l'assemblée ou remplacés par le Sénat lui-même sont inamovibles (L. C. 24 février, art. 7); les 225 sénateurs des départements sont élus pour neuf années et renouvelables par tiers tous les trois ans, suivant une division en trois séries faite par le Sénat lui-même, comprenant chacune 75 sénateurs, et dont l'ordre de renouvellement a été désigné par la voie du sort en séance publique (L. C. 24 février 1875, art. 6, et procès-verbal de la séance du Sénat du 29 mars 1876).

La série B, formée des 29 départements compris par ordre alpha. bétique entre la Garonne (Haute-) et l'Oise inclusivement, du département de Constantine en Algérie et de la Martinique, est sortie la première et a été renouvelée au commencement de l'année 1879. La série C, formée des 28 derniers départements dans l'ordre alphabétique, de l'Orne inclusivement jusqu'à l'Yonne, du département d'Oran et des Indes françaises, sort la seconde; et la série A, formée des 30 premiers départements dans l'ordre alphabétique, de l'Ain au Gard inclusivement, du département d'Alger, de Constantine et de la Réunion, sort la troisième.

Ainsi la règle constitutionnelle adoptée pour le Sénat est celle du renouvellement partiel; d'autre part le Sénat, contrairement à la règle admise pour la Chambre des députés ne peut être dissous.

42. En ce qui concerne la Chambre des députés, la loi constitutionnelle du 25 février 1875 (art. 12) se borne à poser le principe fondamental qu'« elle est nommée par le suffrage universel »>, assurant ainsi l'homogénéité de sa composition; mais elle laisse à la loi électorale le soin de déterminer les conditions de son élection, même en ce qui concerne le mode d'élection par scrutin de liste ou scrutin individuel, la durée de son mandat, les conditions de son renouvellement.

Tous ces points sont réglés par la loi organique du 30 novembre 1875 sur l'élection des députés, qui occupe une place considérable dans notre étude d'ensemble sur la législation électorale [nos 545 à 564]. Nous nous bornons à constater ici que l'article 44 de cette loi [no 564] consacre la règle de l'élection des députés au scrutin individuel par arrondissement, avec fractionnement des arrondissements dont la population dépasse cent mille habitants et leur

RÈGLES COMMUNES AUX DEUX CHAMBRES.

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division en circonscriptions électorales établies par une loi du 24 décembre 1875, portant sur cette base, à 534, le nombre des députés, avec ceux des colonies [voir no 539], et ne pouvant être modifiées, comme la loi organique elle-même, que par une autre loi. Aux termes de l'article 15 de la loi organique du 30 novembre 1875, « les députés sont élus pour quatre ans ; la Chambre se re» nouvelle intégralement [no 564] », et l'âge d'éligibilité est fixé par l'article 6 à vingt-cinq ans.

La loi constitutionnelle du 25 février 1875 (art. 5) donne au président de la République le droit, admis au profit de la couronne dans les monarchies, de dissoudre la Chambre des députés avant l'expiration légale de son mandat, à charge de faire procéder à de nouvelles élections dans le délai de trois mois; l'exercice de ce droit de dissolution est toutefois subordonné à l'avis conforme du Sénat, doté de cette importante prérogative.

43. Une règle capitale commune aux deux chambres organisées par les lois constitutionnelles de 1875, est qu'elles ne sont pas permanentes; qu'elles ne peuvent siéger qu'ensemble et en session d'une durée minima de cinq mois chaque année; qu'elles sont soumises aux mêmes règles pour leur réunion, leur convocation, leur ajournement et leur clôture par le président de la République (L. C. 16 juillet, art. 1, 2 et 4), sauf les réserves de l'article 4.

Nous avons vu que les deux chambres avaient les mêmes attributions législatives [no 39] et les mêmes attributions constituantes éventuelles pour former ensemble l'assemblée nationale de révision [no 38]; elles forment également l'assemblée nationale chargée de procéder à l'élection du président de la République [no 47]; mais nous avons déjà fait remarquer [no 38] l'avantage qui, au cas de réunion des deux assemblées en une seule, résulte pour la Chambre des députés du nombre plus considérable de ses membres qui en forment près des deux tiers; il n'est pas compensé par les honneurs de la présidence dévolus au Sénat [no 44 3o].

Nous verrons, en traitant du pouvoir exécutif, les conditions communes dans lesquelles les lois constitutionnelles admettent l'intervention des chambres dans l'action de ce pouvoir [no 50].

Les deux chambres siégent en séance publique et ont le droit de se former en comité secret (L. C 16 juillet, art. 5), nomment ellesmêmes leurs bureaux chaque année (id., art. 44), font leurs règlements (publiés au Journal officiel du 19 juillet 1876), vérifient les

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RÈGLES SPÉCIALES AU SÉNAT.

pouvoirs de leurs membres et peuvent seules recevoir leurs démissions (L. C. 46 juillet, art. 40).

Les membres des deux chambres reçoivent la même indemnité (L. 30 novembre 1875, art. 17 [n° 562], et L. 2 août 1875, art. 26 [no 565]). Tout mandat impératif est nul et de nul effet (L. 30 novembre 1875, art. 13). Les cas d'indignité et d'incapacité sont les mêmes (L. 2 août 1875, art. 27); mais, au point de vue des incompatibilités, il en est autrement [no 44 6o].

Les membres des deux chambres jouissent au même titre de l'immunité de toute recherche ou poursuite en raison des opinions ou votes émis par cux dans l'exercice de leurs fonctions (L. C. 16 juillet 1875, art. 13, et L. 47 mai 1849 [no 695]); ils ne peuvent être poursuivis ou arrêtés, pendant la durée de la session, et sauf le cas de flagrant délit, qu'avec l'autorisation de la chambre dont ils font partie (L. C. 16 juillet 1875, art. 14).

44. Les attributions et règles propres au Sénat à l'exclusion de la Chambres des députés, en outre de celles qui tiennent à leurs modes divers de formation et déjà expliquées [nos 39 à 42], sont les suivantes : 4° le remplacement des sénateurs inamovibles en cas de vacance [no 40]; 2o le droit actuellement épuisé de révoquer les conseillers d'État élus par l'assemblée avant la loi du 25 février 1875 (art. 4 in fine); 3° lorsque les deux chambrés se réunissent en assemblée nationale pour la révision de la constitution ou l'élection du président de la République, le bureau de cette assemblée est celui du Sénat (L. C. 46 juillet, art. 112); 4° le Sénat ne peut être dissous [no 44]; 5o c'est sur son avis conforme que le président de la République peut dissoudre la Chambre des députés [no 42]; 6o tandis que l'incompatibilité du mandat de député avec une fonction publique est la règle, n'admettant que des exceptions limitativement déterminées (L. 30 novembre 1875, art. 8 à 12 [no 562]), cette règle devient au contraire l'exception en ce qui concerne les fonctions de sénateur (L. 2 août 1875, art. 20 [no 565]); 7° le Sénat peut siéger sans que la Chambre des députés soit en session, dans deux cas exceptionnels prévus par les articles 3 in fine et 4 in fine de la loi du 16 juillet 1875; 8° le Sénat peut scul être constitué en cour de justice.

45. Cette dernière attribution est conférée au Sénat par l'article 9 de la loi du 24 février et l'article 12 de la loi du 16 juillet 1873; aux termes de ces articles, le Sénat peut être constitué en

FONCTIONS JUDICIAIRES DU SÉNAT.

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cour de justice: 1° pour juger le président de la République; 2o pour juger les ministres; et 3° pour juger toute personne prévenue d'attentat commis contre la sûreté de l'État. Le Sénat est saisi, dans les deux premiers cas, par la mise en accusation que peut seule prononcer la Chambre des députés [no 46 et 54]. Dans le troisième cas, le Sénat est saisi par un décret présidentiel rendu en conseil des ministres, et qui, si la justice ordinaire est saisie, peut intervenir jusqu'à l'arrêt de renvoi devant la cour d'assises. Une loi, ou, à défaut de loi, le Sénat, détermine le mode de procéder pour l'accusation, l'instruction et le jugement. [Voir, à propos des priviléges de juridiction, nos 746 et 747.]

Toutes les constitutions monarchiques ou républicaines ont reconnu, comme celle de 1875, la nécessité de constituer une juridiction plus élevée, investie d'une double compétence ratione persona ou ratione dignitatis, et ratione materia, en raison soit de la position politique élevée des accusés, soit de la gravité et de la portée politique du crime. Mais le législateur de 1875 avait le choix entre deux systèmes : celui des Chartes de 1814 et de 1830, qu'il a imité, et qui donnait à la Chambre des pairs, c'est-à-dire à un corps également politique, cette haute attribution judiciaire; et celui des hautes cours de justice, composées, sur le modèle des cours d'assises, de magistrats appartenant à la cour de cassation, et de hauts jurés pris par la voie du sort dans tous les conseils généraux, système qui était organisé par les Constitutions de 1791, de l'an III, de l'an VIII, de 1848 et de 1852.

46. La Chambre des députés possède aussi, en outre des attributions législatives constituantes et électives, qui lui sont communes avec le Sénat, deux attributions qui n'appartiennent qu'à elle seule : 4o les lois de finances doivent d'abord lui être présentées et être votées par elle, avant d'être soumises au Sénat, sans préjudice du pouvoir de celui-ci de rejeter ou d'amender ces lois comme toutes les autres [no 39]; 2° si le Sénat a seul le droit de juger le président de la République et les ministres, la Chambre des députés a seule le droit de les mettre en accusation [no 45]. [Voir aussi no 38 et 43 2o].

47 Suivant la règle de l'unité d'action gouvernementale et administrative [no 26], le pouvoir exécutif est confié aux mains d'un seul homme; il porte le titre de président de la République, et, conformément à l'institution républicaine, il est électif, renouvelable par l'élection et par périodes fixes. L'élection du président a

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POUVOIR EXÉCUTIF; PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE.

lieu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et par la Chambre des députés réunis en assemblée nationale; la durée de son pouvoir est de sept ans ; il est indéfiniment rééligible. S'il y a solution de continuité et vacance par décès ou par toute autre cause, dans l'intervalle très court qui doit s'écouler avant une nouvelle et immédiate élection, le conseil des ministres est investi du pouvoir exécutif (L. C. 25 février, art. 2 et 7; L. C. 46 juillet, art. 3).

Ces textes ont reçu leur application le 30 janvier 1879 à l'occasion de la démission du président de la République et de son remplacement par l'élection d'un nouveau président, élu dans l'assemblée nationale composée des deux Chambres, par 563 voix, sur 670 suffrages exprimés. Cette élection a mis fin à la disposition du 24 de l'article 8 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875, qui avait réservé exclusivement jusqu'au 20 novembre 1880 au président de la République le droit de provoquer la révision de la constitution.

48. Nous avons déjà vu quelles sont les attributions constituantes et législatives du président de la République. — Il partage avec les chambres le droit de demander la révision des lois constitutionnelles en tout ou en partie (L. C. 25 février, art. 8 [no 38] ). — Il partage avec les chambres l'initiative législative et peut exiger des deux chambres une nouvelle délibération, sans pouvoir jamais ni faire partie des assemblées, ni participer personnellement au vote et même à la discussion des lois, conformément au principe de la séparation des pouvoirs (L. C. 25 février, art. 3 24; L. C. 46 juillet, art. 6 et art. 7 § 2 [no 39]).

49. L'article 3 § 4 in fine de la loi du 25 février 4875 dispose que le président de la République « promulgue les lois lorsqu'elles » ont été votées par les deux chambres; il en surveille et en as>> sure l'exécution ». L'article 7 24 de la loi du 16 juillet 1875 fixe le délai de la promulgation, à un mois de la date de la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée, et à trois jours en cas de déclaration d'urgence par les deux chambres.

Un décret du 6 avril 1876 a pourvu à l'exécution de ces dispositions, en réglant la formule de promulgation des lois; il y a lieu de regretter qu'il n'oblige pas à insérer dans le décret de promulgation la date du dernier vote législatif, qui constitutionnellement donne sa date à la loi [voir nos 20, 21 et 39].

Un décret-loi du gouvernement de la défense nationale du 5 no

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