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LA COUR, sur les concl. de M. Laplagne-Barris, ay. gén. ; Attendu, sur le 2o moyen, qu'aux termes de l'art. 57 du règlement du 16 juillet 1814, les conseils de discipline des bataillons de la garde nationale peuvent juger au nombre de quatre juges, non compris le président; que ce règlement a été maintenu par les ordonnances du roi intervenues sur la matière : que, dans l'espèce, le jugement a été rendu par un conseil composé de six membres;

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Attendu, sur le 3° moyen, que les dispositions des art. 24, 25 et 26 de la section 2 de la loi du 14 octobre 1791, qui, statuant sur l'uniforme de la garde nationale, en déclarant que, néanmoins, dans les compagnies, cet uniforme ne pourra être exigé, ne sont point en opposition avec les dispositions de la charte, les institutions qu'elle a formées, et les lois intervenues depuis la restauration; Que les ordonnances royales des 17 juillet 1816, 30 sept. 1818 et 30 janv. 1825 en ont implicitement ordonné l'exécution;

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Qu'aux termes du sénatus-consulte du 21 sept. 1805, les gardes nationales doivent être organisées par des règlemens d'administration publique: Que, par un règlement de cette nature, intervenu le 8 janvier 1814, et qui a mis la garde nationale de Paris en activité, chaque légion a été composée de quatre bataillons et de quatre compagnies d'élite; qu'aux termes de l'art. 8 dudit règlement, les grenadiers composant les compagnies d'élite sont tenus de s'habiller; - Que, depuis, et par ord. du 30 janv. 1825, il a été établi deux contrôles de la garde nationale de Paris, l'un actif, l'autre de réserve; Que, sur le contrôle d'activité sont inscrits, les grenadiers et les chasseurs. --Que, dès-lors, les uns et les autres composent les compagnics d'élite; — Qu'il suit de là que les gardes nationaux, maintenant portés sur les, contrôles d'activité soumis à une discipline particulière, sont tenus de porter l'uniforme, lorsqu'ils sont appelés, et qu'ils ne peuvent faire de service sans être revêtus de cet uniforme: que se présenter pour faire le service sans être revêtu de l'uniforme prescrit, c'est refuser effectivement le service, puisque c'est se présenter hors d'état de le faire; Attendu, d'ailleurs, qu'aux termes de l'art. 17 de l'ord, du 17 juillet 1816, il a été établi des conseils de recensement chargés de la formation du contrôle d'activité; qu'aux termes de l'art. 31 de ladite ordonnance, les opérations de ce conseil doivent être approuvées par une décision administrative; et qu'aux termes de l'art. 22, les réclamations contre ces décisions sont portées devant le préfet pour y statuer en conseil de préfecture; Que, dès-lors, les citoyens portés sur le contrôle d'activité, dressés en exécution de l'ord. du 30 janvier 1825, et qui n'ont pas réclamé contre leur inscription sur le contrôle, se sont volontairement soumis aux obligations qui dérivent de cette inscription; Que, dans l'espèce, le demandeur a été compris dans le contrôle d'activité; qu'il n'allègue point avoir réclamé contre cette inscription; qu'il a conséquemment consenti à la charge imposée aux gar, des nationaux destinés à faire partie du service actif,

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et qu'il ne pouvait raisonnablement se refuser à en accomplir les devoirs;

Attendu, sur le 4 moyen, que, si le conseil de discipline a fait mention de la récidive dans son jugement, il n'a point prononcé une aggravation de peine pour cette récidive, et qu'il s'est renfermé dans les limites des dispositions pénales portées par l'ordonnance du roi du 17 juillet 1816; d'où il suit qu'il n'a ni excédé ses pouvoirs, ni violé les dispositions des lois en vigueur;

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Attendu, sur le 5 moyen, que l'art. 163 c. inst. crim. n'est obligatoire pour les conseils de discipline qu'autant que la contravention sur laquelle ils ont à statuer est prévue par une disposition particulière de la loi ou des règlemens d'administration publique qui gouvernent la matière, et punie d'une peine spécialement appliquée par les lois ou règlemens à cette contravention, et qu'il ne l'est pas dans l'espèce, puisque le décret du 5 avril 1813, confirmé par l'ordonnance

du roi du 17 juillet 1816 qui régit la matière, ne contient point de dispositions spéciales sur la contravention dont il s'agit; d'où il suit que, dans l'espèce, le conseil de discipline n'a point violé dans son jugement la disposition de l'art. 163 c. inst. er.;

Attendu, sur le 6o moyen, que le décret de 1813 et l'ordon. de 1816 ont laissé au conseil de discipline le droit de graduer les peines et d'apprécier les circonstances de la contravention; que, dans l'espèce, le conseil de discipline n'a pas excédé les limites de la graduation de peines portées par lesdits décrets et ordonnances; Rejette. Sect. crim. Du 19 janvier 1826. M. Portalis, pr.-M. Ollivier, rapp.-M. Isambert, av.

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AVOCAT, TEMOIN, SERMENT, Révélation. Les avocats sont de la classe des personnes qui, dépositaires par état ou par profession des secrets qu'on leur confie, ne peuvent les révéler hors les cas prévus par la loi. — Ainsi, un avocat, appelé à déposer comme témoin, peut, avant de préter serment, déclarer qu'il ne se considérera pas comme obligé à divulguer, comme témoin, les faits qui lui ont été confiés en qualité d'avocat. Les juges ne peuvent le condamner à l'amende, pour avoir refusé de prêter le serment sans cette déclaration; et on n'est pas fondé à prétendre qu'il devait le prêter purement et simplement, sauf à lui à faire ensuite, et le cas échéant, la déclaration qu'il croyait lui être imposée par les règles de sa profession, ou à garder le silence sans explication sur les secrets qu'il ne pouvait révéler.

(Ministère public C. Me Sourbé..)

Me Sourbé, avocat, est assigné devant le tribunal correctionnel de Condom pour déposer comme témoin. Avant de prêter le serment, il déclare qu'il ne croit pas devoir prêter serment, s'il est obligé de dire ce qui a pu se passer devant lui comme avocat, mais qu'il est disposé à prêter le serment avec cette restriction, Jugement qui, considérant que la loi ne fait aucune distinction entre les personnes appelées comme témoins, ni dans les faits et circonstances pour l'éclaircissement desquels elles doivent être entendues, rejette l'excuse et ordonne à Me Sourbé de prêter serment sans aucune restriction. Refus M Sourbé. Nouveau jugement par qui le condamne à 25 fr. d'amende, par application des

articles 80 et 355 c. inst. cr.-Appel par Me Sourbé; le 2 déc. 1825, jugement infirmatif du tribunal correctionnel d'Auch, par le motif que, d'après l'art. 378 c. pen., et d'après les principes qui ont toujours régi leur profession, les avocats ne doivent ni ne peuvent révéler, même à la justice, les faits qui leur ont été confiés dans le secret du cabinet, si ce n'est dans les cas très-rares où la révélation est expressément commandée par la loi à tous les citoyens; qu'on oppose vainement que l'avocat aurait do prêter serment et déclarer ensuite qu'il ne pouvait déposer sur les confidences qui lui avaient été faites, ou même s'abstenir d'en parler, sans le dire; qu'il est, en effet, trop évident que la conduite de l'avocat qui se présente franchement devant la justice, en annonçant qu'il veut déposer tout ce qu'il sait autrement que par les confidences qu'il a reçues en sa qualité d'avocat, est plus loyale que celle de celui qui prêterait serment de dire toute la vérité, et croirait cependant devoir la taire ensuite, ou se livrer à des réticences indignes de son caractère.

Pourvoi par le ministère public pour violation de l'art. 378 c. pén. Il reconnaît qu'en principe, les avocats ne doivent point révéler les faits dont ils n'ont eu connaissance qu'en leur qualité; mais il attaque le jugement du tribunal correctionnel d'Auch, en ce qu'il aurait décidé que Me Sourbé a été fondé à ne vouloir prêter qu'un serment restrictif. Or, il soutient que tout témoin cité en justice est tenu de satisfaire à cette citation, de comparaître, de prêter serment et de déposer; que la loi prescrit la formule du serment; qu'il ne peut y être apporté aucune modification, aucune restriction; que l'art. 378 c. pén. ne dispense pas les dépositaires de secrets de prêter serment, et ne les autorise pas à y apposer des restrictions, sauf à eux à ne révéler que les faits qu'il leur est permis de révéler, sans manquer aux devoirs de leur profession; qu'ainsi, dans l'espèce, Me Sourbé devait prêter serment sans observation ni restriction. Il avoue que les motifs donnés par le tribunal de Condom sont erronés; mais il soutient que le dispositif est conforme à la loi; que le tribunal a pu et du condamner Me Sourbé a l'amende, pour avoir refusé de prêter serment.

Ce système, a-t-on dit pour Me Sourbé, partie intervenante, péche par sa base. Me Sourbé ne demandait pas que la formule du serment fût modifiée; il soumettait seulement un doute, un scrupule; il voulait qu'il fat bien entendu que le serment qu'on lui demandait, et qu'il ne refusait pas de prêter, ne l'obligeait pas à révéler les faits qui lui avaient été confiés, en sa qualité d'avocat. Le tribunal de Condom, en disant la que loi ne faisait aucune distinction entré les personnes et les faits, entendait donc qu'il révélât ceux qu'il ne croyait pas de son devoir de divulguer. C'était là une contravention à la loi, et, par conséquent, le tribunal d'appel a bien jugé en la réprimant. Il n'a pas, par-là, autorisé Me Sourbé à prêter un serment restrictif; il à senlement déterminé les obligations que ce serment impose au témoin dans le cas particulier. L'observation de Me Sourbé était prématurée, selon le demandeur; le tribunal d'appel a répondu victorieusement à l'objection. La marche franche et loyale qu'a suivie Me Sourbé, est en effet celle que lui traçait l'honneur et les règles toujours suivies en cette matière. Dans aucun temps, les avocats n'ont été obligés de révéler de

vant la justice les faits qui leur ont été confiés dans le secret du cabinet (1). ARRÊT.

LA COUR, sur les concl. de M. Laplagne-Barris, av. gén; Attendu qu'un témoin qui prête le serment de dire toute la vérité et rien que la vérité sur les faits relatifs à l'instruction dans laquelle il est entendu, ne saurait, sans violer la religion du serment, s'abstenir pén., les personnes dépositaires, par état ou par prode dire ce qu'il sait; - Qu'aux termes de l'art. 378 c. fession, des secrets qu'on leur a confiés, ne peuvent les révéler hors le cas où la loi les oblige à se porter dénonciateurs, sans encourir la peine portée en cet article; Que, dès-lórs, un avocat qui á reçu des révélations qui lui ont été faites à raison de ses fonctions, ne pourrait, sans violer les devoirs spéciaux de sa profession et la foi due à ses cliens, déposer cé qu'il avait

(1) On trouvera le complément de ce système dans l'analyse que nous allons offrir d'une consultation qui a été produite en cause d'appel, et portant la signature de vingt-cinq avocats, les plus anciens de l'ordre des avocats à la cour de cassation. En effet, Mc Lassis, ayant été consulté sur cette affaire, a cru devoir en référer au conseil de son ordre. Et ce conseil, jaloux de proclamer les prérogatives essentielles à l'exercice de la profession d'avocat, a délibéré une consultation qu'il a fait présenter à la signature des vingt-cinq avocats plus anciens de l'ordre, et dans laquelle on a établi que les secrets confiés à l'avocat sont inviolables et sacrés, et que l'avocat ne peut les révéler sans manquer aux devoirs de sa profession. En voici l'analyse: «L'inviolabilité du secret, disent les jurisconsultes consultés, est, pour les avocats, une règle aussi ancienne que leur profession; ils l'ont religieusement observée dans tous les temps, et les magistrats l'ont toujours respectée.-Ils citent ici le Nouv. Répert., vis Avocat et Déposition. Cependant elle a été méconnue par le tribunal de Condom à l'égard de Me Sourbé. Ce tribunal s'est fondé sur les art. 80 et 355 c. inst. cr. Il est vrai que ces articlés veulent que toute personne citée pour être entendue en témoignage soit tenue de comparaître et de satisfaire à la citation; qu'ils autorisent le juge à condamner à l'amende tout témoin qui ne comparaîtrait pas ou qui refuserait de prêter serment, Mais c'est là une règle générale qui admet nécessairement des exceptions. Ainsi, il est incontestable qu'un prêtre catholique ne peut pas déposer des faits qui lui ont été révélés dans le secret de la confession. Cette exception s'étend à toutes personnes qui, par état, deviennent dépositaires des secrets des citoyens. La violation de ces secrets est même un délit prévu par l'art. 378c. pén., dont la disposition s'applique évidemment aux prêtres, aux avocats, aux avoués, quoiqu'ils n'y soient pas nommés.-On pourra objecter que l'art. 378 c. pén. n'a eu en vue que les révélations volontaires et spontanées, et que, par conséquent, il n'autorise pas ceux qui y sont désignés à refuser de déposer en justice. M. Merlin a émis cette opinion dans un réquisitoire rapporté au Répert., vo Témoin judiciaire. Quelque imposante que soit l'autorité de ce savant jurisconsulte, son opinion ne doit pas être suivie dans le cas particulier. Il s'agissait d'un arrêt qui avait ordonné qu'un prêtre catholique serait tenu de comparaître et de déposer en justice sur un vol qui lui avait été révélé, non pas précisément dans l'acte sacramentel de la confession, mais sous la foi du même secret.-M. Merlin reconnaissait, en principe, que le secret de la confession est inviolable; mais il soutenait que ce principe n'avait pas été violé dans l'espèce, parce qu'il était jugé en fait et reconnu par le prêtre que le vol sur lequel il était interpellé de déposer ne lui avait pas été révélé dans l'acte sacramentel de la confession; ensuite il examinait si le prêtre pouvait se dispenser de déposer, parce qu'il avait promis le secret. Il soutenait la négative. Il disait qu'on prétendrait vainement que les avocats, les médecins, etc., ont été exemptés par un grand nombre d'auteurs, parce que l'opinion des auteurs n'est pas une loi; il ajoutait qu'on argumenterait vainement de l'art. 378 c. pén., 1o parce que ce code n'était pas encore en activité; 2° parce que la disposition citée n'est applicable qu'aux révélations spontanées des secrets confiés à ceux qu'elle désigne, — On voit que ce n'est qu'accidentellement que M. Merlin soulève la difficulté. Il est permis de croire que, s'il avait eu à l'examiner à fond, il n'aurait pas condamné la doc trine si sage et si morale qui a toujours été suivie en cette ma

appris de cette manière; -Que, s'il est appelé comme témoin, dans une instance relative à des faits qui lui avaient été ainsi confiés, avant de prêter le serment prescrit par la loi, il peut annoncer au tribunal qu'il ne se considérera point comme obligé, par ce serment, à déclarer, comme témoin, ce qu'il ne sait que comme avocat; Qu'en le faisant, il satisfait pleinement au vou de la loi, et qu'en jugeant que la conduite du sieur Sourbé n'avait rien de répréhensible, le tribunal de l'arrondissement d'Auch, statuant en police correctionnelle sur l'appel du jugement rendu par le tribunal de Condom, non seulement n'a contrevenu à aucune disposition législative, mais a témoigné son juste respect pour la sainteté du serment; - Rejette.

Du 20 janvier 1826. Sect. cr. -M. Portalis, pr.

M. Olivier, rapp.

M. Lassis, av.

COMMUNE, AUTORISATION, RESPONSAB.-NULLité. En admettant une action civile contre les communes pour la réparation des dommages résultant des désordres commis sur leur territoire, la loi du 10 vend. an 4 a soumis l'exercice de cette action à des formes spéciales qui ne peuvent se concilier avec la nécessité d'obtenir l'autorisation prescrite par l'édit de 1683.- Si donc, dans le cas où les procès-verbaux, constatant un tière, et que l'art. 378 n'a fait que sanctionner. A l'opinion fugitivement émise par M. Merlin, nous pouvons opposer l'opinion raisonnée de M. Carnot, Comment. sur le code pénal, et l'opinion de M. Favard de Langlade, Répert. de la nouvelle législation, vis Avocat et Enquête. En effet, l'interprétation que M. Merlin donne à l'art. 378 est aussi contraire à son texte qu'à son esprit. Cet article punit ceux qui, étant, par état ou profession, dépositaires des secrets qu'on leur confie, révèlent ces secrets. Le législateur n'établit aucune distinction entre les révélations spontanées ét celles qui pourraient être faites sur l'interpellation du juge. Dans l'affaire relative au prêtre dont nous avons parlé, la cour de cassation jugea contre l'opinion de M. Merlin (C.. A.. t. 11. 1.18. -Ĉ.. N.. v° Témoin. ). Elle n'invoqua pas l'art. 378 c. pén.; mais c'est évidemment parce que le code pénal n'était pas encore en vigueur. Il est probable que, si la question s'était représentée depuis, soit relativement aux prêtres, soit relativement aux avocats, elle aurait pris cet article pour base de sa décision. La question a été élevée, en 1816, devant la cour de Rouen, par un avocat et un avoué. Cette cour a rejeté leurs excuses; mais elle n'en a pas moins rendu hommage aux principes que nous venons de développer (Voy. C. A.. 16. 2. 135. C. N.. v Témoin.).

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pillage, ont été envoyés au procureur du roi, ce fonctionnaire garde le silence, l'action que la partie lésée forme directement contre la commune ne peut être déclarée non recevable, sous le prétexte que cette commune n'aurait point été autorisée par le conseil de préfecture à défendre à cette action.

L'envoi au procureur du roi des procès-verbaux constatant le pillage, ne constitue pas la litispendance; il faut la réquisition de ce magistrat au tribunal (1).

Le jugement qu'en cas de pillage la loi du 10 vend. an 4 prescrit de rendre dans les dix jours, sur poursuites d'office et sans y appeler la partie lésée, peut être attaqué par opposition ou par appel par cette partie (2). Quid ? à l'égard de la commune (3).

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Les formes de procédure établies par des lois spéciales doivent continuer d'être observées, quoique dérogeant aux règles générales (décr. 1er juin 1807): ici ne s'applique pas l'article 1041 cod. procéd. ; mais ces formes spéciales doivent être restreintes aux cas prescrits (4).

(Cazelles C. la comm. de Montagnac.)

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Sur renvoi, après cassation, de l'affaire rapportée C. A. 22. 1. 3. - C. N. 3. 152 la cour de Toulouse a rendu, le 5 mars 1822, un arrêt dans leSi quel, après avoir reconnu que le procureur du roi ayant gardé dans son cabinet les procès-verbaux constatant le pillage des propriétés du sieur Cazelles, et étant resté dans une inaction absolue, la citation donnée, dans cet état, à la commune de Montagnac, par Cazelles, constituait une action principale introductive d'instance, et non une action accessoire ou une intervention dans une instance liée, cette cour considère, « 1o que, sans rien préjuger sur l'existence ou l'abrogation de la loi du 10 vend. an 4, il faut reconnaître qu'elle détermine des formes spéciales de procédures pour les poursuites d'office dont elle charge les autorités administratives et judiciaires, mais qu'elle ne s'occupe nullement des formes à suivre dans le cas où la partie lésée agit directement et en son nom contre la commune; que, dans ce cas, la partie lésée ne trouvant rien dans la loi sur laquelle est basée l'action qu'elle prétend exercer, qui prescrive, en ce qui la concerne, des formes particulières, est contrainte à suivre la marche de la procédure ordinaire; 2° que la loi du 10 vendémiaire an 4, considérée comme loi spéciale et de police, est évidemment une loi d'exception qu'on ne pourrait étendre à des cas qu'elle n'a pas expressément prévus et déterminés, sans violer ouvertement les principes les plus positifs et les plus tutélaires de notre législation, et qu'on étendrait évidemment les dispositions déjà si rigoureuses (pour ne rien dire de plus) de cette loi, si l'on soumettait les parties privées à des formes de procédure qui n'ont été établies que pour les poursuites d'office de la partie publique, et qui dérogent d'une manière aussi essentielle au droit commun; Qu'à la vérité, le conseil M. le procu

Au surplus, en supposant que l'art. 378 c. pén. ne pût s'appliquer qu'aux révélations spontanées, les avocats ne devraient pas moins être dispensés de déposer sur les faits qui leur ont été confiés dans le secret du cabinet. Cette exception résulte de la nature même des choses. Le législateur réglé avec soin tout ce qui regarde la profession d'avocat; il l'a placée sous une discipline spéciale; les avocats sont les défenseurs naturels de la fortune, de l'honneur, de la vie des citoyens. En matière criminelle, la loi rend même leur ministère nécessaire. Le ministère de l'avocat exige, de la part du client, la confiance la plus intime et la plus absolue. Comment pourrait-il donner un avis éclairé, si on ne lai donnait pas une connaissance entière des faits? Comment pourrait-il défendre une cause, s'il n'avait pas sous les yeux tous les actes qui s'y rattachent directement ou indirectement? Or, la loi qui provoque, qui commande même cette confiance des citoyens envers les avocats, ne peut pas exiger que ceux-ci la trahissent. La loi, qui a donné un conseil à l'accusé, ne saurait transformer l'avocat en témoin, et le contraindre à révéler les aveux déposés dans son sein. Un tel système mettrait la loi en contradiction avec elle-même; il serait immoral, inique, absurde.-L'inviolabilité du secret n'est pas seulement, pour les avocats, un principe d'honneur; il est de l'essence de leur ministère. Sans l'inviolabilité du secret, point de confiance; sans confiance, l'avocat ne peut ni conseiller, ni plaider en connaissance de cause.

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(1) Proposition consacrée par la cour royale.

reur général l'a fortement combattue.-Mais il nous semble que la cour suprême, par le principe général qu'elle a consacré, s'est abstenue de la résoudre.

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(2) Proposition consacrée par la cour royale.

cas.

(3) La loi de la réciprocité veut qu'il en soit de même dans ce (4) Proposition consacrée par la cour royale.

d'état, par un avis du 12 mai, approuvé le 1" juin 1807, a décidé que, nonobstant l'art. 1041 c. pr., les formes de procédure, établies par des lois spéciales, doivent continuer d'être observées, quoique dérogeant aux lois générales; mais qu'il résulte seulement de cet avis que les lois spéciales doivent être suivies, quant à la forme de procéder, et dans l'intérêt du gouvernement, lorsqu'elles déterminent elles-mêmes cette forme, et dans les seuls cas pour lesquels elles l'ont expresséinent prescrit; - Qu'ainsi, et à l'égard de la loi du 10 vend. an 4, supposé qu'elle soit encore en vigueur, les autorités administratives et judiciaires, ayant à en faire l'application d'office, devraient se conformer au mode de procéder qu'elle détermine, et selon lequel il n'est certes pas besoin que les communes soient autorisées à ester en jugement, puisque, loin de les appeler en cause, on doit alors procéder contre elles en leur absence et sans qu'elles soient admises à se défendre; mais qu'il n'en saurait être ainsi, lorsque, comme dans l'espèce, la partie lésée, voyant que le ministère public demeure dans l'inaction, au lieu de provoquer l'exercice des poursuites d'office qui lui sont dévolues par le recours à l'autorité supérieure, se décide à engager, de son chef, une instance contre la commune responsable, et qu'exerçant dans ce cas une action purement privée, et dans son intérêt seul, ne trouvant, d'ailleurs, dans la loi dont il s'agit, que le principe de cette action, au fond, sans aucune forme spéciale, relativement à son exercice, il est évident que la partie lésée doit se conformer au droit commun, en faisant autoriser la commune contre laquelle il agit; qu'il est incontestable, et on en demeure d'accord, que, s'il était intervenu d'office, et sur les seules réquisitions du ministère public, un jugement de condamnation contre la commune de Montagnac, celle-ci aurait eu le droit, malgré le silence de la loi du 10 vendém. an 4, à cet égard, de former opposition à ce jugement, ou d'en interjeter appel; qu'il est aussi incontestable que la commune n'aurait pu faire usage de l'un ou de l'autre moyen, surtout envers la partie lésée, qu'avec l'autorisation préalable du conseil de préfecture, qu'elle aurait dû provoquer, dans ce cas, en sa qualité de demanderesse; mais que, ces deux propositions étant admises, il serait bien singulier et bien étonnant que le sieur Cazelles, poursuivant lui-même le jugement avec la commune, par une instance régulière et privée, ait pu légitimement s'affranchir du recours préalable à l'autorité administrative, et se dispenser, en attaquant la commune, de l'accomplissement d'une formalité, sans laquelle la commune elle-même n'aurait pu agir contre lui par voie d'opposition ou d'appel;-Attendu, enfin, que la nécessité de l'autorisation des communes, même relativement à l'application de la loi du 10 vend. an 4, a été formellement reconnue et consacrée par le conseil d'état, notamment par son arrêté du 12 brum. an 11, relatif à deux jugemens du tribunal de 1re instance de Fontenay, et, plus récemment, par une ordonnance royale, aussi rendue en conseil. d'état, le 8 juillet 1819, dans la cause du sieur Guy contre la commune d'Agde; -Attendu qu'il suit des motifs ci-dessus, qu'il a été bien jugé par le tribuual de Béziers, et que le jugement par lui rendu dans la présente cause, le 23 nov. 1818, doit être confirmé.>>

Pourvoi nouveau de la part du sieur Cazelles. —La

commune a tâché de justifier l'arrêt dénoncé, en s'efforçant d'établir, 1° que la loi de vend. an 4, née de nos orages, est une loi d'exception; que les lois d'exception doivent être rigoureusement renfermées dans leurs termes, et que tous les cas non prévus par elles sont réglés par le droit commun qui protège les citoyens contre leur extension abusive; 20 que le mode de procédure établi par la loi du 10 vend. an 4, est une instance d'office de la part du ministère public; que, quoique la puissance de juger ne réside pas en lui, il faut ou une réquisition de sa part, ou une citation, pour que l'instance soit introduite; que, s'il y a silence ou déni de justice de sa part, on doit s'adresser à ses supérieurs, et qu'enfin la cour de Toulouse a jugé, en fait, qu'il n'y a pas eu d'instance d'office contre la commune de Montagnac, ce qui place son arrêt à l'abri de la censure; 30 que, toutes les fois qu'il ne s'agit pas d'action réelle, celui qui se prétend créancier d'une commune doit d'abord soumettre sa demande au conseil de préfecture.

Le système de la commune, combattu par M. Guillemin, trouve une réfutation solide et victorieuse dans le réquisitoire prononcé par M. le baron Mourre, proc. gén.; nous allons en offrir l'analyse.

M. le proc. gén. rappelle d'abord que la cour d'Amiens s'étant prononcée sur la question, par son arrêt du 27 nov. 1816, la cour de cassation s'était vue, en 1821, dans la nécessité de l'examiner d'une manière sérieuse, afin de fixer la jurisprudence; qu'aussi ne la resolut-elle, par son arrêt du 19 nov. 1821, qu'après une mare delibération dans la chambre du conseil. « Il nous a paru, dit-il ensuite, que la cause pouvait se réduire à deux points extrêmement simples. Assurément, la procédure tracée par la loi de vendem. an 4 (art. 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8) est tout-à-fait extraordinaire. Mais ce n'est pas tout qu'elle ait un caractère spécial, c'est malheureusement qu'elle laisse beaucoup à désirer. Et par exemple, les parties pourront-elles former opposition, se pourvoir par appel? La loi n'en dit rien; elle semble même annoncer que tout doit être fait d'office; mais cependant la raison se soulève contre une pareille théorie. Il peut s'agir, dans le procès, d'un intérêt immense, de toute la fortune d'un citoyen. Faudra-t-il qu'un jugement de première instance décide irrévocablement de sa destinée? Par combien de points de vue erronés, de faux principes, de bases mal données ou mal conçues, ses droits ne peuvent-ils pas être méconnus ou affaiblis ? Combien d'objections même ne peut-il pas y avoir à faire contre le rapport des experts? Si le particulier peut être lésé, la commune peut l'être aussi; ils ont, l'un et l'autre, le plus grand intérêt à tenir par quelque lien au droit commun. S'ils n'y tenaient par rien, l'intervention'de Cazelles, en supposant même qu'il eût fait autoriser la commune, aurait été non recevable.... Mais, au surplus, il ne s'agit ici ni d'opposition ni d'appel.-Il s'agit d'intervention.-Non, dit la cour royale; le sieur Cazelles ne peut pas être considéré comme un intervenant, «parce qu'il est bien » vrai que le procureur du roi avait acquis les moyens » de poursuivre; mais il est vrai aussi qu'il n'avait pas » poursuivi; il avait gardé les pièces dans son cabinet, » sans en faire aucun usage; il n'avait adressé au tri>> bunal aucune réquisition le tribunal n'était pas » saisi. L'action de Cazelles était donc une demande

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principale, introductive d'instance. »Il nous semble

ture, dans la spécialité de cette attribution, comme
dans la nature de la procédure, un principe tellement
exclusif de toute association administrative, qu'il faut
conclure que
c'est au tribunal seul à régler le sort des
parties. Son jugement doit intervenir dans les dix jours,
et, pour tout dire en un mot, il est inévitable. Cela
posé, qu'a fait Cazelles? Il est intervenu dans une in-
stance pendante devant un tribunal qui devait néces.

tribunal de Béziers, quand il a fait signifier sa cita
tion à la commune.-Il n'y était pas en personne; mais
il y était par son nom, par son intérêt. 11 en est de
même de la commune. Qu'a donc fait Cazelles par sa
citation, si ce n'est d'avertir cette commune qu'il vou-
lait être présent et provoquer lui-même la condamna-
tion ? La loi lui défendait-elle une intervention? Non,
et la cour royale le reconnaît elle-même.....

que la cour de Toulouse, tout en nous apprenant l'inaction déplorable du ministère public, en a tiré une fausse conséquence. -Que les pièces aient été adressées au ministère public, ou déposées au greffe, ou qu'il y ait eu toute autre manière de les faire parvenir à la justice, chaque mode a saisi le tribunal. Et comment l'arrivée des pièces au tribunal, quelle que soit la main qui les reçoive, n'opérerait-elle pas la litispensairement y statuer... Il y a plus, il était déjà devant le dance? Comment s'opère-t-elle dans les procès ordinaires? Par l'exploit d'ajournement. Or, ici il n'y a pas d'exploit, il n'y a pas d'ajournement. Que faudrait-il donc dans le système de la cour de Toulouse ? Attendre que le ministère public eût présenté ses réquisitions à l'audience; mais le jugement définitif peut intervenir le même jour. Quel sera donc le point physique et matériel que l'on assignera à l'intervenant pour user de son droit d'intervention? Si on l'oblige de rapporter l'autorisation préalable, on le soumet (pour le cas dont il s'agit) à la plus absurde des formalités, car l'autorité administrative a un mois pour répondre. Et comme il ne s'écoulera peut-être pas une heure entre les réquisitions du ministère public et le jugement, on demande comment il serait possible que la partie intervînt pendente lite, s'il est vrai que le procès ne soit pendant que lorsque le procureur du roi a présenté ses conclusions au tribunal. Il faut donc renoncer au système de litispendance, et dire que l'envoi des pièces, leur réception du moins, équivaut à l'exploit d'ajournement et produit la litispendance.....

Mais ce n'est pas assez d'avoir raisonné jusqu'à présent sur le matériel de l'intervention; il faut maintenant la considérer moralement, voir ce qu'elle est en elle-même, et rechercher si, indépendamment des obstacles physiques, il n'y a pas, dans l'action principale, une telle empreinte qu'elle dispense virtuellement la partie intervenante de la formalité de l'autorisation : or, la loi, à notre sens, présente deux caractères qui repoussent énergiquement le système de l'autorisation.

C'est à la diligence de l'autorité municipale que l'instance est ouverte. La loi elle-même autorise ces diligences; elle les commande même; premier caractère.

Le jugement doit intervenir dans les dix jours qui suivent l'envoi des procès-verbaux (1); -Ce jugement est inévitable; deuxième caractère. 1ol'art. 2 de la loi du 10 vend. an 4 veut que la municipalité porte ellemême l'affaire devant le tribunal, et qu'elle saisisse la justice par l'envoi des pièces.-La demande en autorisation suppose la faculté de terminer l'affaire administrativement, avant qu'elle soit portée devant les tribunaux. Cette formalité ressemble, sous plusieurs rapports, à la tentative de conciliation devant les bureaux de paix. Or, comment le conseil de préfecture auraitil à délibérer sur une demande en autorisation, lorsque le procès est déjà porté, et nécessairement porté devant le tribunal?-2° le tribunal, d'après l'économie de la loi, semble exercer plutôt les fonctions d'arbitre qu'une juridiction véritablement contentieuse. La loi ne parle que de l'appréciation du dommage; l'instance est sommaire; le jugement doit intervenir dans les dix jours de l'envoi des procès-verbaux. Il y a dans la na

(1) Ces procès-verbaux doivent être envoyés eux-mêmes dans les trois jours.

Nous avons dit que l'envoi des pièces saisissait le tribunal, comme l'aurait fait un ajournement. Certes, on ne doutera pas qu'un exploit d'ajournement n'opère la litispendance, quoiqu'il ne soit pas encore connu du tribunal. Il en est de même de l'envoi des pièces. La loi ne dit pas que le ministère public saisira le tribunal, qu'il présentera son réquisitoire dans tel délai.-Nut doute que, si le ministère public ne donne pas connaissance au tribunal des procès-verbaux, s'il ne porte pas l'affaire à l'audience, le tribunal ne pourra pas juger, pas plus qu'il ne jugerait dans un procès ordinaire, si, après l'exploit d'ajournement, après la présentation au greffe, après même des jugemens préparatoires, les parties ne se mettaient pas en mesure d'obtenir un jugement définitif... ..»

M. le proc. gén. démontre ensuite que, des deux autorités invoquées par la cour de Toulouse, l'arrêté du 12 brum. an 11 et l'ord. du 8 juillet 1819, la première est tout-à-fait étrangère à la question, et que la seconde n'est pas applicable, en ce que l'ordonnance qui avait autorisé le sieur Guy à former son action, était intervenue dans une affaire où il n'y avait aucun envoi de procès-verbaux, par conséquent aucune instance liée; que son action était principale; et qu'enfin, il ne paraît pas que, sur sa demande en autorisation, la question de savoir si cette autorisation était nécessaire ou non, ait été examinée.

« Or, dans l'espèce actuelle, ajoute M. le proc. gén., l'autorisation était-elle nécessaire? Non, a dit la section civile de la cour, parce que l'instance était liée. Oui, a dit la cour royale, parce que l'envoi des procèsverbaux ne constituait pas litispendance. Ainsi, la eour voit que la question secondaire devient la question principale; c'est là qu'est toute la cause » (2).

ARRÊT.

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· Con

`LA COUR, sur les concl. conf. de M. Mourre, proc. gén.; Vu l'édit du mois d'avril 1683; - Vu les art. 2, 3, 4 et 5 du tit. 5 de la loi du 10 vend. an 4, sur la police intérieure des communes; Va enfin l'arrêté du gouvernement du 17 vend. an 10; sidérant qu'en accordant une action civile contre les communes, pour la réparation des dommages résultant des désordres qui sont commis sur leur territoire, la loi du 10 vend. an 4 a soumis l'exercice de cette action à des formes spéciales et d'exception qui ne peuvent se

(2) Voy. cependant plus haut, note ire,

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