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Le proc. gén. expose, etc.- Jeanne Desmée, accusée d'infanticide, fut traduite devant la cour d'assises d'Indre-et-Loire, le 24 juin dernier. - La déclaration du jury, sur les questions posées par M. le président, fut: « Sur mon honneur et ma conscience devant Dieu et devant les hommes; sur la première question: Non, Jeanne Desmée n'est pas coupable d'avoir, le 18 mars dernier, homicidé volontairement l'enfant du sexe féminin dont elle venait d'accoucher. » — Sur la seconde question: « Non, l'accusée n'est pas coupable d'avoir, par imprudence, négligence ou inattention, commis involontairement un homicide; mais, oui, l'accusée est coupable d'en avoir été involontairement la cause. » -Sur cette déclaration, la cour d'assises, par arrêt du même jour 24 juin, faisant l'application de l'art. 319 c. pén., condamna l'accusée à trois mois d'emprisonnement, à 50 fr. d'amende et aux frais.

Tel est l'arrêt que l'exposant est chargé de soumettre à la censure de la cour. La cour d'assises a fait une fausse application de l'art. 319 c. pén. de la cour d'assises vient de ce qu'ayant divisé cet arL'erreur ticle en deux parties bien distinctes, elle n'a pas joint à chacune d'elles la disposition qui s'y rattache. Elle a considéré que les circonstances de la maladresse, d'imprudence, etc., n'avaient absolument de rapport qu'à l'homicide commis involontairement ; mais que, quant à la cause involontaire de l'homicide, les circonstances indiquées pour l'auteur de l'homicide n'étaient pas nécessaires pour qu'il y eût lieu à l'application de la peine prononcée par cet article. S'il en était ainsi, il s'ensuivrait que celui qui aurait le moins de reproche à se faire dans un accident malheureux se trouverait puni, tandis que celui qui aurait été la cause du malheur arrivé n'éprouverait aucune condamnation.-En lisant attentivement cet article, qui est rédigé clairement et avec précision, il est facile de reconnaître qu'il faut, dans l'un comme dans l'autre cas dont il est question, qu'il y ait eu imprudence, maladresse, inattention, etc.; en un mot, c'est comme si l'on avait dit : Quiconque, par maladresse, imprudence, négligence, aura commis involontairement un homicide; ou quiconque, par maladresse, imprudence, etc., aura été la cause involontaire d'un homicide, sera puni de, etc.; Il résulte bien évidemment de la saine interprétation de cet article 319 c. pèn., que celui qui a été la cause involontairement d'un homicide, sans avoir à se reprocher de maladresse, d'imprudence ou négligence, n'est pas plus coupable que l'auteur même de l'homicide qui est à l'abri des mêmes reproches. Dans l'espèce, le jury ayant écarté les circonstances aggravantes, il s'ensuivait que l'accusée Desmée devait être acquittée; la cour d'assises l'ayant condamnée, il y a donc eu fausse application de l'art. 319 c. pén. précité. Ce considéré, etc.-H. de Vatimesnil.

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Du 15 sept. 1825. pr.-M. Busschop, rapp.

Sect. crim.

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VOL, VASE SACRÉ.-JURY, QUESTION. Lorsqu'à la question: L'accusé est-il coupable d'aappelé ciboire? le jury répond: Oui, l'accusé est couvoir volé dans l'armoire d'une sacristie un vase sacré pable, mais sans aucune des circonstances aggravantes; cette réponse claire et complète est acquise à l'accusé, et il n'y a pas lieu de faire expliquer le jury sur la question de savoir si le vase volé était ou n'était pas un ciboire. (C. inst. cr., 345.)

Lorsqu'une question nouvelle résulte des débats, question principale. (C. inst. cr., 337, 338.) cette question doit être ajoutée et non substituée à la

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Lorsque, d'après le résumé de l'acte d'accusation et l'arrêt de renvoi, un individu est accusé d'avoir volé un vase destiné aux cérémonies de la religion catholique cette question doit être posée au jury; l'accusation n'est pas purgée, si le président s'est borné à lui soumettre la question résultante des débats, de savoir si l'accusé s'est rendu coupable du vol d'un vase sacré. (Le Ministère public C. Desenne.)

1

LA COUR, sur les concl. de M. de Vatimesnil, av. procureur du roi à Blois, et résultant de ce que la cour gén.; Sur le moyen de cassation présenté par le d'assises n'aurait pas fait expliquer le jury sur la question de savoir si le vase d'argent volé par Desenne n'était pas un ciboire; Attendu que la cour d'assises ayant, sur le réquisitoire du ministère public, posé, comme résultant du débat, la question suivante: « Detrait frauduleusement, dans la sacristie de l'église de la senne est-il coupable d'avoir, le 10 mai dernier, sousMadeleine, à Vendôme, un vase sacré appelé ciboire, lequel était renfermé dans une petite armoire! La réponse du jury a été : Oui, l'accusé est coupable, mais sans aucune des circonstances aggravantes, telles qu'elles déclaration du jury, sur la seule question qui ait été sousont établies dans la position de la question.—Que cette mise à sa délibération, était précise, catégorique et conforme à ce que prescrit l'art. 545 c. inst. cr.; qu'elle ne demandait donc en soi aucune explication, puisqu'en écartant la double circonstance d'un vol de ciboire ou vase sacré « renfermé dans une armoire de la sacristie de l'église, dont il s'agit, » et en déclarant l'accusé sacristie, elle répondait entièrement à la question recoupable d'un simple vol de vase d'argent dans ladite mise aux jurés ; que, sous ce rapport, l'accusé a, comme le ministère public, un droit acquis dans une déclaration du jury parfaitement compétente et régulièrement émise, et que, dans cet état des faits, il ne pourrait être lége; qu'ainsi tombe et s'évanouit le 2e moyen du decondamné à aucune des peines portées contre le vol sacrimandeur, tiré de ce que la cour d'assises, en condamnant simplement Desenne à cinq années d'emprisonne

ment, aurait faussement appliqué l'art. 401 c. pén., et violé la loi du 20 avril 1825, sur la répression des crimes et délits commis dans les édifices ou sur les objets consacrés à la religion catholique;

Mais attendu que l'art. 10 de la susdite loi, après avoir, dans son 1 S, prononcé la peine des travaux forcés à temps contre tout individu coupable d'un vol de vases sacrés commis dans un édifice consacré à la religion de l'état, dispose, au 2° S, que, dans le même cas, sera puni de la peine de réclusion tout individu coupable du vol d'autres objets destinés à la célébration des cérémonies de la même religion;

Attendu, en fait, que de l'arrêt de renvoi de l'accusé à la cour d'assises et du résumé de l'acte d'accusation, il résulte que Desenne était prévenu d'avoir volé un vase d'argent destiné aux cérémonies de la religion catholique, crime prévu par le dernier § de l'art. 10 de la loi du 20 avril 1825, et que si, dans ledit arrêt de renvoi, la chambre des mises en accusation a substitué par erreur le mot consacré à celui de destiné aux cérémonies de la religion catholique, elle a rectifié cette erreur par la citation du 2° S de l'article de loi auquel elle se référait, et fait assez connaître que c'était dans les termes de cette partie de l'article que l'accusation devait être portée; que, sur ce point, comme sur le résultat du debat, le jury devait être mis à portée de s'expliquer relativement à la culpabilité d'un individu qui pouvait n'être pas, à ses yeux, convaincu d'un vol de ciboire ou vase sacré, et cependant être reconnu coupable du vol d'un vase destiné aux cérémonies de la religion catholique; qu'il fallait qu'à cet égard une question, qui sortait nécessairement du résumé de l'acte d'accusation, fât soumise au jury, et que celle résultant des débats ne devait pas l'exclure;-Que cependant la cour d'assises séant à Blois s'est bornée à poser, d'après le débat, une question incidente qui devait être ajoutée et non pas substituée à la question principale, et que, par suite de cette erreur, l'accusation n'a pas été entièrement purgée, puisque le jury n'a point été interrogé sur le fait et les circonstances particulières que présentait le résumé de l'acte d'accusation;--En quoi ladite cour d'assises s'est écartée des règles de sa compétence et a violé les art. 337 et 338 c. inst. cr. : -Par ces motifs, casse et annulle l'arrêt rendu par la cour d'assises du dép. de Loir-et-Cher, le 17 août dernier; Et, pour être procédé à de nouveaux débats, seulement sur les faits et les circonstances résultant de l'acte d'accusation non purgés par la déclaration du jury existante, ainsi qu'à une position de question additionnelle, et pour être statué conformément à la loi, tant sur ladite déclaration du jury que sur celle à intervenir;-Renvoie, etc. Du 15 sept. 1825. Sect. crim. M. Portalis, pr. -M. Chantereyne, rap,

Voie publique, DÉMOLITION, DÉLAI.—Chose jugée. Un tribunal de police qui ordonne la démolition d'une construction faite sur la voie publique, peut, sans excès de pouvoir, accorder au prévenu un délai pour opérer cette démolition,

Le délai qu'un tribunal de police accorde à un individu pour démolir une construction élevée sur la voie publique, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative ne puisse, dans l'intérêt public, contraindre

le prévenu à opérer la démolition dans un plus court délai. (C. pén., 471, no 5.)

(Ministère public C. Sauer.)

· LA COUR, sur les concl. de M. de Vatimesnil, av. gén.;-Attendu, sur le second moyen, que le tribunal de simple police de Colmar, en donnant un délai au sieur Sauer pour la démolition du hangard qu'il avait élevé sur la voie publique et qu'il lui était ordonné de démolir, n'a point excédé ses pouvoirs;

Qu'en effet, les tribunaux de simple police n'ordonnent la démolition de constructions élevées sur la voie publique en contravention aux lois et règlemens sur la voirie, qu'à titre de réparation et de dommages et intérêts; qu'ils ne sont pas juges de ce qui intéresse la sûreté de la voie publique, mais seulement arbitres de la réparation qui est due au public; et ils peuvent modérer cette réparation, en accordant un délai plus ou moins long à celui qui y est condamné ;—Que leur jugemens ne font point obstacle à ce que l'autorité administrative compétente, agissant dans la sphère de ses attributions, ne puisse, dans l'intérêt de la sûreté de la voie publique, contraindre les contreven ans qui ont construit sur cette voie, sans avoir préalablement requis et obtenu l'alignement nécessaire, à opérer la démolition de leurs constructions dans un délai plus court que celui qui leur est accordé par le jugement qui les condamne à démolir, ainsi qu'il résulte du n° 5 de l'art. 471 e. pén., puisque cette autorité peut même y contraindre, selon l'exigence des circonstances, ceux qui n'ont point encouru de condamnation et qui n'ont contrevenu à aucunes lois ou règlemens;-Rejette.

Du 15 sept. 1825.-Sect. crim.-M. Portalis, pr.→ M. Clausel de Coussergues, rap.

DÉPENS, DOMMAGES, MINISTÈRE public, RÉGIE. Le ministère public, lorsqu'il ne fait qu'obéir à ses devoirs dans l'action qu'il exerce contre un individu, ne peut être condamné aux dépens, même en matière de contravention à la traite des noirs. (C. pr., 130.)

Lorsque le ministère public a succombé dans une action criminelle intentée contre des particuliers, l'état ne peut être condamné envers eux à des dommages-in

térêts.

La loi prohibitive de la traite des noirs est une loi de police, et non une loi fiscale. (L. 15 avril 1818.)

Les administrations chargées de la perception des droits publics, n'agissant pas dans l'intérêt de la vindicte publique, mais dans un intérêt purement pécuniaire, peuvent, lorsqu'elles succombent, être condamnées à des dommages-intérêts et aux dépens,

(Minist. publ.; aff. de la Marie-Madeleine.) Par le jugement qui a renvoyé les armateurs et capitaine de la goëlette la Marie-Madeleine, de la prévention d'avoir contrevenu à la loi sur la traite des noirs, le gouvernement a été condamné envers eux à 10,000 fr. de dommages-intérêts et aux dépens. Sur l'appel du ministère public, non seulement le conseil d'appel séant Saint-Louis-du-Sénégal, a confirmé ce jugement, mais il a prononcé contre le ministère public de nouveaux dommages-intérêts, et l'a condamné aux frais faits sur l'appel.-Pourvoi.

à

ARRÊT.

LA COUR,sur les concl. de M. de Vatimesnil, av.

gén.; Attendu que si la justice commande que tout tort ou dommage soit réparé, et si la loi veut que la partie civile, dans le cas où elle succombe dans sa poursuite, et où celui qu'elle poursuit est reconnu innocent, soit condamnée envers lui à des dommages et intérêts; que si la loi veut pareillement que le dénonciateur supporte, en semblable hypothèse, la peine d'une dénonciation imprudente ;-Néanmoins, la justice et la loi se réunissent pour assurer, avant tout, la sûreté publique et le maintien de l'ordre public, et pour faire prévaloir un si grand intérêt sur les interêts privés de chaque citoyen;-Que cette grande considération a déterminé le législateur à ne pas permettre qu'il soit prononcé de dommages et intérêts contre le déuonciateur, en cas d'acquittement du dénoncé, lorsque le dénonciateur est fonctionnaire public et n'a fait qu'obéir à ses devoirs en dénonçant aux tribunaux le fait qui a servi de base à la poursuite et l'individu qui pourrait en être l'auteur; -Qu'en effet, c'est alors dans l'intérêt général de la vindicte publique, et non pour la réparation d'un tort ou d'un dommage privé, que l'action criminelle a été introduite, et qu'il n'est jamais dû de dommages et intérêts par suite d'une instruction requise par les ma-, gistrats ou le ministère public, d'près le commandement, exprès de la loi et dans l'intérêt de la vindicte publique;

Attendu que si, en matière fiscale, les administrations publiques, qui sont chargées, au nom de l'état, de la perception des droits et revenus publics, peuvent être condamnées, lorsqu'elles échouent dans leur poursuite, à des dommages et intérêts envers les individus qu'elles accusaient de contravention, c'est qu'elles n'agissent point dans l'intérêt de la vindicte et de l'ordre publics, mais dans un intérêt réellement pécuniaire;. Attendu que la loi prohibitive de la traite des noirs est une loi de police et de sûreté, et non une loi fiscale; que les contraventions à cette loi, poursuivies par le ministère public, ne le sont point, comme les contraventions aux lois de douanes, quoiqu'elles soient portées devant les mêmes tribunaux, dans un intérêt pécuniaire, mais dans l'intérêt sacré de l'humanité et du droit des gens, et par conséquent de la vindicte et de l'ordre publics; Attendu que, dès-lors, l'arrêt attaqué, qui a condamné l'état et le ministère public à des dommages et intérêts et aux dépens envers les armateurs et le capitaine de la goëlette la Marie-Madeleine, parce que le ministère public a échoué dans ses poursuites, au sujet d'une contravention à la loi du 15 avril 1818, a procédé comme en matière de douanes, et a méconnu et violé les dispositions de cette loi et les principes généraux de la législation criminelle, qui s'opposent à ce que l'état et le ministère public soient condamnés à des dommages et intérêts, lorsqu'un prévenu est renvoyé d'une poursuite ou d'une accusation intentée au nom et dans l'intérêt de la vindicte publique: Par ces motifs, faisant droit sur le pourvoi du procureur du roi près le conseil d'appel institué dans la colonie du Sénégal, casse et annulle Parrêt rendu par ledit conseil, le 14 février dernier, dans la disposition qui a confirmé la condamnation du gouvernement à des dommages et intérêts et aux dépens envers le prévenu, prononcée en première instance, et dans la disposition qui, en cause d'appel, a condamné le ministère public à de nouveaux dommages et intérêts et aux dépens envers le prévenu;

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TENTATIVE, CARACTÈRE, CASSATION, CHAMB. D'ACcus. Une cour peut, tout en reconnaissant qu'un individu s'est introduit dans une habitation à l'aide d'escalade et d'effraction, et avec l'intention d'y commettre un vol, déclarer néanmoins que ces faits ne constituent pas le commencement d'exécution requis par la loi pour caractériser la tentative criminelle de vol (c. pén. 2.)

Si une cour reconnait, en fait, qu'un prévenu a enlevé l'un des barreaux de fer qui garnissaient une croisée de la maison dans laquelle il s'est introduit, elle doit le renvoyer devant la police correctionnelle, comme prévenu du délit de destruction de clôture; elle viole l'art. 250 c. inst. cr., si elle le renvoie de la poursuite. (Intérêt de la loi. Lavareille ).

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en

Le 27 juin 1825, la chambre d'accusation de Bordeaux a rendu l'arrêt que voici Attendu qu'il résulte de l'information, que, le 16 avril dernier, Jean Lavareille s'introduisit dans le château de Lafilolie, situé dans la commune de Condac, et appartenant à M. de Feletz, passant par une croisée, après avoir enlevé un des barreaux de fer qui la garnissaient; qu'il fut trouvé caché sous un lit, près d'un salon dans lequel il y avait une grande quantité d'eau-de-vie; que tout porte à penser qu'il ne s'était introduit dans le château que pour voler, mais que rien n'annonce qu'il fût entré dans le salon, et qu'on ne remarqua point que les bouteilles eussent été dérangées au moment où on le surprit; Qu'ainsi, si Lavareille paraît coupable d'une tentative de vol, si son introduction violente dans le château forme l'acte extérieur qui la manifeste, aucun fait de la cause ne présente le commencement d'exécution du vol, nécessaire, aux termes de l'art. 2 du c. pén., pour qu'elle soit assimilée au crime; que, quelque répréhensible que soit l'action de Lavareille, elle ne se trouve pas prévue par la loi pénale; Déclare n'y avoir lieu à accusation contre Jean Lavareille; et ordonne, en conséquence, qu'il soit mis en liberté, etc. »

Chargé de dénoncer cet arrêt, dans l'intérêt de la loi, M. de Vatimesnil a présenté, pour M. le procureur général, deux moyens : 1° Violation des art. 2, 379 et 384 c. pén. En fait, la cour royale de Bordeaux a reconnu : 1° que Lavareille s'était introduit dans le château de Lafilolie; 2° qu'il s'y était introduit à l'aide d'effraction; 3° qu'il avait l'intention de voler. Comment cette cour a-t-elle pu décider que la réunion de toutes ces circonstances ne constituait pas un commencement d'exécu tion de la tentative de vol imputée à Lavareille! Un acte qui précède immédiatement la consommation du crime est nécessairement un commencement d'exécution. Que restait-il à faire à Lavareille pour exécuter le vol! rien autre chose qu'à s'emparer des objets mobiliers qui se trouvaient dans les appartemens où il s'était introduit. S'il se fut emparé de ces objets, il aurait été coupable de vol consommé. Or, les fais déclarés constans par la cour de Bordeaux devaient immédiatement précéder le fait de l'appréhension de ces objets mobiliers; donc ces faits constituent le commencement d'exécution. S'ils n'avaient pas ce caractère, s'ils n'étaient que des actes extérieurs, comme l'a dit la cour royale de Bordeaux, il faudrait qu'entre ces actes et le vol consommé, on pût, par la

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pensée, placer un fait intermédiaire qui serait le commencement d'exécution. Or, c'est ce que l'exposant croit impossible: donc il y avait commencement d'exécution. Il est vrai que l'on peut objecter que la cour de cassation, par ses arrêts de rejet des 27 août 1812 et 18 mars 1813, semble avoir consacré une doctrine contraire à celle que l'exposant vient de présenter; mais en examinant attentivement les espèces dans lesquelles ont été rendus ces arrêts, on reconnaît qu'elles sont essentiellemont différentes de celle sur laquelle a statué la cour de Bordeaux. Dans la cause jugée par la cour de cassation le 27 août 1812, la cour de Bruxelles avait déclaré qu'il n'y avait aucun indice d'nn commencement d'exécution. Tout était donc décidé en fait; et c'est avec raison que la cour suprême a rejeté le pouvoi. Dans la cause ju gée le 18 mars 1813, la même cour de Bruxelles avait déclaré l'existence des faits matériels, semblables à ceux que présente l'affaire actuelle; mais elle n'avait pus reconnu que le prévenu se fut introduit, avec l'intention de voler, dans le lieu où il avait été surpris; loin de là, la cour de Bruxelles avait décidé que cette introduction n'indiquait pas spécifiquement une tentative de vol plutôt qu'une tentative de tout autre crime. La cour de Bruxelles ayant ainsi écarté l'intention de voler, il était ímpossible que son arrêt fat cassé. Dans l'espèce actuelle, au contraire, la cour de Bordeaux, après avoir déclaré que tout portait à penser que Lavareille ne s'était introduit dans le château de Lafilolie que pour voler, a positivement qualifié le fait qui lui était imputé de tentative de vol. Seulement, les circonstances de fait sont, selon la cour de Bordeaux, des actes extérieurs, et non un commencement d'exécution. Ainsi, la cour de Bruxelles avait jugé en fait, puisqu'elle avait apprécié l'intention; la cour de Bordeaux, au contraire, a jugé en droit, puisque, après avoir reconnu l'existence des faits matériels, joints à l'intention, elle a déterminé le caractère légal de ces faits, en disant qu'ils n'étaient que des actes extérieurs, et qu'ils ne constituaient pas un commencement d'exécution. La cour de cassation a été réduite à censurer, dans les motifs de son arrêt, la décision de la cour de Bruxelles, sans pouvoir l'annuller, parce qu'elle n'avait résolu qu'une question de fait. Elle ne se contentera pas de censurer la décision de la cour de Bordeaux; elle l'annullera, parce qu'elle a résolu une question de droit. - Mais, dit-on, le code pénal n'a pas défini le commen cement d'exécution. L'exposant répond que la définition résulte de l'expression elle-même. L'exécution est nécessairement commencée, quand le coupable a fait tous les actes qui appartiennent au crine, à l'exception de celui qui doit consommer le crime. Autrement, il n'y aurait aucune différence entre la tentative et le crime accompli. Or, il ne restait plus à Lavareille, ainsi que l'exposant l'a déjà prouvé, qu'un seul acte à faire pour consommer le crime; donc il y avait commencement d'exécution.

L'arrêt fait suffisamment connaître le second moyen de cassation.

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Qu'il s'ensuit que, quelque erronnée que puisse être l'opinion de la chambre d'accusation de la cour royale de Bordeaux, en jugeant que les faits de l'escalade et de l'effraction, à l'aide desquels le prévenu Lavareille s'est introduit dans le châteeu de Lafilolie, avec l'intention d'y commettre un vol, ne constituaient point le commencement d'exécution requis par la loi pour caractériser la tentative criminelle de vol, néanmoins ladite chambre n'a point commis de violation expresse de la loi; Rejette ce premier moyen.

Relativement au second moyen : Considérant que la chambre d'accusation de la cour royale de Bordeaux a reconnu, d'après l'instruction, que Lavareille s'était introduit dans ledit château, par une croisée dont il avait enlevé un des barreaux de fer qui en formaient la clôture; Que si de ce fait ne devait pas nécessairement résulter la prévention d'une tentative criminelle de vol, il en résultait du moins celle du délit de destruction de clôture, prévu par l'art. 456 c. pén.; que, d'après cette prévention, la chambre d'accusation devait, aux termes de l'art. 230 c. d'instr. cr., renvoyer ledit Lavaraille devant le tribunal correctionnel compétent; d'où il suit qu'en ordonnant sa mise en liberté, comme n'étant prévenu d'aucun fait punissable, ladite chambre a faussement appliqué l'art. 229 c. instr. cr., et violé l'art. 230 du même code, ainsi que l'art. 456 c. pén. : Vu l'art. 441 c. instr. cr., et la lettre de S. Ex. le garde des sceaux, casse et annulle dans l'intérêt de la loi. Du 23 sept. 1825. Sect. crim. M. Portalis, pr. -M. Busschop, rap.

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REGL. DE JUGES, CONFLIT NÉGATIF.CASSATION. ATTRIB. Lorsque, sur un conflit négatif entre la chambre du conseil et la chambre d'accusation, la cour de cassation a, sur règlement de juges, renvoyé l'affaire devant la chambre d'accusation; que, sur ce renvoi, cette chambre, ne voyant qu'un délit dans le fait dénoncé, s'est de nouveau déclarée incompétente, et a renvoyé les pièces devant le tribunal correctionuel, qui s'est déclaré incompétent à son tour, il y a lieu, dans cet état, par la cour de cassation, saisie sur nouveau règlement de juges, d'assigner aux faits leur caractère légal, et de transmettre les pièces à une chambre d'accusation qui, d'après ces faits ainsi qualifiés, statuera conformément à la première disposition de l'art. 231 c. inst. cr. (C. inst. cr., 526) (1).

(Ministère public C. Gagneriez.)

-

LA COUR, sur les concl. de M. Vatimesnil, av. gén.;-Attendu que le nommé Henri-Joseph Gagneriez était prévenu d'avoir porté, à plusieurs reprises, des coups de poing dans l'estomac du nommé Louis Hubert, qui était alors dans un état d'ivresse, par l'effet desquels celui-ci a été renversé, et qu'à la troisième chute il a eu la jambe droite fracturée :-Que, sur un premier conflit négatif de juridiction qui s'était élevé dans cette affaire, sous le rapport de la compétence, entre la chambre du conseil du tribunal de première instance de Cambrai et la cour royale de Douai, chambre des appels de police correctionnelle, la cour de cassation, statuant par règlement de juges, ayant renvoyé devant la chambre des mises en accusation de ladite cour royale, cette chambre, sans avoir égard aux réquisitions du ministère public,

(1) Arrêt conforme, G. N.. t. 3. 267.-C. A.. 13. 1. 68.

et sans énoncer les motifs de sa décision, a renvoyé le prévenu devant le tribunal correctionnel de Douai, pour y être jugé sur le fait d'avoir, par imprudence, occasionné la fracture dont il s'agit, délit prévu par l'art. 320 c. pén.;-Que le tribunal de Douai isi par ce renvoi, reconnaissant que, de la procédure et de l'instruction faite devant lui, il résultait que, hors le cas de légitime défense et sans excuse suffisante, le nommé Gagneriez avait porté à Hubert des coups qui l'avaient fait tomber trois fois successivement, et qu'à la troisième chute, ledit Hubert avait eu la jambe droite fracturée, ce qui lui avait occasionné une maladie et incapacité de travail personnel pendant plus de vingtjours, et jugeant que ce fait constituait le crime prévu et puni de peines afflictives et infamantes par l art. 309 c.pen., a déclaré la juridic tion correctionnelle incompétente, et a renvoyé le prévenu devant qui de droit, en état de mandat de dépôt; -Que, par l'effet de la contrariété existante entre ce jugement, contre lequel il n'y a point eu d'appel, et qui, en conséquence, a acquis l'autorité de chose jugée, et l'arrêt souverainement rendu par la chambre des mises en accusation, le cours de la justice se trouve de nouveauinterrompu, et qu'il importe de le rétablir promptement, en assignant aux faits reconnus leur caractère légal-Faisant droit sur la demande du procureur général à la cour royale de Douai, et statuant par règlement de juges, en vertu du pouvoir qui lui est conféré par l'art. 526 c. inst. cr., sans s'arrêter ni avoir égard à l'arrêt rendu par la chambre des mises en ascusation de ladite cour royale le 7 juillet dernier, lequel sera réputé comme non avenu, ordonne que les pièces de la procédure seront transmises à la cour royale d'Amiens, chambre des mises en accusation, pour, sur la prévention du crime prévu par l'art. 309 c. pén., être procédé contre Henri-Joseph Gagneriez, en oonformité de la 1" disposition de l'art. 231 c.inst, cr.

devant un tribunal de répression, a raison d'un préfen. du dommage causé à la propriété d'autrui, le prévenu allègue, pour sa défense, que le fonds prétendu endommagé lui appartient et qu'il n'a fait qu'user d'un droit qui, étant reconnu par le tribunal compétent, doit faire disparaître toute idée de délit, le tribunal saisi de la plainte doit sùrseoir, en ce cas, au jugement correctionnel ou de simple police, jusqu'à ce qu'il ait été statué par le tribunal civil ordinaire sur la question de propriété;-Attendu que, dans l'espèce, les demandeurs, traduits devant le tribunal de simple police du canton de Châteauneuf, pour avoir fait paître leurs bestiaux dans la lande de Villebret, affermée pour le compte de la commune de Miniac-Morvan, ont soutenu être copropriétaires et copossesseurs de ladite lande; — Quesi, dans le principe, ils ont excipé d'un droit de propriété appartenant aux sections de commune ou villages riverains dont ils font partie, éclairés depuis par le résultat d'une conférence tenue en présence du sous-préfet, en exécution de l'arrêté du 24 germinal an 11, et par l'avis de ce magistrat, ils se sont présentés devant le tribunal d'appel, comme ayant, en leur faveur, sur la lande dont il s'agit, des droits de propriété individuels et des faits personnels de possession ;-Qu'ils étaient donc recevables à élever une question préjudicielle appuyée, ainsi que le constatent les qualités même du jugement attaqué, non sur un droit appartenant collectivement à la masse des habitans de tel ou tel village, mais sur une prétention qu'en leur propre et privé nom ils voulaient soumettre aux tribunaux civils, auxquels seuls il appartient d'en apprécier le mérite;

Que le bail consenti par le conseil municipal de la commune de Miniac-Morvan, au nom de tous les habitans, quoique revêtu de l'approbation de l'autorité supé. rieure, ne pouvait être un obstacle légal au sursis demandé et au renvoi des parties devant les juges de la

Du 23 sept. 1825.-Sect. crim.-M. Portalis, pr.- propriété;-Qu'un acte de cette nature tient à l'exercice M. Rataud, rap.

QUESTION PRÉJUD., DROIT DE PROPRIÉTÉ, BAIL Si, dans un procès porté devant un tribunal de répression, a raison d'un prétendu dommage causé tà la propriété d'autrui, le prévenu allègue que le fonds prétendu endommagé lui appartient, et qu'il n'a fait qu'user d'un droit qui, étant reconnu, doit faire disparaître toute idée de délit, le tribunal doit sursevir jusqu'à ce qu'il ait été statué par le tribunal ordinaire sur la question de propriété (1).

Si le droit allégué par le prévenu d'un dommage causé à la propriété d'autrui, est un droit communal et non un droit individuel, y a-t-il lieu à surseoir jusqu'au jagement de la question de propriété (2) ?

Un bail consenti par le conseil municipal d'une commune ne peut être considéré comme un acte administra

tif proprement dit, dont les tribunaux ne puissent pas

connaitre.

(Chapelle, etc. C. le Ministère public. )

LA COUR,-sur les concl. de M. de Vatimesnil, av. gén.;-Vu les art. 408 et 413 c. inst. cr.;- Et attendu qu'en principe général, lorsque, dans un procès porté

(1) Voy. C A.. t. 2.-C. N.. v° Question préjudicielle. (2) La négative s'induit des termes de l'arrêt,

des fonctions municipales relatives à la gestion des communes, et rentre dans les règles ordinaires du droit civil dont l'application appartient aux tribunaux; qu'il ne peut être rangé dans la classe des actes administratifs propreprobation dont l'a revêtu le préfet, comme tuteur légal ment dits, dont ils ne peuvent connaître, et que l'apde la commune, ne peut changer la nature d'un acte purement communal;-Qu'ainsi, dans l'espèce, le tribunal saisi de la poursuite pouvait, sans porter atteinte à l'autorité administrative, et devait, en prononçant le sursis demandé, renvoyer au tribunal compétent une prévenus, faisait disparaître toute idée de délit ou de question de propriété qui, étant jugée en faveur des

contravention ;

Que cependant le tribunal correctionnel de Saint-Malo, attribuant les effets d'un acte d'administration publique à un bail qui n'en a pas les caractères, et faussement l'exception proposée par les demandeurs, tant que ce persuadé qu'il ne pouvait prononcer régulièrement sur prétendu acte administratif ne serait pas rapporté par l'administration supérieure, a cru devoir rejeter cette exception préjudicielle; en quoi ledit tribunal a violé les règles de sa compétence et fait une fausse application des lois qui, en établissant de sages limites entre des fonctions nécessairement distinctes et séparées, interdisent aux tribunaux toute immixtion dans les opérations véritablement administratives;-Que, par suite de l'erreur

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