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part. 7, p. 392). Or, cette disposition a été violée dans l'espèce; Daret a changé le mode de construction et a réclamé 34,000 fr. sans qu'il y ait d'écrit relatif à ce changement et à ce prix exorbitant. L'arrêt déclare qu'il y a des conventions verbales, mais elles ne suffiraient pas; il faudrait, au moins, qu'elles fussent écrites. D'ailleurs, la cour de Paris n'allègue aucune convention sur le prix pour les changemens, puisqu'elle s'en rapporte à la première convention; dès-fors, c'était encore le cas de ne pas admettre les changemens faits par Daret, puisque l'une des deux conditions nécessaires ne se rencontre pas.

2o Violation des lois sur les brevets d'invention, en ce que la cour a donné l'option de conserver la machine, ou d'en recevoir le prix. ARRÊT.

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LA COUR,-sur les concl. de M. Joubert, av. gén.; -Attendu, sur le moyen, pris de la prétendue violation de l'art. 1793 c. civ., qui ne permet aucune augmentation de prix dans les entreprises et constructions sur un plan convenu, sous le prétexte des changemens ou additions qui auraient pu y être faits, qu'autant qu'une pareille convention aurait été rédigée par écrit; Attendu que, dans l'hypothèse actuelle, l'arrêt attaqué constate, en fait, que le demandeur en cassation a dérogé au mode primitivement adopté pour l'établis sement de la machine à imprimer qui a fait la matière du litige, et qu'il a consenti que l'entrepreneur, le sieur Daret, substituât à l'arbre à rayons, qui devait faire marcher la presse, une chaîne sans fin mue par quatre roues d'engrenage; qu'en conséquence de ce consentement, il a annoté de sa main les nouveaux plans qui avaient été donnés par ledit sieur Daret pour construire la machine dans le nouveau système de la chaîne sans fin ;-Qu'il résulte, en outre, des faits et circonstances de la cause, que le demandeur a surveillé la confection de cette machine, et n'a pu ignorer, par conséquent, les changemens que l'entrepreneur avait apportés au mode d'exécution qu'il avait d'abord proposé; Attendu que l'arrêt a restreint la condamnation qu'il a prononcée contre le demandeur à la somme de 15,000 fr.

et aux frais de pose, maximum du prix reconnu avoir été ainsi stipulé lors des premières conventions, et a rejeté la demande formée par l'entrepreneur de la somme de 34,393 fr. 88 c., pour le prix originaire et les prétendues augmentations qu'il soutenait avoir faites à cette machine;-D'où il suit que l'arrêt attaqué, loin d'avoir violé les dispositions de l'art. 1793 que le demandeur invoquait, s'y est, au contraire, exactement conformé; Attendu, sur le 2° chef ou moyen proposé seulement à l'audience et pris de la violation prétendue des lois sur les brevets d'invention, en ce que ledit arrêt a déféré à l'entrepreneur l'option de conserver la machine, ou d'en recevoir le prix-Considérant que cette dispo'sition de l'arrêt étant purement facultative et comminatoire, elle ne peut donner aucune ouverture à la cassation;-Rejette.

Du 16 août 1826. — Ch. req. —M. Voysin de Gartempe, f. f. de prés.-M. Chilhaud de Larigaudie, rapp.

-M. Isambert, av.

PROCES-VERBAL, PREUVE, CONTRAVENTION.

Les procès-verbaux et rapports destinés à constater les contraventions, lors même qu'ils sont faits par des agens ou officiers auxquels la loi n'a pas accordé le droit d'en étre crus jusqu'à inscription de faux, faisant néan– moins, aux termes de l'art. 154 c. inst. cr., foi en justice jusqu'à preuve contraire, le tribunal de simple police, saisi d'une contravention au balayage des rues, constatée par un procès-verbal d'un de ces agens ou officiers, qui renvoie le prévenu des poursuites, sans que ce proces-verbal ait été attaqué ni débattu par une mandé à faire cette preuve, viole les art. 154 c. inst. cr. preuve contraire, et sans même que le prévenu ait deet 471, no 3, c. pén.

(Minist. pub. C. Talon et Gaillard.)

Du 19 août 1826.—Ch, crim, cass.-M. Portalis, pr. -M, Gary, rap.

Nota. Le même jour, même arrêt entre le même commissaire de police et le sieur Mirabel, tonaelier, qui avait déposé ses tonneaux sur la voie publique, et qui, quoique ce fait fût reconnu constant, avait été acquitté. Le point jugé par ces arrêts est des plus constans. . v Procès-verbal.

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Fin de la première Partię.

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JOURNAL DES AUDIENCES.

DEUXIÈME PARTIE COURS ROYALES.

PRESCRIPTION, CHEMIN VIGINAL. Lorsqu'un chemin vicinal, non classé dans le tableau des chemins vicinaux d'une commune, a cessé de servir à l'usage pour lequel il était originairement destiné, la propriété peut en être acquise par prescription, encore qu'il ne soit pas justifié, que sa suppression a été formellement prononcée par l'autorité administrative.Dans ce cas, la possession publique et non interrompue à titre de propriétaire, pendant le temps nécessaire pour prescrire, dispense de représenter un acte de suppression. (C. civ., 541, 2226 et 2227) (1).

(Duvrac C. com de Saint-Romain de Colboc.) La commune de Saint-Romain revendiquait, contre les époux Duvrac, un terrain anciennement occupé par un chemin vicinal tombé en désuétude, mais que l'autorité administrative ne paraît pas avoir jamais supprimé. Les époux Duvrac opposaient la prescription de dix et même de quarante ans. Jugement du tribunal civil du Havre qui statue en ces termes : - «Attendu qu'on ne peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le commerce; que si les biens particuliers des communes, quoique l'aliénation n'en soit pas permisé sans autorisation, peuvent être prescrits, il ne faut pas en conclure que les choses communales et destinées à des usages publics, comme les chemins publics, les églises, les places publiques, puissent être l'objet

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(1) La question de savoir si les chemins vicinaux sont prescriptibles, est très-controversée parmi les auteurs. Pothier, de la Prescription, 1re part., ch. 1er, no 7; Dómat, Lois civiles, liv. 3, tit. 7, sect. 5, § 2; Denisart, vo Chemin, enseignent qu'ils sont imprescriptibles; Dunod, des Prescriptions, soutient aussi qu'ils ne peuvent être prescrits par le temps ordinaire, mais il admet la prescription immémoriale. Parmi les auteurs modernes, M. Henrion de Pansey, Compétence des juges de paix, chap. 44, enseigne que, dans notre droit public, les chemins sont imprescriptibles, et que la possession la plus longue est comptée pour rien. - M. Robion, n° 70, adopte la même opinion. M. Isambert, Traité de la voirie, liv. 1er, chap. 3, § 3, et ch. 4, sect. 1, S1, qui examine longuement la question, admet une distinction entre les chemins classés au nombre des chemins vicinaux par l'autorité administrative et ceux qui ne le sont pas. Quant aux premiers, il les soutient imprescriptibles tant qu'ils he sont pas rendus à l'agriculture par l'autorité locale et sur l'approbation de l'autorité administrative supérieure; à l'égard des seconds, il pense qu'ils peuvent être prescrits, parce que le caractère d'imprescriptibilité n'est attaché qu'à l'acte de la puissance publique, qui fait sortir les chemins de la classe des propriétés ordinaires.-M. Garnier, Traité des chemins, n° 163, et Explication de la loi du 28 juillet 1824, pense, sans distinction, que la propriété des chemins vicinaux peut être acquise par la pos session trentenaire.-M. Vazeille, Traité des prescriptions, p. 89 et suiv., enseigne la même doctrine, qui est aussi exposée par l'auteur du Code des chemins vicinaux, p. 19.-Dans notre espèce, le chemin n'avait pas été classé, et plusieurs circonstances prouvaient qu'il avait été dans l'intention de l'autorité de ne pas maintenir ce chemin au nombre des chemins vicinaux. La question la plus difficile n'a donc pas été décidée par l'arrêt que nous rapportons.

ANNEE 1826.-2 PARTIE

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d'une prescription; qu'elles sont placées en effet hors du commerce; Qu'à la vérité, en rentrant dans le commerce, elles deviennent prescriptibles; mais que le fait qui les change de nature doit être constant avant tout; Que cette doctrine, savamment exposée par Domat Lois civ., liv. 3, tit. 7, sect. 5, S 2, repousse dans l'espèce, toute idée de prescription; - Que sans doute, ainsi que le dit cet auteur, la profanation d'un lieu sacré, la destruction des murs et fossés dont une ville était entourée et propriétaire, seraient des faits de nature à faire rentrer l'église et les fossés dans la classe des domaines communaux ordinaires; mais qu'à l'égard d'un chemin public, il ne suffit pas qu'il soit abandonné ou négligé comme de peu d'utilité, il faut encore que la suppression en soit légalement prononblissement, s'il lui était utile, et qu'enfin si, lorsqu'un cée; qu'un seul habitant pourrait en réclamer le rétachemin a été supprimé administrativement, la possession quadragénaire fait présumer l'aliénation, cette possession ne peut en même temps rendre présumables et la suppression et l'aliénation; qu'ainsi, la prescription quadragénaire opposée par les époux Duvrac doit être écartée malgré les termes de l'art. 521 c. civ.; Que cette prescription ne vaut de titre que lorsque le titre n'est pas représenté; que la représentation d'un titre vicieux écarte la prescription, et que le possesseur injuste d'un emplacement démontré être celui d'un chemin public he prescrit pas plus qu'un dépositaire ; -Que, d'ailleurs, la prescription décennale est également inapplicable.

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Appel par les époux Duvrac. ARRÊT.

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LA COUR, sur les concl. de M. Levesque, subst. Attendu que si, d'un côté, l'intérêt public exige que des chemins assez nombreux soient conservés pour la facilité des communications et l'avantage du commerce, d'un autre côté, l'intérêt de l'agriculture et de la propriété s'oppose à la multiplicité des chemins; Que c'est pour concilier ces divers intérêts qu'un arrêté du 23 mess. an 5 a ordonné la confection d'un état général des chemins vicinaux existant dans chaque département; que cet état a été dressé en l'an 6, pour la commune de Saint-Romain-de-Colboc, et que, dans cet état, ne se trouve point compris le chemin réclamé par le maire au nom des habitans; qu'il apparaît, au contraire, qu'en l'an 6, l'autorité locale, au lieu d'un cheinin, n'a constaté à cette époque qu'une sente de deux pieds de largeur, tendante de la grande route à la mare de Colboc, sente dont elle a même demandé la suppression, comme inutile; d'où il résulte la conséquence, qu'en admettant l'existence d'un ancien chemin sur la propriété des auteurs des époux Duvrac, ce chemin aurait été dès-lors considéré par l'autorité administrative,

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comme inutile et contraire à l'intérêt de l'agriculture et dé la propriété; que l'administration a reconnu, en l'an 6, comme elle l'avait fait antérieurement, au moins d'une manière implicite, que les communications de SaintRomain à Goderville sont très-faciles; qu'en effet, le chemin de Goderville aboutit dans Saint-Romain, à la grande route de Rouen au Havre, et que cette grande route joint immédiatement, et à très-peu de distance du chemin de Goderville, la route départementale qui traverse le bourg de Saint-Romain, dont les habitaus, si leur réclamation était admise, seraient obligés de confectionner et d'entretenir à leurs frais un second chemin ayant la même destination, et voisin de la route départementale; Que l'état actuel des choses, seulement avec une sente de deux pieds de largeur, existe depuis 1765, époque de la confection de la grande route de Rouen, c'est-à-dire depuis plus de 50 ans, pendant lesquels aucune réclamation n'a été fournie, avant l'action, par la commune de Saint-Romain, qui, dès-lors, comme en l'an 6, a considéré qu'un chemin, outre les deux grandes routes existantes, était sans utilité et ravirait, sans motif, une partie de la propriété d'un de ses habitans, qui serait ainsi morcelée;

Attendu que si les tribunaux sont incompétens pour statuer sur l'utilité ou l'inutilité d'un chemin, ils sont compétens pour prononcer sur la question de propriété et de possession, et sur l'inutilité reconnue par l'autorité administrative;

Attendu que si, d'après l'art. 2226 c. civ., « on ne peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le commerce », l'art. 2227 dispose que « les établissemens publics et les communes sont soumis aux mêmes prescriptions que les particuliers, et peuvent également les opposer »; que les dispositions de ce dernier article sont conformes à celles de l'art. 541, qui le précède, et porte que « les terrains, fortifications et remparts des places qui ne sont plus places de guerre, appartiennent à l'état, s'ils n'ont été valablement aliénés, ou si la propriété n'en a point été prescrite contre lui »; qu'ainsi, les terrains des places de guerre, tant qu'elles sont places de guerre, ne peuvent être prescrits; mais que la prescription peut commencer dès qu'elles cessent d'être considérées comme telles; qu'il en est de même des chemins qui, tant qu'ils sont chemins, ne peuvent être prescrits, mais qui deviennent soumis à la prescription, lorsqu'ils ne servent plus à l'usage pour lequel ils étaient originairement destinés; lors, surtout, que, comme dans l'espèce, on a remplacé un chemin par deux autres chemins et plus étendus et plus commodes, à la charge, non de la commune qui se trouve ainsi affranchie de la réparation, mais de l'état et du département qui en font les frais; lorsque le propriétaire au préjudice duquel on veut ressusciter un ancien chemin, a contribué, aux dépens de sa propriété, à l'élargissement de la grande

route;

Attendu que, par jugement du 7 mars 1822, passé en force de chose jugée, il a été ordonné qu'un jugecommissaire se transporterait sur les lieux pour y recueillir, à titre de renseignemens, les déclarations des personnes les plus âgées de la commune, faire faire des fouilles, et du tout dresser procès-verbal; qu'en exécucution de ce jugement, des fouilles ont été faites, et des déclarations constatées; -Qu'il résulte des fouilles, que l'on a remarqué une terre sablonneuse à la profondeur de 50 centimètres, ce qui établit l'ancienneté de la cul

ture, puisque le chemin se trouve recouvert, à la profondeur d'un pied et demi, de couches de terre végétale, que la charrue n'a pu y jeter que successivement et par suite de culture pendant un grand nombre d'années; Qu'il résulte également des documens fournis par les habitans mêmes de Saint-Romain, appelés par le jugecommissaire, âgés de 70, 79, 8o et 84 ans, dont deux sont propriétaires dans ladite commune, que la suppression du chemin remonte à la confection de la grande route, c'est-à-dire à 1764, et que, depuis cette époque, il n'a plus été fait usage de ce chemin;

Qu'aux preuves résultant des fouilles de la nature actuelle du sol, de son ancienneté dans cet état, de la possession plus que quadragénaire des époux Duvrac, se joint le procès-verbal de plantation de bornes entre l'auteur de ces derniers et François Hanin, le 30 nov. 1776, enregistré à Fécamp, le 3 déc. suivant; qu'il suit de ce procès-verbal que dès 1776 il n'existait plus de chemin séparant les deux propriétés, et que des bornes ont été plantées à cette époque et publiquement entre les deux propriétaires, sans aucune réclamation de la part de la commune; que la démonstration est complète, lorsqu'on consulte ensuite l'état général des chemins de la commune de Saint-Romain, dressé en l'an 6, par l'autorité locale, qui non seulement ne parle pas du chemin de Réboumare, mais qui considère comme inutile la sente de deux pieds, conduisant à la mare de Colboc; lorsqu'on se reporte même au nouveau procès-verbal de l'état des chemins, dressé par le maire actuel de Saint-Romain, le 30 avril 1814, et dans lequel état ne figure pas davantage le chemin traversant la propriété des époux Duvrao;-Que les actes opposés à ces derniers, pour écarter le moyen de prescription, sont insignifians ou même contraires aux prétentions de la commune; le premier (l'aveu de 1773), parce qu'il n'est pas établi qu'il s'applique au chemin litigieux, et que d'ailleurs il remonterait à une époque antérieure de plus de 40 ans à l'action intentée par la commune; le deuxième (la transaction du 31 mars 1797), parce qu'il énonce que le chemin se trouve supprimė par la confection de la grande route du Havre à Rouen, ce qui reporte cette suppression à l'année 1765; le troisième (l'arrêté du 19 août 1809), parce que la pétition sur laquelle il est intervenu n'était relative qu'à la sente de deux pieds dont les époux Duvrac ne contestent pas l'existence, et que cette pétition énonce qu'anciennement cette sente était un chemin, lequel a été abandonné; ce qui constate encore l'ancienneté de l'état actuel des choses, état qui remonte à la confection de la grande route, et qui est attesté même par le procèsverbal du juge-commissaire, qui, après les fouilles effectuées, a trouvé, à un pied et demi de profondeur, l'ancien chemin couvert de couches de terre végétale que la charrue y avait jetées, état enfin que confirme celui dressé en l'an 6, et même le procès-verbal de 1814;

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Qu'in limine litis et dans toutes les écritures du procès, les époux Duvrac ont soutenu qu'ils avaient la possession plus que quadragénaire du terrain réclamé comme chemin; qu'en première instance, la commune · n'a point méconnu cette possession; que ce n'est que tardivement et lors des dernières plaidoiries que, dans de nouvelles conclusions, elle a eru devoir hasarder cette méconnaissance; mais que la preuve sollicitée par les époux Duvrac, et provoquée tardivement par les conclusions de la commune de Saint-Romain, ne don

nerait à la cour aucuns renseignemens utiles, et ne ferait qu'occasionner des frais frustratoires; qu'il résulte des faits, circonstances et documens du procès, en écartant même les déclarations des personnes entendues sur le lieu contentieux, la preuve complète d'une possession continue, non interrompue, paisible, publique, non équivoque, à titre de propriétaires, et plus que quadragénaire, parles époux Duvrac et leurs auteurs, du terrain réclamé comme chemia par la commune de Saint-Romain;-Que cette possession dispense les époux Duvrac de représenter l'acte qui dans les temps éloignés, aurait prononcé la suppression de ce chemin... Réforme...; déclare non recevable et mal fondée l'action intentée au nom de la commune de Saint-Romain-de-Colboc... » Du 11 février 1825. Cour de Rouen; 2 ch. M. Aroux, pr.-MM. de Malherbe et Daviel père, av.

DONATION, ÉPOUX, Part d'enfant.

Lorsqu'un des époux donne à l'autre une part d'enfant le plus prenant, et que le donateur décède sans laisser d'enfans ni d'héritiers à réserve, l'époux donataire ne doit pas recueillir la totalité des biens; il faut, dans ce cas, supposer l'existence d'un enfant, et réduire à la moitié des biens l'effet de la donation. (C. civ., 916, 1091, 1094.)

(Bourbonne C. époux Garnier.)

Par contrat de mariage du 6 thermid. an 7, le sieur Landelle et la de Bourbonne se donnent réciproquement, en toute propriété, une part d'enfant le plus prenant. En 1822, décès de la de Landelle sans enfans, ni autres héritiers à réserve; par testament du 1er sept. 1822, elle avait légué ses biens aux époux Garnier. En 1824, assignation par Landelle aux époux Garnier en délaissement des biens à eux légués. Il prétend avoir droit à la totalité de la succession de sa femme, à défaut d'enfans. Il invoque Lebrun, Traité des success., liv. 2, ch. 6, sect. 1, dist. 5, n° 12. -Les défendeurs, en s'appuyant sur l'autorité de Duplessis, sur l'art. 279, cout. de Paris; de Ricard, des Donat., part. 3, no 1281; de Pothier, des Donat., sect. 3, art. 7, § 6, répondent que l'on doit supposer l'existence d'un enfant, et qu'ainsi la part du mari ne pourrait excéder la moitié. Le 28 juin 1824, jugement du tribunal de Bar-surSeine, qui accueille cette défense par les motifs suivans: - Considérant que la loi du 17 nivòse an 2, sous l'empire de laquelle les mariés Landelle ont contracté, permet bien aux conjoints de se donner l'universalité de leurs biens, sauf réduction à l'usufruit, au cas de survenance d'enfant; mais que, pour que l'époux survivant puisse réclamer la totalité de la succession de l'époux prédécédé et donateur, il faut que ce dernier ait manifesté l'intention de donner l'intégralité de sa fortune, par des explications claires, positives et non équivoques;-Considérant que la dame Landelle, dans son contrat de mariage, non seulement n'a pas manifesté l'intention d'avantager le sieur Landelle de la généralité de ses biens; qu'elle a au contraire manifesté une intention opposée, en ne lui donnant qu'une part d'enfant; que le défaut de survenance d'enfant ne peut étendre la donation à l'universalité des biens du premier décédé, lorsque la donatrice n'a pas prévu ce cas, et n'a donné positivement qu'une part d'enfant, sans ajouter qu'à défaut d'enfant, elle donnait la totalité;

qu'en l'absence d'une pareille addition, pour que l'époux donataire survivant pot réclamer la totalité de la succession, il faudrait que la loi eût dit que, dans le cas de donation d'une part d'enfant, et à défaut d'existence d'enfant, l'époux donataire aurait la totalité, comme elle a dit que, dans le cas de survenance d'enfant, la donation serait sujette à réduction; -Considérant que si, d'après les dispositions du contrat de mariage des mariés Landelle, et en l'absence d'enfant issu de ce mariage, le sieur Landelle n'a pas droit à l'universalité des biens de son épouse décédée, puisqu'elle ne lui en a pas donné la totalité, il ne devait pas non plus être privé de toute espèce de droits à cette succes sion, dont la défunte lui a donné une part :

« Considérant que, dans l'état où se trouvent les parties, en l'absence d'enfant, de faits, d'événemens et d'expressions qui pourraient fixer et déterminer l'étendue de la portion que la dame Landelle a eu l'intention jurisconsultes Pothier, Ricard et autres, et à la loi rode donner à son mari, on doit s'en référer à l'avis des fuerit portio adjecta, dimidia pars debetur; — Consimaine, Dig. de Verb. signif., qui dispose ainsi : Si non dérant que cette appréciation à moitié, par supposition gles du droit et de la raison, mais encore aux intentions d'un seul enfant, est conforme non seulement aux rèmanifestées par les époux dans leur contrat de mariage, puisqu'ils entendaient se faire et se sont fait une donation mutuelle et réciproque d'une part d'enfant, ce qui exclut toute idée d'une donation universelle; Considérant que la dame Landelle a pu, en conséquence, disposer de la moitié de ses biens, etc. » Appel par Bourbonne, cessionnaire de Landelle.

ARRÊT.

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LA COUR;-Adoptant, etc. Met l'appel au néant. Du 14 mars 1825. - Cour de Paris.-2° ch.― MM. Lemaire et Periu, av.

PUISSANCE PATernelle, Mineurs, Biens. Un père ne peut, durant le mariage, être destitué, par un conseil de famille, de l'administration de la personne de ses enfans mineurs, pour cause de dissipa.. tion, insolvabilité ou inconduite notoire; mais il peut, pour les mêmes causes, être privé de l'administration des biens personnels de ses enfans mineurs. (C. civ., onnels 389, 444.)

(Le sieur Decambray C. le sieur Alaine).

Le sieur Decambray, marié à la demoiselle Alaine, a éprouvé des pertes considérables par suite de l'invasion des troupes étrangères : sa femme obtint contre lui un jugement de séparation de biens. Le 16 mai 1819, testament par lequel la mère du sieur Decambray légue à ses petits-enfans mineurs toute la portion de biens dont elle pouvait disposer, en manifestant le vœu que ce legs fût employé à donner une éducation convenable aux enfans.

Le 23 février 1824, délibération du conseil de famille des mineurs Decambray, dans laquelle il est dit que le sieur Decambray a dissipé tous ses biens et continué ses habitudes d'inconduite; que les biens purement mobiliers, légués par l'aïeule maternelle, est le seul moyen de pourvoir à l'éducation des mineurs ; que ce moyen est insuffisant, qu'il est impossible de laisser l'administration de ce revenu dans des mains si peu

sûres; en conséquence, le conseil de famille destitue Decambray de l'administration de la personne et des biens de ses enfans, nomine pour tuteur-administrateur un sieur Alaine, oncle des mineurs, et pour subrogé-tuteur le sieur Lespagnol de Chanteloup.

Demande en homologation de cette délibération; 'et, le 13 juillet 1824, jugement du tribunal civil de Reims, ainsi conçu : « Le tribunal, considérant que tout administrateur dont la gestion porte préjudice aux intérêts de ses administrés, est susceptible de révocation; qu'à la vérité, l'administration légale du père lui confère une plus grande autorité qu'au tuteur; mais que les devoirs et les charges sont communs à l'un et à l'autre ; que leur devoir est de sagement administrer;- Considérant qu'il faut bien distinguer les droits qui appartiennent essentiellement à la puissance paternelle, des obligations de l'administrateur légal; que les premiers ont leur source dans la nature, et sont confirmés par la loi; qu'ils ne peuvent être détruits que par la mort naturelle ou civile, ou dans le cas déterminé par la loi; qu'il n'en est pas de même du droit purement légal accordé au tuteur, d'administrer la fortune des mineurs : que ce droit n'ayant été établi que dans l'intérêt des enfans mineurs, il peut et doit être retiré s'il en fait abus, et dans les cas prévus par l'art. 444; qu'au cas particulier, il est de notoriété publique que le sieur Decambray continue de vivre dans le déréglement de conduite qui a amené la ruine de sa fortune, et déterminé les jugemens et arrêts qui ont prononcé la séparation de biens entre ledit sieur Decambray et la dame son épouse; qu'il est donc urgent de prendre, à son égard, toutes les précautions que commande l'intérêt des mineurs, placés sous la protection spéciale de la loi et des magistrats; Considérant que le conseil de famille, dans sa délibération, a fait confusion de deux pouvoirs qui doivent rester entièrement distincts, puisqu'ils ne se confèrent et ne se perdent que de la manière cidessus indiquée; que s'il convient de prémunir les enfans mineurs contre tous les dommages auxquels ils pourraient être exposés, il est nécessaire aussi de respecter les prérogatives attachées à la puissance paternelle; d'où suit que la délibération du conseil de famille doit être homologuée dans tout ce qui a rapport à la conservation des biens des mineurs Decambray, sans porter atteinte à ce qui touche la puissance paternelle; que cette distinction établie par l'esprit et la lettre de la loi l'est encore par la classification qui en a été faite au code civil, où l'on trouve la puissance paternelle réglée dans le titre 9, et la minorité et la tutelle dans le titre suivant; que les faits imputés au sieur Decambray sont justifiés par les actes authentiques ci-dessus rappelés, et que dès-lors l'art. 444 lui est applicable: déterminé par ces considérations et par les motifs déduits aux jugemens et arrêts qui ont prononcé la séparation de biens entre les époux Decambray et par ceux qui ont provoqué la délibération du conseil de famille, en date du 23 février dernier; homologue ladite délibération en ce qui a rapport seulement à l'administration des biens des mineurs Decambray, confiée par cet acte au sieur Alaine, leur aïeul maternel; pour le surplus, dit qu'il n'y a lieu à homologuer, etc.

-

Appel par Decambray. Il commence par faire valoir des considérations de fait. Il ajoute : Les premiers juges ont commis une inconséquence; il résulte de leur dé

cision que le père doit conserver l'administration de la personne des enfans; mais qui réglera les dépenses ? si c'est un étranger, la puissance paternelle en souffrira ; il vaudrait mieux enlever tous les droits au père que de lui en laisser un en lui ôtant les moyens de l'exercer. D'ailleurs il n'est pas vrai que l'on puisse priver le père de l'administration de ses biens. Le père n'est point un mandataire révocable; la tutelle dative et la tutelle testamentaire constituent bien un mandat; mais il n'en est pas de même à l'égard du père, c'est la nature qui lui a donné son droit sur ses enfans; l'administration des biens lui est donnée comme une conséquence de celle de personne.

la

La loi a réglé ce dont le père serait comptable. A l'égard des biens, il doit compte des capitaux, et Decambray offre d'en faire emploi de la manière que la cour déterminera; quant aux revenus, il n'en doit aucun compte, il en dispose suivant son droit de père, et l'on ne peut lui en demander compte sans attenter à la puissance paternelle dont l'exercice est confié à lui seul, sans limite et sans contrôle.

Les intimés répondent : Le pouvoir d'administrer les biens des enfans n'est pas essentiellement inhérent à la puissance paternelle. Il peut en être détaché. L'article 389 constitue le père comptable de la propriété et des revenus des biens dont il n'a pas la jouissance, et de la propriété seulement de ceux dont il a l'usufruit. Cet usufruit ne lui appartient que sous la condition expressément imposée par l'art. 385 de subvenir à la nourriture, à l'entretien et à l'éducation des enfans selon leur fortune. S'il ne remplit pas cette condition, si sa conduite le met hors d'état d'accomplir le vœu de la loi, il en résulte que le droit d'administrer les biens dont il a l'usufruit, droit soumis à une condition essentielle qui n'est pas remplie, doit être enlevé au père. Autrement on violerait toutes les lois qui ont pris de sages précautions pour la conservation des biens des mineurs. Aux termes de l'art. 389 c. civ., la famille a eu le droit de décider qu'un capital purement mobilier ne devait pas rester entre les mains d'un père dissipateur. L'offre de faire emploi des capitaux serait insuffisante; car la loi n'a pas pour objet d'empêcher seulement la dissipation des capitaux, mais encore d'assurer l'application des revenus à la nourriture, à l'entretien et à l'éducation des enfans; il fallait nécessairement priver le père de toute administration pour satisfaire au vœu de la loi, et pour se conformer aux intentions de l'aïeule des mineurs.

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