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déclarent ennemi du bonheur François quiconque oseroit troubler l'exécution des décrets de l'assemblée nationale.

Adresse du même genre de la municipalité de Beziers en Languedoc; elle est pénétrée des mêmes sentimens, & supplie l'assemblée nationale d'avoir égard, dans l'emplacement des départemens, à sa situation, à sa population, à sa contribution territoriale, & aux anciens établissemens qui y existent.

Un membre a fait des plaintes sur la maniere dont les billets de tribune se distribuoient; on a mis aux voix si cette affaire seroit renvoyée aux inspecteurs à nommer, & la négation a été décidée.

M. Necker a envoyé à M. le président une lettre par laquelle il le prioit de faire part à l'assemblée d'une adresse de plusieurs citoyens Genévois, pénétrés de respect & d'admiration pour l'assemblée nationale; ils annoncent un don de 900 mille livres, & ils prient M. Necker de faire agréer cette somme à l'assemblée. D'abord cette générosité a excité les plus vifs applaudissemens; mais ces mouvemens d'enthousiasme ont fait place à des réflexions dignes d'un peuple libre, qui veut devoir tout au patriotisme, & non à l'intérêt de la politique.

M. de Volney a observé qu'il n'étoit pas étonnant que dans la circonstance présente un don de 900 mille livres eût fait sensation; mais qu'il croyoit de la dignité Françoise, avant d'accepter, de faire expliquer les Génevois, si c'étoit en qualité de citoyens François ou d'étrangers qu'ils nous faisoient cette offrande; si c'est en cette derniere qualité, j'opine, a-t-il dit, pour le refus.

M. de Fumel a appuyé M. de Volney. Quelque gêne qu'on éprouve dans les finances, la France n'est pas réduite à recevoir l'aumône.

Ainsi, dans les beaux jours de Rome, les Romains luttoient contre l'adversité; des échecs rapides et multipliés ne les forcerent jamais de faire une démarche qu'ils n'auroient pas faite dans la prospérité la plus éclatante. Il est glorieux de refuser lorsqu'on a besoin. Cette vérité, qui pa roîtra un problême à des hommes ordinaires, sera sentie de tous les cœurs vraiment François. La même raison qui déterminoit les Romains à ne jamais faire des propositions de paix lorsqu'ils étoient battus, doit nous déterminer à ne rien recevoir des étrangers lorsque nous sommes dans la détresse. Le patriotisme ne fait que de naître mais il se développera énergiquement, lorsque les vices du gouvernement seront entiérement dé

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racinés. Le germe de la noblesse, de la grandeur; de la loyauté, attendoit avec impatience, dans le cœur de tous les François, le moment de produire l'arbre fécond du patriotisme, dont les vastes rameaux ombragent déjà tout l'empire François.

La discussion sur l'acceptation, ou le refus de l'offre des Génevois, commençoit à s'ouvrir assez vivement, lorsque l'assemblée a voté pour réprendre l'ordre du jour; mais il paroît, dans l'intention de l'assemblée, de ne rien recevoir sans une déclaration préalable des Génevois.

Un honorable membre a occupé quelques instants la tribune; mais comme son plan s'étendoit sur toutes les branches des finances, & que l'objet de la discussion ne tomboit que sur le projet du comité des finances, il a cédé la place à M. le marquis de Montesquiou.

Si je n'étois qu'un de vos commissaires, je me tiendrois dans un silence respectueux, & ne croirois point devoir vous promettre d'autres vues que celles qui vous ont été présentées par votre comité; mais ma qualité de représentant de la nation me commande de soumettre à votre sagesse mon travail particulier..... Dans la carriere ouverte aujourd'hui, il est permis à l'homme observateur d'y faire des découvertes. On vous a proposé de

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mettre en vente une masse des biens du clergé & du domaine, jusques à la concurrence de millions. Si je ne me suis pas trompé, ces moyens sont illusoires & injustes ; illusoires, parce qu'ils vous présentent comme remede de nos maux ce qui n'est qu'un palliatif; injustes, en ce que vous blessez les droits d'une foule de particuliers, & que vous allez directement contre les droits. sacrés de la propriété. La justice fait la puissance des empires; vous devez, & vous ne voulez rien faire qui puisse la blesser. Ainsi, vous ne pouvez mettre en vente des biens grévés des frais du culte, de l'entretien des églises, du soulagement des pauvres, de la subsistance des ministres des autels, sans connoître préalablement à quelle somme montent les dettes & les grévemens des biens ecclésiastiques quant aux domaines, c'est un objet si peu considérable, que vous ne devez pas vous en occuper dans ce moment. Ils ne produisent annuellement que 16 cents mille livres, & cette somme n'est rien, comparée à nos besoins.

La régénération totale de l'empire ne fera encore que les augmenter, & rendre plus difficiles, peut-être même impossibles, les anticipations. D'après le nouveau régime que vous voulez établir, les faiseurs de services voient visiblement que vous supprimerez les receveurs généraux &

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subalternes ces messieurs, loin de consentir, en faveur du gouvernement, à proroger les avances & leurs cautionnemens, se payeront par leurs mains, & le montant de toutes les anticipations sera en moins pour le trésor royal. Il faut donc, outre les 80 millions, que le ministre vous a dit être indispensable, pour faire face aux besoins extraordinaires de 1790, faire entrer en ligne de le remplacement des anticipations./

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Je sais que les biens du clergé sont une ressource immense; mais, quoique vous ayiez décrété qu'ils sont à la disposition de la nation, je ne crois pas qu'on doive y toucher dans ce moment ; j'en ai déjà donné les raisons ci-dessus ; mais ce qui, à mon avis est très-déterminant à ne point mettre en vente pour 400 millions de biens à la fois, c'est la rareté du numéraire, la détresse générale de la France, & la quantité de biens fonds déjà en vente. Il pourra bien arriver que des capitalistes en acquierent; mais je mets en fait que ces acquisitions n'iront peut-être pas jusqu'à 20 millions. C'est-là le terme où aboutira, suivant toutes les apparences, la vente des biens ecclésiastiques. L'imagination exagere les objets; mais la raison les juge, le bon sens les pese. Ne sembloit-il pas que les dons patriotiques seroient une mine inépuisable? & vous voyez aujourd'hui

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