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COMPÉTENCE DES CONSEILS DE PRÉFECTURE

331. Dans tous les cas prévus par les 22 3 et 4, il est procédé au règlement de l'indemnité, conformément aux textes ci-dessous de la loi du 16 septembre 1807; les conseils de préfecture ne sont jamais liés, en matière de travaux publics, par le résultat de l'expertise par eux ordonnée; mais il y a nécessité d'expertise, et, en cas de désaccord des experts, nécessité de tierce expertise. Le caractère obligatoire de l'expertise doit subir toutefois un tempérament que la raison impose et que la jurisprudence consacre; le conseil d'État admet avec raison que l'expertise cesse d'être obligatoire lorsqu'en tenant les faits allégués pour avérés, il appert qu'ils ne peuvent servir de base à une allocation d'indemnité (C. d'Ét. 5 mai 1859, Hubie; 25 février 1864, Kégel; 2 mai 1866, Bompois; 4 fëvrier, 10 mars, et 5 août 1869).

La prestation de serment des experts est considérée comme une formalité substantielle, prescrite à peine de nullité de l'arrêté qui s'ensuivrait, sauf pour l'ingénieur en chef tiers expert de droit et ayant prêté le serment afférent à ses fonctions (C. d'Ét 24 juin 1866).

Il est aussi de jurisprudence (C. d'Et. 19 janvier 1850; 21 juin 1866; 17 janvier 1867, Boyron; 3 juin 1869, Limozin) que les indemnités dues pour dommages quelconques résultant de l'exécution de travaux publics doivent être fixées, de même que les indemnités pour occupations temporaires de terrains, d'après les règles tracées dans les articles ci-dessous de la loi du 16 septembre 1807.

Les experts pour l'évaluation des indemnités relatives à une occupation de terrain dans les cas prévus au présent titre seront nommés, pour les objets de grande voirie, l'un par le propriétaire, l'autre par le préfet, et le tiers expert, s'il en est besoin, sera de droit l'ingénieur en chef du département. Lorsqu'il y aura des concessionnaires, un expert sera nommé par le propriétaire, un par le concessionnaire, et le tiers expert par le préfet. Quant aux travaux des villes, un expert sera nommé par le propriétaire, un par le maire de la ville, ou de l'arrondissement pour Paris, et le tiers expert par le préfet (Loi du 16 septembre 1807, relative au desséchement des marais, etc., art. 56).- Le contrôleur et le directeur des contributions donneront leur avis sur le proces— verbal d'expertise, qui sera soumis par le préfet à la délibération du consid de préfecture; le préfet pourra, dans tous les cas, faire faire une nouvelle er pertise (art. 57).

332. Cet article 56 de la loi du 16 septembre 1807 a mérité des critiques fondées. D'une part, la tierce expertise qu'il prescrit el qui est généralement nécessaire, car il est assez rare que les experts désignés par les parties soient d'accord entre eux, constitue après l'expertise une nouvelle et seconde opération qui retarde d'autant

EN MATIÈRE DE GRANDE VOIRIE; DÉFINITION.

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la solution du litige; il serait plus avantageux de ne faire procéder qu'à une opération unique. D'autre part, la désignation faite par cet article 56, de l'ingénieur en chef pour tiers expert de droit, est depuis longtemps justement combattue. Le projet de loi de 1870 relatif à la procédure à suivre devant les conseils de préfecture, et dont il a été parlé ci-dessus [nos 301 et 302], proposait en cette matière d'importants changements contraires aux dispositions de 1807. Sur le dernier point notamment, l'exposé des motifs s'expliquait de la manière suivante : « On a depuis longtemps fait remarquer que l'ingénieur en chef, sous la direction duquel se sont accomplis les travaux dont l'exécution donne lieu au litige, est mal placé pour émettre un avis impartial sur la réclamation, ou que du moins son impartialité peut être suspectée par les parties. Aussi beaucoup d'ingénieurs demandent eux-mêmes l'abrogation de cette disposition de loi ».

B. Grande voirie.

333. Définitions; petite et grande voirie ; renvois.

334. Attributions de l'administration active en matière de voirie.

335. Son pouvoir d'ordonner la démolition des constructions menaçant ruine. 336. Voies de recours; compétence administrative et judiciaire.

337. Juridiction contentieuse et répressive relativement à la grande voirie; à la voirie urbaine et aux chemins vicinaux;

338. 339.

aux rues traverses des routes.

340. Nature de la contravention au cas de construction empiétant sur le sol de la voie publique; prescription; controverse.

341. Juridiction relative aux contraventions de grande voirie; loi de l'an X; décrets de 1811 sur les routes; de 1812 sur les canaux, fleuves et ports; loi de 1845 sur les chemins de fer.

342. Loi des 19-22 juillet 1791 qui maintient en vigueur les anciens règlements touchant la voirie.

313. Pénalités de ces anciens règlements.

344. Édit de décembre 1607.

345. Loi du 23 mars 1842.

346. Juridiction relative à la police du roulage.

333. Le 25 de l'article 4 de la loi du 28 pluviôse de l'an VIII rapporté no 313] dispose que le conseil de préfecture prononcera sur les difficultés qui pourront s'élever en matière de grande

- voirie ».

Le régime de la voirie est l'ensemble des règles relatives aux oies de communication. Elle se divise, d'après la nature et le egré d'importance des voies de communication, en petite et rande voirie.

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ATTRIBUTIONS DE L'ADMINISTRATION ACTIVE

La petite voirie comprend les voies de circulation d'utilité com munale: les chemins vicinaux et les chemins ruraux, formant la voirie rurale, et les rues et places des villes, bourgs et villages, formant la voirie urbaine ou municipale; — la grande voirie enbrasse les routes nationales et départementales, ainsi que les rues des villes, bourgs ou villages qui leur font suite, les chemins de fer, même ceux d'intérêt local (Lois de 1865 et de 1880; circ. min. 12 août 1865), les fleuves, rivières navigables ou flottables, canaux de navigation, ports, havres et rades de commerce, les rues et places de Paris. Sur ce dernier point le décret du 26 mars 1852, article 1er, porte : « Les rues de Paris continuent d'être soumises >> au régime de la grande voirie ».

Nous ne devons nous occuper ici que de la grande voirie; encore, ses dépendances appartenant au domaine public, ce sera dans une autre partie de l'ouvrage que nous devrons traiter de l'établissement et de la suppression de ces grandes voies de com munication [no 928 à 951]; c'est aussi en traitant de l'alignemen et des servitudes d'utilité publique que nous traiterons de l'élar gissement et des garanties légales de conservation de ces voies publiques [n° 850 à 864, 867 à 874].

334. Pour commenter le paragraphe 5 de l'article 4 de la loi de 28 pluviôse de l'an VIII, en déterminant les attributions des conseils de préfecture en cette matière, nous devons d'abord les dis tinguer de celles qui appartiennent à l'administration active dans l'intérêt de la sûreté et de la liberté du passage. L'article 6 de la loi des 7-14 septembre 1790, suivant l'idée du temps, confondait, au contraire, le contentieux avec l'administration pure; texte, qui n'offre plus qu'un intérêt historique, était ainsi conçu « L'administration, en matière de grande voirie, appartiendr >> aux corps administratifs; et la police de conservation, tant po » les grandes routes que pour les chemins vicinaux, aux juges d >> district >>.

L'administration active doit prévenir ou supprimer les acciden ou entreprises de nature à compromettre la facilité et la sécurit des communications; elle est chargée de la police de la voir ayant pour objet l'intérêt général de sa conservation; pour grande voirie, l'autorité administrative compétente est le préfe pour la voirie urbaine, c'est le maire (loi des 16-24 août (7) art. 3 2 1er [voir no 203] ).

Le rôle de la justice administrative est de réprimer tous les ac

EN MATIÈRE DE VOIRIE; PÉRILS IMMINENTS.

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de nature à porter atteinte à la viabilité et à la sûreté des voies publiques soumises au régime de la grande voirie, la justice judiciaire n'ayant de compétence que relativement à la petite voirie. Or l'administration active, indépendamment des pouvoirs destinés à prévenir les périls imminents dont il va être parlé, intervient principalement dans la police de la grande voirie par voie de poursuite devant la justice administrative, afin de faire respecter les interdictions écrites dans les lois et règlements.

335. L'un des plus grands périls qui menacent la sécurité et même l'existence des routes, en même temps que la sûreté des personnes, est la chute subite des constructions édifiées le long de ces voies publiques. Les préfets, comme administrateurs de la grande voirie, ont le droit et le devoir d'ordonner la démolition des maisons qui menacent ruine sur le bord des routes et sur le bord des rues qui en dépendent. Il est à remarquer que les principes de la matière et le mode de procéder sont les mêmes, sous ce rapport, pour la grande voirie et la voirie urbaine; et ce que nous allons dire des droits des préfets pour la première, s'applique à ceux des maires pour la seconde en vertu de leurs attributions de police et de voirie municipales [n° 203].

Lorsqu'un bâtiment est reconnu menacer ruine et compromettre la sûreté de la voie publique, son état est constaté par un procèsverbal dressé par un commissaire de police. Le préfet enjoint au propriétaire de réparer sa construction, dans le cas où cette réparation peut être permise, et, dans le cas contraire, il ordonne de démolir dans un délai rapproché. L'arrêté préfectoral est notifié au propriétaire, et contient désignation d'un expert chargé de procéder à la reconnaissance de la propriété dans l'intérêt de l'administration et contradictoirement avec celui de la partie, dans l'hypothèse où l'existence du danger serait contestée; si les deux experts sont d'avis différents, le préfet nomme un tiers expert; après quoi doit intervenir un nouvel arrêté préfectoral. Ces formalités d'expertise contradictoire ne sont applicables, ni en matière de petite voirie (C. d'Ét. 24 février 1860; c. cass. ch. crim. 2 octobre 1847; 6 mars 1857; 25 janvier 1873, de Valin), ni même en matière de grande voirie au cas de péril tout à fait imminent; dans ce dernier cas, l'administration préfectorale doit pourvoir d'urgence, et sous sa responsabilité, aux intérêts de la sûreté pulique; mais si le propriétaire venait à prouver devant le mimistre que sa maison ne menaçait pas ruine, une indemnité lui serait due.

T. I.

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DÉMOLITION DES BATIMENTS MENAÇANT RUINE.

L'arrêté préfectoral et l'arrêté ministériel confirmatif, qui, hors le cas de péril urgent pour la sécurité publique reconnu par l'administration, ordonnent la démolition sans qu'il ait été procédé à une expertise contradictoire, doivent être annulés par le conseil d'État pour excès de pouvoir (C. d'Ét. 30 janvier 1862, Lemarić'; 24 février 1870, Blanc; 4 mai 1870, Boncorps).

Il est admis, quant à la fixation des règles auxquelles est soumis l'exercice du droit de l'administration, qu'il y a lieu, d'après une jurisprudence ancienne et constante, d'ordonner la démolition d'un bâtiment pour cause de péril dans les cas dont l'énumération suit: — « 1° lorsque c'est par vétusté que l'une ou plusieurs jambes étrières, trumeaux ou pieds-droits sont en mauvais état;

2o lorsque le mur de face sur rue est en surplomb de la moiti de son épaisseur, dans quelque état que se trouvent les jambes étrières, les trumeaux et pieds-droits; 3° si le mur sur rue es à fruit, et s'il a occasionné sur la face opposée un surplomb égal au fruit de la face sur rue; 4° chaque fois que les fondations sont mauvaises, quand il ne se serait manifesté dans la hauteur du bâtiment aucun fruit ni surplomb; — 5° s'il y a un bombement égal au surplomb dans les parties inférieures du mur de face.

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Le procès-verbal dont il a été parlé ci-dessus doit constater l'existence de ces indices, et le droit de propriété trouve sa garantie dans l'accomplissement des formalités que nous avons décrites. Ces formalités sont tracées par deux déclarations royales de 18 juillet 1729 et 18 août 1730; la compétence, judiciaire sous l'ancien régime, d'après ces déclarations, est passée à l'adminis tration active sous l'empire des principes nouveaux; aussi ces declarations ne sont-elles plus aujourd'hui que des règlements d'exé cution; elles sont maintenues et observées, mais seulement so: le rapport des expertises contradictoires prescrites dans les a ordinaires de péril. Nous donnons le texte des articles 7, 8 et de la déclaration du 18 août 1730; ils reproduisent à peu de chose près les articles correspondants de celle du 18 juillet 1729 et co sacrent un privilége spécial.

avec com &

Au cas que la partie soutienne qu'il n'y a aucun danger, elle aura la facu de nommer un expert de sa part, pour faire la visite conjointement a qui sera nommé par notre procureur audit bureau, et sera tenue, la partis, le nommer sur-le-champ, sinon sera passé outre à la visite par l'expert qui aura été nommé par notre dit procureur (art. 7). La visite sera faite

le temps qui aura été fixé par la sentence, en présence de la partie, ou de „ ment appelée au domicile de son procureur, si elle a comparu, sinon, forme prescrite par l'article 4, et ce, soit que la sentence ait été donnée

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