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dont les échéances correspondaient aux époques de paiement prétendues prises par les deux acquéreurs. Chacun de ces billets porte expressément la déclaration du sieur Poupard, qu'il n'entend faire aucune novation à ses titres. Poupard ne fut point payé à l'échéance du premier billet: bientôt il apprit que Debreyne avait pris la fuite. Alors se voyant joué par la veuve Laffon, il la traduisit devant le tribunal civil de Dunkerque, ainsi que les deux acquéreurs, Vanhoremberghe et Dupont, à l'effet d'obtenir contre eux une condamnation solidaire au remboursement de sa créance.

Le tribunal, par jugement du 24 janvier 1823, condamna le sieur Vanhoremberghe à payer à Poupard une somme de 5,010 fr., valeur représentative du terrain par lui acquis, si mieux il n'aimait délaisser. En même temps, il ordonna que le sieur Dupont tiendrait compte au demandeur de la diminution de valeur causée au gage hypothécaire par la démolition des bâtimens : mais il le relaxa de toute action en indemnité pour l'enlèvement des arbres fruitiers ou de futaie, qu'il considéra comme ayant perdu, par la vente, leur qualité d'immeubles fictifs. Le tribunal rejeta la demande de solidarité, par le motif qu'il ne pouvait en exister aucune entre l'acquéreur du sol et celui de la superficie, acquéreurs de deux choses différentes, en vertu de deux contrats distincts.

Sur les appels respectifs de ce jugement de la part de Poupard et des mariés Dupont, la cour royale de Douai a rendu, le 10 juin 1823, l'arrêt dont voici les termes : -« Attendu que Dupont et sa femme n'ont acheté que des matériaux à emporter et des arbres à abattre; que l'enlèvement des matériaux et l'abattis des bois, par eux achetés, a eu lieu sans aucune opposition, malgré la publicité de la vente qui a eu lieu et des faits qui en ont été la conséquence; Attendu qu'adversativement à Dupont et à sa femme, la vente des matériaux provenant de la démolition à effectuer de la maison de campagne dont il s'agit, et celle des arbres à abattre sur le terrain de cette maison, ne peuvent être considérées que comme des ventes d'objets mobiliers; — Attendu qu'une fois la démolition et l'abattis effectués, les matériaux et les arbres vendus à Dupont ont cessé d'être soumis à l'hypothèque de Poupard; Attendu que les Attendu que les circonstances de la cause ne permettent pas de penser que Poupard ait ignoré la démolition de la maison de campagne, et que tout établit, dans la cause, que les acheteurs se sont conduits de bonne foi et sans fraude; - La cour, faisant droit tant sur l'appel principal de Poupard que sur l'appel incident émis par Dupont et sa femme, declare Poupard non recevable et non fonde

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dans sa demande introductive d'instance.>>

Pourvoi en cassation de la part de Poupard, pour contravention aux art. 518, 521, 2118, 2166, 2167 et 2175 du code civil; 1o en ce que la cour de Douai a regardé, comme mobilière, la vente faite par la dame Laffon de sa maison de campagne, sur le motif que cette vente avait été faite pour démolir, et a déchargé l'acquéreur Dupont de l'obligation d'acquitter la créance hypothécaire du sieur Poupard; 2° en ce que cette cour a également affranchi de l'hypothèque de Poupard les bois de haute futaie compris dans la même vente, sous prétexte qu'ils étaient vendus pour être abattus:

On a dit, dans l'intérêt du demandeur, pour justifier

les deux branches de ce moyen, sur la première desquelles on a particulièrement insisté:

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Pour déterminer le caractère d'une vente, et pour savoir si elle est mobilière ou immobilière, il suffit, et la simple raison l'enseigne, de se fixer sur la nature de la chose vendue. Or, quelle est la nature d'une maison d'un édifice? « Les fonds de terre et les bâtimens, porte l'art. 518 c. civ., sont immeubles par leur nature. >> Ainsi, à la différence des objets dont parle l'art. 524, et qui ne sont immeubles que par la destination du propriétaire, les fonds de terre et les bâtimens ont par euxmêmes et essentiellement le caractère d'immeubles. Peu importe que la propriété du sol et celle des édifices ou superficie soient distinctes et ne résident pas dans la même majn; détachées comme réunies à la propriété du fonds, les maisons conservent toujours leur nature immobilière; car, on le répète, ce n'est pas par leur cohérence et leur accession au sol que les édifices sont immeubles; ils le sont par leur nature propre. La vente d'une maison est donc une vente immobilière, quoique la maison soit aliénée séparément du fonds sur lequel elle est assise, et qui est vendu à un autre acquéreur. Et si la vente est immobilière, l'acquéreur ne peut être affranchi du recours des créanciers hypothécaires que par le moyen de la purge légale.

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Cette vente cesse-t-elle, comme la cour de Douai l'a jugé dans l'espèce, d'être immobilière, par cela que les édifices ont été vendus pour être démolis? On comprend que, s'il était possible d'admettre une pareille doctrine, l'hypothèque n'offrirait plus au créancier qu'un gage illusoire, qu'une simple énonciation, qu'un mot glissé dans le contrat de vente suffirait pour anéantir. La condition ou charge de démolir insérée dans la yente n'altère donc nullement son caractère essentiel et constitutif de vente immobilière, et dès-lors ne peut exonérer l'acquéreur des obligations que la loi lui impose envers les créanciers hypothécaires, dont il désire éviter les poursuites.

A la vérité, la démolition une fois opérée, il ne reste que des matériaux dans lesquels il est impossible de voir autre chose que des objets mobiliers (art. 532 c. civ.). Mais cet événement postérieur à la vente n'en change pas la nature; il ne peut faire qu'elle n'ait pas été immobilière, puisqu'elle avait pour objet un immeuble. Seulement et comme le droit de suite hypothécaire ne peut plus s'exercer sur les matériaux provenus de la démolition; comme les créanciers sont privés de leur gage par le fait de l'acquéreur, leur action réelle qui n'a plus la chose sur laquelle elle pouvait s'exercer, se trouve convertie en une action personnelle contre l'acquéreur. Ici doit s'appliquer l'art. 2175 du cod. civ., d'après lequel « les détériorations qui procèdent du fait ou de la négligence du tiers-détenteur, au préjudice des créanciers hypothécaires ou privilégiés, donnent lieu contre lui à une action en indemnité. » Si le tiers détenteur doit indemnité pour les simples détériorations que l'immeuble a souffertes par sa négligence, peut-on mettre en doute qu'il ne doive garantir les créanciers de la perte qu'ils éprouvent par suite de la destruction totale et volontaire de l'immeuble hypothéqué?

Sur quels motifs s'est fondée la cour de Douai pour éluder l'application de ces principes et renvoyer les mariés Dupont de l'action du sieur Poupard? Elle a dit

d'abord que la vente d'édifices pour les démolir n'était qu'une vente mobilière; nous croyons en avoir dit assez pour rendre sensible l'erreur d'une semblable

doctrine.

Elle a considéré ensuite que l'enlèvement des matériaux avait eu lieu sans opposition, malgré la publicité de la vente. Mais d'abord il n'est pas exact de dire que la vente ait été publique; la vente publique qui avait. été annoncée n'a pas eu lieu : les actes même prouvent que les mariés Dupont et le sieur Vanhoremherghe ont acquis sans enchères et sans publicité; c'est donc à tort qu'on argumente contre le sieur Poupard de son silence. La connaissance qu'un créancier peut avoir eue de la vente de l'immeuble hypothéqué, n'a jamais emporté renonciation à son hypothèque : Non videtur consensisse creditor, dit la loi romaine, si, sciente eo, debitor rem vendiderit, cum ideò passus est venire, quia sciebat ubique pignus durare. Cette renonciation ne résulte pas même de la présence de l'acquéreur au contrat (Mornac sur la loi Caius, ff. de pign. act.; M. Grenier, des Hyp., t. 2, p. 452). Mais ensuite quel aurait pu être le résultat de l'opposition qu'il aurait formée ? S'il est admis en principe que la vente d'un édifice pour être démoli, ne constitue qu'une alienation de choses mobilières, en vain le créancier inscrit, averti par la démolition et l'enlèvement des matériaux, multipliera-t-il les oppositions entre les mains de l'acquéreur. De deux choses l'une ou le prix de la vente est payé, et alors l'acquéreur est à l'abri de toute recherche, puisque les meubles n'ont pas de suite par hypothèque; ou le prix est encore dû, et dans ce cas il représente des objets mobiliers sur lesquels le créancier hypothécaire ne peut réclamer aucun droit de préférence.

Enfin, la cour de Douai parle de la bonne foi des acquéreurs. Il semble difficile d'y croire, quand on considère la vileté du prix auquel ils ont acquis, l'omission de purge légale d'un immeuble qu'ils savaient grevé d'hypothèque, et la précipitation avec laquelle ils ont enlevé les matériaux. Mais, au surplus, quelle peut être l'influence de la bonne ou de la mauvaise foi du tiers-détenteur d'un immeuble qui a négligé les formalités nécessaires pour purger les hypothèques, d'un acquéreur qui a non pas seulement laissé se détériorer par sa négligence le gage des créanciers, mais qui a volontairement détruit et dispersé ce gage? En pareille circonstance, la bonne foi ne peut-être que l'ignorance de la loi, et l'on sait assez que c'est là une excuse qu'on ne peut proposer d'admettre. Il faut revenir à la question du procès; la vente d'une maison pour la démolir est-elle mobilière ou immobilière? Si elle est mobilière, l'arrêt dénoncé est à l'abri de la critique. Si, au contraire, et comme on eroit l'avoir prouvé, la vente d'un édifice ne perd pas son caractère d'immobilière, par cela que l'édifice est destiné à être démoli, rien ne peut soustraire l'acquéreur à la purge ou à l'obligation personnelle de désintéresser les créanciers hypothécaires, et partant aucune des considérations sur lesquelles s'est fondé l'arrêt dénoncé pour affranchir les mariés Dupout de l'action du sieur Poupard, ne peut justifier cet arrêt du reproche d'avoir violé les art. 518, 2160 et 2175 du c. civ.

Ajoutons que la doctrine professée par la cour de Douai renverse tous les principes admis jusqu'à ce jour. Quel trouble elle apporte dans les transactions des citoyens! quel bouleversement dans les fortunes! Un

créancier voyait la maison de son débiteur affectée à la garantie de ses droits; tranquille et confiant dans la valeur de son gage, il s'endormait sur la foi d'une législation protectrice; mais voilà qu'un système nouveau vient le déshériter des fruits de sa vigilance: ce système encourage la mauvaise foi; il rend la fraude facile, et enlève aux négociations leur stabilité. Des bâtimens ne sont plus qu'une agglomération de matériaux, que, d'un trait de plume, le débiteur pourra mobiliser, et le gage du créancier hypothécaire lui sera ravi, avant même qu'aucun acte extérieur l'ait averti de sa ruine! On a dit, sur la seconde branche du moyen proposé:

,

De la maison hypothéquée au sieur Poupard dépendaient des arbres de haute futaie, non mis en coupes réglées, pour une valeur de 4,500 fr. Ces arbres, compris dans la vente faite aux mariés Dupont, ont été divertis par eux. Doivent-ils en indemniser le créancier hypothécaire? Oui sans doute; car une vente de cette nature n'est pas plus, à l'égard des créanciers inscrits une vente mobilière, que la vente d'une maison pour la démolir. On n'ignore pas que la jurisprudence a toujours considéré les bois taillis, vendus pour être exploités, comme des meubles entre les mains de l'acquéreur, dégagés, par l'aliénation, de toute affectation hypothécaire. L'hypothèque, en effet, n'enlève point au débiteur Padministration de ses biens; elle lui laisse le droit d'en percevoir tous les revenus, et, par suite, la faculté de vendre les fruits de ses immeubles, lorsqu'ils sont parvenus à leur maturité. De là la conséquence qu'il peut, sans fraude, aliéner les coupes de ses bois taillis, puisque ces coupes sont reconnues par la loi elle-même pour être de véritables fruits, ainsi qu'il résulte de l'art. 590 du code civ. Pareillement, lorsque des bois de haute futaie ont été mis en coupes réglées, la loi veut que l'usufruitier puisse en profiter, en se conformant à l'aménagement des proprétaires (591). Ces coupes sont alors classées au rang des fruits par le législateur. Un débiteur pourra donc en consommer l'aliénation dans les mêmes circonstances, sans que son créancier hypothécaire ait droit de s'en plaindre.

Mais s'il a vendu des futaies non aménagées, l'acquéreur demeurera soumis à l'hypothèque, parce que ces futaies sont tout l'immeuble, et que le sol n'a de valeur que par elles. Aussi voit-on que le code n'en attribue pas la jouissance à l'usufruitier. (arg. à contrario de l'art. 591 précité). Cette opinion est celle de Basnage, ainsi qu'on peut l'induire du passage suivant, pris dans son Traité des hypothèques, p. 58:

D

« Et comme un acquéreur ou un créancier, dit-il, » peut veiller pour la conservation de ses hypothèques, » et empêcher qu'elles ne soient affaiblies ou diminuées » par la détérioration des biens qui lui sont hypothequés, il fut jugé, le 10 avril 1653, que celui qui avait » acheté des bois de haute futaie, était tenu de bailler » caution, aux créanciers hypothécaires, du prix des » bois qu'il faisait abattre, parce que la valeur du » fonds hypothéqué était diminuée par cette vente. » Cette doctrine est également admise par M. Persil, Reg. hypothec., t..1, p. 249.

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devant le tribunal de Saint-Dié, et soutiennent qu'il est déchu de tout recours contre eux, à cause du défaut dé protêt et de la prescription de cinq ans ; ils prétendent enfin qu'il est sans qualité pour agir en vertu du procèsverbal d'adjudication.-Germain répond que le gou

celle de la coupe des arbres ont été faites publiquement aux enchères, après avoir été annoncées par des af fiches (1); — Attendu que l'enlèvement de ces marchandises a été effectué loyalement et sans fraude, au su du demandeur en cassation, et sans aucune opposition de sa part; Attendu, d'ailleurs, vernement lui ayant cédé ses droits par la négociation ves pour suites dirigées contre les acquéreurs n'ont été princi-, des traites, il a trente ans pour agir. piées que plusieurs mois après l'exécution pleine et entière de ces ventes ; qu'il suit de l'ensemble de ces faits reconnus constans, que la cour royale de Douai en écartant, par fin de non recevoir, l'action formée par le demandeur, loin d'avoir violé aucune loj, a fait une juste application de celles qui devaient régir la matière; - Rejette, etc.

Du 9 août 1825; sect. req. M. Botton, f. f. de pr. M. Liger-Deverdigny, rapp. M. Dalloz,av.

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LETTRE DE CHANGE, CONDITION, PROTET. Quelle que soit la cause primitive d'une lettre de change, le porteur doit se soumettre aux règles prescrites pour le protét, et le recours contre les accepteur et endosseurs. Ainsi, la circonstance qu'une lettre de change a été souscrite, au profit de l'état, par un adjudicataire de coupes de bois, n'empêche point que le porteur qui n'a pas fait faire de protét faute de paiement, et qui n'a pas exercé de poursuites contre les endosseurs et accep teur, dans le délai voulu, ne soit déchu de toute action contre eux. (C. com., 168 et 189.),

2

La seule négociation d'une lettre de change, souscrite au profit de l'état par un adjudicataire de coupes de bois, ne transmet pas au porteur le droit particulier que le gouvernement s'est réservé, dans le cahier des charges, de pouvoir poursuivre l'adjudicataire en paiement de l'adjudication par les voies ordinaires, on cas de non acquittement de la lettre de change, et outre l'action qui résulterait de ce non acquittement. Ainsi, le porteur de la lettre de change qui n'a pas fait faire de protét à l'échéance, et qui est resté cinq ans, sans exercer de poursuites contre les endosseurs, ne peut prétendre qu'en vertu des conventions particulières du cahier des charges, il a le droit, comme étant à la place de l'état, de recourir contre les cautions de l'adjudicataire pendant trente ans (2).

(Germain C. Gley et Antoine.)

En 1812, le sieur Marande, adjudicataire de bois de l'état, souscrit, en paiement, plusieurs lettres de change, acceptées par le sieur Gley et endossées par le sieur Antoine, tous deux cautious de son adjudication. Le receveur général des Vosges passe une de ces traites à l'ordre du sieur Germain. Le décembre 1814, jour de l'échéance, elle n'est pas payée, et il n'est pas fait de protêt.-En 1821, Germain notifie le procès-verbal d'adjudication à Marande et à ses cautions; et Marande étant insolvable, il fait commande ment à Gley et aux héritiers d'Antoine de payer la traite. Opposition par ceux-ci; ils assignent Germain

(1) Les actes de vente des 15 et 19 janvier 1822 détruisent toute idée d'une vente publique, et, à plus raison, d'une vente aux enchères, comme on l'a fait voir à l'audience. L'adjudication publique et aux enchères qui avait été annoncée, n'avait eu aucune suite, faute d'enchérisseurs.

(a) Cette proposition, formellement consacrée par l'arrêt de la cour royale, l'est aussi implicitement et nécessairement, par l'arrêt de la cour suprême.

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1

Le 8 août 1822, jugement qui rejette la prétention de Germain.-Appel; et, le 23 février 1824, arrêt confirmatif de la cour de Nancy, en ces termes : « Considérant que si les traites souscrites par les adjudicataires de bois, et notamment celle dont il s'agit, sont la représentation du prix d'immeubles, elles n'en sont pas moins soumises, lorsqu'elles sont négociées, à tou tes les règles des lettres de change, dont elles ont la forme, et doivent, par conséquent, être protestées à leur échéance et le paiement en être réclamé, dans les cinq ans, sous peine, dans le premier cas, de déchéance du recours, et, dans l'autre, de prescription, aux termes des art. 168 et 189 c. com. ; qu'ainsi, la lettre de change, dont il s'agit, n'ayant pas été protestée jusqu'alors, quoique payable le 31 déc. 1814, et le paiement n'en ayant été réclamé que le 27 déc. 1821, le sieur Germain a encouru et la déchéance et la prescription prononcées par ces articles; - Considérant, d'ailleurs, que le sieur Germain est sans qualité pour faire usage du procès-verbal d'adjudication du 17 septembre 1812, puisque la cession ne lui en a pas été faite; qu'il n'y a point figuré comme partie, et qu'il lui est totalement étranger; qu'aux termes des art. 7 et 8 du cahier des charges, il n'appartient qu'au receveur général de poursuivre l'adjudicataire et ses cautions, en vertu du procès-verbal d'adjudication; que ces articles, en introduisant, en sa faveur, un mode particulier de poursuites, qui l'autorise à employer les mêmes voies que la régie de l'enregistrement, et à provoquer même une amende contre les retardataires, né lui ont pas permis de céder ces droits à un tiers, qui ne peut, dans ce cas, être mis à la place d'un agent du gouvernement, avec lequel les parties ont traité; qu'ainsi, sous ce nouveau rapport, le sieur Germain est encore non recevable et mal fondé. »

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Pouryoi de la part de Germain, pour fausse application des art. 168 et 189 c. com., et violation des art. 1271 et 1692 c. civ. Il est constant qu'encore que le gouvernement exige des lettres de change en paiement des coupes de bois qu'il vend aux particuliers, il conserve le droit d'agir directement en vertu du procèsverbal d'adjudication; c'est-à-dire, qu'il ne s'opère pas de novation par les letres de change, et que, pendant trente ans, les adjudicataires peuvent être actionnés. S'il en est ainsi à l'égard de l'état, il doit en être de même à l'égard de ceux à qui l'état fait cession de ses droits.-Or, dans l'espèce, cette cession a eu lieu. Car

la cession d'une créance, représentée par une lettre de change, s'opère par l'endossement. Ainsi, le demandeur était recevable, pendant trente ans, à agir coutre les cautions de l'adjudicataire.

ARRÊT.

LA COUR,-sur les concl. de M. Joubert, av. gén.; -Attendu que le sieur Germain étant porteur d'une traite ou lettre de change, qui lui a été transmise par la voie de l'endossement, et agissant contre les précédens endosseurs, ceux-ci, quelle qu'ait été, dans le

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(Commune d'Arbent, etc. C. de Fleurieu.) Par jugement des 15 janvier et 4 juillet 1793, la commune d'Arbent est réintégrée dans la propriété qu'elle réclamait de 672 arpens de bois, contre le sieur de Fleurieu, représentant le seigneur d'Arbent. De Fleurieu se pourvut en cassation, mais bientôt il acgaiesça au jugement. Cependant le sieur Perrin, à qui de Fleurieu avait vendu, par acte sous seing privé, du 15 oct. 1790, 1800 pieds de sapin, à prendre dans, les bois litigieux, en commença la coupe. La commane s'y opposa; elle fit mettre sous le séquestre les bois coupés, et de

devant les juges qui doivent connaître de la contestation.

Pourvoi de la commune, mais seulement contre l'arrêt de compétence; Violation des lois qui ont établi les deux degrés de juridiction, et de la loi dug vent. an 4Cette dernière loi, disait la cominune, en abolissant celles des 10 juin et 2 oct. 1793, qui soumettaient les contestations entre les communes et les particuliers au sujet de biens communaux, à des arbitres souverains, a rétabli les deux degrés de juridiction pour ces contestations La partie qui se pourvoit par opposition contre une décision arbitrale, prétendant qu'il n'y a pas de jugement et, par là même, que la chose est encore à juger, doit donc, dans l'ordre des juridictions, porter l'affaire en première instance. Aussi qu'est-il arrivé? c'est que la cour de Lyon s'est mise bientôt en contradiction avec elle même; car, après avoir statué sur l'opposition, elle renvoie devant les premiers juges pour prononcer sur le fond, ce qu'elle n'eût évidemment pas fait, si elle eût été investie du droit de juger

l'affaire.

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LA COUR, sur les concl. de M. Joubert, av. gén. ; -Attendu que l'arbitrage forcé, créé par le décret du 10 juin 1793, pour statuer sur les demandes des communes en réintégration dans leurs biens communaux, était une juridiction souveraine; qu'il n'y a aucune apa'logie entre cette juridiction et celle des juges de paix, tribunaux d'arrondissement et tribunaux de commerce

vant le tribunal de Nantua. Perrin appela de Fleurieu ens essentiellement juges en première instance, ne

garantie.—Le tribunal, aux termes des lois des 28 août 1793, 10 juin et 2 oct. 1793, renvoya les parties à faire décider leurs contestations par des arbitres. 5 therm. an 2, jugement arbitral qui déclara la vente valable, ainsi que les paiemens reçus par de Fleurieu; condamna la commune à des dommages-intérêts envers Perrin, et ordonna que celui-ci paierait le restant du prix de la coupe à la commune.

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investis et

du droit de jager certaines causes eu dernier ressort;
Attendu que, d'après le titre 32 de l'ord. de 1667, qui
n'a point cessé d'être en vigueur jusqu'à son remplace-
ment par le code de procédure, il était permis à une partie
qui n'avait été ni entendue ni légalement représentée
devant le tribunal qui l'avait condamnée, de se pour-
voir par voie d'opposition; que si, dans l'ordre naturel
des choses, cette opposition doit être portée au tribu-
nal

Le 24, signification de ce jugement, par Perrin, à la

commune et au sieur de Fleurieu.

aqui a rendu le jugement, cette marche ne pouvait par la loi du 10 juin 1793, a été aboli par la loi dug venPart. 475 c. pr., cette opposition devait être portée à un com-ose an 4; que, d'après l'analogie du cas prévu par tribunal égal à celui qui avait rendu le jugement attaqué, qui ne pouvait, dans l'espèce, être que la cour royale de Lyon;"

Ce dernier, après vingt-huit ans, a assigné la commune et les héritiers Perrin devant la cour de Lyon, pour voir statuer sur l'opposition, et, au besoin, sur la tierce opposition qu'il formait à la sentence arbitrale du 5 therm. an 2. La commune oppose l'incompétence, de la cour, et prêtend qu'au fond l'opposition n'est pas, valable; máis, par un premier arrêt du 13 juillet 1824, la cour se déclare compétente, attendu qué les sentences rendues par des arbitrés forcés avant le 17 vend. an 4, dans les cas prévus par les lois des 10 juin et 2 oct. 1793, n'étaient pas sujettes à l'appel; attendu que la sentence arbitrale da 5 therm. an 2 est attaquée par la voie de l'opposition fondée, entre autres, sur ce que les arbitres, qui ont prononcé étaient sans pouvoir légal; attendy que la connaissance de cette opposition à une sentence en dernier ressort ne peut être portée que devant la cour qui remplaçant le tribunal d'arbitres qui n'existe plus.-16 juillet 1824, arrêt définitif de la cour de Lyon, qui annulle la sentence arbitrale et renvoie les parties

(1). Cette décision est en opposition avec les arrêts rapportés C... 1..790. Gus A. t. 1o, p. 300, et avec l'opinion de M. Merlin, ibid. Voy, aussi plus bas, p. 10:

"

Attendu que cette cour, après avoir adınis l'opposition et y faisant droit, a déclaré le jugement arbitral non avenu, par des motifs qui n'ont été l'objet d'aucune critique de la part du demandeur, et renvoyé les parties à se pourvoir par les voies de droit devant les tribunaux compétens, de la même manière qu'elles le pourraient en vertu de l'art. 1 de la loi du g ventôse an 4, s'il n'avait jamais existé de jugement arbitral; D'où il suit que ni les règles de la compétence, ni celle qui établit deux degrés de juridiction en matière civile, n'ont été violées;-Rejette.

n

er

Du 9 nov. 1825.-Sect. req.-M. Henrion, prés.
g
M. Pardessus, rapp.-M. Nicod, av.

---ADOPTION, ÉTRANGER, CHOSE JUGÉB.

¿» La capacité d'être adopté est un droit purement civil

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qui appartient à la législation sur l'état des personnes et au droit public interne. · Les étrangers en sont incapables, s'il n'existe pas de traité entre leur nation et la France qui contienne une clause réciproque de ce droit. (C. c., 11).

Spécialement: Un Badois ne peut être adopté par un Français. (Traités 20 nov. 1765 et 30 mai 1814.

Lorsque deux époux ont conféré l'adoption à un étran· ger, les héritiers d'un des adoptans peuvent demander la nullité de l'adoption, dans leur intérêt personnel, sans avoir besoin du concours de l'autre adoptant.

Le jugement qui prononce une adoption est un acte de juridiction volontaire, duquel ne peut résulter l'exception de la chose jugée à l'égard des tiers intéressés à faire annuller l'adoption. En conséquence, cette nullité peut être demandée au tribunal même qui a rendu le jugement d'adoption (C. c. 1551).

(Sander-Lotzbeck C. Dugied.)

Pour les faits de cette cause, nous nous référons à l'arrêt de cassation rapporté C. A.. 23. 1. 323.-C. N.. 1. 281, ainsi qu'aux observations et à la discussion lumineuse dont il est précédé.

Cet arrêt a renvoyé la cause devant la cour de Dijon, qui a jugé les deux premières questions conformément à la jurisprudence de la cour suprême. La cour de Dijona eu, comme on le verra, à s'occuper de deux autres questions accessoires : son arrêt, en date du 31 janv.1824, est conçu en ces termes: « Considérant....... sur la 2o question, que c'est à tort que les premiers juges ant basé leur incompétence sur ce qu'ils ne pouvaient se réformer eux-mêmes et encore moins réformer un arrêt de cour royale, puisque ces principes, vrais en euxmêmes, ne recevaient aucune application, attendu que les jugemens et arrêts, en matière d'adoption, ne jugent véritablement rien et ne font que mettre le sceau légal à cette adoption, sans rien statuer sur la validité, d'autant qu'ils sont rendus sans contradiction et sans être motivés;

Sur la 3 question, considérant que rien, dans le titre 8 c. c., qui traite de l'adoption, de ses formes et de ses effets, ne tend à interdire, aux héritiers du sang ou testamentaires, la faculté de critiquer l'adoption consommée; et que les tribunaux peuvent d'autant moins admettre une interdiction, que la loi ne prononce pas, que cette loi prescrit elle-même des cas où l'adoption serait révocable;

Sur la 4 question, considérant que, sans s'occuper de rechercher si les appelans sont héritiers universels ou à titre universel, il suffit qu'ils aient intérêt à faire augmenter la portion qui leur revient dans la succession de Guillaume Lotzbeck, pour qu'on ne leur refuse pas qualité pour attaquer l'acte dont l'effet serait de diminuer cette portion;

Sur la 5 question, considérant que, quoique les mariés Lotzbeck aient adopté Sander par un seul et même acte, cette adoption n'est pas indivisible, et qu'on peut prononcer sur l'une, sans s'occuper de l'autre; que, d'ailleurs, les appelans n'auraient eu aucune qualité pour faire figurer la veuve Lotzbeck dans la cause, et qu'on ne peut conséquemment se faire un moyen contre eux de ce qu'elle n'y est pas...;

Sur la question, considérant que l'adoption est l'exercice d'un droit civil, et que, pour s'en convaincre, il suffit d'examiner les différences essentielles qui exis

tent entre les actes ou les droits qui dérivent du droit des gens et ceux qui dérivent du droit civil, jus civitatis, or, les engagemens qui dérivent du droit des gens sont ceux qui existeraient par la nécessité des choses, quand même la loi n'en aurait pas déterminé la forme, et qui, d'ailleurs, sont admis par toutes les nati ons civilisées, tels que le droit de vendre, d'acheter, d'échanger, de prêter, etc. Ceux qui dérivent du droit civil sont, au contraire, ceux dont on ne peut concevoir l'existence, sans que la loi civile en ait accordé la faculté ; d'où il suit qu'on ne peut révoquer en doute que l'adoption ne soit au nombre de ceux-là; car c'est, à proprement parler, une fiction de la loi qui donne un enfant au père adoptif et un père à l'enfant;-Considérant que les art. 8, 11 et 13 c. civ. règlent, de la manière la plus claire, quelles sont les personnes qui jouissent des droits civils, soit dans leur plénitude, soit seulement en partie; que l'art. 8 détermine, en termes généraux, que tout Français jouit des droits civils; que l'art. 11 détermine que l'étranger jouit des mêmes droits civils accordés aux Français par les traités de la nation à laquelle cet étranger appartient; d'où déjà la conséquence que l'étranger ne jouit pas de tous les droits civils, et qu'il y a restriction; mais ce qui le confirme, c'est que l'art. 13 statue que l'étranger jouira des droits civils pendant sa résidence en France, quand il aura obtenu du roi l'autorisation d'y établir son domicile; aussi cette simple exposition des principes, réfute suffisamment la première proposition de l'intimé, que les étrangers jouissent en France de tous les droits civils dont ils ne sont pas privés par une disposition spéciale de la loi, et elle répond également à cette seconde proposition, qu'un étranger peut être adopté en France, parce qu'aucune disposition de la loi d'adoption ne le défend;-Considérant que, du moment qu'il est établi que l'adoption est l'exercice d'un droit purement civil, et que les étrangers ne jouissent en France que de ceux ́accordés réciproquement par des traités de leurs nations, il ne reste, pour décider entièrement la question, qu'à examiner si les Badois sont, par quelques traités, intervenus entre la France et le pays de Bade, déclarés aptes à être adoptés par des Français; or, ce point de fait n'est pas même controversé; il est reconnu que le traité de 1765 n'en fait pas, et n'en pouvait faire mention; car l'adoption n'était alors, ni dans nos lois, ni dans nos mœurs; et le traité de 1814, dont il a été dit un mot, n'est que le renouvellement de celui de 1765; et vainement Sander prétend-il échapper aux conséquences de cette opinion, en soutenant que le principal effet de l'adoption est de succéder à l'adoptant, et que ces traités établissant le droit des Badois de succéder à l'adoptant des Français, soit ab intestat, soit par dispositions testamentaires, il faut en conclure que le droit d'adopter est simplement compris dans ces traités; car, il n'est point vrai de dire que le droit de succéder soit le principal effet de l'adoption; il est de principe, au contraire, que le principal effet, et c'est ainsi que s'en expliquent les auteurs, est de produire un changement dans l'état personnel de l'adoptant et de l'adopté, changement par suite duquel il s'établit entre eux des rapports de paternité et de filiation, et c'est comme conséquence de ces rapports que la loi a donné à l'adopté le droit de succéder à l'adoptant. Tout aussi vainement Sander prétendt-il, en s'appuyant des définitions données par des

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