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ser. Opposition par ces derniers, qui soutiennent, avec les sieur et dile Cretin et le sieur Bardey, appelés en garantie, que l'inscription prise par Renaud n'a pas pu frapper les immeubles dont ils sont détenteurs.

Le 15 mai 1822, jugement du tribunal civil de Besançon, en ces termes :-Attendu que, dans la vente à réméré et pendant le délai fixé pour l'exercice de la faculté de racheter, la propriété, base nécessaire de l'hypothèque, ne peut ni appartenir tout à la fois au vendeur et à l'acheteur, ni être incertaine entre eux deux que, dans la nécessité de déterminer lequel est, pendant ce temps, le véritable propriétaire, on est forcé de décider pour l'acquéreur, et non pour le vendeur; que voir, avec le sieur Renaud, le propriétaire dans le vendeur, ce serait confondre la vente à réméré avec un simple contrat d'engagement; que la stipulation de la faculté de réméré est incontestablement une clause résolutoire; que toute clause résolutoire suppose un contrat parfait, et qui seulement peut être un jour anéanti par suite de l'événement prévu dans cette clause; qu'il est contre l'essence du contrat de vente que le vendeur retienne la propriété, et que notamment, dans la vente à réméré, la faculté qu'a le vendeur de recouvrer sa propriété, suppose nécessairement qu'il l'a perdue; qu'ainsi et à n'appliquer que les principes généraux, l'acquéreur a, de ce moment, le jus in re; qu'il est réellement le seul propriétaire, et qu'il peut seul aliéner ou hypothéquer, toutefois sous la chance que présente la clause résolutoire ; qu'au contraire, le vendeur est dessaisi de la propriété et de tout jus in re; qu'il n'a plus qu'un jus ad rem, dans l'action qu'il s'est réservée, et que cette action est tout ce qu'il peut céder à des tiers, comme elle est tout ce dont ses créanciers peuvent se prévaloir en son nom; que la rigueur des principes s'oppose donc à ce qu'il puisse hypothéquer l'immeuble vendu à rachat, et que l'équité ne s'y oppose pas moins, parce qu'il répugne à l'équité, qu'après avoir vendu un fonds en le déclarant libre, on le grève soi-même d'hypothèques, qui, toutes conditionnelles qu'on les supposât, n'en porteraient pas moins atteinte aux droits qu'a l'acheteur d'aliéner et d'hypothéquer; >>Que ce système est, d'ailleurs, repoussé par les lois anciennes et nouvelles, comme par les plus habiles interprètes; que, d'après le droit romain, la chose vendue sous condition résolutoire périt pour l'acheteur; que celuici peut prescrire, L.2, ff. de lege commiss. L. 2, ff.de in diem addict. L. 24 ff. pro emptore; que, d'après les docteurs, l'acquéreur jouissait, comme propriétaire nouveau, du bénéfice de la loi emptorem, et qu'il conservait, après le rachat, la portion qu'il avait obtenue dans le trésor trouvé sur le fonds, pendant qu'il le possédait; que toutes les conséquences (aujourd'hui possibles) du droit de propriété sont accordées à l'acquéreur à réméré par les art. 1664, 1665, 1666 et 1673 c. civ., puisqu'il résulte de leurs dispositions, qu'il peut prescrire, aliéner, hypothéquer, exercer enfin tous les droits du vendeur; qu'on ne trouve, au contraire, dans les lois, aucun texte où le législateur ait seulement supposé des actes de propriété de la part du vendeur à réméré, non plus que de tout autre qui, s'étant dépouillé de la chose, aurait conservé quelque chance de la recouvrer; qu'enfin. la disposition de l'art. 2125 c. civ., invoqué par le sieur Renaud, n'est pas applicable à l'hypothèse ; qu'en effet, la clause du contrat ne peut offrir, comme il le pré

tend, le double caractère de condition résolutoire pour l'un des contractans, et de condition suspensive pour l'autre ; qu'elle est uniquement résolutoire; que le débiteur du sieur Renaud, vendeur à réméré, n'avait point, dans l'immeuble, de droit suspendu par une condition, parce qu'il n'y a point de droit en suspens dans un contrat fait sous une clause résolutoire, et qu'il n'avait pas non plus de droit résoluble, parce que c'est l'acheteur à réméré qui a dans sa propriété le droit résoluble, tandis que le vendeur n'a que l'action résolatoire;

Attendu, au surplus, qu'il ne s'agit point, dans l'espèce, d'une hypothèque conventionnelle et spéciale, qui ne peut frapper que les biens présens du débiteur, mais d'une hypothèque judiciaire et générale, qui, de sa nature, s'étend aux biens à venir, et qu'il convient d'examiner la question sous ce nouveau rapport: que l'hypothèque du sieur Renaud n'a pu, dans le principe, frapper les immeubles, vendus par ses débiteurs, nidirectementni indirectement, parce que ces immeubles étaient alors la propriété d'un tiers, et que l'action qui pouvait les faire rentrer sous la main des vendeurs, n'était qu'un simple jus ad rem, que n'accompagnait aucune participation au domaine utile ou direct, dont l'effet était même purement éventuel, et que par conséquent l'hypothèque ne pouvait pas atteindre; qu'en admettant que le sieur Renaud ait pu, lorsqu'il prit inscription, considérer les immeubles vendus antérieurement et à rachat pour ses débiteurs, comme une sorte de biens à venir pour ceux-ci, et espérer que son hypothèque pourrait les atteindre par la suite, il faut admettre aussi que, dans une telle hypothèque, il n'a dû voir qu'un droit éventuel et dépendant, comme celui de ses vendeurs, de la condition à laquelle s'étaient soumis ces derniers pour rentrer dans leur propriété, puisque le créancier ne peut avoir plus de droit que son débiteur à la chose de celui-ci; qu'il ne suffisait donc point au sieur Renaud que l'acquéreur à rachat fût évincé, mais qu'il fallait évidemment qu'il le fût de manière à réintégrer les vendeurs dans la propriété des fonds vendus; - Qu'ainsi donc, dans la supposition prémise, le sieur Renaud devait réaliser l'effet de son hypothèque, non pas en se bornant å laisser à un tiers quelconque acquérir et exercer la faculté de rachat, mais en forçant ses débiteurs à l'exercer où en l'exerçant lui-même (art. 1166 c. civ.), parce que la véritable condition à laquelle serait soumis le sort de son hypothèque était le retour des immeubles dans la propriété de ses débiteurs; que n'ayant pris ni l'une ni l'autre de ces mesures, son hypothèque a manqué de la seule condition qui pouvait en assurer les effets; Par ces motifs, etc.»

Appel par Renaud; et, le 22 nov. 1825, arrêt de la cour de Besançon, qui adopte les motifs des premiers juges.

Pourvoi de Renaud.- 1o Pour violation des art. 2125, 1183, 1659 et 1673 c. civ.-Aux termes de l'art. 2125, on peut consentir une hypothèque sur un immeuble que l'on ne possède que sous condition. Or cet art, est évidemment applicable à la cause, car le vendeur à pacte de rachat possède l'immeuble, sous la condition qu'en remboursant le prix, la propriété lui reviendra; il peut donc consentir une hypothèque. Voy. le Rép., vo Hypo~ thèque, sect. 2. S. 3, n. 5.

Le contrat de vente renferme, d'une part, une vente actuelle, mais résoluble, et, d'autre part, une revente

aussi actuellement promise, mais suspendue jusqu'au remboursement. Dans la supposition que le rachat eût été exercé par le vendeur, nul doute que l'hypothèque ne fût valable: or, peut-on dire que l'hypothèque, dans le cas où un tiers exerce ce reméré, ne sera pas valable? Non sans doute; car le vendeur ne peut pas céder plus de droit qu'il n'en a; le tiers ne tient son droit que du vendeur, il n'en a pas plus que lui; c'est ce qui résulte de la combinaison des art. 1183, 1659 et 1673 c. civ.-Voy. arrêt du 21 germinal an 12, Cass. (C. A.. t. 4. 1. 357 et C. N.. v° Enregist.)

Violation des principes concernant l'effet des clauses résolutoires, et de plus violation de l'art. 2123 c. civ;En ce que la cour a déclaré nulle une inscription prise en vertu d'une hypothèque judiciaire qui frappe sur tous les biens présens et à venir.-En effet, à supposer que le vendeur à pacte de réméré ne conserve aucun droit de propriété sur l'immeuble vendu, il ne s'ensuivra nullement qu'une hypothèque judiciaire acquise contre lui à la même époque, ne puisse pas grever cet immeuble entre les mains du tiers, car l'hypothèque judiciaire frappe sur tous les biens du débiteur; or, le débiteur possédait conditionnellement l'immeuble au moment où il a vendu son droit à un tiers sur cet immeuble, lequel droit le tiers a exercé plus tard.

ARRÊT.

LA COUR,- sur les concl. de M. Joubert, av. gén.; -Attendu, sur le 1 moyen, que la propriété est la base indispensable de toute affectation hypothécaire; qu'en matière de vente à faculté de reméré, et pendant le délai fixé pour exercer cette faculté, les droits de propriété appartiennent exclusivement à l'acquéreur; qu'attribuer ces droits au vendeur, ce serait confondre la vente à réméré avec un simple contrat d'engagement; -Attendu que le droit qu'a le vendeur de rentrer dans le bien, en remboursant le prix et loyaux coûts, à une époque déterminée, ne change pas la nature du contrat de vente, et fait seulement qu'au lieu d'être absolue, cette vente est résolutoire; que toute clause résolutoire suppose nécessairement un contrat parfait, et qui peut seulement être un jour anéanti par suite de l'événement prévu dans cette clause; qu'il est contre l'essence du contrat de vente que le vendeur retienne la propriété, et que la faculté même qu'il se réserve de recouvrer cette propriété, suppose nécessairement qu'il l'avait perdue; Attendu que, de ces principes incontestables résulte la conséquence que l'acquéreur seul a sur le bien vendu le jus in re, c'est-à-dire le droit d'aliéner et d'hypothèquer, avec la chance toutefois que présente la clause résolutoire; tandis que le vendeur dessaisi n'a plus que le jus ad rem dans l'action qu'il s'est réservée, et que cette action est tout ce qu'il peut céder à des tiers, et tout ce dont ses créanciers peuvent se prévaloir en son nom; Attendu, sur le 2o moyen, que si l'effet légal de l'hypothèque judiciaire est de frapper les biens à venir du débiteur comme les biens présens, cet effet ne peut se réaliser quant aux biens à venir, qu'à mesure que ces biens deviennent la propriéte du débiteur, et que le principe n'a pas été méconnu par l'arrêt attaqué, qui s'est borné à reconnaître, en fait et en droit, qu'au moment où l'hypothèque judiciaire de Renaud avait pris naissance, l'immeuble sur lequel il a pris inscription avait depuis long-temps cessé d'appartenir au débiteur, et n'était jamais rentré dans sa main, puisqu'au lieu

d'exercer l'action résolutoire qu'il s'était réservée, il l'avait, comme il en avait le droit, cédée à un tiers qui l'avait exercée en son propre nom et à son profit; Attendu que le cessionnaire, devenu acquéreur par l'exercice de la faculté de réméré, est censé sans doute tenir son droit du vendeur; mais que ce droit remonte à la vente même, puisque l'acquéreur à faculté de réméré a mis le cessionnaire en son lieu et place, et que la cession vis-à-vis du vendeur a eu le même effet que si lui, vendeur, avait renoncé à la faculté qu'il s'était réservée, renonciation qui aurait donné tout son effet à la vente, et l'aurait rendue irrévocable, de résolutoire qu'elle était dans le principe ;-Rejette. Du 21 déc. 1825. Sect. req. - M. Botton, f. f. de pr.-M. de Ménerville, rap.-M. Nicod, av.

SUCCESSION, PÉTITION, ACQUéreur. L'action en pétition d'hérédité ne peut être exercée que contre des cohéritiers ou des acquéreurs de droits successifs. En conséquence, est non recevable la demande en pétition d'hérédité intentée par des héritiers contre un tiers-acquéreur à titre singulier des biens de la succession (c. civ. 815) (1).

La demande en partage des biens de la succession, formée par un héritier contre les détenteurs de ces biens, est une demande en pétition d'hérédité (2).

(Epoux Langevin C. Huvier de Fontenelle). En 1819, la dame Langevin assigna le sieur Huvier de Fontenelle, les époux Gallaix et autres cointéressés, pour procéder aux partage et licitation des immeubles dépendant de deux successions: celle de Pierre Bouillé, trisaïeul de la demanderesse, et celle de François Bouillé, son bisaïeul.

Les défendeurs à la demande de la dame Langevin, qui ne se trouvaient point ses cohéritiers, mais de simples détenteurs à titre singulier, ont opposé une fin de non recevoir résultant de ce que la demande intentée par la dame Langevin était une demande en pétition d'hérédité, et qu'elle ne pouvait, dès-lors, être dirigée que contre des cohéritiers ou des acquéreurs de droits

successifs.

Le 30 juillet 1822, jugement du tribunal de Coulommiers, qui accueille la fin de non recevoir proposée par les défendeurs. Le tribunal s'est fondé sur ce que la demande en partage et liquidation, formée par la dame Langevin, comprenant l'universalité des biens, tant corporels qu'incorporels, était une véritable pétition d'hérédité qui ne peut s'exercer que contre des cohéritiers ou des acquéreurs de droits successifs, et non contre des tiers-détenteurs munis de titres authentiques dont la nullité n'a point été prononcée; - Que c'est vainement que les époux Langevin se prétendent propriétaires, par indivis, des immeubles dont ils demandent le partage; qu'il est de principe, consacré par l'ancienne comme par la nouvelle jurisprudence, que le partage ne peut être provoqué que contre les ayans-droit à l'hérédité; que le code civil, art. 815, contient une disposition précise à cet égard, mais que ce n'est pas le cas d'appliquer l'art. cité à l'espèce ; que, d'ailleurs, rien ne justifie le droit de Langevin et sa femme dans tel ou tel immeuble; que ce droit ne pourrait émaner que de titres la propriété, actes qu'ils ne représentent point.— Appel. ou d'un partage légalement fait, qui leur aurait transmis

(1, 2). Voy., sur ce point, nos obser., v° Succession.

En 1812, testament public de Berthonnet-Montroger, à Saint-Germain, (Creuse), en présence de quatre témoins, dont l'un, le sieur Mignerat, est domicilié à Eguzon (Indre). Le testateur institue pour sa legataire universelle Cécile Billoux. - Au décès de BerthonnetMontroger, ses sœurs demandent la nullité du testament, se fondant sur quatre moyens, dont un seul a fait l'objet du pourvoi; il est tiré de ce que Mignerat, l'un des témoins signataires, n'était point domicilié dans l'arrondissement communal dans lequel le testament a été reçu.—Jugement qui rejette cette demande et déclare le testament valable, attendu que le code civil exige seulement que les témoins du testament soient sujets du roi.

Arrêt confirmatif de la cour de Paris, du 26 nov. 1823. Pourvoi de la part de la dame Langevin, pour violation des art. 815, 816 et 1599 c. civ. Elle soutient que, comme copropriétaire, elle a eu le droit de demander la cessation de l'indivision; que la cour royale a mal à propos considéré l'action en partage comme une action en pétition d'hérédité; qu'elle s'est méprise sur la nature de cette action, en la considérant comme une action qui ne peut s'inteater que contre un cohéritier, et non contre un tiers-acquéreur; qu'en effet, il n'est pas dans sa nature d'être ainsi restreinte; qu'elle a pour objet de faire. rentrer l'héritier dans ses droits, quelle que soit la cause de sa dépossession, dès-lors que cette cause lui est étrangère; que la seule chose à considérer, c'est le droit constant et bien établi que la loi accorde à tout héritier pour revendiquer les biens dont il est privé; que cette action réelle, toute d'équité, dure trente ans; et qu'on ne peut la déclarer non recevable, sans violer l'art. 1599, qui annulle la vente de la chose d'autrui.

ARRÊT.

LA COUR,-sur les concl. de M. Joubert, av. gén. ;— Attendu, en droit, qu'il est de principe que l'action en pétition d'hérédité ne peut être exercée que contre des héritiers ou des acquéreurs de droits successifs;--Attendu, en fait, que les demandeurs ont assigné les défendeurs, tiers-acquéreurs, depuis long-temps, de quelques-uns des biens des successions dont il s'agit, pour être procédé aux partage et licitation desdites successions; qu'en décidant donc que cette demande est une demande en pétition d'hérédité, et que les demandeurs étaient non recevables à la diriger contre les défendeurs, l'arrêt s'est exactement conformé aux lois de la matière, et ne viole aucuns des articles invoqués; - Rejette.

Du 6 déc. 1825.-Sect. req.-M. Brillat, f. f. de pr.-M. Vallée, rapp. — M. Chauveau-Lagarde, av.

TESTAMENT, TÉMOIN, CAPACITÉ, DOMICILE. La capacité des témoins testamentaires est réglée par le code civil, qui, en ce point, a abrogé la loi du 25 vent. an 11; mais les formalités par lesquelles on constate cette capacité, telles que l'énonciation du domicile de ces témoins et autres mentions qui tiennent à la confection de l'acte, sont demeurées, sauf dérogation expresse, sous l'empire de cette dernière loi (L. 30 vent. 12).

an.

La disposition de la loi de ventôse an 11, qui exigeait que les témoins testamentaires fussent domiciliés dans l'arrondissement communal, touchant à la capacité des témoins, a été abrogée par le code civil, lequel n'a pas reproduit cette disposition, et a seulement exigé que les témoins eussent les conditions requises par les articles 974, 975, 980.)

La mention du domicile de ces témoins, exigée par la loi du 25 vent. an 11, doit absolument se trouver dans le testament, cette disposition touchant à la forme du

testament.

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Appel par les héritiers Berthonnet.-Le 10 juin 1823, arrêt infirmatif de la cour de Limoges ainsi conçu : Sur le moyen de nullité tiré de ce que Mignerat, l'un des témoins qui ont signé le testament, n'est point domicilié dans l'arrond. où le testament a été fait; - Attendu qu'il est de principe généralement reconnu et de jurisprudence constante, que la loi du 25 ventôse an 11, qui a réglé les formalités prescrites pour les actes notariés en général, s'applique aux testamens faits par actes publics qui sont aussi des actes notariés, et que toutes les formalités prescrites par la loi du 25 ventose doivent être observées pour les testamens authentiques, à moins que le code civil, qui est la loi spéciale de la matière, ne contienne une dérogation expresse aux disde la loi du 25 ventôse an 11 exige que les témoins positions de la loi du 25 ventôse;-Attendu que l'art. 9 dont les notaires sont assistés pour la réception de leurs actes, soient au nombre de deux, qu'ils soient citoyens français, c'est-à-dire mâles, majeurs, sujets du roi, pouvant exercer les droits politiques; qu'ils sachent signer; qu'ils soient domicilés dans l'arrondissement communal où l'acte est passé, et que l'art. 68 de la même loi attache la peine de nullité à la violation de ces dispositions;- Attendu que l'art. 971 c. civ. porte que le testament par acte public doit être reçu par deux notaires en présence de deux témoins, ou par un notaire en présence de quatre témoins; - Attendu que l'art. 980 du même code porte que les témoins appelés pour être présens aux testamens doivent être mâles, majeurs, sujets du roi, jouissant des droits civils; Attendu que l'art. 974 du même code porte que les testamens par acte public devront être signés par les témoins, et que, néanmoins, dans les campagnes, il suffit qu'un des deux témoins signe, si le testament est reçu par deux notaires, et que deux des quatre signent, s'il est reçu par un seul notaire; -Qu'il suit de là, que les trois articles du code civil qui viennent d'être cités, ont, en ce qui concerne le testament par acte public, dérogé aux dispositions de la loi du 25 ventôse an 11, pour le nombre des témoins de l'acte, l'exercice ou la capacité de la part des mêmes témoins des droits politiques, et enfin la nécessité pour tous ces témoins de savoir signer; - Mais attendu que, ni dans le code civil, ni dans aucune loi postérieure au 25 ventôse an 11, l'on ne trouve, pour les témoins testamentaires, une disposition qui ait dérogé à celle qui veut, dans cette loi, que les témoins d'un acte notarié soient domiciliés dans l'arrondissement communal où l'acte est passé; — Attendu que vainement on dirait que le domicile est suffisamment indiqué par la qualité de sujet du roi, exigée

'par l'art. 930 c. civ.; il est évident qu'on ne saurait attacher une idée précise de domicile à cette qualification, puisque la France a des possessions, et par conséquent le roi des sujets dans les quatre parties du monde; -Attendu que l'on prétendrait tout aussi vainement que l'expression sujet du roi est, dans l'art. 980 c. civ., synonymede régnicole; outre que, d'une part, on ne peut pas supposer que le législateur, en employant l'expression sujet du roi, ait voulu donner à cette expression un sens autre que celui qu'elle a naturellement, le mot régnicole, dans le langage de la loi, n'a jamais voulu dire que français par opposition à aubain ou étranger; -Attendu que la qualité de français et l'exercice ou du moins la capacité des droits politiques, exigés par l'article 9 de la loi du 25 ventôse an 11, pour les témoins instrumentaires, supposent le domicile tout autant et même plus que la qualité de français, et la jouissance des droits civils exigés par l'art. 980 c. civ. pour les témoins testamentaires; que, cependant, les témoins instrumentaires ne peuvent être pris, à peine de nullité de l'acte, que dans l'arrondissement où l'acte auquel ils sont présens a été passé; qu'il faut aussi, à peine de nullité, que leur demeure soit énoncée dans cet acte; et que, dès-lors, on ne peut concevoir comment, pour les testamens authentiques, actes qui sont les plus importans de tous et auxquels la loi attache une solennité particulière, la qualité de sujet du roi et la jouissance des droits civils seulement dispenseraient de l'obligation d'avoir son domicile dans l'arrondissement où le testament est fait, et d'énoncer ce domicile, formalité si impérieusement prescrite par la loi qui régit tous les actes notariés en général;-Attendu, d'ailleurs, que tous les motifs qui ont fait prendre cette mesure pour les actes notariés, ont bien plus de force encore, si on les applique aux testamens en particulier; - Que de tout ce qui précède résulte la conséquence, que les témoins testamentaires ne peuvent, ainsi que les témoins instrmentaires, être pris que parmi les habitans de l'arrondissement où le testament a été fait, et ce à peine de nullité. »

Pourvoi en cassation, de la part de la de Billoux, pour violation de l'art. 980 c. civ., et fausse application des art. g et 68 de la loi du 25 ventôse an 11. Est-ce le code civil qui a déterminé les conditions nécessaires pour être témoin testamentaire ? est-ce la loi du 25 vent. an 11 qui doit être appliquée dans l'espèce? Les arrêts de Bruxelles, 13 août 1808; de Limoges, 7 déc. 1809; de Douai, 27 avril 1812; de Caen, 19 août 1809; de Paris, 18 avril 1814; de Rouen, 16 nov. 1818, s'accordent à reconnaître que l'art. 980 d. civ. a dérogé à l'art. 9 de la loi de ventose, quant à l'aptitude des témoins testamentaires. Il est vrai que la cour de Bruxelles est revenue sur sa jurisprudence, le 13 avril 1811; mais ce retour paraît avoir été causé par une fausse entente de l'arrêt de cassation du 1er oct. 1810, qui a décidé seulement que, sous le code, l'indication de la demeure des témoins était exigée dans les testamens. Or, la différence est grande entre l'indication de la demeure des témoins, ce qui est une forme de l'acte indispensable pour vérifier leur qualité, et la résidence obligée des témoins dans l'arrondissement communal, laquelle tient, au contraire, à leur aptitude ou à leur capacité. - La loi de ventôse et le code civil ont chacun réglé çe qui devait constituer la capacité des témoins; mais le code est postérieur à la loi de ventôse; et, certes, les

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époquesétaient assez rapprochées pour que le législateur, s'il n'eût pas reconnu la nécessité d'une différence entre les témoins instrumentaires des actes en général et les témoins testamentaires, se fût référé, à cet égard, dans le code civil, à la disposition de la loi du 25 vent. ; mais c'est ce qu'il n'a point fait. L'art. 9 de la loi du 25 vent. an 11 porte: « Les actes seront reçus par deux notaires on un notaire assisté de deux témoins, citoyens français, sachant signer, et domiciliés dans l'arrondissement communal où l'acte s'est passé. Et on lit, au contraire, dans l'art. 980 c. civ.: « Les témoins appelés pour être présens aux testamens, devront être mâles, majeurs, républicoles, jouissant des droits civils. » En 1807, le mot républicole a été remplacé par ceux-ci : sujets de l'empereur; et, plus tard, à ces derniers, ont été substitués les mots: sujets du roi. D'où il suit que, dans l'art. 980, il y a synonymie entre les mots républicoles et sujets du roi. On voit par là que beaucoup de différences existent entre les deux art.qu'on vient de lire. D'abord, l'art. 9 de la loi de vent. porte que les deux témoins ne sont appelés que pour remplacer un notaire, et qu'à défaut d'un second notaire, le notaire unique sera assisté de deux témoins. C'est le notaire qui se fait assister des témoins: il en a le choix. On conçoit que la foi a dû circonscrire son choix, et ne lai laisser que l'arrondiss. communal où les témoins sont connus de tous ceux qui ont des rapports avec lui: la crainte des abus qu'il pourrait commettre le voulait ainsi. — Au contraire, d'après le code, il doit toujours y avoir des témoins dans les testamens : deux, s'il y a deux notaires; quatre, s'il n'y a qu'un notaire. Ces témoins ne sont pas seulement appelés pour assister le notaire; ils doivent être présens à la confection du testament: ils ne sont pas au choix du notaire; c'est le testateur qui les appelle, ou qui est censé les appeler. Ainsi l'a professé un rédacteur du code (V. les Procèsverbaux, t. 2, p. 566 ). Or, dès que c'était le testateur qui choisissait les témoins, il n'y avait pas de raison. pour circonscrire l'espace dans lequel devait se faire ce choix; il y en avait, au contraire, pour l'étendre. En effet, un homme va à la campagne avec des amis; il y tombe malade; il veut faire son testament ses amis ne pourront-ils pas être appelés par lui pour témoins? fau. dra-t-il qu'il les choisisse dans un lieu où il ne connaît personne, et qu'il voie s'évanouir la garantie qu'il trouve dans la présence de ses amis, que ses intentions seront fidèlement recueillies ou demeureront secrètes ? Non, la loi a été plus prévoyante il suffit que les témoins soient sujets du roi.

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En second lieu, la loi de ventôse veut que les témoins soient citoyens français, c'est-à-dire nés en France, ou devenus français dans les formes légales. Le code civil n'exige pas autant: il suffit que les témoins soient jouissans des droits civils. Or, comme l'exercice des droits civils est indépendant de la qualité de citoyen (c. c. 7), il s'ensuit que même un étranger, admis à l'exercice des droits civils par le roi (c. c. 13), pourra être témoin d'un testament, lorsqu'il ne pourrait pas l'être dans tout

autre acte.

Enfin l'art. 980 c. c. est littéralement conforme à l'art. 40 de l'ord. de 1735, sur les testamens, qui portait que les témoins seraient males, régnicoles et capables des effets civils. Certes, sous cette ordonnance, personne ne se fût avisé de prétendre que les témoins dussent être pris dans l'arrondissement communal. Il est vrai qu'il

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n'existait pas de loi qui prescrivit cette mesure pour d'autres actes; mais reste toujours que les rédacteurs., en adoptant la disposition de l'ordonnance, ont dû lui attacher les mêmes effets. Le système qu'on soutient ici est, au reste, celui de MM. Grenier, Delvincourt et Berriat-Saint-Prix. Les défendeurs, développant les motifs de l'arrêt dénoncé, insistaient sur le principe qu'une loi postérieure ne déroge à une loi antérieure qu'autant que la dérogation est expresse.

ARRÊT.

LA COUR,-sur les concl.contr.de M. de Marchangy, av. gén.;-Vu les art. 974, 975 et 980 c. civ.; - Considé rant que, dans les testamens par acte public, il faut distinguer ce qui est relatif à la capacité des témoins testamentaires, d'avec ce qui concerne les formalités par lesquelles on constate cette capacité, telle que l'énoncation, dans l'acte, du domicile de ces témoins, et autres mentions qui tiennent à la confection de ce même acte; Que le code civil s'est occupé spécialement de régler cette capacité des témoins testamentaires; Que, quant aux autres formalités de l'acte, elles sont nécessairement demeurées, comme celles des autres actes notariés, sous l'empire de la loi du 25 ventôse an 11, laquelle a eu pour objet de régler, en général, la forme des actes reçus par les notaires; loi qui doit être exécutée en tout ce à quoi il n'a point été dérogé par une loi spéciale;

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Considérant que le code civil, dans les art. 974, 975 et 980, prescrit les conditions qui constituent la capacité des témoins dans un testament; qu'il a, par conséquent, abrogé, aux termes de la loi du 30 vontôse an 12, les dispositions qui, dans les lois précédentes, étaient relatives à cette capacité ; Qu'aucun desdits articles du code civ. n'exige que les témoins testamentaires soient domiciliés dans l'arrondissement communal où l'acte est passé; Que la mention du domicile de ces témoins, mention exigée par la loi du 25 vent. an 11, et nécessaire, parce qu'il faut connaître le domicile pour la vérification même de la capacité, cette mention doit absolument se trouver dans l'acte; Qu'ainsi le témoin domicilié hors de l'arrondissement communal, n'en a pas moins la capacité nécessaire, pourvu que, conformément au code civil, il soit mâle, majeur, sujet du roi, jouissant des droits civils; qu'enfin il remplisse les conditions prescrites par les art. 974, 975 et 980 du code;

Qu'en refusant de reconnaître dans le sieur Mignerat cette capacité d'être témoin testamentaire, sous le prétexte que ce témoin n'a pas son domicile dans l'arrondissement communal où l'acte a été passé, mais qu'il demeure à Eguzon, dép. de l'Indre; et, en annullant, par ce motif, le testament du sieur Berthonnet-Montroger, l'arrêt attaqué a fait une fausse application des art. 9 et 68 de la loi du 25 ventôse an 11, et qu'il a violé Casse. les art. du code ci-dessus rappelés ; Du 4 janvier 1826. Sect. civ. —M. Desèze, 1 M. Piet, rapp.-MM. Champion et Taillandier, av,

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pr.

REGL. DE JUGES, COMPÉT., ORDRE, Urgence, DépENS. Il y a lieu à règlement de juges, devant la cour de cassation, lorsque, par suite de la vente de plusieurs immeubles dépendans d'une même succession, plusieurs ordres se sont ouverts devant différens tribunaux ressortissant de différentes cours.

Dans le cas où, par suite de vente devant le tribunal de l'ouverture d'une succession bénéficiaire, de divers immeubles situés tant dans le ressort de ce tribunal que dans celui de deux autres tribunaux, des ordres ont été ouverts devant chacun de ces tribunaux, c'est le tribunal du lieu de l'ouverture de la succession qui doit demeurer seul saisi, alors, d'ailleurs, qu'aucun créan cier ne s'y oppose, et que c'est là que sont domiciliés be plus grand nombre des créanciers qui ont produit. (C. pr., 59) (1).

Les matières d'ordre requièrent célérité. En consé quence, une demande en règlement de juges a pu étra portée, pendant les vacations, devant la section criminelle de la cour de cassation, faisant fonctions de section des vacations, et jugée par cette section. (C. pr., 750.)

Lorsque le défendeur à une demande en règlement de juges acquiesce à cette demande, il y a lieu de compenser les dépens. (C. pr., 131.)

(De Brivazac C. Barincou.)

Le 15 janvier 1812, décès du sieur de Ménoire à Bordeaux. La dame de Brivazac, sa petite fille, accepte la succession sous bénéfice d'inventaire. La veuve, en vertu de conventions matrimoniales, conserve la jouissance des biens de son mari. Le 24 oct. 1823, elle décède. La dame de Brivazac, en sa qualité d'héritière bénéficiaire, songe à faire vendre les biens dépendans de la succession de son grand-père, et consistant en trois immeubles situés, l'un à Bordeaux, l'autre à Blaye, et le troisième à Toulouse. La vente en est poursuivie devant le tribunal civil de Bordeaux, et l'adjudication définitive a lieu le 25 oct. 1824. Pour la distribution des deniers, trois ordres séparés s'ouvrent, l'un à Bordeaux, à la diligence de la dame de Brivazac, les deux autres à Blaye et à Toulouse, à la requête du sieur Ba

rincou.

La plupart des créanciers inscrits étant domiciliés à Bordeaux, la dame de Brivazac fait, le 16 mai 1825, au greffe du tribunal de Bordeaux, une réquisition pour faire nommer un juge-commissaire qui procéderait à la distribution du prix tant des immeubles situés dans son ressort que de ceux situés dans le ressort des tribunaux de Blaye et de Toulouse, et ce nonobstant les ordres ouverts devant ces derniers tribunaux. Le sieur Barincou, ni aucun autre créancier, ne s'opposent à cette demande. Mais le tribunal de Bordeaux ne pouvant être saisi des poursuites relatives aux trois ordres dont il s'agit, qu'en vertu d'un arrêt de règlement de juges de la cour de cassation, la dame de Brivazac s'est pourvue, à cet effet, devant la section des requêtes. Cette section a ordonné, par arrêt du 19 juillet 1825, que la requête de la demanderesse serait communiquée au sieur Barincou, toutes choses cependant demeurant en

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